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lancer sa réputation, qui s’efface complètement aujourd’hui devant celle de son rival. Du reste, il ne se montra pas jaloux des succès de ce dernier et le désigna lui-même au choix de l’empereur comme son successeur. 11 a laissé soixante-trois pièces dramatiques, qui ont été publiées sous ce titre : Poésie dramaticke (Venise, 1744, 10 vol. in-8<>) et dont 8 ont été traduites en français par Bouchaud (Paris, 1758, 2 vol, in-8«). Il faut encore citer parmi ses œuvres littéraires : La Resa di Madone (Venise, 1687) ; La Conquista di Navarino (Venise, 1687) ; Compendio del vocabolario délia Crusca (Venise, 1705) ; Poésie sacre dramatiche (Venise, 1735) ; DUsertazioni Vossiane (Venise, 1752-1753, 2 vol.), additions à l’ouvrage de Vossius sur les historiens vénitiens ; Compendio délia storia délia republica di Venezia (Venise, 1774), etc. Il s’était aussi occupé d’études géographiques et philosophiques, ainsi que le prouvent ses ouvrages intitulés : Mappemondo istorico, continuazione dell’ opéra del Padre Foresti (Venise, 1704), et Lettere al Fontanini intorno la grand’ opéra délie méditazioui filosofiche di B. Treoisan (Vienne, 1704). Après sa mort, ses Letlere furent recueillies et publiées par Forcellini (Venise, 1752, 3 vol.), nouvelle édition revue et augmentée par Moielli (Venise, 1785, 6 vol.). — Son frère aîné, Pietro Caterino Zeno, né à Venise en 1666, mort en 1732, entra de bonne heure dans les ordres et professa la rhétorique à Murano, puis la philosophie à Venise. Lorsque son frère partit pour l’Allemagne, il prit la direction du Giornale dé littérati dont il publia les tomes XXIX à XXXVIII. On a encore de lui des traductions de la Logique d’Arnaud et de quelques sermons de Bourdaloue, ainsi qu’une édition des poésies de Jean délia Casa (Venise, 1788-1729, & vol.). ZENOB (Clag), prélat arménien, né en Syrie j il vivait au rve siècle de notre ère. Après avoir été secrétaire de saint Grégoire, il devint évêque, fonda le célèbre monastère de Clag et occupa pendant vingt ans son siège épiscopal. On lui doit, outre un grand nombre d’Homélies dans lesquelles on trouve des détails historiques importants, une Histoire de la province de Ûarou, réimprimée à Constantinople (1719, in-12).

ZKiVOBE (saint), prélat italien, né vers 334, mort vers 415. Il fut converti au christianisme par Théodore, évêque de Fiésole, puis convertit lui-même sa famille. Doué d’une éloquence entraînante, il s’adonna avec ardeur à la prédication, défendit les décisions du concile de Nicée contre les hérésies envahissantes et se signala par l’ardeur de sa foi lorsque Julien voulut rétablir le paganisme dans J’empire (361). Recommandé par saint Ambroise au pape Damascènè, Zénobe fut appelé à Rome, nommé diacre de l’Église romaine, envoyé comme légat à Constuntinople, puis sacré évêque de Florence. Une dissertation sur la vie de ce personnage que l’Église a canonisé, se trouve dans le voyage d’HippopAite et Chariton, imprimé dans les Deticue eruditorum de J. Lami.

ZÉNOBIE s. f. (zé-no-bl — nom de femme). Entom. Genre d’insectes lépidoptères nocturnes, tribu des noctuides, dont l’espèce type habite la Guyane.

— Crust. Syn. d’IDOTÉE.

— Bot. Genre d’arbrisseaux, de la famille des éricinées, tribu des andromédées, formé aux dépens des andromèdes, et comprenant des espèces qui croissent dans l’Amérique du Nord.


ZÉNOBIE, épouse de Rhadamiste, roi d’Ibérie, et fille de Mithridate, roi d’Arménie, qui vivait au 1er siècle de notre ère. Son époux, qui avait fait périr son beau-père, fuyait devant les Arméniens soulevés ; comme elle était enceinte et ne pouvait plus supporter les fatigues de la route, elle pria Rhadamiste de la soustraire par une mort honorable aux outrages et à l’avilissement de l’esclavage qui l’attendait si elle tombait entre les mains de ceux qui les poursuivaient. Rhadamiste la poignarda et jeta son corps dans l’Araxe. Le courant du fleuve la déposa sur la rive ; des pâtres la recueillirent et, comme elle respirait encore, lui donnèrent des soins et la conduisirent à Tiridate, roi d’Arménie, qui l’accueillit avec bonté (53 de notre ère).

