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TRAI

est-ce là que vous demeurée ? et dans la locution oui-da.

b<> Entre très et l’adjectif ou l’adverbe suivant : Très-bien, très-fort, etc. Mais il ne fondrait pas de trait d’union dans cette phrase : 11 est très en colère.

6» Pour lier même à un pronom personnel : Moi-même, lui-même, eux-mêmes, etc.

7» Entre les dizaines et les unités, quand celles-ci s’ajoutent aux premières : Dix-neuf, trente-sept, deux cent vingt-quatre. 11 faut ajouter à cette règle le mot quatre-vingts.

8° Entre deux prénoms appliqués à une seule personne : Paul-Louis Courier, JeanJacques Rousseau, et entre certains noms Fropres dans le même cas, consacrés par usage : Gay-Lussac, Prévost-Paradai, etc.

9° Entre les mots qui servent ensemble à nommer un département, une- ville, une rue, etc. : Pyrénées-Orientales, Lons-le-Saunier, Civila- Vecchia, Clermûnt-Ferrand, rue des Grands-Augustins, etc.

10" Après non suivi d’un nom, d’un verbe ou de Kadverbe seulement : Non-valeur, nonreceooir, non-seulement.

11» Après quasi suivi d’un substantif : Quasi-contrat, quasi-délit.

Tous les mots français commençant par la préposition latine ultra s’écrivent en deux parties et prennent le trait d’union après cette préposition, excepté ulirumontain.

La préposition extra se joint généralement au moi ; il faut excepter extra-muros et quelques expressions exclusivement scientifiques.

Enfin on doit encore employer !e trait d’union dans les mots composés commençant par arrière, demi, mi, quasi, sous, vice, très ; il faut le supprimer dans les mots commençant par taiti, archi, co, extra, juxta.

— Typogr. V. division.

— Allus. hist. Trall du Parlhe, Allusion à la manière de combattre des Parthes. V

FLÈCHE.

— AllUB. Httér. L» «rail du vieux Prinm,

Trait impuissant que Priam lança contre Pyrrhus. Se dit, dans l’application, de tout effort qui manque son but par défaut de vigueur. V. TELUM 1MBEI.LB SINE ICTU.

TRAIT, AITE (trè, è-te) part, passé du v. Truire. Dont on a tiré le lait : Vache traite. 11 Tiré des mamelles, en parlant du lait : Lait nouvellement trait.

— Techn. Tiré à la filière : De l’or, de l’argent trait. (Acad.)

TRAITABLE adj. (trè-la-ble — rad. traiter). Qu’on peut traiter : Un pareil sujet n’est

pas TRAITABLE.

— Doux, facilement abordable ; qu’on peut aisément manier, façonner : N’être pas trac-, table. Auoi’r une humeur peu traitabi.b. L’esprit est plus traitable que le caractère. (Guizot.) v

TRAITAILLER v. n. ou intr. (trè-ta-llé ; Il mil. — rad. traiter). Paire sans cesse de nouveaux traités, de nouveaux accords sans importance ou peu durables : Perdre son temps à travailler au lieu de se battre.

TRAITANT s. m. (trè-tan — rad. traiter). Celui oui se chargeait, aux termes et conditions d’un traité, d’opérer le recouvrement des impôts et deniers publics : Depuis qu’il y avait des traitants, ils avaient toujours mangé sans jamais être repus. (Alex. Duin.)

Sache quello province enrichit les traitant*.

Boileau.


TRAITE s. f. (trè-te — féminin du participe français trait, qui signifie proprement tiré, et qui représente le latin tractus, participe du verbe trahere, tirer). Trajet que l’on fait d’une seule haleine, sans s’arrêter : Faire une grande, une longue traite.

Adieu, dit le renard, ma traite est longue à faire.
              La Fontaine.

Tout d’une traite, Sans s’arrêter en chemin : Le jour suivant, je me rendis tout d’une traite à Ségovie. (Le Sage.) || Sans s’interrompre : J’ai lu ce roman tout d’une traite.

— Transport de marchandises d’une province à une autre ou d’un État à un autre, et particulièrement Trafic, échange de marchandises que font tes bâtiments de commerce sur les côtes d’Afrique : Faire la traite. Faire la traite de la gomme, de l’ivoire.

