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BAI

— Mallicm. So disait pour oscillation. V. ce mot.

BAISE-PIED s. m. (bè-ze-pi-é-rad. baiser ot pied). Action de baiser le pied en signe do soumission, do respect : Le BAisiï-riEn ne se pratique plus guère qu’en Turquie et à Home. Nous allâmes nous placer tout près du kiosque, devant la porte duquel devait avoir lieu la céremanie du baise-pied. {Th. Gaut.) Il No se dit que par plaisanterie et par allusion à baisemain.

— Fig. Servilité, bassesse : Il ne sait par quelles génuflexions, par quels bm^e-vieds tut témoigner son humilité excessive et le terreà-terre de son adoration. (Cormen.)

BAISER v. a. ou ti (bè-zé — lat. basiare, môme sens). Poser ses lèvres sur : Baiser la bouche, la joue, le front. Baiser la main d’une femme, d’un vieillard. Bmser des reliques, un crucifix- Il voulait me baiser les mains, je voulais baiser ses joues, cela faisait une contestation. (Mme de Sév.) Tous les vieillards baisèrent ce livre avec respect. (Fcn. J Ses yeux cherchèrent la croix de Jésus-Cltrtst, et ses lèvres ta baisèrent. (Fléch.) Selon l’usage oriental, les criminels, apris avoir été punis ; baisent la main de leurs juges. (Volt.) // en coûte moins à un homme fier de quitter la vie que de baiser la main à un tyran qui lui fuit grâce. (Volney.) Ils baisent avec transport ta terre où s’accomplit leur salut. (Chateaub.) Les assassins de César commencèrent par lui baiser le visage, la poitrine et les mains. (Maries.) Il y a de belles dames de par le monde qui se laissent baiser la main comme le pape laisse baiser sa mule. (A. de Musset.) A Londres, on embrasse les femmes sur la bouche ; à Madrid, on leur baise seulement la main, (L.-J. Larcher.)

Oh ! maman, oh ! papa, laisez-moi de bon cœur.

Lemonmer.

Du Christ avec ardeur Jeanne baisait l’image.

C. DeLAVIGNEj

Viens baiser cette joue, et reconnais In place Oii rut jadis l’affront que ton cournjre efface.

Corneille.

Son front tt-l-l ! gardé ce pli rêveur Que nous baisions tous deux pour l’effacer, ma sœur ?

Lamautihe.

Venez, vous qu’on adore,

Qu’on vous baise cent fois, et puis cent rois encore. C. Délavions.

Que fifiwc-t-il ainsi ? la rose de ma femme. Il est temps dû jeter un peu d’eau sur sa flamme.

E. AUOIEH.

Toutes les nuits un ange

Vient baiser les (leurs du lotus Aux borda sacrés du Gange.

De Banville.

— Absol. : Allons, salue :, monsieur.Bai- SERM-j’e ? — Oui, oui. (Mol.)

— Par aiial. Se dit des oiseaux qui se becquêtent, qui se caressent bec à bec : Un tourtereau qui baise sa compagne.

— Par ext. Recevoir la visite de ou fairo uno visite à : Vous avez donc baise toute la Provence ? (M«"> de Sév.) S’est dit par allusion à l’ancien usage de baiser les personnes à qui l’on faisait ou dont on recevait une visite.

— Fam. Arriver, venir, atteindre jusqu’à : Ceux du conseil des finances y entrèrent sans savoir si l’affaire baiserait ou non le bureau de ce conseil. (St-Sim.) « Ce sens a vieilli.

— Poétiq. Toucher légèrement, effleurer ; Le zéphyr baise les fleurs. Les vagues venaient baiser le pied des rochers.

L’onde qui baise ce rivage,

De quoi se plaint-elle à ses bords ?

Lamartine.

L’aurore aux doigts roses reviendra tous les jours Baiser les vaguas blondes.

De Banville.

Toi dont les flots Impétueux

Viennent, d’un pas respectueux. Baiser te sable des rivages. Gqdeau.

— Fig. Bénir, donner des marques d’amour, de respect, de reconnaissance : Il faut pouvoir baiser ses fers et aimer son esclavage. (Mass.)

Baiser la main, Baiser sa propre main devant quelqu’un, par forme de salut ou pour donner une marque de respect, d’aû"ection ou de remerciement ; a surtout lieu de la part des enfants : Allons, baisez la main et dites merci.

