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Maximilien Ier fit en 1519. Il ordonna, dans cette bizarre pièce, qu’aussitôt après son décès ses cheveux seraient coupés, ses dents broyées et réduites en cendres publiquement dans la chapelle de sa cour. Il désira encore, pour montrer la vanité des grandeurs humaines, que son corps, après avoir été exposé toute la journée, fût renfermé dans un sac rempli de chaux vive, recouvert de taffetas et de damas blanc ; qu’il fût ainsi exposé dans le cercueil préparé pour le recevoir ; qu’on l’inhumât dans l’église du palais de Neustadt, sous l’autel Saint-Georges ; surtout qu’il fût placé de manière que la tète et le cœur se trouvassent sous les pieds du célébrant. Ses intentions furent strictement exécutées.



On s’est quelquefois servi des formules solennelles des testaments pour léguer ses opinions à la postérité en même temps que ses biens à ses héritiers. Luther s’est servi de ce procédé contre Érasme : « Ceci est mon testament, que je laisse après moi et dont je vous prends à témoin. Je tiens Érasme de Rotterdam pour le plus dangereux ennemi du Christ. Dans son Catéchisme, celui de tous ses ouvrages qui m’offusque le plus, il n’enseigne aucune doctrine nette et tranchée ; je n’y vois pas un mot qui pousse dans un sens plutôt que dans l’autre ; en revanche, il y accumule des erreurs faites pour porter le trouble dans les jeunes âmes. Il a écrit contre moi un livre intitulé Hyperaspiles, dans lequel il essaye de défendre son Traité sur le ’libre arbitre, que j’ai attaqué dans mon De servo arbitrio. Mon ouvrage à moi n’a pas été réfuté, et ce n’est pas Érasme qui le réfutera ; car j’ai la conviction que ce que j’ai écrit sur cette matière est la propre vérité de Dieu. S’il y a au ciel un Dieu vivant, Érasme sera un jour confondu et puni. Il est l’ennemi de la religion, l’adversaire déclaré du Christ, le vrai portrait d’Epioure et de Lucien. »



« Feu Montaigne, auteur des Essais, dit Automne, sentant approcher la fin de ses jours, se leva du lit en chemise, prenant sa robe de chambre, ouvrit son cabinet, fit appeler tous ses valets et autres légataires et leur paya les legs qu’il leur avait laissés dans son testament, prévoyant les difficultés que feraient ses héritiers. »



Au <span class="romain" title="Nombre xvii écrit en chiffres romains">xviie siècle, une vieille demoiselle dévote, choquée de ce que les ecclésiastiques, familiarisés avec les cérémonies lugubres des enterrements, n’y paraissaient pas pour la plupart fort tristes et même y riaient quelquefois, voulut réformer cet abus, au moins pour ses funérailles. Mais le moyen qu’elle employa produisit un effet tout opposé au but qu’elle se proposait. Elle fît son testament et, par une clause spéciale, elle déclara que, si quelque ecclésiastique s’avisait de rire à son convoi, elle entendait qu’il ne lui fût rien payé de la somme très-forte qu’elle destinait aux honoraires du chapitre, et que la portion du ou des rieurs fût répartie sur ceux qui ne riraient pas. Quelque temps après, la bonne dame meurt ; son frère, qui était son héritier, convoque le clergé et fait part aux ecclésiastiques de l’article du testament qui leur prescrivait d’être sérieux pendant l’enterrement. On promit bien de l’exécuter ; mais à peine la cortège funèbre fut-il en marche, qu’il n’y eut pas un seul prêtre qui, jetant les yeux sur son voisin et songeant à la clause testamentuire, pût s’empêcher de rire. Pendant le trajet au lieu saint et même au cimetière, l’hilarité continua ; alors le frère, prenant acte de cette infraction au prescrit de la disposition testamentaire, refusa au clergé ses honoraires. L’affaire fut plaidée ; l’avocat de l’héritière fit valoir la sagesse de la clause ; mais celui du clergé lui répondit qu’il éiait impossible, dans une pareille circonstance, d’envisager le zèle hypocrite d’un frère héritier d’une fortune opulente, sans en rire ; qu’ainsi il fallait mettre cette clause au rang des dispositions non écrites. Le clergé gagna sa cause (Peignot, Choix de testaments remarquabtes.)



