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Clément Thomas et Lecomte, rue des Rosiers, à Montmartre.

18° Lagrange (Charles-Marie), fusillé le 22 février 1872, pour assassinat des généraux Clément Thomas et Lecomte.

19" Lolive (Joseph), fusillé le 18 septembre 1872, pour assassinat des otages de la Roquette.

20° Préau de Vedel (Gustave), fusillé le 19 mars 1872, pour assassinat de Chaudey à Sainte-Pélagie.

21° Rossel (Louis-Nathaniel), fusillé le 28 novembre 1871.

22" Rouillac (Jean-Pierre), fusillé le 6 juillet 1872 ; assassinat de la route d’Italie et de la Butte-aux-Cailles.

23° Serizier (Jean-Baptiste), fusillé le 25 mai 1872 ; assassinat des dominicains d’Arcueil.

24° Verdaguer (Goderic-Joseph), fusillé le 28 février 1872 ; assassinat des généraux Clément Thomas et Lecomte.

Dans le rapport du général Appert sur les Opérations de la justice militaire après la prise de Paris figurent des tableaux statistiques dont voici le résumé :

Les décisions judiciaires s’appliquant aux 39 membres du Comité central se divisent ainsi :

Condamnations contradictoires :

À mort, 3 (commuées en travaux forcés à
perpétuité).
Travaux forcés à perpétuité, 2.
Déportation dans une enceinte fortifiée, 8.
Déportation simple, 3.


Condamnations par contumace :

À mort, 12.
Travaux forcés à perpétuité, 1.
Déportation dans une enceinte fortifiée, 8.
Travaux forcés à temps, 1.


Les décisions judiciaires relatives à l’exécution des otages :

À mort, 16, dont 9 exécutés et 7 commués
en travaux forcés à perpétuité.
Travaux forcés à perpétuité, 8.
Déportation dans une enceinte fortifiée, 8.
Déportation simple, 15.
Diverses peines, 25.


Arrestations opérées à la suite de l’insurrection :

38,000 individus environ, dont 5,000 militaires.
850 femmes.
650 enfants de seize ans et au-dessous.

Insurgés envoyés dans les dépôts des côtes de l’Océan, 28,000 environ.

Classement définitif des insurgés dont les dossiers ont été examinés par la justice militaire :

18,930 détenus mis en liberté par ordonnance de non-lieu.
11,070 définitivement déférés aux conseils de guerre.
Nombre de repris de justice, 7,400.

L’Assemblée nationale finit cependant par comprendre qu’une mesure de clémence apparente devait atténuer l’impression produite en France par de si nombreuses condamnations. Le 16 juin 1871, sur la proposition de M. Haentjens et de plusieurs de ses collègues, elle avait décidé qu’une commission de 30 membres serait nommée à l’effet de rechercher les causes de l’insurrection de Paris. Dans une des séances qui suivirent, M. Dufaure, garde des sceaux, proposa ce projet de loi, relatif à l’exercice du droit de grâce :

« Article 1er. En matière politique et de presse et pour les condamnations de toute nature, et en matière de crimes ou délits ordinaires pour les condamnations supérieures à un an d’emprisonnement, le droit de grâce confié au chef du pouvoir exécutif ne sera exercé par lui qu’après avoir pris l’avis d’une commission spéciale, nommée par l’Assemblée nationale.

« Art. 2. Sont exceptées les grâces collectives proposées par le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la proposition des ministres de la guerre, de la marine, des finances ou des travaux publics, dans le cas où ne s’applique pas le droit de transaction conféré par les lois de 1815, du 18 juin 1856 et du 7 septembre 1870.

« Art. 3. Les amnisties ne peuvent être conférées que par une loi. »

Comme on le voit, M. Thiers se retranchait prudemment derrière une commission ; il ne voulait ni endosser l’odieux d’une telle proscription, ni avoir à lutter contre une Assemblée dont il connaissait les fureurs politiques. M. Barbie, chargé du rapport, modifia le texte du projet de manière à préciser nettement les intentions de la majorité :

« ........

« Art. 2. L’Assemblée nationale délègue le pouvoir de faire grâce au président du conseil des ministres, chef du pouvoir exécutif.

« Art. 3. Néanmoins, la grâce ne peut être accordée que par une loi aux ministres et autres fonctionnaires ou dignitaires dont la mise en accusation a été ordonnée par l’Assemblée nationale.