Baiser la main de quelqu’un, Y appliquer ses lèvres pour saluer, pour témoigner 1 amour, le respect ou la soumission :

Il me faut applaudir aux exploits du vainqueur. Et oai’ser une main qui me perce le cœur.

Racine.

Il Lui faire sos compliments : Sur cela, je vous baisb très-humblement les mains. (M™* de Sév.) Je baisk les mainS à monsieur lédocteur. (Mol.) D’une allure dégagée, il partit pour aller baiser les mains à 2a duchesse. (Damas-Hinard.) Il Lo glorifier, le bénir dans Ses œuvres : Sensible à la beauté du feuillage, au bruissement de l’herbe, au parfum des plantes, elle admirait la main de Dieu et la baisait dans ses œuvres. (Lamart.) H Ironiq. Témoigner vivement qu’on n’est pas de son avis, qu’on ne veut pas faire ce qu’il veut : Puisque vous faites tant de façons, je vous baisb les mains. (Danc.)

3e vous baise les mains ; je n’ai pas le loisir.

Molière.

S’il est ainsi, je vous baise les mains. Muses ; gardez vos faveurs pour quelque autre. J.-B. Rousseau.

BAI

Baiser les pas, la trace des pas de quelqu’un, Lui donner d’humbles marques de respect et de soumission : Vous êtes trop heureux de voir et d’entendre tous les jours M. de Turcnne ; baisez lus pas par oit il passe* (M’»o do Sév.)

... Vous devriez filer un peu plus doux, Et baiser tous les ; i«s par où madame passe. La Chaussée.

Il Baiser les pîeds ? la poussière des pieds de quelqu’un, S’humilier profondément devant lui :

Les rois des nations, devant loi prosternés. De tes pieds baisent la poussière.

Racine.

— Prov. Il ne faut pas tant baiser son ami à la. bouche que le cœur lui en fasse mal, Il ne faut pas multiplier les marques d’amitié au point de fatiguer ses amis.

Baiser la terret Se prosterner sur le sol et y appliquer ses lovres en signe d’humiliation chrétienne, n Fig. Ramper, manquer de noblesse, d’élévation :

Ses vers plats et grossiers, dépourvus d’agrément, Toujours baisentla terre........

Boileau.

Baiser le babouin. V. Babouin.

— Jeux. Baiser le cul de la vieille, Perdre sans faire un point, sans gagner uno seule fois. Il Baiser les quatre coins de la chambre, Pénitence à laquelle un joueur est condamné, et qui consiste à prendre une dame par la main et à la conduire aux quatre coins de la pièce en l’embrassant à chacun d’eux, il Baiser la terre. Dieu ayant tiré l’homme de la terre et la femme aussi, par conséquent, on choisit une dame et on l’embrasse. Il Baiser l’image de Dieu. On agit do la même façon, n Baiser le faite de la maison, c’est, pour un homme, baiser une dame au front, et, pour une dame, baiser aussi un homme au front. Il Baiser derrière ta porte. Le pénitent conduit une damo derrière la porto et lui donne un baiser.

— Véner. Baiser l’eau, So jeter à l’eau, en parlant du cerf poursuivi par les chasseurs : L’animal alla baiser l’eau au troisième étang. (Journ.)

— Féod. Baiser le uerrou, Dans quelques coutumes provinciales, hommage quo le vassal rendait à son seigneur féodal au manoir du fief dominant, et qui, en l’absence du seigneur, tenait lieu de foi et hommage, lorsque le vassal prenait dûment acte de ses soumissions. Le vassal, dit la coutume du Berry. était seulement tenu, pour faire la foi ei hommage, de se transporter au lieu du fief dominant ; et s’il ne trouvait pas le seigneur en personne, ou quelqu’un fondé de sa procuration, il faisait son devoir en baisant le verrou de la porto du manoir du seigneur s’il on existait, sinon, au lieu de la justice où était situé le fief dominant, et il était obligé de fairo dresser un acte public et authentique, justifiant qu’il s’était conformé à la coutume, et dont copie était laissée au greffier. Les coutumes d’Auxerre et de Sens contenaient à peu près les mêmes dispositions.

i— Géom. S’est dit autrefois de deux courbes qui ont une osculation ou un contact du second ordre. V. Osculation.

Se baiser, v. pr. Se donner mutuellement des baisers : Les initiés se baisaient, aux mystères de Cërès, en signe de concorde. (Volt.) Les premiers chrétiens et les premières chrétiennes se baisaient à la bouche dans leurs agapes. (Volt.) Il est dur de passer de gens qui sb baisent à gens qui se mangent. (Volt.) Il est constant quelles se baisent de meilleur cœur deuant les hommes. (J.-J. Rouss.)

