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d’observation. Une campagne de l’Inde, de l’Amérique, du Levant. ... J’aurais mieux aima dix campagnes.

C. DBLAV10NE.

— Jeux. Paroli de campagne, Paroli que marque un joueur fripon, sans que sa carte soit venue en gain : Les joueuses de profession sont sujettes à faire des paRolis de campagne. (Acad.) Il Case de campagne. Au trictrac, Case qu’on a faite sans avoir le droit de la faire.

Campagne de Fronce (1814). Nous devons nous borner, dans cette notice, à des indications générales, à une simple esquisse de cette campagne célèbre, en renvoyant pour les autres détails aux articles spéciaux consacrés à l’histoire de Napoléon, aux batailles, actions particulières, etc.

On sait qu’en janvier 1814, la France, épuisée par vingt ans de guerre, se trouva en présence de la plus formidable coalition qui ait menacé l’existence d’une nation. Toute l’Europe était armée contre nous : 160,000 Anglais, Espagnols et Portugais, conduits par Wellington, franchissaient les Pyrénées, poussant devant eux les maréchaux Soult et Suehet ; 80,000 Autrichiens, Illyriens et Italiens, sous les ordres de Bellegarde et Bubna, luttaient en Lombardie contre le prince Eugène et cherchaient à se frayer, à travers les Alpes, Un chemin jusqu’à Lyon ; 13,000 Hollandais, 8,000 Anglais et 80,000 Suédois, Hanovriens, . Russes et Prussiens, s’avançaient par la Hollande, le Bas-Rhin et la Belgique, pendant que les armées de Bohême et de Silésie, qui comptaient plus de 300,000 combattants, débouchaient au pied des Vosges et se préparaient à envahir la Champagne. Enfin 400,000 autres soldats s’organisaient ou étaient en inarche vers les frontières françaises.

Dans la nuit du 25 janvier, Napoléon, après avoir nommé Marie-Louise régente, et Joseph Bonaparte lieutenant général, après avoir embrassé sa femme et son fils, qu’il ne devait plus revoir, quitta les Tuileries pour aller commencer cette lutte formidable et désespérée. Il arriva le soir du 25 à Châlonssur-Marne ; il y trouva plusieurs de ses maréchaux : Ney, Marmont, le duc deValmy, etc. Tous ces capitaines illustres, blanchis dans la victoire, n’envisageaient qu’avec une poignante inquiétude cette situation terrible, inévitable dénoûment de l’épopée impériale. Il fut constaté que, pour le premier moment, on n’avait guère à opposer que 50,000 hommes aux 230,000 environ qui marchaient vers Paris ; quant aux renforts qu’on attendait, ils ne devaient finalement composer qu’un total bien inférieur à toutes les forces de l’ennemi ; c’était dans la proportion de 1 contre 5 qu’on allait avoir à lutter. Napoléon, réduit à cette extrémité, ne désespérait cependant pas encore de la fortune, et il comptait triompher à force de hardiesse et de génie.

Voici quel était son plan. L’ennemi s’avançait dans la direction de Mayenco et Metz à Paris, Schwarzenberg dans celle de Bâle à Paris (pour lier leurs opérations avec les forces agissant dans les Pays-Bas) ; Bubna par Genève ; Colloredo par Auxonne et la Bourgogne ; Giulay et le prince de Wurtemberg par Langres et la Champagne ; Wréde par 1 Alsace. En outre, de nombreux détachements se trouvaient autour de Strasbourg, Besançon, Béfort, etc.

Napoléon estimait que tant de corps divisés ne pourraient être concentrés à propos, et il comptait, en manœuvrant rapidement entre la Seine et ta Marne, remporter sur les généraux séparés des succès qui arrêteraient la marche confiante des coalisés, prolongeraient la guerre, relèveraient le moral de la nation et donneraient le temps aux renforts d’arriver.

