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raient dans la lutte contre le gouvernement de Versailles. Enfin un troisième décret était ainsi conçu :

« La Commune de Paris,

« Considérant que le premier des principes de la République française est la liberté ;

« Considérant que la liberté de conscience est la première des libertés ;

« Considérant que le budget des cultes est contraire au principe, puisqu’il impose les citoyens contre leur propre foi ;

« Considérant, en fait, que le clergé a été complice de la monarchie contre la liberté,

« Décrète :

« Art. 1er. L’Église est séparée de l’État.

« Art. 2. Le budget des cultes est supprimé.

« Art. 3. Les biens dits de mainmorte, appartenant aux congrégations religieuses, meubles et immeubles, sont déclarés propriétés nationales.

« Art. 4. Une enquête sera faite immédiatement sur ces biens, pour en constater la nature et les mettre à la disposition de 1» nation. »

Le même numéro du Journal officiel où avaient paru les décrets précédents renfermait le décret suivant, que nous citons en entier, car c’est le programme même de la Commune, curieux et significatif, bien qu’on ne pût en comprendre alors toute la portée. Au milieu d’exagérations amenées par un système préconçu, il exprime d’ailleurs des idées qui devaient faire une grande impression sur l’esprit parisien, car elles répondaient à des appréhensions trop réelles. Voici cette pièce, qui parut dans la partie non officielle et sans signature :

« L’heure n’est plus aux déclarations de principes. Depuis hier, la lutte est engagée.

« Cette fois encore, la guerre civile a été déchaînée par ceux qui, pendant deux semaines, ont donné un accent sinistre, une portée sanglante à ces grands mots : l’ordre, la loi.

« Eh bien ! même à cette heure terrible, la révolution du 18 mars, sûre de son idée et de sa force, n’abandonnera pas son programme. Si loin que puissent l’entraîner les nécessités de la guerre, si nouvelle que soit la situation où elle se trouve placée, la Commune n’oubliera pas qu’elle n’a pas été élue pour gouverner la France, mais bien pour l’affranchir, en faisant appel à son initiative, en lui donnant son exemple.

« Mais, si la Commune de Paris entend respecter le droit de la France, elle n’entend pas ménager plus longtemps ceux qui, ne représentant même plus le despotisme des majorités, ayant épuisé leur mandat, viennent aujourd’hui attenter à son existence.

« Des esprits impartiaux et neutres l’ont reconnu, Paris était hier, il est aujourd’hui surtout à l’état de belligérant. Tant que la guerre n’aura pas cessé par la défaite ou la soumission d’une des deux parties en présence, il n’y aura pas à délimiter les droits respectifs. Tout ce que Paris fera contre l’oppresseur sera légitimé par ce fait qui constitue un droit, à savoir : défendre son existence.

« Et qui donc a provoqué ? Qui donc, depuis deux semaines, a le plus souvent prononcé des paroles de violence et de haine ? N’est-ce pas ce pouvoir tout gonflé d’orgueil et de raison d’État qui, voulant d’abord nous désarmer pour nous asservir et s’insurgeant contre nos droits primordiaux, même après sa défaite, nous traitait encore d’insurgés ? D’où sont venues, au contraire, les pensées de pacification, d’attributions définies, de contrat débattu, sinon de Paris vainqueur ?

« Aujourd’hui, l’ennemi de la cité, de ses volontés manifestées par 200,000 suffrages, de ses droits reconnus même des dissidents, lui envoie, non des propositions de paix, pas même un ultimatum, mais l’argument de ses canons ; même dans le combat, il nous traite encore en insurgés pour lesquels il n’y a pas de droit des gens ; ses gendarmes lèvent la crosse en l’air en signe d’alliance, et, lorsque nous avançons pour fraterniser, ils nous fusillent à bout portant ; ses obus éclatent au milieu de nous et tuent nos jeunes filles !

« Voilà donc enfin cette répression annoncée, promise à la réaction royaliste, préparée dans l’ombre comme un forfait par ceux-là mêmes qui, pendant de si longs mois, bernèrent notre patriotisme sans user notre courage !