Traite des nègres ou simplement Traite, Trafic des esclaves noirs : Les immunités pour la traite des nègres furent supprimées par un décret en 1793. Le premier qui fit la traite méritait l’exécration du genre humain (Raynal.) La traite flétrit aux yeux de l’Europe et ceux qui la font et ceux qui la tolèrent, (B. Const.)

— Fam. Traite des blancs, Commerce d’hommes que faisaient les agents de remplacement militaire. || Exploitation des salariés.

— Banque. Commerce des banquiers : Ce qui caractérise une lettre de change, c’est la traite de place en place. (Acad.) || Lettre de change, considérée relativement à celui qui la tire : Ce sont des traites signées de vous et passées à notre ordre par des tiers porteurs. (Alex. Dum.)

— Fin. Droits qu’on prélevait autrefois sur toutes les marchandises qui entraient dans le royaume, qui en sortaient, ou même qui passaient d’une province dans une autre : On payait la TRAITE des marchandises en Bretagne, en Dauphiné. (Acad.)

— Anc. monn. Tout ce qui s’ajoutait au prix intrinsèque des métaux employés à la fabrication des monnaies, et qui était indépendant du poids et du titre : La traite comprenait le seiqneuriage, le brassage et les remèdes de poids et de loi.

— Techn. Nom que les tanneurs donnent au bord du plain sur lequel ils étendent les peaux pour les égoutter,

— Econ. rur. Action de traire le lait.

— Syn. Traite, trajet. La traite est proprement le temps que dure une marche, un voyage par terre, ou l’action même de marcher, d’avancer, considérée comme durant plus ou moins longtemps. Trajet peut se dire d’un voyage par eau, et quand il s’applique à la terre il a rapport à la distance parcourue, à celle qui sépare le point de départ du point d’arrivée.