« Art. 4. La grâce ne pourra être accordée aux personnes condamnées pour infractions qualifiées crimes par la loi, à raison des faits se rattachant à la dernière insurrection de Paris, et dans les départements depuis le 15 mars 1871, que s’il y a accord entre le chef du pouvoir exécutif et l’Assemblée nationale, représentée par la commission dont il sera parlé ci-après. En conséquence, tous les recours formés par les condamnés, après avoir été instruits par le ministre de la justice, seront transmis au président de l’Assemblée nationale. Ces recours seront examinés par une commission de 15 membres nommés par l’Assemblée nationale en réunion publique. La grâce ne pourra être accordée par le chef du pouvoir exécutif que conformément à l’avis de cette commission. En cas de dissentiment entre la commission et le chef du pouvoir exécutif, la condamnation sera exécutée. »

Ce fut ce dernier projet qui l’emporta ; l’Assemblée, elle, ne craignait pas d’encourir la responsabilité devant laquelle avait reculé M. Thiers. La commission dite des grâces, et qui se montra si peu disposée à faire usage de son pouvoir que M. Ordinaire, en termes peu parlementaires, la qualifia un jour de « commission d’assassins, » fut élue en séance publique les 21 et 22 juin 1871. Elle fut composée de MM. Martel, président ; Piou, vice-président ; comte de Bastard, Félix Voisin, secrétaires ; Barbie, comte de Maillé, comte Duchâtel, Peltereau-Villeneuve, Sacase, Tailhaud, marquis de Quinsonas, Bigot, Merveilleux du Vignaux, Paris, Corne. Elle se réunit pour la première fois le 30 juin ; sa dernière réunion, avant la prorogation de l’Assemblée nationale, eut lieu le 20 décembre 1875 ; elle avait tenu alors 246 séances. À cette même date du 20 décembre, MM. Martel et Félix Voisin présentèrent à l’Assemblée un rapport détaillant les travaux de la commission ; nous en détachons les passages suivants :

« Le nombre total des affaires soumises à notre examen mérite, messieurs, d’appeler maintenant votre attention. Il importe de classer immédiatement ces affaires d'après la nature des condamnations prononcées ; nous voyons ainsi qu’elles se décomposent da la manière suivante :

Condamnations à mort.... 110
Condamnations à la déportation dans une enceinte fortifiée . . . 739
Condamnations à la déportation simple . . . 2,137
Condamnations à la détention. . . 1,221
Condamnations au bannissement . . . 65
Condamnations aux travaux forcés à perpétuité . . . 82
Condamnations aux travaux forcés à temps . . .134
Condamnations à la réclusion . . . 56
Condamnations à l’emprisonnement. . . 1,891
Condamnations à l’emprisonnement dans une maison de correction . . . 5
Condamnations à la surveillance de la haute police. . . 11
                Total . . . 6,501

affaires soumises à l’examen de la commission des grâces.

« Ce nombre considérable, intéressant à connaître pour lui-même, doit être rapproché du nombre total des condamnations contradictoires de même nature prononcées, soit par les conseils de guerre, soit par les cours d’assises, à Paris et dans les départements. C’est, en effet, le rapprochement de ces deux nombres qui vous permettra de voir combien il y a eu, en matière criminelle, de condamnations contradictoires prononcées, et combien il y a eu de condamnés de l’insurrection de 1871 ayant formé des recours en grâce.

« Les conseils de guerre et les cours d’assises, statuant en matière criminelle, ont prononcé, du 15 mars 1871 au 30 novembre 1875, un nombre total de 9,596 condamnations contradictoires ; nous décomposerons encore ce nombre d’après la nature de la peine prononcée, comme nous l’avons fait tout à l’heure pour les affaires soumises à l’examen même de la commission ; nous trouvons ainsi qu’il y a eu :

Condamnations à mort . . . . 110
Condamnations à la déportation dans une enceinte fortifiée . . . . 1,197
Condamnations à la déportation simple . . . . 3,446
Condamnations à la détention. . . . 1,321
Condamnations au bannissement. . . . 333
Condamnations aux travaux forcés à perpétuité . . . . 94
Condamnations aux travaux forcés à temps. . . . 179
Condamnations à la réclusion . . . . 70
Condamnations à l’emprisonnement . . . . 2,070
Condamnations à l’emprisonnement dans une maison de correction . . . . 59
Condamnations à la surveillance de la haute police . . . . 117
            Total. . . . 9,596

condamnations contradictoires prononcées en matière criminelle.

« Ainsi, messieurs, nous savons, d’une part, que 9,596 condamnations contradictoires ont été prononcées contre ces individus compromis dans l’insurrection, à raison d’infractions qualifiées crimes, et, d’autre part, que 6,501 de ces individus ont formé des recours en grâce ; c’est donc, dans cette catégorie de condamnés, une proportion de 66 pour 100 qui a fait appel à la clémence de la commission et du président de la République...