Dans la nuit même il prit ses dispositions. Le lendemain 26, il se porta sur Vitry-le-François et reprit possession de Saint-Dizier (27), après que Victor en eut chassé un corps russe qui s’y était établi. Le 28, quoiqu’il n’eût que 17,000 hommes, parmi lesquels beaucoup de conscrits, il marcha hardiment sur Blùcher, qui s’avançait vers Brienne à la tête de 30,000 hommes, et le 29, il enleva cette ville à l’ennemi, après un combat vif et langlant. Cette journée d’ailleurs ne "fit que lâter la jonction de Blilcher et de Schwartenberg, qui de Bar-sur-Aube revinrent en-Kjmble sur Napoléon, qui avait pris position îans la plaine de la Rethière. Il disposait en.

o moment de 32,000 hommes, et voyait se

Jéployer en face de lui 170,000 ennemis ! Le ’." février, fut livrée cette terrible bataille de sa Rothière, qui resta indécise, mais où la résistance héroïque de nos soldats, qui gardèrent leur champ de bataille, fut un véritable phénomène de guerre, suivant l’expression d’un historien. Napoléon fut d’ailleurs admirablement secondé par Oudinot, Marmont, Gérard et Victor. Il n’avait accepté ce combat si disproportionné que pour couvrir sa retraite, et dans la nuit il franchit l’Aube et se retira en bon ordre sur Troyes, où il s’établit le 3 février. Toutefois, cette bataille était un grand acte militaire, mais elle nous laissait dans un immense péril, et l’empereur, qui par ses fautes et son despotisme avait amené cette effrayante situation, était supplié par Berthier, Caulaincourt, Bassano, par ses amis les plus dévoués, de traiter à tout prix de la paix au congrès qui s’était ouvert a Chàtillon. Mais actuellement les coalisés présentaient des conditions fort dures, les

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frontières de 1790 et notre exclusion des futurs arrangements européens. Assailli de toute part, Napoléon ne voulait pas céder sur ce point, tout en autorisant son plénipotentiaire, Caulaincourt, a faire de grands sacrifices. Il expédiait ordre sur ordre, soit pour appeler différents corps de troupes et en faire lever de nouvelles, soit pour calmer les alarmes trop fondées, pourvoir à la défense de Paris et à la marche des affaires, etc.

Cependant, il s’était encore rapproché de Paris en venant s’établir à Nogent-sur-Seine {7 février). Cette marche rétrograde causait de vives inquiétudes, et lui-même n’avait pas encore trouvé l’occasion qu’il épiait pour frapper des coups décisifs. Mais les fautes de l’ennemi ne tardèrent pas à la lui offrir. Dans la préoccupation de manœuvres pour acculer ce redoutable adversaire sur Paris, en y amenant successivement toutes les armées de la coalition, les alliés décidèrent de nouveau que Blùcher et Schwarzenberg agiraient séparément, le premier en suivant la Marne, et l’autre la Seine, à portée de se secourir, et en entraînant toujours Napoléon jusqu’à la jonction de ces deux rivières, c’est-à-dire jusqu’à Paris. L’admirable capitaine, qui suivait de l’œil tous les mouvements de ses adversaires, eut au milieu de ses amers soucis un élan de joie indicible en voyant se réaliser la faute qu’il avait prévue. Obligé de faire face de tous les côtés à la fois avec une poignée de soldats, il arrêta, avec sa promptitude accoutumée, le vaste ensemble de ses combinaisons, augmenta encore, par quelques manœuvres habiles, l’espace qui séparait ses ennemis, et commença avec autant de hardiesse que de prévoyance et de précision cette suite de belles opérations auxquelles il dut, à la veille de sa chute, cinq ou six de ses plus brillantes journées militaires.

Toutes ses dispositions prises et ses corps en mouvement, il partit de Nogent le 9 février, en se dirigeant vers la Marne, pour aller se placer au milieu des corps dispersés de l’armée de Blùcher. Il avait avec lui Marmont, Ney, Mortier et environ 30,000 hommes. Malgré des obstacles de toute nature, et notamment des terrains marécageux entre Sézanne et Saint-Prix, il parvint à gagner les points qu’il voulait occuper, aidé, d’ailleurs, par les paysans, qui accouraient en foule apporter des renforts de bras et de chevaux pour tirer les canons de la fange où ils enfonçaient et transporter le matériel. Le 10, il rencontra, sur le plateau de Champaubert un corps de l’armée de Blùcher, composé de troupes russes et commandé par Olsouvieff. Il attaqua ce corps avec la plus grande vigueur et l’écrasa complètement. Ce brillant succès lui livrait la route de Montmirail. Il apprit en même temps que Blùcher était à Etoges, Sacken vers Montmirail, d’York vers la Marne, enfin que toutes ses prévisions étaient justes et qu’il se trouvait au milieu même des divisions de cette armée. Il avait pris en même temps ses mesures pour ne pas être surpris pas Schwarzenberg, et pouvoir au besoin se porter à sa rencontre s’il venait au secours de Blùcher.