— Fam. Se toucher, être en contact : Deux pains qui SE baisent dans le four. Il n’y avait dans la cheminée que deux tisons qui se baisaient.

BAISER s. m. (bè-zé — du lat. basium, basiare. Basium vient apparemment du sanscrit bhadd, ouvrir la bouche ; en persan, le verbe baiser se dit bonsiden (bons, un baiser). Les langues indo-germaniques so sont servies d’une autre racine qu’on retrouve dans l’aoristedu verbe grec cuned, jebaise ; ë-cus-é, il a baisé. De là viennent les mots allemands kusz, kùssen, et les mots anglais kiss, to kiss, etc.). Action de celui qui baise, qui pose sa bouche sur le visage ou sur quelque partie du corps d’une personne, ou sur un objet quelconque : Chaste baiser. Baiser d’amitié. Baiser amoureux. Donner, recevoir, rendre un baiser. Prendre, refuser un baiser. Être couvert de baisers. Le baiser était une manière de saluer très-ordinaire dans toute l’antiquité. (Volt.) Témoignage d’amour, de respect, d’amitié, de reconnaissance, de paix ou de charité, le baiser participe en quelque chose de la nature du serment. (A. Martin.) La pudeur a sa fausseté et le baiser son innocence. (Mirab.) Il y a bien des nuances dans les baisers, même dans ceux d’une fille innocente. (Balz.) Le tabac, ce narcotique stupéfiant qui tue l’âme et le corps, repousse le baiser et appelle la bière. (Tousseïiol.) Le baiser est, avec le sourire et le langage, un trait distinctif de notre espèce. (C. Dollfus.) Si j’étais moins affairé, je t’aurais déjà baillé vingt baisers sur • tes joues roses. (P. do Musset.)

Ii a bu des baisers le nectar inconnu.

Legouvê.

Viens recevoir, en ce jour,

Le fraiser d’amour fraternelle.

La Fontaine.

BAI

Jamais, dans mes transports, jamais, je te le jure, Je n’oserai ravir ces baisers enivrants.

C. Delavkinë.

j’aime, et je veux pâlir ; j’aiinc, et jo veux souffrir ; J’aime, et pour un baiser je donne mon génie. A. de Musset.

Les baisers ne nichent point

Au fond des rides moroses. Ponsaed.

— Poét, Douce influence extérieure", caresse, contact agréable : Des fleurs qui s’ouvrent sous les- baisers du soleil. Roses épanouies sous les baisers du zéphyr. Elle végétait comme un beau lis dans sa douce extase, le sein ouvert aux brises de la nuit, aux baisers du jour. (G. Sand.) Au réveil de la nature, les facultés de la jeune fille achevèrent de s’épanouir, comme la corolle d’une fleur sous les tièdes baisers du soleil. (J. Sandeau.) Jamais nymphe plus ravissante

Ne reçut les kaisers de l’onde caressante.

Delille.

Objet des baisers du zéphyr, Hâte-toi de t’epanouir.

De Boufplers.

Tout ravit et palpite au baiser du soleil. C’est de lui qu’ici-bas toute splendeur émane. DE Banville,

....... La mer vient déposer

Sur les (lots du rivage un lumineux baiser. Et s’endort mollement sur cette blonde arène. Al. Soumet.

Baiser de paix, Baiser qu’on donne ou qu’on reçoit en signe do réconciliation, do bonne intelligence : Il n’a domit ? à JésusChrist te baiser de paix que pour le trahir. (Mass.) Il se prit à pleurer, et rendit au tzar son baiser de paix. (Mérimée.) il Dans la primitive Église, le baiser de paix était celui que les chrétiens so donnaient en signe d’union et de charité mutuelle (particulièrement au moment de communier, n Baiser de réconciliation, Celui qui se donnait entre ennemis qu’on avait réconciliés. C’est notre baiser de paix actuel. Il Baiser de la foi, Celui que les chrétiens so donnaient entre eux, principalement quand ils exerçaient l’hospitalité les uns envers les autres, il Baiser de Judas, Baiser perfide, baiser do traître Allusion au baiser que Judas donna à Jésus pour le désigner à ses ennemis, n Cette expression s’applique également à de fausses politesses, it des protestations perfides : Cette division est aussi agréable que ’celle du grand couvert est fastidieuse, par te ton guindé et alambiqué, le style d’adulation, et les phrases parasites, les politesses dites baisers de Judas. (Fourier.)