« À cette provocation, à cette sauvagerie, la Commune a répondu par un acte de froide justice. Ne pouvant encore atteindre les vrais coupables dans leurs personnes, elle les frappe dans leurs biens. Cette mesure de stricte justice sera ratifiée par la conscience de la cité, cette fois unanime.

« Mais si les plus coupables, les plus responsables sont ceux qui dirigent, il y a des coupables aussi, des responsables parmi ceux qui exécutent. Il y a surtout ce parti du passé qui, pendant la guerre, mettait sa valeur au service de ses privilèges et de ses traditions, bien plus qu’au service de la France ; qui, en combattant, ne pouvait défendre notre patrie, puisque, depuis 89, notre patrie, ce n’est pas seulement la vieille terre natale, mais aussi les conquêtes politiques, civiles et morales de la Révolution.

« Ces hommes, loyaux peut-être, mais fanatiques à coup sûr, se sont réunis sans honte aux bandes policières. Ils sont atteints dans leur parti d’après cette loi fatale de solidarité à laquelle nul n’échappe. La mesure qui les frappe n’est d’ailleurs que le retour aux principes mêmes de la Révolution française, en dehors de laquelle ils se sont toujours placés. C’est une rupture que devait amener tôt ou tard la logique de l’idée.

« Leur alliance avec le pouvoir bâtard qui nous combat n’est, en effet, au point de vue de leur croyance et de leurs intérêts, que le devoir et la nécessité même. Rebelles à une conception de la justice qui dépasse leur foi, c’est à la Révolution, à ses principes, à ses conséquences qu’ils font la guerre. Ils veulent écraser Paris, parce qu’ils pensent du même coup écraser la pensée, la science libres ; parce qu’ils espèrent substituer au travail joyeux et consenti la dure corvée subie par l’ouvrier résigné, par l’industriel docile, pour entretenir dans sa fainéantise et dans sa gloire leur petit monde de supérieurs.

« Ces ennemis de la Commune veulent nous arracher non-seulement ta République, mais aussi nos droits d’hommes et de citoyens. Si leur cause antihumaine venait à triompher, ce ne serait pas seulement la défaite du 18 mars, mais aussi du 24 février, du 29 juillet, du 10 août.

« Donc, il faut que Paris triomphe ; jamais il n’a mieux représenté qu’aujourd’hui les idées, les intérêts, les droits pour lesquels ses pères ont lutté et qu’ils avaient conquis.

« C’est ce sentiment de l’importance de son droit, de la grandeur de son devoir qui rendra Paris plus que jamais unanime. Qui donc oserait, devant ses concitoyens tués ou blessés, à deux pas de ces jeunes filles mitraillées, qui donc oserait, dans la cité libre, parler le langage d’un esclave ? Dans la cité guerrière, qui donc oserait agir en espion ?

« Non, toute dissidence aujourd’hui s’effacera, parce que tous se sentent solidaires, parce que jamais il n’y a eu moins de haine, moins d’antagonisme social, parce que, enfin, de notre union dépend notre victoire. »

Il faut bien le reconnaître, l’Assemblée qui siégea à Versailles montrait déjà et a montré depuis des tendances qui devaient justifier plus d’un passage de ce programme.

Nous ne dirons rien ici des journaux créés alors pour la défense de la Commune, le Vengeur, le Cri du peuple, le Père Duchêne, etc., chacun d’eux étant l’objet d’une notice particulière soit au Grand Dictionnaire, soit dans ce Supplément.

À plusieurs reprises, la Commune fit appel aux citoyens pour les inviter à acquitter le montant de leurs impôts, et aux fonctionnaires pour qu’ils reprissent leurs postes. Mais bien peu, soit parmi les contribuables, soit parmi les fonctionnaires, se rendirent à cette invitation. Ceux qui consentirent à rester en fonction étaient, pour la plupart, chargés de la conservation des grands dépôts littéraires, scientifiques et artistiques, dont ils préservèrent les richesses, quelquefois au péril de leur vie. Du reste, ils n’avaient point fait acte d’adhésion à la Commune.