— Encycl. Traite des nègres. Les asientos, traités ou contrats du gouvernement espagnol avec divers particuliers ou diverses compagnies étrangères pour fournir des esclaves noirs à ses possessions d’outre-mer, furent très-fréquents depuis le XVIe siècle. Comme ce trafic était entouré de beaucoup de garanties, et qu’au monopole de la vente des nègres s’ajoutait le bénéfice d’introduire en fraude beaucoup d’autres objets de commerce, les gouvernements de l’Europe tâchaient, par tous les moyens imaginables, d assurer ce privilège à leurs sujets. Charles-Quint l’octroya en 1517 à ses compatriotes les Flamands. Ils en tirèrent de tels bénéfices et se multiplièrent à un tel point en Amérique qu’ils en vinrent aux mains avec les Espagnols à Saint-Domingue, tuèrent en 1522 le gouverneur de cette île et assiégèrent le fort. Depuis lors, le gouvernement se résolut à limiter considérablement les asientos. Ils cessèrent en 1580 ; mais les besoins du trésor, la nécessité de rembourser aux Génois les sommes énormes qu’ils avaient fournies pour l’expédition de l’invincible Armada, portèrent Philippe II à conférer de nouveau le privilège de l’asiento. Gomez Reinel en fut gratifié de 1595 à 1600. En cette année, on traita pour neuf ans avec le Portugais Jean-Rodriguez Coutinho, gouverneur d’Angola. Il s’engagea à fournir aux colonies 4,250 esclaves par an et à payer au roi une rente de 162,000 ducats. Sa mort, en 1603, fit passer le contrat à son frère Gonzalez-Vaez Coutinho. Le 26 septembre 1615, nouvelle concession à un autre Portugais, nommé Antonio-Fernandez Delvas, pour huit ans. Il s’obligeait à introduire 3,500 esclaves et à payer 115,000 ducats par an. Un autre Portugais, Manuel-Rodriguez Lamego, traite pour huit autres années en 1623 et s’engage à fournir 3,500 esclaves et à payer 120,000 ducats ; 2,500 esclaves et 95,000 ducats sont les conditions stipulées en 1631, pour huit nouvelles années, avec les Portugais Cristobal-Mendez de Sossa et Melchior Gomez Anjel. La guerre entre la France et l’Espagne et d’autres motifs ignorés interrompirent les asientos jusqu’en 1662. Domingo Fullo et Ambrosio Lomelin en jouissent alors pour neuf ans, pendant lesquels ils doivent fournir 24,500 nègres et payer au roi 2,100,000 piastres. La ferme passe pour cinq ans, en 1674, à Antonio Garcia et dom Sébastien de Siliccas, moyennant 4,000 esclaves et 450,000 piastres. Le contrat est rompu, faute d’exécution, et un autre est conclu en 1676, pour cinq ans avec le consulat de Séville, offrant de payer 1,125,000 piastres et 1,200,000 de prime, puis le 27 janvier 1682 avec don Juan Barrozzo del Pazo et don Nicolas Porcio, de Cadix, pour 1,125,000 piastres. Il est transféré après eux aux Hollandais don Balthazar Coimans puis en 1692 à don Bernardo-Francisco Malin de Guzman, résidant au Venezuela, moyennant 2,125,000 écus d’argent, pour cinq ans ; enfin à la compagnie portugaise de Guinée, de 1696 à 1701. Ce contrat, par lequel la compagnie s’obligeait, en propres termes, à fournir 10,000 tonnes de nègres (diez mil toneladas de negros), donna lieu à tant de scandales et de difficultés qu’une transaction pour le mettre à néant dut intervenir, le 18 juillet 1701, à Lisbonne, entre les rois d’Espagne et de Portugal, Philippe V et dom Pedro II, traitant, comme d’usage, au nom de la sainte Trinité (el nombre del santisima Trinidad). Au traité avec le Portugal succède un traité avec la France. Le 27 août 1701, le roi Très-Catholique et le roi Très-Chrétien stipulent pour dix ans (1702-1712) que le monopole du transport des nègres dans les colonies de l’Amérique appartiendra à la compagnie royale de Guinée, représentée par M. du Casse, chef d’escadron, gouverneur de Saint-Domingue. Elle se charge de l’asiento, c’est-à-dire de l’introduction des esclaves nègres dans les Indes occidentales de l’Amérique appartenant à Sa Majesté Catholique, afin de procurer par ce moyen un « louable, pur, mutuel et réciproque avantage » à Leurs Majestés et à leurs sujets ; elle fournira en dix ans 4,800 « pièces » d’Inde, des deux sexes et de tous âges, tirées d’une partie quelconque de l’Afrique, excepté de Minas et du Cap Vert, attendu que les nègres de ces pays ne sont pas propres pour lesdites Indes, soit 4,800 nègres par an (art. 1er). Pour chaque nègre, la compagnie payera 33 écus, chaque écu valant 3 livres tournois (art. 2). À cause des besoins pressants de la couronne d’Espagne, la compagnie avancera 600,000 livres tournois (art. 3), sur les 4,755,000 qu’elle doit, et en retour il lui est fait remise des droits sur 800 nègres par an. Les navires doivent être français ou espagnols, les équipages de toute nation, mais exclusivement catholiques (art. 8). L’introduction pourra avoir lieu dans tous les ports où il y aura des officiers de l’Espagne. Dans les îles du Vent, Sainte-Marthe, Cumana, Maracaïbo, les noirs ne pourront être vendus au delà de 300 piastres, mais partout ailleurs le plus cher que la compagnie le pourra (art. 9). Sa Majesté Catholique place le traité et les opérations de la compagnie sous la protection de tous les fonctionnaires des possessions espagnoles. Elle engage « sa foy et sa parole royale à ladite compagnie, regardant le traité comme son propre bien et se réservant à elle seule la connaissance de tous les cas qui peuvent survenir dans l’exécution du traité. »

