Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 15, part. 1, T-Tour.djvu/271

Cette page n’a pas encore été corrigée

TOLE

Chindesa’mte. Ervige, pour mieux établir son pouvoir, Ht assembler un concile k Tolède fîour faire confirmer solennellement son élection par les évêques et par les seigneurs du royaume. Il s’y trouva trente-cinq évêques, quatre abbés, trois députés et quinze seigneurs.

Seizième concile (683). Ce concile, composé de quarante-huit évêques, six abbés, vingt-sept députés et vingt-six des principaux officiers du palais, lit plusieurs règlements concernant les affaires temporelles.

Dix-septième concile (684). Les évêques d’Es|i ; igne n’ayant pu se trouver au sixième concile général de Constantinople, le pape Léon I [ leur envoya la définition de foi contre les mouothélites avec une lettre en leur annonçant la conclusion du concile. Les évêques de la province se réunirent au nombre de dix-sept k Tolède, pour recevoir les communications papules.

Dix-huitième concile (688). Ce concile eut pour objet, de répondre au pape Benoît II sur différentes controverses. Soixante et un évêques, cinq députés, deux ubbés et dix-sept comtes assistèrent à cette réunion, où le roi Egica se trouva en personne et qui fut présidée par saint Julien de Tolède.

Dix-neuvième concile (693). Cinquante-neuf évêques, cinq abbés et le roi Egica se trouvèrent a ce concile, où le roi fit présenter aux évêques un mémoire concernant les juifs et les fauteurs d’attentats politiques.

Vingtième concile (694). Ce concile, qui est le dernier (les conciles do Tolède dont nous ayons les actes, fut tenu également par le roi Egica, en présence d’un grand nombre d’évèques. Une conspiration venait d’être découverte parmi les juifs ; le huitième canon condamna tous les juifs d’Espagne à être dépouillés de leurs biens et réduits en servitude perpétuelle. Ceux dont ils deviendraient les esclaves ne devaient point leur permettre de pratiquer leurs cérémonies ; il leur était enjoint de leur ôter leurs enfants, à l’âge de sept ans, pour Ie3 élever chrétiennement et les marier ensuite à des chrétiens. Ces canons fuient confirmés par un édit royal.

Vingt et unième concile (701). Il ne nous reste de ce concile ni actes ni canons. Le roi Vitiza le fît réunir dans l’église de Saint-Pierre pour régler diverses affaires politiques.

Vingt-deuxième concile (1323). Six siècles s’écoulèrent entre le vingt et unième et le vingt-deuxième concile. Ce dernier fut provoqué par Jean, archevêque de Tolède et chancelier du royaume ; on n’y régla que des points de discipline ecclésiastique.

Vingt-troisième concile (1339). Ce concile, tenu sous Gilles d’Aibornoz, archevêque de Tolède, publia cinq canons, dont un est relatif k l’aliénation des biens de l’Église.

Vingt-quatrième concile (1473). Ce concile fut tenu par l’archevêque Alphonse de Caville ou de Cavillo, dans le bourg d’Aranda. Ou y fit vingt-neuf règlements sur la discipline ecclésiastique.

Vingt-cinquième concile (1565-1566). Christophe de Sandoval, évêque de Cordoue, tint ce concile avec les évêques de Siguença, de Ségovie, de Paleueia, de Cuença et d’Osina, dans la dixièmé année du règne de Philippe IL Le concile eut trois sessions. Dans la première, ou lut le décret du concile de Trente, touchant la célébration des synodes provinciaux et une profession de foi y fut signée ues assistants. La seconde session ne fut tenue qu’en 1566. On y lit trente et un canons de discipline. La troisième session se tint le 25 mars de la même année et produisit encore vingt huit canons sans intérêt.