« La lutte militaire allait suivre son cours avec une lenteur méthodique du côté de Versailles, qui n’avançait qu’à coup sûr, de manière à ne rien perdre du terrain conquis et à refouler peu à peu dans l’enceinte les troupes de la Commune. Après l’insuccès qu’avaient subi ces dernières le 2 avril, on pouvait croire qu’elles ne renouvelleraient pas de sitôt leur tentative. Dès le lendemain, cependant, 3 avril, les reconnaissances opérées par des détachements de l’armée signalaient, dès le point du jour, la mise en marche de nombreuses colonnes de fédérés, et les dépêches télégraphiques du Mont-Valérien corroborèrent bientôt ces renseignements. Des forces considérables s’avançaient, en effet, sous les ordres de Gustave Flourens, comprenant environ 30,000 hommes. Cette armée, dont l’attitude paraissait assez résolue, passa à petite portée des canons du Mont-Valérien, dont elle ne sembla pas se préoccuper, croyant sans doute, avec une incroyable imprudence, à la complicité ou tout au moins à la neutralité de la garnison. Un peu plus tard, une autre colonne, commandée par le général Duval, se portait également sur Versailles par Meudon et Petit-Bicêtre. Nous empruntons au Journal officiel de Versailles le récit des événements de cette journée :

« Ce matin, dès la première heure, une forte colonne d’insurgés s’était portée par Courbevoie et Nanterre sur Rueil et s’y était établie avec quelques pièces d’artillerie. Après avoir occupé la caserne, leur premier soin fut de construire des barricades. Un certain nombre s’avancèrent jusqu’à Bougival, se répandirent jusqu’à la Seine et jusqu'à Chatou.

« Mais le feu du Mont-Valérien les chassa de la plaine ; l’annonce des mouvements des troupes, qui se tenaient prêtes depuis le matin dans leurs positions au-dessus de Rueil et du Bougival, acheva de jeter l’incertitude et le trouble dans leurs rangs, et chefs et soldats commencèrent à se retirer isolément ou par groupes.

« Les troupes, à leur approche, ont été cependant accueillies par la fusillade ; mais leur élan a jeté le désordre parmi les insurgés, qui se sont dispersés en grande hâte.

« À cinq heures, Rueil, Nanterre et Courbevoie étaient délivrés, les barricades étaient détruites, et des insurgés, saisis sous différents costumes, étaient ramenés prisonniers.

« Les troupes, artillerie et gendarmerie, cuirassiers, bataillons de ligne et infanterie de marine, regagnaient leurs positions et leurs quartiers, accueillies partout, sur leur route, par des marques de chaleureuse sympathie. Leur attitude énergique et calme montrait assez le sentiment qu’elles ont du devoir pénible, mais impérieux, qu’elles remplissent.

« Un des chefs de l’insurrection, M. Flourens, a été tué, et son corps ramené dans la soirée.

« Dès le matin aussi, de nombreux bataillons d’insurgés avaient occupé les hauteurs de Meudon, la grande avenue qui, du château, descend à Bellevue, et un certain nombre de maisons du village.

« L’action s’est engagée vers six heures du matin.

« Le régiment de gendarmerie à pied cantonné à Sèvres et quelques gardiens de la paix ont combattu pendant quatre heures avec une intrépidité admirable. Un millier d’hommes a tenu tête à des masses infiniment supérieures. Le colonel Grénelin s’est élancé à la tête du régiment, et les insurgés ont été délogés du village par une charge à la baïonnette.

« Un instant après, trois pièces d’artillerie placées sur la plate-forme du château de Meudon achevaient de jeter le désordre parmi les troupes de la rébellion, qui fuyaient en pleine déroute.

« Dans la soirée, M. le chef du pouvoir exécutif pouvait annoncer à l’Assemblée nationale que, grâce à l’élan et à la fermeté de nos soldats, les insurgés, repoussés sur les autres points, ne tenaient plus que la position de Châtillon, dont quelques coups de canon suffiront sans doute à les déloger demain. »

Nous ne répéterons pas ici le récit de la mort de Flourens, qui se trouve déjà au Grand Dictionnaire. V. Flourens.