— Mystic. Baiser du Seigneur, Amour de Dieu pour la créature, état de grâce des fidèles : J’ai vu sa main défaillante chercher encore en tombant de nouvelles forces pour appliquer sur ses lèvres le bienheureux signe de notre rédemption : N’est-ce pas mourir entre les bras et dans le baiser du Seioneur. (Boss.)

Baiser féodal, Baiser donné par lo seigneur au vassal, lorsque celui-ci venait lui rendre hommage, un genou à terre et tête nue. Toutefois il ne le baisait à la bouche que si ce vassal était gentilhomme. Une dame ayant refusé de se soumettre à la coutume, il fut ordonné, après procès, que les dames rendraient hommage sans recevoir du seigneur lo baiser à la bouche. Le baiser féodal était lo symbole de l’engagement réciproque que prenaient le soigneur et lo vassal de se secourir l’un l’autre, sous peine pour le refusant do perdre son fief. Le roi, dans les hommages qu’on lui rendait, n’accordait la faveur du oaiser qu’à la noblesse du sang, jamais à celle du fief, n Droit de baiser de paix. V. droit.

— Ane. coût. Gage que les parties contractantes se donnaient de la bonne foi avec laquelle leur engagement serait rempli,

— Phys. Baiser électrique, Petite expérience do société, qui consiste à faire monter une demoiselle, par exemple, sur le gâteau de résine ou le tabouret à pieds do verre, et à la mettre en communication avec le conducteur d’une machine. Chacun est admis à venir l’embrasser à tour de rôle ; mais tous n’arrivent pas a goûter cette faveur et plusieurs sont punis de leur témérité par l’étincelle piquante qui jaillit de leurs lèvres, et les force à rétrograder. Ceux dont la jeune personno veut bien accepter le baiser y parviennent avec facilité, si, préalablement, elle a soin de les toucher par un point quelconque de leurs vêtements ; ce contact permet au fluide êlectriquo de s’écouler, et la personne isolée peut être embrassée sans que Von ressente de commotion.

— Jeux. Nom donné à diverses pénitences usitées dans les jeux dits de salon : Baiser à la pincette, Jeu d’attrape dans lequel on convient qu’un des joueurs embrassera tous les autres en lui prenant les joues avec le pouce et l’index : il a toujours pour objet de faire rire la société aux dépens d’un de ses membres. L’attrape consiste à se noircir secrètement les doigts, quand, après avoir ainsi embrassé à la ronde, on arrive à la victime désignée. Il Baiser à la capucine. Celui à qui cette pénitence est imposée choisit une personne d’un autre sexe que le sien, puis le couple s’agenouille dos a dos et cherche à s’embrasser en penchant la tête en arrière, la tète du jeune homme se renversant sur l’épaule gauche de la demoiselle, et celle de la demoiselle sur l’épaule droite du jeune homme. Il Baiser à la religieuse. On place au milieu du salon une chaise dont le dossier

BAI

figure la grille du couvent. Une dame s’assied sur cette chaiso ot applique sa joue aux barreaux, tandis que le jeune homme, condamné à la pénitence, se met à genoux de l’autre côté et tâche de l’embrasser. Si, au lieu d’un pénitent c’est d’une pénitente qu’il s’agit, un jeune nomme so met sur la chaise, et la dame s’agenouille, il Baiser dn hasard. Quand cette pénitence est imposée à un homme, on distribue à quatre dames les quatre dames d’un jeu do cartes ; puis on fait tirer au pénitent un des quatre rois du feu, et il embrasse la dame dont il a le roi correspondant. Pour une pénitente, on procède de la môme manière, mais en distribuant les rois à des jeunes gens et lui faisant tirer une dame, n Baiser trompeur. Uno dame s’approche d’un jeune homme, commo pour lui laisser prendre un baiser, et, au moment où celui-ci s’avance pour l’embrasser, elle s’éloigne rapidement et va accorder cette faveur à un de ses voisins.

— Epithètes. Doux, tendre, affectueux, caressant, amoureux, savoureux, voluptueux, délicieux, revissant, enchanteur, plein do charme, plein d’appas, plein de volupté, avide, enivrant, ardent, brûlant, de feu, embrasé, chaud, humide, lascif, impudique, chaste, timide, tremblant, mal assuré, furtif, dérobé, clandestin^ ravi, rapide, vif, long, réitéré, redoublé, froid, glacé, contraint, perfide, traître, gros, grossier, lourd, dégoûtant, fétide.