« RENSEIGNEMENTS STATISTIQUES SUR LES CONDAMNÉS AYANT FORMÉ DES RECOURS EN GRÂCE.

« Le nombre des individus compromis dans les 6,501 affaires soumises à l’examen de la commission se décompose :

« D’après le sexe, en :

Hommes, 6,403
Femmes 98
   Total 6,501

« D’après le lieu d’origine, en :

Originaires du département de la Seine. 1,709
Originaires des départements. 4,598
Originaires des pays étrangers 194
                Total 6,501

« D’après la situation de famille, en :

Célibataires 3,278
Mariés sans enfants 827
Veufs sans enfants 124
Mariés avec enfants 2,057
Veufs avec enfants 215
               Total 6,501

« D’après la profession, en :

Occupés aux travaux des champs 615
Occupés à des travaux industriels 4,011
Concierges ou domestiques.. 411
Négociants, marchands, logeurs, employés divers... 906
Exerçant une profession libérale 125
Militaires ou marins 329
Sans profession 104
             Total 6,501

« Votre commission a constaté que, sur la totalité de ces individus, il y en avait 1,514 qui avaient antérieurement subi des condamnations judiciaires ; mais il convient de remarquer que ce nombre est sans doute au-dessous de la réalité, car le casier judiciaire du tribunal de la Seine ayant été détruit dans les incendies du Palais de justice et de l’Hôtel de ville, les recherches sur les antécédents judiciaires sont souvent devenues très-difficiles.

« 595 condamnés ont été signalés, dans le rapport de M. le garde des sceaux, comme vivant en concubinage ; un grand nombre d’entre eux ont été également signalés comme des souteneurs de filles. »

Dans la suite, de nouveaux dossiers furent soumis à l’examen de la commission ; le tableau suivant, extrait d’une annexe présentée par les mêmes rapporteurs, donne les résultats définitifs des travaux de cette commission :

« Les dossiers de 210 condamnés ont été examinés pour la troisième fois.

« 127 condamnés ont été l’objet de décisions favorables ; 34 n’avaient encore obtenu aucune commutation ou remise de peine.

« En quatrième examen, 4 condamnés sur 7 ont été l’objet de décisions favorables ; un seul n’avait encore obtenu aucune commutation ou remise de peine.

« État définitif comprenant l’ensemble des travaux de la commission.

« 1° Nombre total des condamnés qui ont fait appel à la clémence de la commission et du président de la République, 6,536.

« 2° Nombre total des condamnés qui ont obtenu des commutations, remises partielles ou totales de leur peine, 2,649.

« 3° Nombre total des avis émis par la commission :

En premier examen 6,536
En deuxième examen 1,426
En troisième examen..... 210
En quatrième examen..... 7
          Nombre total.... 8,179

« 4° Nombre total des avis de la commission concluant au rejet des recours en grâce 5,039

« 5° Nombre total des avis de la commission concluant à des commutations, remises partielles ou totales de peine 3,140

       Total général.... 8,179

avis émis par la commission des grâces du 28 août 1871 au 8 mars 1876, époque de la cessation définitive de ses travaux. »

Nous ne traiterons pas ici la question de l’amnistie, qui devait inévitablement échouer dans les termes où elle s’est produite au Sénat ; elle renaîtra, d’ailleurs, et ce sera le vrai moment d’en faire l’historique, quand elle aura reçu une solution définitive.

Quelques lecteurs nous auront peut-être trouvé sévère pour les hommes de la Commune ; nous répondrons par le jugement écrasant porté contre par deux hommes dont on ne niera pas la compétence et les sentiments républicains, Mazzini et le malheureux Rossel.

« Cette insurrection, a écrit Mazzini, qui a soudainement éclaté, sans plan préconçu, mêlée à un élément socialiste purement négatif, abandonnée même par tous les républicains français de quelque renommée et défendue avec passion et sans un esprit fraternel de concession par des hommes qui auraient dû, mais qui n’ont pas osé se battre contre l’étranger, devait inévitablement aboutir à une explosion de matérialisme et finir par accepter un principe d’action qui, s’il avait jamais force de loi, rejetterait la France dans les ténèbres du moyen âge et lui enlèverait pour des siècles à venir tout espoir de résurrection. Ce principe est la souveraineté de l’individu, qui ne peut amener qu’une indulgence personnelle illimitée, que la destruction de toute autorité et que la négation absolue de l’existence nationale. »