TOLEDE (province de), province d’Espagne, entre celles déCuença k l’E., de Ciutlad-Real au S., de Madrid au N., celles d’Avila et de Cacérès k l’O. ; 330,000 hab. et 14,383 kiloin. carr. de superficie. Sa surface, traversée par les sierras de Tolède, de Guadalupe, de Rtibial, de Yévenes, de Uiliuerca, est irès-montagneuse dans la partie méridionale. Le reste est entrecoupé de collines et de vastes plaines. Elle est arrosée par le Tage, qui la traverse de l’E. À l’O., par le Pasa, le Scdana, le Sangrera, l’Algodor, le Gebilo, le Guaoaviuina, (’Alberche, la Tajuna, tous aifluents du Tage, et par le Guadiana, lij Guuualupejo, l’Estena, le Ballaqiie, la Gi^nela, qui courent dans sa partie orientale. Cependant ony manque d’eau de source ; il n’y existe que quelques lagunes. L’hiver y est pluvieux ; en été, lorsque le solano y soufde, il fait très-chaud. Le sol est très-fertile, et on y recueille du froment, du seigle, de l’orge, de l’avoine, des légumes, des fruits, beaucoup de vin, des olives, du safran, du lin, du chanvre, du cumin, etc. On y élève du gros et du menu bétail, des vers à soie et des abeilles. Il y existe des mines d’argent, de cuivre, de fer, de sel et de salpêtre^ L’industrie manufacturière y a pour objet la fabrication lie lainages, de toiles, d’étoffes de soie, telles que veluurs, peluche, damas, satin ; de rubans, de franges, de draps et de chapeaux tins et communs ; de sparterie, de soude, de savon, de poterie, de quincaillerie de fer et de cuivre ; des corderies, des moulins à papier, des verreries, des distilleries d’eau-de-vie, des tanneries. Son commerce a pour base les vins, la laine, les fromages de chèvre, le froment, les draps, les étoffes de

  • oie, le savon, la faïence, la poudre, le seljetc.

TOLE

TOLÈDE (Frédéric de), duc d’Albb, général espagnol, né dans la seconde moitié du Xvs siècle. Sa famille prétendait descendre des empereurs Paléologue. Il se signala par sa valeur en combattant les Maures de Grenade, prit part, en 1512, à la guerre qui venait d éclater entre l’Espagne et la France, reçut le commandement d’une armée, en qualité de capitaine général, s’empara de Parapelune, contraigntt les généraux français à repasser les Pyrénées, les poursuivit et se rendit maître de tout le royaume de Navarre. En récompense des services qu’il venait de rendre, le roi Ferdinand lui donna la ville de Hue.-ca.

TOLÈDE (don Pèdre db), surnommé le Grand, général espagnol, liis du précèdent, né à Alba-de-Tormès en 1484, mort en 1553. 11 gagna la confiance de Charles-Quint pendant la guerre de Flandre et fut nommé par lui vice-roi de Naples en 1532. Son gouvernement se signala par. quelques réformes dans l’administration de la justice, mais aussi par une excessive sévérité. Il détruisit les principaux repaires de voleurs et d’assassins, interdit le port des armes, excepté aux nobles, et frappa les coupables sans distinction de rang. En même temps, il s’attacha à embellir et à assainir Naples, où il fit construire des rues, des édifices publics, notamment le palais royal connu sous le nom de PulussoVecchio. En 1537, les Turcs ayant débarqué à Castro, il les repoussa et fortifia les villes maritimes de la Pouille. Profilant de la haine stupide dont les juifs étaient l’objet, Tolède chassa ces malheureux du royaume en 1540. Eu même temps, persuadé que le progrès des lumières devait nuire à la foi, il s’efforça d’étouffer toute culture littéraire et supprima toutes les académies instituées à Naples. En 1547, il entreprit d’instituer à Naples des tribunaux d’inquisition sur le modèle de ceux de l’Espagne ; mais un soulèvement gétiéral du peuple et de la noblesse le força de renoncer à ce projet. Il mourut à Florence en 1553, pendant une expédition dirigée contre Sienne. Il fut le père du trop fameux duc d’Albe.

TOLÈDE (Alvarez de), duo d’Albb, célèbre général espagnol, fils du précédent. V. Albe.

TOLÈDE (DON Pèdre db), connétable de Castille, de la même famille que les précédents, né dans la seconde moitié du xvia siècle. Nommé général des galères de Naples, il se battit contre les Turcs, lit avec succès une descente sur les côtes de iaMorée (1595) et devint un des favoris de Philippe III, qui le nomma connétable de Castille. Comme il était parent de Marie de Médicis, le roi d’Espagne le nomma ambassadeur de France

dans le double but de détacher Henri IV de l’alliance des Provinces-Unies et de lui proposer le mariage du dauphin avec une infante. ■ Don Pedro de Tolède, dit Pèréfixe, avait une morgue fière et grave et était haut et magnifique en paroles lorsqu’il s’agissait de l’honneur et de la gloire de sa nation et de la puissance de son roi ; mais, hors de la, fort civil et courtois, soumis et respectueux où il le fallait être, galant, adroit et spirituel. > Pendant ses entrevues avec le roi, il lui tint le plus fier langage. Ayant exalté la puissance de l’Espagne en des termes menaçants, Henri IV lui dit : « Si le roi d’Espagne continue ses attentats, je porterai le feu jusque dans l’Escunal, et si je monte une fois a cheval, on me verra bientôt à Madrid. — Le roi François I«ry fut bien, » lui répondit l’ambassadeur d’un ton calme et fier. Il échoua dans sa mission et retourna en Espagne, selon les uns en juillet 1608, selon d’autres au commencement de 1609.

