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dit de plusieurs dans un sens équivoque, d’une manière divisible. Il Universel in prsedicando créé, Universel qui se divise en s’affirmant de plusieurs, dans un sens univoque.

— Hist. Nom donné aux lettres circulaires que le roi de Pologne adressait" aux seigneurs.

— Syn. Universel, commun, général. V. COMMUN.

— Eneycl, Philos. La logique distingue, parmi les propositions, celles qui sont générales ou universelles et celles qui sont particulières ; celles-ci ont pour sujet un terme particulier, les.autres un terme général ou universel. Un terme, dans une proposition, peut être pris particulièrement ou généralement ; on dit aussi universellement. Il est pris universellement quand il désigne toute une classe, tout un genre : l’homme, les animaux, etc. ; particulièrement, dans le cas contraire (v. particulier). Le sujet est tantôt particulier, tantôt universel : particulier, il rend la proposition particulière ; universel, il la rend universelle. L’attribut est toujours pris particulièrement, quand la proposition est affirmative, et universellement quand elle est négative. Afflrme-t-on, en effet, on déclare que tel sujet appartient à la elasse désignée par l’attribut, est espèce eu égard au genre qu’exprime l’attribut, en fait partie ; l’attribut ne convient donc au sujet que partiellement ; nie-t-on, on déclare que tel sujet n’est aucun des êtres qui appartiennent au genre qu’exprime l’attribut, ou la sépare de tous les individus de ce genre, ou nie de lui la totalité de ces êtres, n 1, ’homme est raisonnable, » c’est-à-dire qu’il est du nombre des êtres raisonnables ; raisonnable n’est donc pas pris ici dans toute son extension, mais particulièrement, à L’animal n’est pas raisonnable, < c’est-à-dire qu’il n’est aucun des êtres raisonnables ; c’est dans toute son extension, c’est universellement que raisonnable est nié ici d’animal.

En psychologie, on appelle universelles les idées et les vérités nécessaires. Les idées nécessaires sont celles qui ont pour objets des vérités nécessaires ; celles-ci sont des rapports qui ne peuvent pas ne pas être, qui sont absolument, qui sont donc éternellement, universellement ; tels sont les axiomes. Ce qui est nécessairement vrai l’est absolument, en quelque temps, en quelque lieu que ce puisse être, toujours, partout ; il est vrai toujours, il est vrai partout ; il est universellement vrai, parce qu’il est absolument vrai, et il est absolument vrai parce qu’il est nécessairement vrai que « le tout est plus grand que la partie, » que • deux quantités égales a une troisième sont égales entre elles, » etc. Ainsi de tous les axiomes et de toutes leurs conséquences, de toutes les vérités mathématiques, de toutes les vérités de raison. Comme elles sont universelles efl elles-mêmes ou objectivement, elles le sont aussi subjectivement, c’est-à-dire qu’elles sont universellement reconnues par toutes les intelligences raisonnables ; les vérités universelles sont objets d’idées universelles,

— Scolast. On donnait le nom à’universaux aux idées générales dans la grande querelle qui s éleva à leur sujet pendant le moyen âge. Les universaux ont-ils une réalité en dehors de l’esprit humain ? sont-ils des substances ou seulement des noms, de purs sons ? Par exemple, l’humanité existe-t-elle indépendamment de tout homme, ou bien ce mot

n est-il qu’une étiquette destinée à réunir sous un même nom tous les individus hommes ? Tel était le problème à résoudie ; il avait exercé de tout temps la sagacité des philosophes. Selon Platon, les idées générales, les universaux ont une réalité dans l’intelligence divine et ont servi de type aux individus. Cette opinion de l’existence des universaux antérieure à celle des individus (universalia ante rem, comme disaient les scolastiques) n’était point partagée par Arisfote, qui, tout en admettant la réalité des universaux, ■ soutenait qu’ils n’avaient de réalité que dans les choses comme formes ou figures inhérentes à la matière. Il enseignait donc les universalia in re. Les stoïciens enfin, aussi peu satisfaits des formes d’Aristote que des idées de Platon, niaient la réalité des universaux et prétendaient que les individus seuls existent réellement, que les idées générales ne sont que des abstractions de l’esprit, de simples noms désignant les qualités communes a divers objets individuels. Us croyaient donc que les universaux étaient postérieurs à l’individu, universalia post rem. La formule universalia ante rem est celle des réalistes ; la formule universalia post rem, celle des nominalistes. Quanta celle des universalia in re, elle fut adoptée par plusieurs partisans de la philosophie aristotélicienne ; mais la lutte devenant de plus en plus vive et les esprits s’échauifant, l’attention se porta sur les réalistes et sur les nominalistes. Par suite de l’étroite connexion qui s’était établie a cette époque entra la philosophie et la religion, cette question se compliquait d’ailleurs d’une foule de problèmes théologiques sur la Trinité, les attributs divins, la Cène. Ce fut même sur mie question dogmatique que la lutte s’engagea. Roseelin, chanoine de Compiègne, était nominaliste, c’est-à-dire qti il refusait une réalité objective aux universaux. Il soutenait donc que si les trois per ONIV