Lorsque ce traité prit fin, l’Angleterre obtint que le monopole lui fût concédé pour trente ans (1713-1734). Ce fut l’objet du traité connu sous le nom de traité de l’Asiento (23 mars 1713). Sa Majesté Britannique se chargeait d’introduire dans l’Amérique espagnole 144,000 pièces d’Inde des deux sexes, de tout âge, soit 4,800 par an, moyennant 33 piastres écus et 1/3 de piastre par tête (art. 1 et 2). Les conditions étaient à peu près les mêmes que celles du traité avec la France. Même obligation d’avancer, à cause des besoins de la couronne, 200,000 piastres escudos (art. 3) moyennant remise annuelle du droit sur 800 nègres (art. 4). Même droit d’importer dans tous les ports du Nord et Buenos-Ayres (art. 7) ; mais les Anglais, plus habiles, obtinrent de plus grands avantages commerciaux. Ils pouvaient introduire plus de 4,800 esclaves par an, pendant les vingt-cinq premières années, en ne payant pour ce supplément que 16 piastres 2/3 (art. 6). Ils recevaient des terrains pour établir leurs factoreries aux lieux d’embarquement et de débarquement (art. 4). Ils firent changer la peine de mort pour contrebande en une peine et une amende (art. 22), se firent accorder quinze jours de répit avant de payer pour les nègres débarqués en état de maladie, et dispense si le nègre mourait dans ce délai (art. 24). Les deux rois étaient intéressés pour moitié, chacun pour un quart, dans le trafic, et le roi d’Espagne dispensé de payer sa part en capital, à condition de servir un intérêt de 8 pour 100, comme dans le précédent traité (art. 28). Enfin, par un article additionnel, pour témoigner à Sa Majesté Britannique « l’envie qu’elle a de lui faire plaisir », Sa Majesté Catholique accordait la faculté d’envoyer annuellement un vaisseau de 500 tonneaux pour commercer avec l’Amérique, à condition de ne vendre les marchandises qu’au temps des foires, pas avant l’arrivée des flottilles et galions, Sa Majesté se réservant d’ailleurs encore dans cette opération un quart des profils et 5 pour 100 sur les trois autres quarts (art. 43). Toutes ces stipulations furent consacrées de nouveau dans le traité de paix préliminaire, signé à Madrid le 27 mars 1713 (art. 9), et par l’article 12 du traité d’Utrecht (13 juillet 1703), le même traité qui fixe la succession d’Espagne et cède à l’Angleterre la possession de Gibraltar et de Minorque. En 1743, l’Angleterre faillit rallumer la guerre en Europe parce que l’Espagne refusa le renouvellement de ce traité.

Pendant plus de deux siècles, l’Europe trouva, pour se ruer sur l’Afrique, cette activité fébrile qui avait précipité l’Espagne sur l’Amérique à la suite de Colomb. Si l’Angleterre eut toujours l’avantage dans cette course frénétique ; si elle importa, dans une seule année (1786), jusqu’à 38,000 esclaves, la France tint toujours le second rang et rétablit en quelque sorte l’équilibre en restant plus longtemps dans la carrière. On trouve, au 2 juillet 1789, un arrêt du conseil d’État qui maintient les immunités en faveur de la traite. Bien plus, ces immunités ne disparurent que par un décret du 27 juillet 1793 qui, en les supprimant, respecta cet odieux trafic lui-même. Voici le texte de ce document, qu’on ne trouve que dans la collection dite du Louvre : « La Convention nationale décrète que toutes les primes accordées jusqu’à présent pour la traite des esclaves sont supprimées. » L’esclavage lui-même fut aboli par un décret du 4 février 1794. On sait le mot du premier consul ; il avait demandé, en prenant le pouvoir, sous quel régime les colonies avaient le plus prospéré ; on lui répondit que c’était sous celui en vigueur au moment où avait éclaté la Révolution : « Alors qu’on le leur applique de nouveau, et au plus vite. » répondit-il. La sénatus-consulte qui rétablit l’esclavage et la loi du 30 mai 1802 (10 prairial an X) qui ouvrit de nouveau le commerce de la traite, avec tous les errements, immunités et primes usités en 1789 furent les conséquences de cette volonté si péremptoirement formulée. Le dernier acte qui figure sur cette matière dans le code de nos colonies est du 9 novembre 1805. C’est une proclamation du gouverneur anglais de Sainte-Lucie, possession récemment enlevée à la France, qui autorise l’importation par tout pavillon, pour relever cette colonie que la guerre avait dépeuplée.

Telle fut la législation de la traite jusqu’au jour où elle passa dans le domaine de la politique internationale. À partir de ce moment, c’est par les actes des chancelleries européennes que se marque sa carrière. Pendant la paix d’Amiens l’importation des nègres à la Martinique s’éleva à 3,558 ; mais l’exportation fut de 1,766 et la réduisit à 2,792. En l’an XII, la guerre interrompit ce commerce ; cependant, en l’an XIII, 730 esclaves furent encore introduits par un négrier venant de la côte d’Afrique. Pendant la Restauration, la traite fut à peu près nulle dans nos colonies, excepté celle de Bourbon ; mais elle acquit une grande extension à Cuba et au Brésil. Des documents authentiques, recueillis par M. de Humboldt, établissent qu’en dix ans, de 1811 à 1820, Cuba reçut plus de 116,000 esclaves. Les seules introductions de nègres au Brésil, par le port de Rio-Janeiro, s’élevèrent :

En 1821, à 20,852 esclaves.
En 1822, à 17,008 esclaves.
En 1823, à 20,610 esclaves.