TOLÈDE (don François de), vice-roi du Pérou 11 vivait au xvie siècle et appartenait à la maison d’Oropesa. Nommé vice-roi en 1566, il arriva à Lima cette même année, se mit aussitôt à persécuter les incas, attira à Lima, eu 1571, par de perfides promesses, le jeune inea Tupac Amaru, fils de Manco II, et le fit périr sur l’éohafaud, malgré les prières et les larmes des Espagnols eux-mêmes. De retour en Espagne en 1581, il fut accueilli par Philippe II d’une façon foudroyante. Arrêté sous l’inculpation de malversations et dépouillé de ses immenses richesses, il fut jeté en prison, et y mourut.

TOLEDO, ville des États-Unis (Ohio), sur la gauche de la Maumée, k 4 milles environ de sou embouchure dans le lac Erié. Elle a pris et parait devoir conserver la prééminence comme marché central des grains de l’Ohio et d’une partie du N.-O. et des pro-I duits manufacturés de New-York. C’est au- ! jourd’hui, après Chicago, l’entrepôt le plus florissant du commerce des céréales et l’dn des principaux points de passage des éinigrants qui, de l’État de New-York, vont s’établir dans les cultures de l’Ouest. Les principaux articles du commerce de Toledo ’ sont : les farines, les blés, les alcools, les bestiaux, les viandes sèches, les peaux, la potasse, les bois de construction, 1 épicerie, la nouveauté, la faïencerie, la cristallerie, la quincaillerie, etc. Ces articles figurent alternativement, pour la plupart, a l’importation ’ et à l’exportation. Les produits amenés par 1 la voie des lacs se dirigent sur TObio et ■ l’Ouest en échange des denrées apportées 1 par les chemins de fer et le canal. La navigation des lacs trouve, k Toledo le double

TOLE

avantage d’un por.t commode et de nombreux et profitables éléments d’échange.

TOLÈNE s. m. (to-lè-ne). Chim. Produit de la distillation du baume deTolu avec l’eau. TOLENTINO, ville du royaume d’Italie, sur une colline au’ pied de Inquelle coule le Chienti, dans la province et k 19 kilom. S.-O. de Macerata ; 11,000 hab, Tannerie.-i, fabriques de faïence. Elle avait, dès le ve siècle, un évêché qui fut réuni k celui de Macerata en 15S6. La cathédrale, dédiée à san Nicolo di Tolentino, est décorée de quelques bonnes peintures. Tolentino est remarquable par le souvenir de la paix qui y fut conclue avec la France en 1797 et de la bataille qu’y perdit Murât en 1815, bataille qui eut pour conséquence la perte de sa couronne.

Tolentino (TRArTÉ de), conclu et signé entre le pape Pie VI et la République française le l" ventôse (19 février 1797). Dès que Mantoue eut capitulé, Bonaparte, sans même attendre que le vieux Wurmser vint lui rendre son épée, partit pour Bologne afin de faire la loi au pape, qui n’avait que trop manifesté son antipathie contre la République. Les ordres que lui avait transmis le Directoire lui enjoignaient, pour ainsi dire, de détruire la puissance temporelle du saintsiége ; mais Bonaparte, sans tenir compte des ordres reçus par lui, avait arrêté dans son esprit des prétentions plus modestes ; il ne voulait arracher au pape qu’une ou deux provinces et une forte contribution de guerre. À la tête de la division Victor, qu’il réunit à Bologne, et de quelques recrues italiennes levées en Lombardie et dan3 la Cispadane, il marcha sur les États romains. Le pape se trouva alors dans la plus cruelle anxiété, car il n’ignorait pas que la perfidie de ses intentions et de ses actes mêmes était parfaitement connue du général français, dont le nom seul-jetait la terreur en Italie. Aux bords du Senio, Bonaparte rencontra l’armée papale, qu’il mit en déroule en un instant ; puis il s’avança jusqu’à Ancôue, où il enveloppa 3,000 hommes commandés par le général autrichien Colli et les fit presque tous prisonniers. Il se dirigea ensuite sur Lorette, s’avançant directement sur Rome, et arriva à TolentW le 25 pluviôse (13 février). Le pape allait quitter Rome, lorsque le général des camaldules, que Bonaparte avait vu k Tolentino, arriva au Vatican et rassura Pie VI sur les intentions peu révolutionnaires du général français. Le pape envoya alors k Tolentino le cardinal Mattei, le prélat Galeppi, . le marquis Massimi et son neveu le duc de Braschi, avec des pleins pouvoirs pour traiter, pourvu que le général n exigeât aucun sacrifice contraire a la foi catholique, chose, au fond, très-indifférente k Bonaparte quand cela ne contrariait pas ses projets. Les articles du traité furent, en conséquence, prompiement arrêtés et signés ; en voici la substance :