sonnes de la Trinité sont une seule chose, et non trois choses en soi, unies par la volonté et la puissance, il faut nécessairement que le Père et le Saint-Esprit se soient incorporés avec le Fils ; or, comme il ne pouvait admettre cette dernière hypothèse, il trancha le problème en sacrifiant la réalité de l’unité de Dieu à la réalité des trois personnes divines. Il trouva un rude adversaire dans le futur archevêque de Cantorbéry, saint Anselme, qui le força de se rétracter au synode de Soissons (1092) et qui assura poui1 plusieurs siècles le triomphe du réalisme sur le nominalisme, qui conduisait & admettre troisdieux. La lutte des universaux se trouvant suffisamment exposée aux mots réalisme et scolastiqub, nous nous bornons à renvoyer le lecteur à ces deux mots.

UNIVERSELLEMENT adv. (u-ni-vèr-sè-leman

— rad. universel). D’une façon universelle, générale : J’étais universellement estimé. (J.-J. Rouss.) Le condiment le plus important, le plus universellement répandu, c’est le sel. (A. Rion.) La fraternité n’existe pas ; cela est universellement reconnu. (Proudh.)

— Logiq. Au point de vue général, absolu : Les termes ne doivent pas être prisfalus universellement dans la conclusion qu’ils ne l’ont été dans les promisses, (Dumarsais.)

UNIVERSITAIRE adj. (u-ni-vèr-si-tè-rerad. -université). Qui appartient à l’Université : Les études universitaires. Les professeurs universitaires. Le monopole universitaire. On ne m’imposa’ pas l’instruction universitaire dans toute sa rigueur. (G. Sand.) La psychologie, entendue selon la méthode universitaire, est une dérision. (Proudh.)

— Qui contient des universités, où l’on se livre aux études universitaires : Pérouse est une ville universitaire et poétique. (G. Sand.)

— s, m. Membre de l’Université : Un avocat parle, un député parle, un universitaire parle, toute brute parle, et le roi ne parlerait pas ! (Cormen.)

— l’artisan de l’Université : Les cléricaux accusent les universitaires d’être voltairiens.

UNIVERSITÉ s. m. (u-ni-vèr-si-té — lat. uniocrsitas, universalité, parce que l’Université comprenait l’universalité des professeurs et des étudiants). Corps enseignant établi par l’État : //Université de Paris, de Toulouse, d’Oxford, de Bologne, de Sétiille. Le recteur de ^’Université de Paris. Les universités de Padoue et de Bologne ont eu le singulier privilège de compter jusqu’à nos jours plusieurs femmes parmi leurs docteurs. (Renan.)

Les animaux ont-ils des universités ? Voit-on fleurir chez eux les quatre Facultés ?

Boileau.

— Au moyen âge, l'Université de Paris ou simplement l’Université, Celle qui avait son siège à Paris et qui était fort célèbre. |] Par ext., Le quartier des écoles : Z’Université couvrait ta riue gauche de la Seine, depuis la Tournelle jusqu’à la tour de Nesle. (V. Hugo.)

— Aujourd’hui, Se dit absolument du corps enseignant et choisi par l’État, en France : Je ne dirai pas que ^’Université soit parfaite ; mais je crois qu’elle est supérieure, même pour la moralité, aux établissements qu’on lui oppose. (Thiers.) On ne viendra à bout de la llévolution qu’en détruisant l’XJm- versité, ce repaire de philosophie. (E. Augier.) L’enseignement de /’Université a l’inconvénient d’être trop uniforme et de laisser trop peu de place au goût individuel soit du professeur, soit de l’élève. (Renan.)

