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BORD

ennemis, fatals, orageux, sombres, ensanglantés, épouvantés.

Bord* (les) de la Seine, de la Sevré, du Rhône, de la Loire, du Gapeau, du Nil, du Gardon, du Sebou, etc., tableaux de MM. Daubigny, T. Rousseau, P. Flandrin, Courbet, Français, Belly, de Curzon, E. Delacroix, etc. V. la description de la plupart de ces tableaux, aux noms des fleuves et des rivières.

Bord (chanson de), recueillie et notée par G. Mathieu. Cette chanson, qui fait partie du répertoire des matelots français, et dont l’origine est inconnue, a été, suivant toute apparence, improvisée au retour d’une campagne par quelque matelot poète ; car elle a un goût (te terroir. L’auteur est aussi peu soucieux que Cambronne del’atticisme de 1 expression, et ce n’est pas lui qui aurait fait prendre le change ii la fameuse marchande d’herbes d’Athènes ; mais on sait, que le gaillard d’aviint d’un vnisseau n’est pas l’Académie.

— oflt Nous a - per - çum’ sous l’ventzà

■ oût, Noua a - per - çum’ sousl’vent zà

SiHëp

bis.

bis.

Bots, C’était pour al-1er à Bres • Variante. Et qu’il fallait f... z’à l’eau)

DEUXIÈME COUPLET.

Le capitaine au même instant Fait appeler son lieutenant. — Lieutenant, te sens-£u capable. Dis-moi, te scns-tu-z-’asseï fort Pour aller accoster son bord ?

TROISIÈME COUPLET,

Le lieutenant, fler-z-et hardi. Lui répond : Capitaine, z-oui, Faites monter votre équipage, Braves soldats et matelots. Faites-les donc monter en haut.

QUATRIÈME COUPLET.

Le maître donne un coup d’ sifflet : l En haut, larguez les perroquets ; 1 Largue les ris, et vent arrière, Laisse porter jusqu’à son bord Pour voir qu’est équi sera l’plus fort.

CINQUIÈME COUPLET.

"Vir’ lof.pour lof en arrivant,) Nous l’avons pris par Bon avan t, j À coup de hacllfs d’abordage. De piques et de mousquetons, Nous l’avons mis a la raison.

bit.

bis.

bis.

bis.

SIXIÈME -COUPLET.

Que va-ton dir’ de lui bientôt En Angleterre et à Breslau ? D’avoir laissé prendr’ sa frégate Par un corsair’ de six canons. Lui qu’en avait trente si bons !

SEPTIÈME COUPLET.

Buvons un coup, buvons-en deux ï À la santé des amoureux ! À la santé du roi de France,

M * pour celui d’Angleterre

Qui nous a déclaré la guerre ! « On peut remplacer le M.... trop énergique, par tant pis, etc.

BORDA s. f. (bor-da). Bot. Nom vulgaire d’une ansérine.

BORDA (Jean-Charles), savant mathématicien et marin français, né à Dax en 1733, mort en 1799. Après avoir passé quelques années au collège de La Flèche, il entra dans le génie militaire, puis dans les chevau-légers. Dès l’année 1756, il lut à l’Académie des sciences un Mémoire sur le -mouvement des projectiles, et ce travail remarquable lui valut d être attaché a l’illustre compagnie comme membre associé. Nommé aidé de camp du maréchal de MaiUebois, il prit part à la bataille d’Hastemheck ; mais il rentra bientôt dans le génie militaire, qui convenait bien mieux à son goût pour les sciences mathématiques, et il fut employé dans les ports, ce quilui fournit l’occasion de publier de savants mémoires sur la résistance des fluides, sur la meilleure forme à donner aux vannes des roues hydrauliques et aux roues elles-mêmes, sur la théorie des