Un chanoine prébendé de l’église de Saint-Pierre de Genève, nommé Dominique de Viry, inséra dans son testament, daté des ides de février 1500, une clause à peu près semblable. Fondant un anniversaire pour lui et pour les siens, il ordonna que les chauoines absents, dormant ou babillant pendant l’office dudit anniversaire (ce sont les expressions du fondateur) fussent privés de leur part à la rente qu’il leur assigne et dont la portion devra augmenter celle des autres.



En 185., lord N***, un des plus riches gentlemen du Royaume-Uni, vint à mourir. Ses nombreux collatéraux, ses clients, le nombreux personnel de ses maisons étaient rassemblés, sur sa volonté expresse, pour assister à la lecture de son testament, que l’originalité bien connue du défunt faisait présager gros de surprises. Au moment où le notaire ouvrait le parchemin, après en avoir fait sauter les cachets, un jeune chat s’élança sur l’épaule d’une petite servante qui se tenait cachée derrière tout le monde. L’animal folâtre faisait de telles gambades et de telles grimaces, que l’enfant, n’y tenant plus, partit d’un grand éclat de rire. L’assemblée entière, choquée d’une telle irrévérence et d’un si prodigieux oubli du décorum, fixa sur la pauvre fille des yeux furibonds ; mais l’élan du rire est si contagieux, que plus l’enfant faisait d’efforts pour le comprimer ; plus son rire éclatait. On allait, avec indignation, procéder à l’expulsion de la servante, lorsque le notaire, qui avait jeté les yeux sur le testament, la proclama, à la stupéfaction générale, légataire universelle ; en effet, la première clause attribuait la totalité de l’héritage à la personne qui ne pourrait s’empêcher de rire à l’ouverture du testament. Comme de raison, les héritiers en appelèrent au tribunal, qui donna gain de cause à la jeune fille et fit respecter les dernières volontés du défunt. La servante ne se sépara plus du chat auquel elle devait sa fortune et trouva moyen de faire partager l’héritage à l’un des héritiers déconvenus.



Un avare, au lit de mort, fait venir son notaire, s’accommode sur ses oreillers et dit : « Écrivez toujours le commencement, et puis je vous dicterai les articles. — Je donne, lègue et transfère..., écrit l’homme de loi en répétant la formule à mesure. — Du tout ! du tout ! s’écrie le testateur, qui l’interrompt vivement. De tout cela je ne fais rien. Jamais ce ne sera ma volonté ni de donner, ni de léguer, ni de transférer quoi que ce soit. Je ne le pourrais pas. — Très-bien, fit le notaire, qui réfléchit quelque temps avant de trouver à modifier le style officiel. Si nous mettions : • Je prête jusqu’au jugement dernier ? — À la bonne heure ! voilà qui peut aller, » reprit l’avare. La difficulté était levée, et le reste du document marcha fort bien.



Pope, dans une satire, raconte une anecdote analogue :

« Je donne... (en soupirant disait le vieux Cléon)
Ma ferme et mon domaine à mon neveu Léon.
— Et votre argent, monsieur ? — Quoi ! tout le numéraire ! ...
Allons, puisqu’il le faut, je le donne à Valère.
— Votre manoir, monsieur ? » Ici Cléon pleura,
Et criant : « Je ne puis le donner ! » expira.



Un autre Harpagon écrivit à la fin de son testament : « On ne fera pas faire la grosse par le notaire X... ; il est trop cher. »