— Encycl. Voltaire, en parlant du baiser, dit que l’homine et certains oiseaux sont les seuls animaux qui connaissent ce moyen do témoigner leurs sentiments les plus tendres. C’est en effet !a plus grande marque d’affection qu’un être sensible puisse donner à son semblable, et l’on sait que beaucoup d’oiseaux, la colombe surtout, nous offrent le modèle de l’amour conjugal le plus parfait. Chez les anciens, dont les mœurs étaient beaucoup plus simples que les nôtres, et qui no connaissaient pas les délicatesses d’une pudeur souvent affectée, lo baiser fut longtemps la manière la plus ordinaire de saluer, c’est-à-dire de témoigner extérieurement un sentiment d’estime ou de respect ; car pour eux il n’y- avait point d’estime ni de respect possibles sans amour. Le baiser faisait partie essentielle du culte rendu aux divinités, et le mot adorer lui-même ne signifiait pas autre chose que baiser, ad os portare. Le livre de Job nous apprend que les hommes qui adoraient le soleil et la lune étendaient leurs mains vers ces astres et les portaient ensuite a leur bouche (Si vidi solem aut hmam et osculatus sum manum meam ore meo). On baisait aussi les statues des idoles (l Rois, xix, 8 ; Cicéron, Verr.). Pour donner une marque d’amitié aux hôtes que l’on recevait ou qui s’éloignaient, on leur donnait un baiser (Tobie, ix, 8, et x, 13, ; ïtuth., 1, H) ; et l’on baisait alors soit la bouche, soit la barbe, les cheveux ou les yeux (Genèse, xxrx, 13 ; Samuel, xx, 9), Dès la plus haute antiquité, c’était aussi de la même manière que le vassal rendait à son suzerain l’hommage de fidélité qu’il lui devait (Cyropédie, 7, 5, 32 ; Psaumes, 2, 12). Dans l’Orient moderne, le éaiser d’hommage se donne sur la main ou sur les genoux (Niebuhr, Voyages, 1, 4H). On baisait aussi les pieds des grands, et les rois perses n’accordaient pas cette faveur a tout le monde ; aujourd’hui encore, dans le même pays, on baise le par de la robe d’une personne à qui l’on veut témoigner un profond respect. En France, en Allemagne, en Angleterre, il n’y eut longtemps d’autre manière de saluer les dames que de les baiser sur la bouche ; Montaigne, a ce sujet, fait la remarque suivante : « C’est une déplaisante coutume, et injurieuse aux dames, d’avoir h prêter leurs lèvres a. quiconque a trois valets h sa suite, pour mal plaisant qu’il soit. » Les cardinaux conservèrent longtemps le droit de baiser les reines sur la bouche ; les reines d’Espagne elles-mêmes se soumettaient à cet usage, mais il paraît qu’il n’eut jamais cours en France.

L’Église catholique, chez laquelle les vieilles coutumes se conservent bien plus longtemps que dans la société laïque, donne encore aujourd’hui une large place au baiser dans ses cérémonies. Dès les premiers temps du christianisme, saint Paul écrivait aux fidèles de se saluer par de saints baisers (Salutate ii}vicem osculo sancto), et les rites modernes distinguent encore le baiser de l’autel, le baiser de paix, le baiser de l’anneau, de la main ou dos

flieds. Le baiser de l’autel se pratique dans a célébration de la messe ; l’autel est baisé dix fois pour une grand’messe, et neuf fois seulement pour une messe basse. Le baiser de paix est celui que les fidèles se donnaient autrefois avant la communion ; mais le pape Innocent III l’abolit à cause des abus auxquels la corruption des mœurs avait donné lieu. Aujourd’hui, le prêtre se borne à baiser une petite plaque d’argent ou d’autre métal, appelée patœ ; puis il la remet tmn de ceux qui le servent à l’autel, et celui-ci la fait baiser à tous les prêtres et aux clercs qui se trouvent dans le chœur. Lorsque le pape donne la communion, on baise son anneau avant de la recevoir ; on baise aussi l’anneau des évêques quand ils donnent la confirmation et quand ils officient pontificalement. Les cardinaux baisent la main du pape quand il vient d’être élu, quand il tient chapelle et lorsqu’ils reçoivent de lui les cendres, les palmes ou autres objets. Aux grand’niesses, les fidèles ve-