Voici le jugement porté par Rossel : « Aucun des serviteurs de la Commune n’avait étudié son rôle pour la grande scène. Pas d’étude, pas d’acquis, pas de caractère, pas d’audace durable. Cette plèbe ouvrière aspire à posséder le monde, et elle ne sait rien du monde. Lorsqu’un malfaiteur veut forcer une maison, il en fait d’abord le tour ; il étudie les portes, la serrure ; il sait où sont les meubles et comment les forcer. La Commune a été le malfaiteur novice, qui est réduit à tuer pour voler, et qui se trouve ensuite embarrassé de crimes inutiles, ne sachant où sont les caches et les secrets. La comparaison me plaît, et je m’y tiens. Paris a été, entre les mains de ces sauvages, comme un coffre-fort à secret. La maison était forcée, le peuple faisait la courte-échelle sous les fenêtres, et la Commune, se grattant le front devant le coffre-fort plantureux qui contenait la richesse sociale, était obligée de se contenter du billon. Seulement, elle a mis, en partant, le feu à la maison, par acquit de conscience. (Papiers posthumes.) »

Ces jugements, comme on le voit, dépassent en sévérité celui que nous avons porté nous-même. D’ailleurs, il ne faut pas oublier que tous ceux qui prirent part aux tristes événements de cette époque néfaste ne furent pas également coupables ; plusieurs d’entre eux croyaient sincèrement travailler dans l’intérêt du peuple, et ils furent entraînés par les circonstances.

Nous n’ajouterons qu’un mot en terminant ce douloureux récit. On pouvait s’attendre à des élections réactionnaires après ces sombres événements ; on pouvait craindre que la Commune n’eût tué la République ; il n’en fut rien. C’est que le robuste bon sens français n’avait jamais confondu l’idée communaliste avec l’idée républicaine.

Commune (la), journal fondé par les principaux rédacteurs du Combat et du Vengeur. Il dura du 20 mars au 19 mai 1871 et n’eut que 60 numéros, Delimal en était le rédacteur en chef ; les autres rédacteurs étaient : Georges Duchêne, Henri Brissac, Émile Clerc, J. Capdevielle, Camille Clodong, Henri Muret, A. Rogeard, liadrian, Segoiliet, Ch. Lullier, G. Daubes et Millière. Il s’imprimait rue Coq-Héron et avait ses bureaux rue Tiquetonne.

Il se montra d’abord défenseur ardent des principes de la Commune, et, dans son premier numéro, il avait dit : « La Commune, c’est l’ordre, c’est l’économie dans les dépenses, c’est la réduction des impôts, c’est la porte ouverte à toutes les réformes sociales qui s’imposent d’elles-mêmes et que les institutions monarchiques sont impuissantes à réaliser ; c’est, en un mot, l’ère des révolutions violentes fermée et la guerre civile rendue impossible. » Mais bientôt il trouva que la Commune ne montrait pas assez d’énergie : « Si, dit-il dans son n° 44, elle voulait prendre à tâche de se rendre impopulaire, elle n’agirait pas autrement. » Le n" 60, qui fut le dernier, contenait une attaque beaucoup plus violente, dont nous citerons seulement quelques lignes : « Il n’y a ici d’autres trahisons que l’ineptie, l’imbécillité des polissons et des drôles qui ont mis la main sur les services publics, dont ils ne connaissaient pas la premier mot. Entre leurs mains, sûreté générale est devenue guet-apens, et salut public doit s’appeler abandon ou négligence des plus élémentaires garanties. » Dès le lendemain, le journal fut supprimé par décret, et les rédacteurs apprirent ainsi, à leurs dépens, que les polissons et les drôles de la Commune ne reculaient pas devant une atteinte portée à la liberté de la presse, quand il s’agissait de leur défense personnelle.

Commune (bulletin des), placard officiel hebdomadaire, publié à Paris par les soins du ministère de l’intérieur et envoyé à chacune des communes de France pour être affiché à la porte de.la mairie. Le Bulletin des communes, résumé du Journal officiel, contient, indépendamment des décrets et des arrêtés ministériels, des articles conçus et écrits selon l’esprit du gouvernement. Le Bulletin des communes, qui a remplacé le Moniteur des communes, a été d’abord imprimé a l’Imprimerie nationale. Depuis, il a été donné à l’imprimerie Dalloz, dans des circonstances qui méritent d’autant plus d’être rapportées qu’elles font connaître et apprécier les moyens auxquels a recours le gouvernement dit de l’ordre moral.

L’imprimerie nationale, dont, faute d’une meilleure combinaison, on a fait une annexe du ministère de la justice, est un établissement de l’État, une propriété nationale qui, bon an mal an, produit pour 6 millions d’imprimés divers. Si l’Imprimerie nationale fait des bénéfices, le Trésor public les encaisse ; si elle fait des pertes, le Trésor y fait face. Qui touche aux intérêts de cet établissement