Le lendemain, il marcha vers Montmirail, où il se trouva en face de la division de Sacken, pendant qu’au loin, dans la direction de Château-Thierry, on voyait arriver les troupes d’York. Avec 24,000 hommes environ, Napoléon ne craignit pas de se heurter à ces forces, qui se composaient de 50,000 Russes et Prussiens. Il n’entre pas dans le plan de cet article de donner les détails des batailles, qu’on trouvera aux articles particuliers ; rappelons seulement que Napoléon remporta une victoire complète. Après cette belle journée de Montmirail, il marcha sur Château-Thierry, où il écrasa le troisième corps de Blùcher (York), puis il revint sur Montmirail pour faire face au général en chef lui-même. Le 14, les deux adversaires se rencontrèrent à Vauchamps. L’ennemi, malgré son énorme supériorité numérique, fut partout culbuté, obligé de reprendre la route de Chàlons. C’est ce brillant combat de Vauchamps qu’on a nommé la seconde journée de Montmirail. En cinq jours de combat, Napoléon avait battu à quatre reprises et en partie désorganisé l’armée de Blùcher. Il dirigea sur Paris 18,000 prisonniers ; puis il écrivit à Caulaincourt de continuer à négocier la paix, mais de ne rien signer sans son ordre. II espérait naturellement être de plus en plus en mesure d’imposer des conditions plus avantageuses. Peut-être même se flattait-il encore de triompher complètement de l’ennemi et de le rejeter au delà du Rhin.

Mais, hélas 1 quelque accoutumé qu’il fût aux coups d’audace et aux triomphes imprévus, il était difficile de conserver quelque illusion sur l’issue des événements. Certes, au point de vue militaire, c’était un grand spectacle que celui de ce capitaine se débattant avec une poignée d’hommes au milieu des masses ennemies et remportant des victoires au moment où on le croyait écrasé. Mais après avoir épuisé la France par tant d’entreprises hasardées, après avoir armé le « monde contre nous, il se retrouvait en face des haines qu’il avait soulevées, faible, désarmé, n’ayant plus que d’insignifiants moyens d’action, luttant contre les premières armées de l’Europe avec quelques débris des vieilles bandes héroïques et des troupeaux d’enfants arrachés de la veille à leurs mères. Son génie, son étonnante énergie pouvaient bien re CAMP

tarder un moment le déluge d’hommes qui roulait vers Paris ; mais refoulé sur un point, le flot débordait partout où Napoléon n’était pas encore, partout où il n’était plus. C’est ainsi que les Autrichiens avaient profité de sa marche sur la Marne pour forcer le passage de la Seine à Nogent, à Bray, à Montereau, et pour s’avancer vers Paris. Les ponts des deux rivières étaient soigneusement gardés, et les ducs de Bellune et de Reggio résistèrent héroïquement ; mais, écrasé-j par le nombre, ils étaient successivement refoulés jusqu’aux environs de Paris. Les cosaques de Platow commençaient à apparaître aux environs de Fontainebleau.

Napoléon cessa de poursuivre Blùcher pour courir à la rencontre de Schwarzenberg. C’est à Guignes, à huit lieues de Paris, qu’il rencontra, le 16 février, les premières colonnes autrichiennes. A-la vigueur des premiers coups, à la vue de deux de ses divisions dispersées et de ses régiments rejetés les uns sur les autres, Schwarzenberg reconnaît aussitôt la présence du redoutable adversaire de la coalition ; précédé par les souverains, il effectue précipitamment sa retraite sur Troyes et demande une suspension d’armes. Mais les prétentions de Napoléon étaient revenues avec le succès, et il ne consent à traiter qu’aux conditions qui avaient été primitivement arrêtées à Francfort avant l’invasion. Dans l’état des choses, c’était réellement demander l’impossible et jouer imprudemment le tout pour le tout.

La lutte continua.