Frojectiles, en ayant égard à la résistance de air, etc. Ces travaux ne l’empêchaient pas de se livrer en même temps a l’étude des mathématiques pures, et, dans un autre mémoire, il exposa avec une grande clarté les principes du calcul des variations, tel que l’avait conçu Lagrange. En 1767, M. de Praslin, alors ministre, le fit entrer au service actif de la ma BORD

rine, et, dès l’année suivante. Borda fit sa

firemière campagne. En 1771, il fut placé sur a frégate la Flore, avec mission d’essayer les montres marines, au nom de l’Académie. En 1774 et en 1775, il fit partie d’une expédition qui toucha aux Açores, aux lies du cap Vert, et qui longea une partie de la côte d’Afrique. Nommé lieutenant de vaisseau à son retour, il fut ensuite envoyé aux îles Canaries et chargé d’en déterminer la position avec exactitude ; on comprend combien cette mission était importante au point de vue de la science, puisque, à cette époque, la plupart des peuples de l’Europe comptaient les longitudes a partir de l’île de Fer, la plus occidentale des Canaries. Ce fut alors que Borda, pour déterminer avec plus de précision les points d’une côte, substitua aux anciennes méthodes celle des relèvements astronomiques, et employa pour cette opération délicate les instruments- de réflexion ; et le résultat de ses observations fut une magnifique carte des îles Canaries et de la côte d’Afrique. Il fit ensuite, avec le comte d’Estaing, les campagnes de 1777 et 1778, en qualité de major général. En 1781, il eut le commandement du vaisseau le Guerrier ; l’année suivante, il fut chargé de commander le Solitaire, vaisseau de 74 canons, et d’escorter un corps de troupes qu’on envoyait à la Martinique. Après avoir rempli cette mission, il se mit en croisière, et la, attaqué par une escadre anglaise, il fut obligé de se rendre, après une héroïque résistance. Mais les Anglais, qui connaissaient Son mérite, le traitèrent avec distinction, et lui rendirent la liberté sur parole. Déjà Borda avait fait exécuter son cercle à réflexion, dont un astronome anglais, Tobie Mayer, avait eu la première idée, mais qui devint un instrument tout nouveau par les perfectionnements que le mathématicien français y apporta. IV fit ensuite construire, d’après les mêmes principes, des cercles répétiteurs propres à faciliter les observations terrestres, et dont l’usage ne tarda pas à se répandre par toute l’Europe. Lorsque l’Assemblée constituante, pour créer un nouveau système de poids et de mesures, voulut que des savants déterminassent avec précision la longueur d’un arc du méridien. Borda, Méchain et Delambre furent chargés de cette opération difficile, et ce fut Borda qui dirigea spécialement tout ce qui se rattachait aux expériences de physique : il imagina d’employer les règles de platine pour la mesure des bases ; il inventa les thermomètres métalliques, propres à indiquer les plus petites variations de température, créa un appareil ingénieux pour mesurer l’exacte longueur du pendule, et toutes ces créations amenèrent de sérieux progrès dans la physique expérimentale. Dans les dernières années de sa vie, Borda s’était livré à d’importants travaux sur les réfractions. Delambre a vu deux copies d’un mémoire considérable, que l’auteur ne voulut

f>as encore lui communiquer parce qu’il ne e trouvait pas assez parfait. Malheureusement ce mémoire n’a pas été retrouvé dans les papiers que l’illustre physicien laissa en mourant.

Nous citerons, en terminant, les termes dans lesquels M. Biot apprécie les travaux de Borda, envisagés seulement dans leur rapport avec la navigation. « U doit être regardé, dit-il, comme un des hommes qui ont le plus contribué aux progrès de l’art nautique, tant par les instruments exacts qu’il adonnés aux marins que par l’adresse avec laquelle il a su rapprocher d’eux les méthodes géométriques, sans rien ôter à celles-ci de leur exactitude. L’époque à laquelle il a publié ses observations doit être regardée comme celle où les marins français ont abandonné les routines de l’ignorance pour se guider par le flambeau d’une science exacte. »

Outre les mémoires et les travaux dont nous avons parlé, on doit à Borda : Voyage fait par ordre du roi en 1771 et 1772, en diverses parties de l’Europe et de l’Amérique, pour vérifier l’utilité de plusieurs méthodes et instruments servant à déterminer la latitude et la longitude, etc., en collaboration avec MM. Verdun de la Crenne et Pingre (1778, 2 vol. in-4o) ; Description et usage du cercle de réflexion (1787) ; Tables trigonométriques décimales, ou Tables des logarithmes, des sinus, sécantes et tangentes, suivant la division du quart de cercle en îoo degrés, revues, augmentées et publiées par Delambre (Paris, 1804).