Le pape renonçait k tout traité d’alliance contre la France ; il reconnaissait la Republique et se déclarait avec elle en paix et bonne intelligence. « Il lui cédait tous «es droits sur te Comtat^Venaissin ; il abandonnait définitivement à la république Cispadane les légations de Bologne et de Ferrare et, en outre, la belle province de la Romagne. La ville et l’importante citadelle d’Ancône restaient au pouvoir de la France jusqu’à la paix générale. Les deux provinces du duché d’Urbin et de Macerata, que l’année française avait envahies, étaient restituées au pape moyennant la somme de 15 millions. Pareille somme devait être payée conformément k l’armistice de Bologue, non encore exécuté. Ces 30 millions étaient payables deux tiers eu argent et un tiers en diamants ou pierres précieuses. Le pape devait fournir, en outre, 800 chevaux de cavalerie, 800 chevaux de trait, des buffles et autres produits du territoire de l’Église. Il devait désavouer l’assassinat de Basseville et faire payer 300,000 francs tant k ses héritiers qu’a ceux qui avaient souffert du même évéuemept. Tous les objets d’art et manuscrits cédés à la France par l’armistice de Bologne devaient être sur-le-champ dirigés sur Paris. » (Thiers.)

TOLÉRABLE adj. (to-lé-ra-ble — lat. to-

terabilis ; de tulerare, supporter). Qu’on peut tolérer, supporter : C’est une souffrance tolérable. Je vous souhaite une vie tolérable ; car, pour une vie heureuse, cela est trop fort. (Volt.) La conquête, odieuse à tout peuple, ne devient tolérable aux yeux de ceux gui la subissent qu’au prix d’un bon gouvernement. (Thiers.)

TOLÉRABLEMENT adv. (to-lé-ra-b !e-man

— de tolêruble, et du suffixe ment). D’une manière tolérable, passable, supportable : Un bon pays se rétablit toujours par lui-même, pour peu qu’il soit tolérablbment régi. (Vult.)


TOLÉRAMMENT adv. (to-lé-ra-man — rad. . tolérant). Avec tolérance, d’une manière tolérante : Le gouverneur de Launay s’était d’ailleurs prêté le plus toléramment du monde à l’exécution de toutes ses fantaisies, (De Santeny.) || Peu usité.


TOLÉRANCE s. f. (to-lé-ran-se — rad. tolérer). Action de tolérer ; condescendance, indulgence qui empêche de réprimer ou de condamner : Nous demandons la tolérance ; accordons-la, exerçons-la pour en donner l’exemple. (Buff.) Dans la vie sociale, la vertu la plus utile est la TOLÉRANCE. (Mme  Monmarson.) La TOLÉRANCE n'est pas exclusive de la lutte. (L. Jourdan.) Quand la politesse va jusqu'à une TOLÉRANCE aveugle, elle équivaut à une trahison envers soi-même. (De Custine.) La TOLÉRANCE n'est pas la liberté. (E. de Gis.)

Tolérance religieuse ou simplement Tolérance, Condescendance par laquelle on laisse à chacun la liberté de pratiquer la religion qu'il professe : Il est affreux d'enseigner que la TOLÉRANCE est dangereuse. (Volt.) La TOLÉRANCE est le résultat d'une foi éclairée. (E. Alletz.) L'absolue liberté de la controverse religieuse résulte du principe de la TOLÉRANCE. (Villemain.) De l'inutilité des persécutions et des tortures est née la TOLÉRANCE RELIGIEUSE. (E. de Gir.)