Un joaillier nommé Paul Duhalde, qui vivait au commencement du xviiie siècle, eut l’idée bizarre de contracter une société avec Dieu. À cet effet, il rédigea un acte transcrit sur son livre journal dans les termes suivants : «  J’ai résolu de-contracter une société avec Dieu, promettant et faisant vœu d’en accomplir tous les articles qui sont ci-après, et j’engage mes héritiers, quels qu’ils soient, à la teneur de tous ces articles, au cas que je meure avant de l’avoir fait par moi-même.  » Puis, il déclare que cette société, qui a pour objet le commerce des pierreries, est pour cinq ans, à commencer du 2 octobre 1719. Il fixe son bien à 3,000 piastres d’Espagne (15,000 livres de France) ; c’est le fonds qu’il met dans la société, c’est tout ce qui lui reste. Il s’interdit la faculté de contracter aucune autre société pendant cinq ans, si ce n’est avec une femme par le mariage. Aussitôt les cinq ans écoulés, il fera sou bilan ; il prélèvera sur la société : 1o la mise de fonds de 3,000 piastres ; 2o la dot qu’une femme pourra lui apporter ; 3o les successions qui pourront lui échoir pendant ladite société ; après quoi il ajoute : « Et l’excédant se partagera entre Dieu et moi. » Cette singulière société ainsi réglée, Duhalde commence des entreprises dont le résultat est heureux. À l’expiration des cinq ans, ayant liquidé Ses comptes, il se reconnaît débiteur de son associé pour une somme assez considérable ; mais, comme le profit de la société consiste en pierreries non encore vendues, il met ces pierreries dans des paquets sur lesquels il inscrit : « Moitié pour les pauvres, » et, au bas du compte où ce qui revient aux pauvres est réglé, il inscrit : « Malheur et malédiction à mes héritiers quels qu’ils soient qui, sous tel prétexte que ce puisse être, ne donneraient point aux pauvres la moitié de tout ce qui proviendra des susdits articles de pierreries, si Dieu disposait de moi avant que j’eusse satisfait par moi-même, encore que mon bien se trouvât, par quelque événement extraordinaire, réduit à la seule somme qui serait due aux pauvres, puisqu’elle doit être considérée comme un dépôt qu’il faut indispensablement rendre. » Outre cela, Duhalde, pour assurer en grande partie ce qu’il devait aux pauvres, lit, se sentant gravement malade, huit billets de 1,000 livres chacun, payables à ordre d’année en année, et il remit ces billets entre les mains du vicaire de Saint-Germain-l’Auxerrois. Peu de jours après, il mourut, laissant un testament dans lequel il déclarait que, sur les livres faisant mention de ses affaires, il y avait plusieurs articles qui rappelaient des choses qui intéressaient les pauvres ; il priait son exécuteur testamentaire d’examiner ces articles avec toute l’exactitude possible et de les faire exécuter dans toute leur étendue. Il y eut, à propos de ce testament, un curieux procès entre les administrateurs de l’Hôpital-Général et le tuteur de la veuve et des enfants que laissait l’associé de Dieu. Un arrêt, rendu le 3 avril 1726 sur les conclusions de d’Aguesseau, avocat général, déclara valable le testament et autres actes qui y étaient rappelés et en ordonna l’exécution.



L’acteur comique Thomas Weston, fort populaire en Angleterre au milieu du siècle dernier, était le désordre en personne, toujours endetté, toujours poursuivi par les recors, et si adonné au vin, qu’il se tua comme systématiquement à force de boire. Mais il ne perdit jamais sa gaieté naturelle et se montra plaisant jusqu’àu bout sur la scène du monde comme sur la scène du théâtre. Voici son testament, dicté à un ami quelques semaines avant sa mort :

« Comme j’ai quelques obligations à M.Garrick, je lui lègue tout l’argent comptant que je posséderai à M ma dernière heure. Cela n’ira peut-être pas loin ; mais il n’aime rien au monde autant que l’argent et il ne trouvera jamais qu’il en ait trop.

Item. A M. Reddish, un grain de probité. C’est, sans doute, un legs bien léger ; mais, comme ce sera du nouveau pour lui, j’espère qu’il ne me refusera pas de l’accepter.

Item. A M. Brereton, une petite dose de modestie ; trop ne vaut rien.

Item. Comme M. Jacobs attend depuis longtemps l’occasion de remonter sa garde-robe, sinon sa fortune, avec la friperie d’un mort, je lui lègue deux ou trois paires de mes souliers, les plus éculés, et, en conscience, c’est encore assez bon pour lui.