Le 18 fut livré le brillant combat de Montereau ; cette position importante fut arrachée au prince de Wurtemberg. Diverses autres actions eurent également lieu dans le même temps sur divers-points. Enfin le 24, à la suite de nouvelles manœuvres, l’empereur reprit Troyes, pendant que Blilcher, après avoir réorganisé son armée, marchait sur Paris, en suivant le cours de la Marne et en refoulant les ducs de Raguse et de Trévise, contre lesquels il livra différents combats. Napoléon, obligé de le poursuivre pour couvrir Paris, l’enveloppe, le met dans la position la plus critique ; mais, au moment où il se croyait certain de l’écraser, il apprend tout à coup que Soissons intimidé a ouvert ses portes au général prussien. Irrité, déconcerté par cet événement, qui changeait si gravement la situation, l’empereur franchit l’Aisne, continue à suivre son ennemi, gagne sur lui la bataille de Craonne (7 mars), victoire qui n’eut pas d’ailleurs un grand résultat, livre la sanglante bataille de Laon (9 et 10), sans pouvoir forcer les positions de 1 ennemi, et fait ensuite une retraite sur Soissons, ayant fait des pertes moindres que celtes des Prussiens et des Russes, mais qui lui étaient infiniment plus sensibles, vu son petit nombre de troupes.

La prise de Reims et l’anéantissement du corps commandé par l’émigré Saint-Priest ne fut qu’un dédommagement insuffisant, qui ne lui rendit pas la position qu’il avait après Montmirail et Montereau. Néanmoins, ce génie fertile en combinaisons n’était point abattu, et.telle était la frayeur qu’il inspirait encore, que le bruit de ses pas, de ses marches et contre-marches jetait les ennemis dans les plus grandes perplexités et leur faisait modifier leurs résolutions d’une heure à l’autre. Toutefois, ce duel extraordinaire ne pouvait longtemps se prolonger dans de telles conditions. Le 20 mars fut livrée la bataille d’Arcis-sur-Aube, la dernière que Napoléon donna en personne, et qui resta indécise. Se sentant enveloppé par les masses ennemies, il modifia de nouveau ses plans, et résolut de se porter vers les places frontières pour y recueillir des forces et dans l’espérance d’attirer les alliés Sur ses pas. Il se dirigea en effet vers la Lorraine, toujours plein d’assurance et d’illusion, pendant que le découragement se répandait autour de lui parmi ses capitaines et ses serviteurs les plus dévoués. Dans l’intervalle, la rupture définitive du congrès de Chàtillon avait anéanti les dernièreg espérances de paix.

On sait ce qui arriva. Au lieu de suivre l’empereur, les coalisés centralisèrent toutes leurs forces et marchèrent sur Paris, en culbutant sur leur route Marmont, Mortier et les autres lieutenants de Napoléon, et quand celui-ci, instruit de ces nouvelles, voulut accourir en poste pour organiser la défense de la capitale, il était trop tard. V. Paris (Bataille et capitulation de).

L’empereur, agité par mille résolutions contraires, alla s’établir à Fontainebleau, nourrissant de nouveaux projets que la lassitude de la nation, la défection de ses lieutenants et de ses dignitaires, et d’autres causes encore, ne lui permirent ni de réaliser ni même d’entreprendre. V. Napoléon.

La campagne de France est considérée comme une des plus belles et des plus savantes, non-seulement de l’histoire de Napoléon, mais de toute l’histoire militaire.

Terminons cet article par un tableau chronologique des différents engagements qui eurent lieu entre les Français et les alliés pendant cette terrible campagne :

24 janvier 1814. Combat de Bar-sur-Aube (victoire).

27 janvier. Combat de Saint-Dizier (victoire).

29 janvier. Bataille de Brienne (victoire).

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1er février. Bataille de La Rothière ou de Bar-sur-Aube (défaite).

9 février. Reddition d’Avesnes.

10 février. Combat de Champaubert (victoire).

11 février. Combat de Montmirail (victoire).

12 février. Combats des Cacquerets et de Château-Thierry (victoire).

14 février. Combat de Vauchamps (victoire).

17 février. Combats de Mormans et de Valjouan (victoire).

Le même jour. Nouveau combat de Montmirail (victoire).

18 février. Combat de Montereau (victoire). 22 février. Combat de Méry (victoire).

27 février. Troisième combat do Bar-surAube (défaite).