— Ane. cout. Administration des communes.

— Eneycl. I. Ancienne Université de Paris. La première en date des universités qui ont été fondées en France et en Europe est celle de Paris. Toutefois, c’est à tort que l’on attribue d’ordinaire à Charlemagne sa fondation. Pasquier, dans ses Recherches de la France (liv. IX, ch. iv), a le premier démontré cette erreur. Charlemagne ouvrit des écoles ; mais les maîtres et les élèves de ces écoles, dont le nombre s’était rapidement accru, ne formèrent une compagnie et n’eurent une organisation spéciale que beaucoup plus tard. Paris était devenu le- rendez-vous de la- jeunesse studieuse, qui y affluait de toutes les parties de l’Europe pour y suivre les cours de maîtres célèbres, lorsque, en 1200, Philippe-Auguste eut l’idée dé constituer les nombreuses écoles de sa capitale en une corporation, qu’il dota de privilèges. Quinze ans plus tard, Robert de Courçon rédigea les statuts de cette corporation, qui reçut le nom ^Université, soit parce qu*elle embrassait 1 universalité des arts et des sciences, soit parce qu’elle comprenait l’universalité des maîtres et des élèves.

Dès que l’Université fut constituée, la faculté d’enseigner ne fut plus accordée à tous indistinctement. Pour enseigner, il devint nécessaire de posséder ce qu’on appela la licence. À cette époque, les écoliers étaient

! objet d’une sollicitude universelle. On créa

des collèges’ destinés à servir d’asile aux écoliers indigents ; le collège de £aint-Thomas-du-Louvte, eu 1187 ;’ceux de Constantinople, sur la place Maubert, en 1206, des Eons-Enfants-Saint-Honoré en 1209 et de Saint-Nicolas-du-Louvre en 1217. Les papes se déclarèrent les protecteurs de ces écoles, 1

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parce qu’elles étaient placées entre les mains du clergé, et les comblèrent de privilèges que les rois confirmèrent. Philippe-Auguste accorda aux écoliers le privilège dont jouissait l’Église, d’être soustraits à la justice séculière dans les causes criminelles. Il enjoignit à tous les bourgeois de dénoncer et même d’arrêter ceux qui frapperaient un écolier ; leur demeure fut déclarée inviolable, et pour assurer l’exécution de cette ordonnance, il fut prescrit à tous les prévôts de jurer, lors de leur entrée en fonction, en présence de V.Université elle-même, l’observation de ses privilèges. Ces privilèges et cet usage tombèrent en désuétude vers la fin du xvie siècle. M. de Vilieroy fut le dernier prévôt qui prêta ce serment en 1592.

Les papes se montraient de chauds protecteurs de l’Université, dans l’unique but de faire tourner cette protection au service exclusif de la théologie. Aussi, quand certains professeurs de Paris voulurent unir à l’étude de la théologie celle des auteurs païens, ils s’attirèrent une bulle menaçante de Grégoire IX (1228). «Nous vous commandons et vous ordonnons par ces présentes, disait-il, d’abdiquer entièrementune telle folie et d’enseigner désormais la théologie dans sa pureté, sans aucun ferment’ de science mondaine, n’adultérant point la parole de Dieu par les Actions des philosophes. » Cet ordre fut suivi à tel point, nous apprend Budeus dans son Hisloria universitatis, qu’en 1254 on ignorait à l’Université de Paris les noms de Virgile et de Cicéron.