Ce fait, qui tient plus de la légende que de l’histoire, est cependant raconté par Tacite, l’historien des Annale» et de la Vie d’Agricola.

C’est sur l’épisode dramatique que nous venons de conter qu’a été écrite la tragédie de Rhadamiste par Crébillon, substituant ainsi la terreur au sublime de Corneille et au sentiment de Racine, deux éléments dramatiques dont le spectateur était las.


ZÉNOBIE (Septimie), célèbre reine de Palmyre ; elle était fille d’Amrou, prince arabe de la partie méridionale de la Mésopotamie, et épousa en secondes noces le fameux Odénath, chef des tribus arabes du désert de Palmyre et sénateur de cette ville. Elle partagea tous les dangers de son époux pendant ses guerres contre Sapor et dans ces expéditions brillantes où les Arabes semblaient préluder aux conquêtes de l’islamisme. Le génie militaire de cette race annonçait déjà, en effet, l’essor qu’il devait prendre sous les califes. Odénath, après avoir repoussé les invasions des Perses et des Scythes, avait reçu de Gallien les titres de général de l’Orient, dont il était en réalité le maître, et même d’Auguste, lorsqu’il périt assassiné et peut-être à l’instigation de son épouse. Zénobie prit alors le titre de reine de l’Orient (267), continua les conquêtes d’Odénath, résista vaillamment aux légions de Gallien et étendit la domination de Palmyre de l’Euphrate à la Méditerranée et des déserts de l’Arabie jusqu’au cœur de l’Asie Mineure. Ses troupes remportèrent même quelques avantages sur les Romains en Égypte.

Le peu de renseignements que nous possédons sur cette femme extraordinaire nous la dépeignent comme possédant les qualités les plus opposées, ou aspirant à les posséder, afin sans doute de concilier les éléments hétérogènes dont se composait son empire. Sobre et courageuse comme les Arabes, elle imitait en même temps le faste des Perses, parlait avec facilité le syriaque, l’égyptien et le grec, favorisait les juifs sans persécuter les chrétiens, faisait donner à ses fils une éducation toute romaine, pendant qu’elle-même haranguait ses troupes à la manière des généraux romains, bras nus et le casque en tête, cultivait les lettres grecques, attirait à sa cour les poètes et les savants de cette nation et accordait au rhéteur Longin le plus grand crédit.

Il y a toute apparence que cette préférence donnée aux civilisations de l’Europe dut éloigner d’elle ces tribus d’Arabes qui avaient fait sa force et celle d’Odénath. C’est du moins ce qu’on peut conclure de l’examen du récit des revers qu’elle éprouva dans la suite.

Pendant la courte période de son règne (267 à 272), Palmyre fut comme la capitale de l’Orient ; ses habitants, enrichis par le commerce et par les dépouilles des peuples vaincus, l’ornèrent, sous les yeux de Zénobie, de ces monuments prodigieux dont les voyageurs admirent encore les débris après quinze siècles de mutilations. Le porphyre, le marbre, l’or, prodigués avec une magnificence inouïe, mis en œuvre par des artistes grecs ou imitateurs des Grecs, en avaient fait une des merveilles de l’Orient, la Babylone du désert, comme Zénobie était elle-même une autre Sémiramis.

Cependant, Aurélien, après avoir vaincu les Germains et les Vandales, songea à ramener sous sa domination romaine les contrées dont s’était formé le royaume de Palmyre. Zénobie vint hardiment à sa rencontre. Vaincue près d’Antioche et à Emèse, elle fit une retraite habile, en même temps qu’elle lançait contre les légions les hordes de Bédouins du désert de Syrie ; contrainte cependant de s’enfermer dans Palmyre, elle y fut suivie par Aurélien, qui emporta la ville après un siège meurtrier. La reine, montée sur un dromadaire, s’enfuit vers l’Euphrate ; mais, atteinte par les cavaliers romains, elle fut ramenée à l’empereur, qu’elle étonna d’abord par l’énergie de ses réponses. Toutefois, intimidée par les cris de mort des farouches Illyriens qui composaient les légions, elle sentit fondre son courage ; le héros fit place à la femme et, pour sauver sa vie, livra tous ceux qui lui avaient conseillé la résistance. Emmenée à Rome, elle se laissa mourir de faim sur la route, si l’on en croit Zosime ; mais, suivant Vopiscus, elle orna, chargée de pierreries, le triomphe d’Aurélien, qui lui donna ensuite à Tibur une retraite, où elle termina ses jours. La ruine de Palmyre suivit de près la chute de celle qui l’avait élevée si haut. Cette cité arabe, qui dressait orgueilleusement ses édifices grecs au milieu de sa mer de sable, comme une Venise du désert, essaya dans la même année de secouer le joug des Romains. Vaincue, elle fut presque entièrement dévastée. Le petit nombre d’habitants échappés au massacre obtint la permission d’habiter ses débris ; mais son importance fut à jamais perdue, et elle décrut obscurément, dévastée de siècle en siècle par les hordes de barbares, jusqu’à ce que les Turcs vinssent camper au milieu de ses ruines désertes, mais encore majestueuses.