Dans un conseil tenu entre les chefs de l’armée régulière, le soir même du 3 avril, il fut résolu que, le lendemain, l’armée s’emparerait du plateau de Châtillon et occuperait fortement la presqu’île de Gennevilliers. L’opération dirigée sur Châtillon commença au point du jour et réussit complètement. Les fédérés, qui n’avaient point pris la vulgaire précaution de se garder sur leurs vflancs, se virent tout à coup cernés sans pouvoir opposer de résistance. 1,500 gardes nationaux se rendirent sans condition, avec leurs fusils et leurs canons, ceux-ci au nombre de neuf. Là fut également tué un autre chef des fédérés, le général Duval.

La sécurité de Versailles se trouvait dès lors assurée contre toute attaque en rase campagne pouvant se produire de ce côté. Mais les chefs de l’armée, dont les troupes avaient été assez maltraitées par les forts de Vanves et d’Issy pendant l’action, purent se convaincre que la Commune disposait d’une redoutable artillerie, et qu’ils n’entreraient pas dans Paris aussi facilement qu’ils se l’étaient peut-être imaginé d’abord.

Le 4 avril, Cluseret fut nommé délégué à la guerre par la Commune, qui faisait en même temps afficher une nouvelle Proclamation au peuple de Paris, dans laquelle on lisait : « Les Vendéens de Charette, les agents de Pietri fusillent les prisonniers, égorgent les blessés, tirent sur les ambulances. » On a cité aussi une proclamation du général de Galliffet annonçant l’exécution sommaire de paysans qui avaient tiré sur des soldats. Nous sommes pleinement convaincus que, dans la chaleur de cette épouvantable lutte, des actes regrettables ont été commis par les soldats de l’année régulière ; c’est dans la fatalité de ces terribles événements ; mais dans quelle mesure la vérité historique doit-elle réduire les exagérations évidentes de la Commune ? C’est ce qu’il est impossible de préciser, avant, du moins, que tous les documents particuliers qui existent sur cette trop mémorable époque aient été livrés à la publicité et soumis au contrôle le plus impartial et le plus sévère. Quant aux Vendéens de Charette, aux zouaves pontificaux, aux chouans, aux Bretons rappelés à chaque instant dans les proclamations de la Commune, ils n’ont jamais fait partie de l’armée de Versailles. Il est vrai qu’avant le rapatriement de nos prisonniers d’Allemagne, Cathelineau, à Compiègne, et Charette, à Nantes, avaient reçu l’ordre de reconstituer leurs légions ; mais la rapide réorganisation de l’armée française rendit leur présence inutile devant Paris.

Un des derniers actes du général Cluseret fut de réorganiser les compagnies de marche. La pièce que l'Officiel du 4 avril publia à cette occasion se terminait par cette disposition : « Font partie des bataillons de guerre tous les citoyens de dix-sept à trente-cinq ans non mariés, les gardes mobiles licenciés, les volontaires de l’armée ou civils. » Deux jours après, le délégué Cluseret aggravait encore cette mesure exorbitante par l’arrêté suivant :

« Considérant les patriotiques réclamations d’un grand nombre de gardes nationaux qui tiennent, quoique mariés, à l’honneur de défendre leur indépendance municipale, même au prix de leur vie, le décret du 5 avril est ainsi modifié :

« De dix-sept à dix-neuf ans, le service dans les compagnies de guerre sera volontaire, et de dix-neuf à quarante obligatoire pour les gardes nationaux, mariés ou non.