Item. Comme je ne voudrais pas avoir l’air d’oublier mes amis, et surtout mes vieux amis, je lègue à Ch. Bannister mon portrait en miniature, pour le prendre après ma mort et le porter à son cou en guise de mémento, afin qu’il se souvienne que la régularité est la plus sûre de toutes les méthodes pour vivre longtemps et en bonne santé.

Item. Dibble Davies veut absolument avoir quelque chose qui vienne de moi, à titre de vieille connaissance. Je lui fais cadeau de ma constitution ; par malheur, je l’ai bien usée, et j’ai grand’ peur que, moi mort, elle ne vaille guère mieux que la sienne.

Item. Je lègue à toutes les dames en général, sinon la réalité, au moins les dehors de la modestie, qui leur serviront plus souvent qu’elles ne croient.

Item. A MM. les acteurs, un peu de tenue.

Item. Aux acteurs du jour, un. soupçon de verve.

Item. Au public, toute ma reconnaissance.  »



Un gentilhomme anglais, irlandophobe, laissa un testament qui contenait la disposition singulière que voici : " Je donne et lègue la somme annuelle de 10 livres sterling pour être payée à perpétuité par ma succession, laquelle somme, telle est ma volonté et mon plaisir, sera employée à acheter d’une certaine liqueur nommée vulgairement wiskey, et il sera donné avis au public que cette liqueur doit être distribuée à un certain nombre de particuliers, Irlandais seulement, lequel nombre ne sera pas au-dessous de vingt, et ils s’assembleront sur le cimetière où je dois être enterré. Là, on leur donnera à chacun un bâton en bois de chêne et un couteau, et, ainsi armés, le wiskey leur sera distribué par demi-pinte à chacun jusqu’à ce que le tout soit consommé, et je veux que cela ait lieu tous les ans, le 17 de mars ou le 10 d’octobre. Ma raison en est que les habitants grossiers d’Irlande, chaque fois qu’ils s’assemblent, ne manquent que d’armes pour s’entre-détruire et j’ai voulu prendre le moyen le plus efficace pour les assembler, dans l’espérance qu’avec le temps ils dépeupleront eux-mêmes leur pays, qu’on pourra repeupler ensuite avec une race civilisée venue de l’Angleterre. »



Un riche particulier de Londres meurt et laisse à une certaine miss B..., qui ne le connaissait nullement, une fortune de plusieurs millions ; l’article du testament était ainsi conçu : « Je supplie miss B..., d’accepter le don de ma fortune entière, trop faible auprès des inexprimables sensations que m’a fait éprouver pendant trois ans la contemplation de son adorable nez. »



On rencontrait à Londres, au commencement de ce siècle, un vieil original, le docteur Martin van Butchell, habillé d’une façon singulière, et dont la caricature figura souvent à la devanture des libraires. Il se faisait voir au parc le dimanche, coiffé d’un tricorne, allant et venant à l’amble sur un cheval peint. On le traitait d’excentrique, même de charlatan, et l’on racontait qu’il avait fait fortune grâce à un tour assez curieux. Il avait épousé une dame appelée à jouir d’un legs considérable «  tant qu’elle resterait sur la surface de la terre. » Tels étaient les propres termes du testament. Il imagina de les prendre à la lettre, et, pour conserver l’usufruit après la mort de sa femme, il l’embauma, enferma la momie dans une vitrine et la garda dans sa chambre à coucher jusqu’à, son dernier jour ; après quoi on les enterra tous deux de compagnie. Beaucoup de gens affirmaient avoir vu de leurs yeux l’intéressante relique ; dans tous les cas, l’histoire eut cours et ne rencontra pas beaucoup d’incrédules.