Tolérance théologique ou ecclésiastique, ou simplement Tolérance, Condescendance par laquelle on souffre toutes les opinions qui ne sont pas manifestement contraires à la doctrine de l'Église : L’Église latine a toujours usé de TOLÉRANCE pour l'Église grecque. (Acad.) — Tolérance civile ou simplement Tolérance, Permission accordée par un gouvernement de pratiquer dans l’État certaines religions qui n'y sont pas légalement reconnues.

Maisons de tolérance, Maison de prostitution : Il est interdit à une maîtresse de MAISON DE TOLÉRANCE de garder ses enfants chez elle. (Frégier.)

— Monn. Quantité en plus ou en moins que l'État tolère dans le poids des monnaies ou dans les proportions de l'alliage.

— Administr. milit, Écart toléré dans les dimensions des armes et des projectiles,

— Méd. Faculté qu'a un sujet de résister aux effets naturels de certaines substances : L'innocuité des poisons sur Mithridate est un fait de TOLÉRANCE fort célèbre.

— 'Encycl. Philos. « Qu'est-ce que la tolérance ? dit Voltaire. C'est l'apanage de l'humanité ; nous sommes tous pétris de faiblesses et d'erreurs : pardonnons-nous réciproquement nos sottises, c'est la première loi de la nature. » Chez les Juifs, la secte des saducéens fut respectée malgré ses croyances ; les Grecs pratiquèrent la tolérance en respectant Épicure et ses disciples. Quant à Socrate, sa mort doit être moins attribuée à l'intolérance religieuse et au fanatisme qu'à des inimitiés personnelles. Les Romains se montrèrent les plus tolérants de tous les peuples ; ces grands conquérants comprirent qu'ils ne pouvaient conserver toutes les provinces que leurs armes avaient réduites à la soumission qu'à l'unique condition de respecter les croyances des vaincus ; non-seulement les dieux étrangers étaient supportés, mais encore ils avaient leur place à Rome ; les Juifs purent élever des synagogues. Les chrétiens, il est vrai, finirent par ne pas rencontrer la même bienveillance ; mais ils avaient d'abord été tolérés, comme toutes les sectes religieuses, et ils ne furent persécutés que lorsqu'ils déclarèrent la guerre aux autres cultes, au nom d'un principe que Rome ne pouvait pas admettre, à savoir qu'eux seuls avaient raison. Ils renversèrent les idoles ; on les contraignit au respect des lois. Il ne s'agissait donc pas, comme les historiens ecclésiastiques veulent le faire entendre, de les contraindre à adorer un Dieu qui n'était pas le leur, mais bien de les empêcher de briser les statues des dieux romains et de continuer une propagande dangereuse pour la sécurité de l'État. De fait le christianisme, devenu puissant, renversa non-seulement le paganisme, mais l'empire, ce qui montre que les empereurs, en le combattant, pressentaient très-bien sa puissance d'action. Thomas d'Aquin reconnaît d'ailleurs que, si les disciples de Jésus ne détrônèrent pas les empereurs, c'est que cette tâche fut trop lourde pour leurs forces. L'intolérance fit son apparition dans le monde avec le christianisme. Dès le premier siècle, les ébionites, qui niaient que Jésus-Christ fût un Dieu, se virent persécutés par les chrétiens ; les nicolaïtes, qui demandaient la communauté des biens, c'est-à-dire exactement ce que prétendaient opérer les apôtres, furent considérés comme les pires ennemis de l’Église naissante ; les gnostiques soulevèrent l'indignation des fidèles et furent traités d'idolâtres. Tertullien, Praxéas, Origène, Novatien, Novat, Donat, Sabellius eurent, avant même le règne de Constantin, à se repentir de leur indépendance, et bientôt après les disputes des athanasiens et des eusébiens firent couler le sang. Dès l'origine, on vit les apôtres se diviser entre eux et se déclarer la guerre ; la lutte de saint Paul et de saint Pierre à propos de la circoncision des gentils a laissé des traces ineffaçables dans les Actes des apôtres, quel que soit le soin que l'on ait pris plus tard pour atténuer le caractère très-vif de ces luttes et en effacer le souvenir. Dès le Ier siècle, la Judée compta une vingtaine de sectes et un nombre incalculable de prophètes et de messies. Il y avait alors une trentaine d’Évangiles, tous différents et dont les doctrines opposées étaient soutenues avec acharnement par les sectaires qui appelaient de toutes leurs forces les rigueurs du pouvoir contre les sectes rivales. « Lorsque enfin, dit Voltaire, quelques chrétiens eurent embrassé les dogmes de Platon et mêlé un peu de phi-