Dès le xme siècle, l’Université prit la forme qu’elle conserva jusqu’à la fin de son existence. Au début, toutefois, on se borna à diviser l’enseignement en deux grandes divisions, appelées Facultés : la Faculté de théologie et celle des arts, comprenant les lettres et les sciences. On y joignit bientôt deux autres Facultés, celle de droit canon et de droit civil et la Faculté de médecine.» LaFaeuité des arts, dit Lalanne, était composée de quatre nations : la nation de France, divisée en cinq provinces ou tribus ; la nation de Picardie, divisée aussi en cinq tribus ; la nation de Normandie ; la nation d’Allemagne, divisée en deux tribus : celle des continents, subdivisée en deux provinces, et celle des insulaires, comprenant les îles Britanniques. » La nation d’Allemagne avait porté d’abord le nom de nation d’Angleterre ; mais, sous Charles VI, pendant la guerre avec les Anglais, on remplaça le nom de l’Angleterre par celui de l’Allemagne. IJ’Université conférait les grades de bachelier, de licencié et de docteur. A la tête de chacune des quatre Facultés se trouvait un professeur appelé doyen, et à la tête de l’Université était le recteur, élu par les quatre Facultés. Ses fonctions durèrent d’abord six semaines, puis trois mois et enfin deux ans. Lors de son installation, on faisait une procession en grande pompe. Un syndic était chargé de veiller au maintien des privilèges de l’Université, dont les principaux consistaient dans le monopole de l’enseignement, dans le droit d’envoyer des députés aux conciles et aux états généraux, et dans l’exemption des charges de l’État.

« L'Université, dit Dubarle, possédait de temps immémorial une vaste prairie dont l’origine de propriété est restée entourée de nuages, mais qui, connue sous le nom de Pré-aux-Clercs, était le rendez - vous des écoliers et servait h leurs récréations. Cet emplacement, qui s’étendait depuis le bourg Saint-Germain jusqu’à la Seine et depuis la rue des Saints-Pères jusqu’aux Invalides, dans l’espace occupé aujourd’hui par les quais Voltaire et d’Orsay, était voisin de 1 abbaye Saint-Germain. À plusieurs reprises, les moines avaient élevé sur ces prairies des prétentions toujours repoussées, mais qui amenaient souvent entre eux et les écoliers des luttes quelquefois sanglantes. En 1278, quelques envahissements de leur partavaient exaspéré les écoles et produit une rixe pendant laquelle les moines, ayant rassemblé leurs vassaux, avaient attaqué leurs jeunes adversaires, en criant : Tue I tuel Plusieurs effectivement restèrent morts sur la place. L’Université porta plainte au légat et au roi, implorant le secours de leur autorité et menaçant de fermer ses écoles. Les moines

alors, quant aux peines corporelles, n’étaient justiciables que des tribunaux ecclésiastiques ; l’autorité royale était impuissante pour les atteindre ; aussi ce fut le légat qui infligea au prévôt de l’abbaye, principal auteur de ce cruel événement, une pénitence de cinq années ; les réparations civiles étaient du ressort du prince ; Quantum ad nos spectabat, disait Philippe léHardi, et il ordonna que le couvent fonderait dans les églises du Val-des-Ecoliers et de Saint-Martin deux chapelleuies de 20 livres parisis de rente chacune, dont la présentation appartiendrait au recteur, et que de plus il payerait 1,000 livres tournois aux parents des écoliers morts. » Cette anecdote prouve combien était grande la faveur dont jouissait l’Université. Elle avait créé dans son sein, dit Crevier, un tribunal présidé par le recteur, pour juger les causes de ses membres, et devant lequel il n’était pas permis de se servir de l’organe, mais seulement du.conseil d’un avocat. Ce tribunal ne rendait pas de jugements en dernier ressort ; on pouvait appeler de ses décisions à l’Université entière, réunie en assemblée.

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IV'Université de Paris joua un rôle considérable dans les affaires politiques et religieuses au moyen âge. Lorsque les rois voulurent toucher à ses immunités et privilèges, elle leur fit la plus vive résistance et plus d une fois elle suspendit ses cours. Pendant une de ces suspensions (1229-1231), les dominicains instituèrent des chaires de théologie et des écoles. Dès qu’elle eut repris son enseignement, elle réclama avec énergie leur fermeture ; mais elle succomba dans ses prétentions et se vit contrainte de partager le droit d’enseignement avec les corporations religieuses. Dans la seconde moitié du xme siècle, elle soutint la cause de Philippe le Bel dans ses démêlés avec le pap ?. En 1317, Philippe le Long consulta l’Université au sujet de l’interprétation de la loi salique, et celle-ci se prononça en sa faveur contre les prétentions de la fille de Louis le Hutin. Charles V Jui donna le titre de Fille aînée des rois, ce qui valut k l’Université de prendre immédiatement rang après les princes du sang.