Zénobie (Zenobia), opéra italien, livret de Métastase, musique de D. Guglielmo Sbacci ; représenté sur le théâtre de Sant’-Angiolo, à Venise, en 1740. Cette tragédie lyrique du grand poëte italien eut un immense succès. Plusieurs compositeurs mirent en musique les airs dont voici l’indication : Oh almen, qualor si perde ; Cada l’indegno, o miri ; Resta in pace, e gli astri amici ; Di ricche gemme e rare ; lasciami, o ciel pietoso, Ch’io parta ? M’accheto ; Vi conosco, amate stelle ; Non so, se la speranza ; Ha negli occhi un tale incanto ; Va ti consola, addio, duetto ; Quel geloso, incerto sdegno ; Perché, se re tu sei, duetto ; Oh che felici pianti ; Non respiro, che rabbia, e veleno ; Salvo tu vuoi lo sposo ; Voi leggete in ogni core ; Ah perchè, s’io ti detesto ; Pace una volta, e calma ; Si soffre una tiranna ; Pastorella, io giurerei ; Fra lutte le pene ; le chœur E menzogna il dir, che amore, et un air final de circonstance : Qual de' tuoi pregi, Elisa.


Zénobie retirée de l’Araxe, groupe de marbre, par M. Marcellin ; Salon de 1859. Un jeune homme vient de retirer des eaux du fleuve la reine d’Arménie et se penche

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vers elle avec une naïve émotion. Le corps de Zénobie fléchit et s’affaisse : la mort est exprimée avec une vérité saisissante, mais la beauté persiste dans la mort. • Ce groupe, a dit M. Zacharie Astruc, est largement traité, vigoureux ; il offre un grand style, une fière tournure, un intérêt profond. » M. Paul de Saint-Victor dont la critique, trop souvent superficielle, affecta parfois les allures les plus dédaigneuses, a résumé en ces termes son opinion sur l’oeuvre da M. Marcellin : « Je ne puis guère louer que l’habileté de cette grosse machine ; elle a la pompe médiocre d’un récit final de tragédie secondaire. » Suivant M. About, « le groupe de M. Marcellin est une œuvre importante où le public trouve de l’intérêt, où les artistes sont obligés de reconnaître des qualités de facture courante, où la critique doit louer un effort vigoureux pour construire une masse. • La Zénobie retirée de l’Araxe a valu une médaille de 2» classe à M. Marcellin et a été acquise par l’État.

Un tableau de Blondel représentant Zénobie trouvée mourante par des bergers sur les bords de l’Araxe a paru au Salon de 1812 et a figuré pendant longtemps au musée du Luxembourg. Un tableau sur le même sujet par M. Pierre Dupuis a été exposé au Salon de 1867. Une composition de Devéria, Mhadamiste et Zénobie, a été gravée par A. Fouchery (Salon de 1833).


ZENOBIUS, sophiste grec, qui vivait au nB siècle de notre ère. Tout ce qu’on sait de sa vie, c’est qu’il se livrait à l’enseignement à Rome, du temps de l’empereur Adrien. Suidas lui attribue, entre autres ouvrages, YHoroscope (Genethliacon) d’Adrien et une traduction grecque des Histoires de Salluste, Le seul écrit qui nous reste de lui est un recueil de proverbes expliqués, intitulé : Epitome proverbiorum L’ucil. Tarrlaei et Didymi Alexandrini secundum ordinem alphabeticum, grsce (Florence, 1487, in-4»). Cet ouvrage a été plusieurs fois réédité et traduit en latin. Nous citerons la traduction, publiée avec le texte, par André Schott dans le recueil des Adagia sitie proverbia Gr&corum (Anvers, 1612, in-4o).