La reconnaissance des marins a perpétué le souvenir de Jean Borda en donnant son nom au vaisseau-école, ordinairement en rade de Brest, sur lequel sont embarqués les jeunes gens que le concours a déclarés Admissibles, et d’où ils sortent, après avoir subi convenablement leurs examens, avec le grade d’aspirant. Le Borda est une pépinière de braves officiers, et la plupart de nos gloires navales ont navigué pour la première fois sur ses vieilles planches.

BORDA (Siro), médecin italien, né à Paris en 1761, mort à Milan en 1824. Dès qu’il se fut fait recevoir docteur, il fut nommé répétiteur de matière médicale, et plus tard professeur titulaire. Il remplit cette fonction avec un zèle qui lui valut le respect et l’affection d’une jeunesse studieuse. Il avait d’abord adopté la doctrine du contro-stimulisme ; mais il en reconnut plus tard la fausseté, et comme il avait rédigé d’importants manuscrits dans un système qu’il se voyait forcé d’abandonner, il les fit brûler sous ses yeux avant de mourir.

BORD

Quand les événements politiques firent rentrer la Lombardie sous la domination de l’Autriche, Borda se vit en butte à des vexations qui durent abréger son existence.

BORDAGE s. m. (bor-da-je— rad. border). Action de border : Le bordage d’une robe, d’une paire de souliers.

— Mar. Planches épaisses qui couvrent en dehors les côtes ou la membrure intérieure et extérieure d’un navire : Les bordages du premier pont, du second pont. Les bordages de carène. On n’entend plus le maillet du calfat

 ?<ui enfonçait l’étoupe entre deux bordages. Jal.) || Franc bordage, Bordage extérieur ou bordage proprement dit, le bordage intérieur s’appelant plus souvent serrage ou vaigre.

— Archit. hydraul. Planches qui revêtent le coiTre renfermant la maçonnerie sur laquelle on veut fonder une jetée.

— Techn. Action, manière de border, de mettre une bordure : Le bordage d’un soulier. Le bordage d’un chapeau. Le bordage d’un habit, n Bandes de papier gris collées au pourtour des toiles tendues.

BORDAGE s. m. (bor-da-je — rad. borde). Féod. Tenurequi avait lieu lorsqu’on donnait une borde à quelqu’un, à la condition de remplir un office de basse domesticité. I ! Droit de bordage, de bordelage ou de bourderxe, Droit que le seigneur exigeait de tout laboureur tenant une métairie, et proportionné au revenu que celui-ci en tirait.

— Agric. Ferme donnée à moitié fruit. bord ah ou borda s. m. (bor-dâ, — de

bor-da, mot arabe). Grand manteau porté par les Arabes pour se garantir de la pluie..il Vêtement grossier à l’usage des religieux arabes, répondant à notre froc.

Bordai], poème religieux extrêmement célèbre, composé par Chéréf Ed-din el-Bausiri. Le Bordah est exclusivement consacré au panégyrique du prophète Mahomet, par lequel l’auteur s’était cru miraculeusement guéri pendant son sommeil. Le titre complet de ce poème est Kaukeb ed-Derria fi medn kheïr ebberria, XÉtoile étincelante, ou l’Éloge de la plus parfaite des créatures. Toutes les rimes de ce poème sont terminées par un mim (M), lettre initiale du nom de Mohammed. (On sait que les poëmes arabes sont la plupart du temps mouorimes.) Le Bordah jouit, parmi les musulmans, d’une popularité sans égale. L’ouvrage a été primitivement composé en arabe ; il en a été fait une foule de commentaires, de traductions en turc et en persan. Toute personne savante et religieuse en apprend par cœur de longs fragments, et en cite à tout instant des passages dans ses conversations.

BORDAILLE s. m. (bor-da-lle ; Il mil.rad. bord}. Mar. Planche non dégrossie, qui doit servir à former des bordages.

— Navig. Partie la plus voisine des bords, ’ dans un bateau foncet.