Le même jour. Bataille â’Orthez, entre Soult et Wellington.

28 février. Reddition de la place de La Firc.

2 mars. Reddition de Soissons.

3 mars. Combat sur la Barce (défaite). 5 mars. Combat de Jieims (victoire).

7 mars. Bataille de Craonne (victoire).

9, 10 et 11 mars. Bataille de Laon (défaite).

12 mars. Surprise de Jieims, qui fut reprise le lendemain par Napoléon.

Le même jour. Combat de Viella, entre Soult et Wellington (défaite).

15 mars. Héroïque résistance de Comptégne.

16 mars. Belle résistance à’Epernay.

19 mars. Combats de Plancy et de Mmj (victoire).

20 mars. Bataille mémorable i’Arcis-surAube (défaite).

26 mars. Combat de Saint-Disier (victoire), 30 mars. Bataille de Paris et entrée dos alliés dans cette capitale.

10 avril. Bataille de Toulouse, la dernièm de cette désastreuse campagne, gagnée par le maréchal Soult, avec 25,000 hommes, sur Wellington, qui commandait 100,000 Anglais.

Campagne de 1815. On le sait, c’est dans cette courte et mémorable campagne que fut brisée sans retour la fortune du premier Empire. Des articles spéciaux de ce Dictionnaire étant consacrés aux grandes batailles qui ont décidé du sort de la France et de Napoléon, nous n’avons à tracer ici qu’une esquisse des faits généraux et des résultats.

Après son retour de l’Ile d’Elbe, l’empereur proposa la paix à l’Europe, tout en poursuivant avec sa dévorante activité d’immenses préparatifs de guerre. Tl ne se faisait pas d’illusion ; il savait qu’on n’avait aucune confiance en sa parole, et qu’entre l’Europe et lui c’était un duel à mort. Et dans la fait, il avait si cruellement abusé de sa puissance, qu’il était bien difficile de croire à sa sincérité et de résister au désir de l’écraser à jamais.

À la nouvelle de son retour en France, le congrès de Vienne l’avait traité en ennemi public et mis hors la loi des nations. Il était a peine installé aux Tuileries que les légations étrangères avaient demandé leurs passefiorts. Ces manifestations ne pouvaient lui aisser aucun doute ; aussi, tout en continuant d’offrir la paix, sans obtenir même une réponse, se préparait-il à la guerre, comrao nous venons de le dire, en réorganisant l’armée, en rassemblant des forces et en combinant ses plans pour la terrible campagne qu’il prévoyait. En moins de deux mois, il improvisa un armement aussi complet que le permettaient les ressources, pourvut à la sûreté des places, fortifia les abords de Paris, sur la rive droite, mobilisa une partie de la garde nationale, et se trouva prêt, au commencement de juin, sinon à prendre victorieusement l’offensive, au moins à opposer une résistance sérieuse à ses ennemis. Blùcher et Wellington, à la tête des Prussiens et des Anglais, se concentraient en Belgique ; mais ils restaient immobiles, attendant que les Russes et les Autrichiens fussent arrivés devant les frontières de l’Est.

Napoléon résolut de prendro une vigoureuse offensive, au lieu d’attendre que nos forces fussent complètement organisées. On l’a blâmé de cette précipitation, à laquelle Carnot et autres hommes compétents se montrèrent opposés. Il est certain qu’il eût pu attendre encore et entrer en campagne avec 100,000 hommes de plus, laissant derrière lui nos frontières et nos places dans un état convenable de défense. Mais il entrait dans son plan d’attaquer séparément les ennemis ; c’était, on le sait, sa tactique habituelle ; en outre, il avait, comme il le disait, besoin d’une victoire pour frapper l’opinion et ressaisir la dictature qui lui échappait ; de plus, il espérait ainsi empêcher l’invasion de nos départements du Nord et de l’Est ; enfin, l’offensive et les manœuvres rapides allaient mieux à la nature de son génie militaire.

On ne peut disconvenir que, dans l’état des choses, ce plan était plus audacieux que prudent, car on courait le danger de rencontrer une grande défaite qui pouvait compromettre tout à la fois le gouvernement et la France elle-même. Et c’est en effet ce qui arriva.

Au reste, bien que nous soyons naturellement porté pour le système dêfonsif, l’autre ayant eu un résultat si funeste, nous évite-