Jusqu’à Philippe de Valois, le décaiiat avait été donné à I ancienneté.-En 1338, on décida qu’il pourrait désormais être conféré au plus digne par élection, quel que fût son âge. On s efforça en même temps de réformer les abus qui pouvaient être préjudiciables aux études ou aux écoliers. C’est ainsi qu’en 1342 on abolit la brimade des béjaunes. On appelait ainsi la bienvenue exigée des nouveaux écoliers. On lui avait donné ce nom, selon Du Gange, par allusion aux becs jaunes des oiseaux qui na sont pas encore sortis de leurs nids. Les béjaunes étaient les écoliers igno* rants ou novices.

Lors du grand schisme d’Occident qui divisa l’Église pendant une moitié du xivo siècle, l’Université de paris prit fait et cause pour le pape Clément. Elle délibéra sur les moyeus propres à rendre la paix à l’Église. Une assemblée générale de tous ses membres décida que les deux papes qui se disputaient le trône de saint Pierre devaient s’en remettre à la décision d’arbitres choisis. Un mémoire, rédigé par le chancelier pierre d Ailly et par Nicolas de Clémengis, fut approuvé de VUniversité entière. Le successeur de Clément VII étant mort sur ces entrefaites, Benoît XIII reçut de l’Université une lettre de félicitations et de conseils, montrant le sentiment que ce corps avait de son autorité et de sa force. Cette lettre étant restée sans réponse, l’Université déclara au pape « que, s’il n’obtempère pas à ses prières et aux vœux de l’Église, elle lui résistera en face, parce qu’elle ne veut en aucune façon être soumise ni adhérer à son opiniâtreté. ■ Le pape persista dans son silence. Alors Y-Université donna ses conclusions par l’organe du recteur, déclarant que « l’on devait dès maintenant se départir du tout de l’obéissance de notre saint-père. »Le chancelier de l’Université de Paris, Gerson, fut, comme on sait, l’âme du concile de Constance et contribua puissamment à faire déposer le pape Jean XXIII, que le concile remplaça par Martin V. La Faculté de théologie de Paris, la Sorbonne, devint dans le même temps l’un des oracles de l’Église.

Mais si à, cette époque l’influence politique et religieuse de l’Université était grande, l’enseignement était loin d’y être aussi complet qu’on pourrait se le figurer. Des hommes célèbres, Pierre d’Ailly, Gerson, Nicolas de Clémengis, Gille des Champs, enseignaient la théologie et le droit canon à une foule d’élèves avides de savoir ; mais les sefences profanes étaient négligées. La médecine n’inspirait aucune confiance au public et n’attirait aucune considération sur ceux qui la professaient ; en logique, en philosophie, on n était pas^ncore sorti d’Aristote ; l’axiome le maître l’a dit avait toujours force de loi. Quant à la grammaire et à la rhétorique, elles étaient oubliées depuis longtemps. Toutefois, Nicolas de Clémengis s’efforça de rétablir le goût de l’élégance et la politesse du style. On commençait aussi à cultiver les mathématiques ; mais l’astrologie judiciaire avait encore ses professeurs ; on répandait de bonne foi les erreurs les plus absurdes, et les savants eux-mêmes ne savaient pas s’en défendre. Ainsi, nous apprend Duvernel dans sou Histoire de laSorbonne, Gerson avait écrit pour prouver l’effet des influences célestes sur les corps sublunaires, et la Faculté de théologie concédait aux démons, en 1398, le pouvoir de faire quelquefois, avec l’aide de Dieu, des choses merveilleuses. Quelques esprits supérieurs s’élevaient seuls contre ces croyances générales. Ainsi maître Sérisy s’écriait : « O toi, Université de Paris, puisses-tu corriger cette opinion 1 car ces sciences trompeuses ne sont pas seulement défendues parce qu elles sont contre l’honneur de Dieu, mais parce qu’elles ne contiennent ni vérité ni effets. »

Cependant la crédit de cette compagnie que Charles V avait appelée la Fille ainée des rois de France allait croissant. L’Université avait tant de pouvoir, dit M. de Barante, que, lorsqu’elle mettait la main à une chose, il fallait bien qu’elle en vint à bout. Ainsi, pour ne citer qu’un exemple, le sire de Tignonville, prévôt de Paris, avait fait arrêter deux écoliers convaincus des plus grands crimes. L’Université, à la justice de laquelle on offrait las coupables, désavoua de pareils membres ; ils furent condamnés et pendus.