BORDAILLER v. a. ou tr. (bor-da-llé ; 21 mil. — rad. bord). Mar. S’est dit autrefois pour Louvoyer, courir des bordées : La barque eordailla assez longtemps, après quoi elle reprit la mer. (De Retz.) il On dit aussi bordeyer.

BORDANT s. m. (bor-dan — rad. bord), Mar. Ralingue inférieure d’une voile, u On dit

aussi BORDURE.

bordant (bor-dan) part, prés, du v. Border : Des maisons bordant la rue.

BORDANT, ANTE adj. (bor-dan, an-torad. border). Bot. go dit d’une aigrette qui n’offre qu’un léger bord membraneux : Àigrette bordante.

BORDAS (Pardoux), conventionnel, qui fut d’abord nommé membre de l’Assemblée législative par le département de la Haute-Vienne. À la Convention, il vota pour la détention de Louis XV[. On le chargea, en 1794, d’une mission à Bordeaux, avec Jean-Bon-Saint-André. Il entra plus tard au conseil des Cinq-Cents, puis à celui des Anciens, et fut même quelque temps choisi pour présider cette dernière assemblée. Après le 18 brumaire, il fut employé comme chef de division au ministère de la justice, et, en 1807, on le nomma juge suppléant à la cour de justice criminelle.

BORDAS-DEMOULIN (Jean-Baptiste), philosophe et littérateur français, né à La Bertinie, près de Bergerac en Périgord (Dordogne), le 21 février 1798, mort à Paris le 24 juillet 1859. Orphelin de père et de mère presque à son berceau, recueilli et élevé par sa tante, il mena jusqu’à l’âge de quatorze uns, dans les bois du Périgord, une existence demisauvage. En 1813, il se rendit à Bergerac pour commencer ses études classiques. Il lisait beaucoup, dit son biographe M. Huet, étudiait, méditait sans cesse, négligeant son corps, au point d’en devenir tout pâle, et si faible que parfois il pouvait à peine marcher. En 1819, la soif de savoir qui devait le tourmenter jusqu’à la mort le conduisit à Paris. Là, vivant très-retiré et menant une pauvre existence, il se livra à l’étude de la philosophie, des mathématiques, de la théologie et du droit canon ; il médita longtemps de Bonald, de Maistre, puis Condorcet ; il lut et relut Platon, saint Augustin, ’Plotin, Descartes, Malebranche, Leibnitz. A vingt-six ans, il conçut son système philosophique ; à trente-deux, ’il se trouva en possession de ses principales idées.

On ne s’enrichit guère au métier que faisait Bordas. Malgré ses privations, il eut bien BORD

tôt épuisé toutes ses ressources. Voyant que le revenu de sa propriété de La Bertinie ne pouvait le faire vivre, il la vendit, en retira 10,000 fr. dont il laissa le tiers à sa tante, et puisa dans ce pauvre capital, jusqu’à extinction complète, ce qui ne se fit pas longtemps attendre. D’un caractère tendre, ombrageux, et plein de cette insouciance pour la vie matérielle qui caractérise assez souvent ceux qu’absorbe la pensée, Bordas ne put arriver à se suffire à lui-même. Sans quelques amis, il serait littéralement mort de faim. Il fut souvent réduit à un morceau de pain. Quelquefois, par faiblesse, il gardait le lit toute la journée, chancelait, se retenait aux murailles pour ne point tomber dans la rue, et marchait chaussé de vieux souliers ramassés au coin des bornes. M. Huét nous raconte qu’un jour, n’ayant plus que quelques sous, à bout de toute espérance, au lieu d’acheter du pain, il paya de son dernier argent une séance au cabinet de lecture, lut un livre qu’il avait désiré connaître, puis pâle, épuisé, se traîna chez lui pour attendre la mort. Une visite le sauva. Quelques amis dévoués se décidèrent alors à se charger complétement de lui, et il put enfin échapper h la misère, à ce qu’il appelait « les extrémités terribles. »