ZÉNOCARE (Guillaume Snodekaert, plus connu sous le nom db), écrivain et gentilhomme flamand, né à Bruges en 1510, mort à La Haye vers 1565. Après avoir fait en France ses études de droit, il revint en Flandre, où il devint bibliothécaire de Charles-Quint, puis membre du conseil de Hollande. C’était un homme fort instruit, à qui l’on doit une vie de Charles-Quint, intitulée : De vita Caroti Quinti imperatoris libri V (Bruges, 1559, in-fol.). C’est un panégyrique plein de digressions, que sa rareté l’ait encore rechercher.

ZÉNODON s. m. (zé-no-don — du gr. xenos, étrange ; odous, odontos, dent). Ichthyol. Genre de poissons scléroderraes.

ZÉNODORE, géomètre grec, qui vivait au ve siècle av. J.-C., un peu avant Platon. Ii est l’auteur du plus ancien ouvrage de géométrie que nous ayons. Cet ouvrage a été conservé par Théon dans son commentaire sur l’Almugeste ; Zénodore s’y proposait de renverser l’opinion, alors vulgaire, que des contours égaux enfermaient des surfaces

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ZÉNODORE, tyran de Panias et d’une partie de la Syrie vers 32 av. J.-C, mort à Antioche l’an 20. Il obtint d’Auguste la tétrarchie de Chalée et des pays voisins ; mais il excita de tels murmures par la protection ouverte qu’il accordait aux brigands nomades de la Trachonitide, qu’il fut dépossédé par l’empereur, en faveur d’Hérode le Grand, et réduit à son ancienne possession de Panias. Zénodore eut alors recours à, toutes sortes d’intrigues pour amener Auguste à revenir sur sa décision ; mais elles n eurent d’autre résultat que de le faire dépouiller de ce qui lui restait au profit d’Hérode. Il mourut subitement à. Antioche, où il s’était rendu pour avoir une entrevue avec Auguste.

ZÉNODORB, fameux statuaire grec, qui vivait dans le 1er siècle de notre ère, sous les règnes de Claude et de Néron. Appelé en Auvergne par le préfet Vibius Avitus, il exécuta en bronze une statue colossale de Mercure, à laquelle il travailla dix ans. Néron le fît venir à Rome et le chargea de fondre la statue qu’il avait résolu d’ériger a sa propre gloire. Ce nouveau colosse, qui n’avait pas moins de 33 mètres de hauteur, fut placé dans le vestibule du palais d’Or. Dans la suite, Vespasien consacra cette statue au Soleil, dont la tête, ornée de sept rayons, fut substituée a celle du fils d’Agrippine. Cet artiste passait pour le plus grand statuaire de son temps.

ZÉNODOTE JVÉPHÈSB, Célèbre gramma’inrie et critique grec, qui vivait au nie siècle avant notre ère. Il suivit, en même temps que Ptolémée Philadelphe, les leçons de Philétas et devint sous ce prince le premier directeur de la grande bibliothèque d’Alexandrie. Zénodote fut le fondateur de la critique des textes. Nous lui devons infiniment, ainsi qu’à Aristophane de Byzance et à Aiistarque, ses dignes héritiers. Us nous ont donné un Homère pur et correct. On connaît assez bien le détail de leurs travaux depuis la découverte et la publication des Scholics do Venise,

faite au dernier siècle par le philologue français d’Ansse de Villoison. C’est à eux aussi qu’on doit la détermination des auteurs véritables de la plupart des poBmes faussement attribués à Homère, tels que la Batrachomyomachie, les épopées cycliques, les hymnes, etc. Les Alexandrins excellaient dans la connaissance de la langue et des antiquités. On peut adopter sans scrupule tous les résultats de leurs investigations historiques, et il est probable que l’Homère qu’ils nous ont légué est le plus pur grammaticalement, le plus vrai, le plus authentique qu’on ait jamais possédé depuis Soloh et Pisistrate. Mais la recension des poésies homériques et l’interprétation de ces vers immortels n’a été qu’une petite portion de leurs grands travaux. Ils ont restauré le texte de tous les auteurs anciens qu’ils comptaient parmi les classiques, et il n a pas tenu a eux que nous n’ayons Sophocle, ou Eschyle, ou Euripide, ou Aristophane, ou même Eupolis et Ménandre, aussi complets, aussi authentiques que nous avons encore Platon et Homère. Zénodote eut la gloire de diriger et de commencer ces grands travaux d’érudition et de critique. Ce qui reste de l’édition des poèmes homériques de Zénodote a été recueilli et publié par Dùntzer sous ce titre : De Zenodoti studiis homericis (Goattingue, 1848, iu-8°),