Ce trafic d’hommes n’a pas duré moins de trois cent vingt ans. Si, pendant la dernière moitié de cette longue existence, il a seulement enlevé d’Afrique autant d’esclaves qu’il le fit en 1786, on peut croire sans exagération qu’il en a tiré 12 millions pour peupler et cultiver les seules colonies à sucre intertropicales. C’est assurément la plus grande émigration au delà des mers qui ait jamais eu lieu. En admettant qu’il y ait eu 150 nègres par cargaison, il n’a pas fallu moins de 80,000 navires ou expéditions pour faire traverser l’Atlantique à cette immense population.

L’honneur de l’abolition de la traite revient, sans contredit, à Wilberforce, Clarkson, Grenville, Sharp et Buxton. « Sept fois, dit M. Augustin Cochin (l’Abolition de l’esclavage), ils proposèrent le bill d’abolition et sept fois il échoua. Lorsqu’ils réussirent enfin, ils avaient à lutter contre les plus puissants personnages de leur pays : lord Eldon, qui affirmait encore en 1807 au Parlement, que « la traite avait été sanctionnée par des parlements où siégeaient les jurisconsultes les plus sages, les théologiens les plus éclairés, les hommes d’État les plus éminents ; » lord Hawkesbury, depuis comte de Liverpool, qui proposait de rayer dans le préambule de la loi les mots « incompatible avec les principes de justice et d’humanité » ; le comte de Westmoreland, qui déclarait que, « lors même qu’il verrait tous les presbytériens et les prélats, les méthodistes et prédicateurs, les jacobins et les assassins réunis en faveur de l’abolition de la traite, il n’en élèverait pas moins sa voix dans le Parlement contre cette mesure. » On a accusé l’Angleterre d’avoir agi par intérêt ; on a même prétendu qu’elle avait pour but de ruiner toutes les colonies à travailleurs africains, y compris les siennes, afin d’assurer le monopole agricole et commercial de ses immenses possessions des Indes. On a prétendu qu’elle avait voulu conquérir, sous prétexte d’humanité, la surveillance de toutes les marines du monde, la haute police des mers. Ses efforts, ses dépenses, les difficultés auxquelles elle s’est exposée, le langage de ses nommes d’État mettent hors de doute le complet désintéressement de l’Angleterre. Il est possible qu’elle ait trouvé son intérêt dans son devoir, et que, parmi ses hommes d’État, les uns aient été plus sensibles à l’utilité, les autres à l’humanité. Sachons féliciter la nation dont les intérêts sont si bien d’accord avec ceux du genre humain, sans chercher toujours de petits motifs aux grandes actions. L’abolition de la traite dans l’univers entier est devenue comme un article de foi de la politique anglaise. Au congrès de Vienne, le 8 février 1815, une déclaration contre la traite fut signée au nom de l’Angleterre, de l’Autriche, de la France, du Portugal, de la Prusse, de la Russie, de l’Espagne et de la Suède. Déjà, l’Angleterre avait obtenu de la France, dans le traité de Paris du 30 mai 1814, un article ayant pour but de condamner cet odieux trafic. En 1818, au congrès d’Aix-la-Chapelle ; en 1822, au congrès de Vérone, les cinq grandes puissances répètent les mêmes déclarations. L’Angleterre employa sans relâche tous les efforts de sa diplomatie, depuis 1814, pour obtenir des diverses puissances des traités particuliers. Elle eut besoin de vingt-sept années pour persuader le Portugal. Par une convention du 21 janvier 1815, suivie d’un traité signé le 22, l’Angleterre avait promis la remise d’une ancienne dette et 300,000 livres sterling pour indemniser les propriétaires des bâtiments portugais capturés avant cette époque par les croiseurs anglais, et le Portugal avait interdit la traite sous pavillon portugais, excepté pour alimenter ses propres possessions. Par une autre convention du 28 juillet 1817, les deux nations s’accordèrent le droit réciproque de recherche, de détention des négriers, de jugement par des commissions mixtes. Le Portugal promit une pénalité spéciale contre les sujets portugais qui se livraient à la traite. En dépit de ces conventions, près de 60,000 esclaves étaient transportés au Brésil en 1822, l’année où ce vaste empire se sépara de la métropole. No-