La très-honorable Edith Mand Mure Campbell Raudon Abney Hastings, comtesse de London, baronuesse Camphell, London, Manchline et Terreuzene, morte à Ventnor (Ile de Wight) le 23 janvier 1874, a fait avant sa mort un testament qui contient une clause singulière. Après avoir, par ce document, légué tous ses biens à son mari survivant, Frédérick Abney Hastings, et exprimé le désir que son convoi fût aussi simple que possible, la testatrice a ajouté de sa propre main la clause que voici : « Je désire que ma main droite soit détachée de mon corps et enterrée dans le parc de Donnington, sur la pente de la colline qui descend vers le Trent, et qu’on place à l’endroit où elle aura été déposée une petite croix de pierre portant les mots : I byde my tyme (J’attends le moment). »



Louis Barbier, abbé de La Rivière, était un homme assez méprisé. Parti de très-bas, il s’éleva rapidement à force d’intrigues et de bassesses. Mazarin, à qui il vendait les secrets de Gaston d’Orléans, dont il était le favori, le récompensa en le faisant nommer en 1655 évêque-duc de Langres et pair de France. On raconte à ce propos qu’un jour (c’était après la mort de Gaston) l’abbé de La Rivière faisait, en présence de Mlle  de Montpensier, un grand éloge de feu son père : « C’était, disait-il, un prince très-sage, très-pieux et qui valait beaucoup. — Vous devez savoir mieux que personne ce qu’il valait, lui répondit Mademoiselle ; vous l’avez vendu assez de fois pour cela ! ... » Louis Barbier légua tous ses biens aux églises et aux hôpitaux de Langres et de Paris ; mais il ne voulut reconnaître aucun de ses parents. Son testament contient deux articles assez curieux qui méritent d’être cités ici. Ces deux articles sont ainsi conçus :

« Je ne laisse rien à mon maître d’hôtel parce qu’il y a dix-huit ans qu’il est à mon service.

Item. Je lègue 100 écus à qui fera mon épitaphe. »

Cette dernière clause, authentique ou non, prêta à des plaisanteries et à des épigrummes, dont la meilleure est sans contredit celle de La Moimoye, ainsi conçue :

Ci-git un très-grand personnage
Qui fut d’un illustre lignage,
Qui posséda mille vertus,
Qui ne trompa jamais, qui fut toujours fort sage.
Je n’en dirai pas davantage :
C’est trop mentir pour cent ecus.



Vaugelas, le grammairien, mourut à Paris en 1650, dans une profonde misère. Fréron, dans son Année littéraire, rapporte qu’on l’avait surnommé le Hibou, parce qu’il était obligé de garder la chambre tout le jour et qu’il n’osait sortir que de nuit, de peur de tomber entre les mains de ses créanciers. Son testament fut remarquable ; après avoir disposé de ses effets pour acquitter ses créanciers, il ajouta : « Mais comme il pourrait se trouver quelques créanciers qui ne seraient I pas payés quand même on aurait réparti le tout, dans ce cas ma dernière volonté est qu’on vende mon corps aux chirurgiens le plus avantageusement qu’il sera possible, et que le produit en soit appliqué à la liquidation des dettes dont je suis comptable à la société, de sorte que, si je n’ai pu me rendre utile pendant ma vie, je le sois au moins après ma mort. »



L’aventurier Théodore, qui fut un instant roi de la Corse et qui mourut misérablement dans un pauvre garni de Londres en 1755, songea aussi à satisfaire ses nombreux créanciers, et, dans son testament, il leur légua son royaume ; il avait même pris soin de l’hypothéquer à leur profit par-devant la cour des insolvables (insolvent court). L’histoire ne nous dit pas que les créanciers aient jamais bénéficié de l’hypothèque.



Le testament de Rabelais est célèbre. On connaît les derniers moments du maître railleur. Quand il eut reçu l’extrême-onction, il dit tout haut qu’on lui avait graissé les bottes pour le grand voyage. Le prêtre lui ayant demandé s’il croyait à la présence réelle de Dieu dans l’hostie, il répondit d’un air soumis : « Je le crois et j’en suis tout réjoui, car je crois voir mon Dieu tel qu’il était quand il entra dans Jérusalem, triomphant et porté sur un âne. » Ensuite il dicta ce testament burlesque : « Je n’ai rien vaillant, je dois beaucoup, je donne le reste aux pauvres. » Puis, éclatant de rire : « Tirez le rideau, la farce est jouée. » Le prêtre qui l’avait administré publia partout qu’il était mort ivre.



Ludovico Cortusio, célèbre jurisconsulte de Padoue au xve siècle, défendit par acte de dernière volonté, à tous ses parents et amis, de pleurer à son convoi. Celui d’entre