ZENON D’ÉLÉE, philosophe grec, né à Elôe, dans la Grande-Grèce, vers l’an 490 av. J.-C. Il fut disciple de Parménide, et peut-être même son fils adoptif, l’accompagna dans plusieurs voyages qu’il fit à Athènes et contribua à jeter les fondements de l’école éléatique. Dans un de ces séjours, il eut la gloire de donner des leçons à Péiielès, ainsi qu’à l’élite de la jeunesse athénienne, et son enseignement jeta un grand éclat. C’est à lui qu’Aristote rapporte l’invention de la dialectique ; il fut, du moins, un des plus subtils et des plus rigoureux dialecticiens de son temps. Platon, voulant caractériser la souplesse de son argumentation et ses ressources infinies, l’appellé le Palamede d’Eléo. On a dit de lui qu’il était né pour la guerre. Sa vie fut, en effet, un continuel combat : combat dans la philosophie contre l’école des Ioniens, marqué par l’invention ou le perfectionnement de la dialectique et par l’emploi de la prose, chose nouvelle alors en ces matières, mais indispensable au caractère polémique de son enseignement ; combat dans sa vie publique par sa résistance contre la tyrannie et l’héroïsme de sa mort. Quelques auteurs anciens pensent qu’il avait contribué avec Parménide k l’organisation politique de sa patrie. Quoi qu’il en soit, Eléo étant tombée au pouvoir du tyran Démylos (d’autres disent Nôarque), Zénon conspira contre lui, fut trahi, livré aux tortures et, sommé de révéler te nom de ses complices, désigna tous les amis du tyran et enfin le tyran lui-même. Puis il se coupa la langue avec les dents et la cracha à la face de Déinylos. Le peuple, exalté par un tel courage, se jeta sur ce dernier et le mit en. pièces. Il y a plusieurs versions de cet événement. Hermippe, entre autres, dit que Zenon fut pilé dans un mortier. Ce philosophe continua l’œuvre de Xénophane et de Parménide ; il développa les principes de l’école éléatique et particulièrement la doctrine de l’unité absolue contre les partisans de la pluralité. Sa méthode dialectique, qui parut si redoutable à ses adversaires, était la réfutation de l’erreur comme moyen indirect de ramener à la vérité. Ainsi, il se plaçait dans l’hypothèse de la pluralité, de la divisibilité à l’infini ; il en tirait rigoureusement d’absurdes conséquences et en arrivait à nier le mouvement, le temps, l’espace, la mutabilité et concluait à l’immobilité absolue. De là ce système de scepticisme et de nihilisme qu’il opposait aux pluralitaires comme réduction à l’absurde et que des écrivains postérieurs ont pris au sérieux. Au reste, duns l’une et l’autre hypothèse d’une unité sans pluralité et d’une pluralité sans unité, le mouvement périssait. L’anecdote de Diogène marchant devant Zenon pour prouver le mouvement estcontrouvée, ou, du moins, ne peut se rapporter au philosophe d’Elée.car il était antérieur au Cynique de près d un siècle. « Zénon ne niait pas les phénomènes physiques, dit M.LôoJoubertj il niait qu’ils pussent être démontrés logiquement pur des principes absolus. Ce qu’il voulait établir et ce qu’il établit en effet, c’est que les philosophes naturalistes, les partisans de la pluralité absolue, n’étaient nullement fondés à arguer des phénomènes physiques contre l’hypothèse de l’unité absolue, puisque leur propre hypothèse était au moins aussi contradictoire que les faits. De cette polémique, qui, dans les mêmes termes ou avec des formes peu différentes, a été souvent reprise, il n’y a qu’une chose a conclure, c’est que l’unité absolue et la pluralité absolue sont des conceptions abstraites sans existence réelle ; ce qui existe, c’est l’unité et la pluralité relatives, comme attributs des corps. À ce titre, l’unité et la pluralité ne s’excluent pas plus l’une l’autre qu’elles ne sont en contradiction avec les phénomènes. L’originalité de Zénon consista à placer l’élément négatif critique à côté de l’élément constructif dogmatique des premiers philosophes grecs ; il mérite ainsi d’être regardé comme le créateur de la dialectique et le précurseur de Socrate. > Personne, avant M. Cousin, ne parait avoir bien cois-