BordaS-Demoulin publia d’abord ses Lettres sur l’éclectisme et le doctrinarisme (1838), où il attaquait vigoureusement ces deux systèmes. Il composa ensuite, pour un concours de l’Académie des sciences morales et politiques, son ouvrage sur le Cartésianisme, travail qui fut couronné en -séance publique, au mois de mai 1841, et publié en 1843. À cette époque, une pension annuelle de 1,200 fr. fut accordée à Bordas sur les fonds du ministère de l’instruction publique. Il a donné depuis : Mélanges philosophiques et religieux (1846) contenant un remarquable Éloge de Pascal, couronné par l’Académie française en 1842, et un Discours sur Voltaire ; les Pouvoirs constitutifs de l’Église (1855), où l’auteur s’élève contre l’ultramontanisme, le jésuitisme et le marianisme ; avec M. Huet, les Essais de réforme catholique (1856). Il a fourni au Dictionnaire de la conversation un certain nombre d’articles relatifs à l’histoire de l’Église constitutionnelle, et qui sont l’apologie de l’évêque Grégoire et de ses amis. Il est mort à l’hôpital La Riboisière en 1859. Deux volumes d’œuvres posthumes de Bordas ont été publiés en isoi, par M. Huet.

Homme du xixe siècle par la largeur de son libéralisme, Bordas-Demoulin est du xvno par son spiritualisme à contours très-arrêtés et par sa foi catholique. Il reprend et continue, en philosophie, la tradition cartésienne ; en théologie, ta tradition gallicane et la tradition jans’é’niste. Son catholicisme n’a rien de commun avec celui de de Bonald et de Joseph de Maistre. Cet enfant de l’Église ne craint pas de dire à sa mère de dures vérités ; c’est un vigoureux adversaire de la bulle Unigenitus, de l’Immaculée conception, de l’infaillibilité papale et delà théocratie du moyen âge.

Trois grandes théories constituent le système philosophique de Bordas-Demoulin : I» théorie des idées, celle de la substance et celle de l’infini. Nous allons les exposer sommairement.

Théorie des idées. La philosophie, dit Bordas, est la connaissance des moyens de connaître, c’est-à-dire des idées. L’idée est ce qui est perçu, saisi par l’acte de la pensée. 11 ne faut pas confondre l’idée avec l’image. L’image d’un triangle, c’est la représentation qu’on s’en forme dans l’imagination ; l’idée, c’est ce que l’on conçoit par l’intelligence pure, quand on dit que c’est une figure à trois côtés. Où l’intelligence le conçoit-elle ? En elle-même sans doute, puisqu’elle ne peut rien comprendre sans voir en soi-même et par soimême ce qu’elle comprend. Néanmoins la vérité qu’elle comprend, que c’est une figure à trois côtés, étant éternelle, il faut qu’elle la conçoive en même temps dans une intelligence éternelle. Les idées qui sont dans l’âme en constituent l’être, la substance ; les idées qui sont en Dieu en constituent la substance pareillement. Voilà la théorie des idées. On la méconnaît en excluant de la pensée : i° ou les idées humaines ; 2° ou les idées divines ; 3° ou les unes et les autres, et n’y laissant que les sensations. Supprimez les idées humaines ; la pensée réduite aux idées divines ne nous appartient plus ; c’est Dieu qui pense en nous et pour nous, lu connaissance disparaît. Supprimez les idées divines, en qui se trouve 1 éternelle réalité du vrai ; la pensée réduite aux idées humaines n’est plus capable d’aucune connaissance effective, puisque dans toute connaissance effective il entre quelque vérité éternelle. Otez les idées divines et les idée ? humaines, et ne laissez que les sensations, et la pensée s’anéantit. La théorie des idées, ou le système de la vérité, a pour auteur Platon ; le premier système de l’erreur, Zénou de Cittium ; le second, Aristote ; le troisième, Epicure. Ainsi, il n’y a et ne peut y avoir que quatre philosophies : l’une vraie, les trois autres erronées, toutes les quatre constantes. Toute la philosophie de l’histoire tient dans ce cadre. Platon est suivi par Philon le Juif, Plotin, saint Augustin, Bossuet, Leibnitz ; Aristote par saint Thomas, Arnauld, Régis, Reid, Kant, Fichte, Maine de Biran ; Zenon, par Malebranche, Fénelon, Spinosa, Berkeley, Schelling, Hegel, de Bonald ; Épicure, par Bacon, Hobbes, Gassendi, Locke, Condillac, de Tracy.