« J’engage les bons patriotes à faire eux-mêmes la police de leur arrondissement et à forcer les réfractaires à servir. »

Le 6 avril, nouvelle proclamation de la Commune, répétant les mêmes accusations, destinées à justifier une mesure terrible que le même Officiel annonçait en ces termes :

« La Commune de Paris,

« Considérant que le gouvernement de Versailles foule ouvertement aux pieds les droits de l’humanité comme ceux de la guerre ; qu’il s’est rendu coupable d’horreurs dont ne se sont même pas souillés les envahisseurs du sol français ;

« Considérant que les représentants de la Commune de Paris ont le devoir impérieux de défendre l’honneur et la vie des 2 millions d’habitants qui ont remis entre leurs mains le soin de leurs destinées ; qu’il importe de prendre sur l’heure toutes les mesures nécessitées par la situation ;

« Considérant que des hommes politiques et des magistrats de la cité doivent concilier le salut commun avec le respect des libertés publiques,

« Décrète :

« Art. 1er. Toute personne prévenue de complicité avec le gouvernement de Versailles sera immédiatement décrétée d’accusation et incarcérée.

« Art. 2. Un jury d’accusation sera institué dans les vingt-quatre heures pour connaître des crimes qui lui seront déférés.

« Art. 3. Le jury statuera dans les quarante-huit heures.

« Art. 4 Tous accusés retenus par le verdict du jury d’accusation seront les otages du peuple de Paris.

« Art. 5. Toute exécution d’un prisonnier de guerre ou d’un partisan du gouvernement régulier de la Commune de Paris sera sur-le-champ suivie de l’exécution d’un nombre triple des otages retenus en vertu de l’article 4, et qui seront désignés par le sort.

« Art. 6. Tout prisonnier de guerre sera traduit devant le jury d’accusation, qui décidera s’il sera immédiatement remis en liberté ou retenu comme otage. »

Tel fut ce fameux décret sur les otages, qui devait malheureusement recevoir son exécution.

À la même date, l'Officiel annonçait encore que la Commune allait se mettre en relation avec les gouvernements étrangers ; mais sa circulaire, adressée par Paschal Grousset aux représentants des puissances présents à Paris, demeura sans réponse. Le lendemain 7 avril, elle adressa aux départements une déclaration dans laquelle elle expliquait le mouvement insurrectionnel, récriminait contre le gouvernement de Versailles, affirmait son intention de se renfermer exclusivement dans son autonomie et, finalement, faisait appel à toute la France. Elle entrait en même temps de plus en plus dans la voie des mesures arbitraires, après avoir tant de fois annoncé le règne de la liberté. C’est ainsi que, le 8 avril, elle interdisait une réunion publique qui devait se tenir ce même jour à la Bourse ; c’est ainsi qu’elle venait de supprimer trois journaux : les Débuts, le Constitutionnel et Paris-Journal. Déjà les églises avaient été envahies, fermées au culte ; plusieurs servirent à des réunions tumultueuses, où des orateurs de club mettaient en avant des motions qui n’eussent été que bouffonnes dans un temps de calme, mais qui constituaient alors un symptôme terrible de l’état des esprits dans les masses populaires. C’est dans une de ces réunions qu’un orateur s’écria, dans un beau mouvement d’éloquence : « Je voudrais poignarder Dieu ! » et comme le gamin de Paris ne perd jamais ses droits ni son caractère, une voix de Gavroche lui cria du fond de l’église : « Faudrait un ballon ! » Nous voulons croire que, parmi les membres de la Commune, les plus intelligents gémissaient au fond du cœur de ces tristes insanités ; mais c’eût été une imprudence de leur part de chercher à s’y opposer, ce qui n’est peut-être pas une excuse suffisante.

Nous venons de voir que la Commune avait supprimé la liberté de réunion, la liberté de la presse, la liberté de conscience ; elle avait déjà supprimé une autre liberté, et celle-là la plus précieuse de toutes, la liberté d’opinion, la liberté politique. Le 6 avril, elle rendait le décret suivant :

« Art. 1er. Tout garde national réfractaire sera désarmé.

« Art. 2. Tout garde désarmé pour refus de service sera privé de sa solde.

« Art. 3. En cas de refus de service pour le combat, le garde réfractaire sera privé de ses droits civiques, par décision du conseil de discipline. »

Qu’on désarme et qu’on prive de leur solde des gardes nationaux qui refusent le service, c’est tout naturel ; mais qu’on retire leurs droits civiques à des hommes qui refusent de