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11 suffit de la correspondance adressée k Mlle Stourdza, la partie la plus intéressante, pour apprécier son caractère, son rôle et Son talent d écrivain.

C’est le talent seul de M™e Swetchine qui doit être l’objet de notre critique. En général, ses lettres sont un peu uniformes et maniérées. On peut dire, à son acquit, que la recherche et la subtilité, tant dans la censée que dans l’expression, ont chez elle quelque chose de naturel. C’est la finesse et l’ingéniosité propres à l’esprit byzantin, amoureux du brillant, du singulier, du bizarre. Elle a aussi une exquise et aimable distinction, empruntée sans doute à la société parisienne. Elle sait narrer avec grâce et facilité. Mais quant à la comparer avec M"18 de Sévigué, il faut y renoncer. La spirituelle marquise, qui lisait pourtant saint Augustin, aux jours de pluie, n’eût rien compris k la métaphysique orthodoxe de Mme Swet’.-hine ; et certainement elle eût écrit en un style plus franc et plus juste. Elle aimait moins la subtilité et davantage le simple bon sens. Le véritable intérêt des lettres de cette dévote réside dans le conflit de ses aspirations naturelles de femme et de son énergie k les réprimer. Ce tableau ne la rend guère sympathique ; néanmoins il la fait estimer. Une lutte morale qui aboutit au triomphe de la volonté est toujours un spectacle frappant.

Dans ses lettres, comme dans ses Pensées et dans ses Essais, M™e Swetchine, en analysant sou caractère et son cœur, a trouvé des pensées tines et pénétrantes, bonnes k méditer. C’est ce qu’elle a’ laissé de plus durable. « Seulement, dit Sainte-Beuve, si ses amis sont sages, ils la loueront avec un peu plus de sobriété qu’ils ne font depuis quelque temps ; ils exigeront pour elle un peu inoins qu’ils ne sont en train de réclamer ; car le public français, qu’on mène si loin et qui, par moments, se laisse faire Je plus docilement du monde, a ses brusques impatiences et ses retours. Il y a aussi des indigestions d’esprit. •

SWETTL, ville de l’empire d’Autriche.

V. ZWBTTBL.

SWEVEGHEM, bourg de Belgique, province de la Flandre occidentale, arrond, et à 4 kilom. O. de Courtrai ; 5, S80 hab. Distilleries, huileries, fabrication de toiles de lin.

SWEVEZEELE, bourg de Belgique, province de la Flandre occidentale, arrond. et k 13 kilou). S. de Bruges ; 5,000 hab. Fabrication de toiles et tissus de lin.

SWEYNHEIM (Conrad), imprimeur allemand, mort vers 1476. Il fonda avec Pannartz la première imprimerie en Italie. Après s’être séparé de celui-ci en U73, il entreprit une édition de Ptolémée avec cartes géographiques. Ce travail, dont la préface parut en U78, ne fut pas achevé. On croit que Sweynheira fut, comme son ancien associe Pamiartz, victime de la peste qui ravagea Kome en 1475.

SWIENTOPELK ou SVATOPLUK, roi de Moravie, mort eu 894.11 reçut le baptême avec Rastistaf, son oncle, des mains de saint Cyrille et de Methodius (862), se mit, ainsi que son royaume, sous la protection de Carlonian (870), auquel il livra Kastislaf, et devint maître et roi de la Moravie, puis de la Bohême. Soupçonné de vouloir se soustraire k la suzeraineté de Louis le Germanique, il fut emprisonné pendant quelque temps (871). Il accepta le commandement des Allemands contre ses compatriotes, mais il s’entendit en secret avec ceux-ci. Les Allemands furent surpris et défaits et Swientopelk, redevenu roi des Moraviens et des Tchèques, chercha k se soustraire à la vengeance germanique en se coalisant aveu d’autres princes slaves. En 872, il eut k subir une invasion des armées de Louis II. La Bohème fut ravagées mais pendant ce temps Swientopelk remportait ailleurs des succès sur les armées de Carlonian et de Louis et forçait ainsi l’armée d’invasion à évacuer la Bohème. L’année suivante, la paix fut conclue entre Louis II et Swientopelk. Ce dernier réunissait presque tous les peuples slaves sous son sceptre, sion empire s’étendait, k ce qu’on croit, au nord-ouest jusqu’à Magdebourg, au nord jusqu’à la Vistule et jusqu’aux bouches du San, k l’est et au sud jusqu’au Danube et jusqu’à la Theiss. En 874, Swientopelk obtint de Charles le Gros la Pannonie, pour laquelle il lui fit hommage comme vassal. Il eut ensuite à lutter contre Arnuulf, se réconcilia pendant un certain temps avec ce prince, qu’il aida, en 887, k détrôner Charles le Gros, et se brouilla de nouveau avec lui en 892. L’immense empire formé par Swientopelk ne Jui survécut pas.

SWIENTOPELK ou ZUENTIBOLD, fils naturel de l’empereur Arnoulf, roi de Lorraine, tué en 900. Il reçut son nom de Swientopelk, roi de Moravie, son parrain, et fut couronne roi de Lorraine en 895. Il assiégea Laon en 89C, dépouilla de leurs biens et de leurs dignités les comtes Étienne, Odacres, Gérard et Malfried et épousa Oda, tille du comte Eudes, roi de France. Il assista k la diète générale deWorms (897), où il se réconcilia avec les quatre comtes qu’il avait dépouillés, et à la diète convoquée à Saint-Goar sur le Rhin en 898. Swientopelk ayant mécontenté le clergé et les grands, ces derniers se soulevèrent et proclamèrent à Thionville le roi Louis, roi de Lorraine. Swientopelk fut tué dans une

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bataille qu’il leur livra sur les bords de la Meuse.

SWIENTOPELK ou SV1ATOPOLK, fils du

prince Iaropolk Sviatoslavicz et fils adoptif de Vladimir le Grand, qui avait épousé en secondes noces la veuve d’Iaropolk, grand-duc de Kiev, né à Kiev en 980, mort vers 1100. Vladimir ayant partagé de son vivant ses États entre ses fils, Swientopelk obtint Turof (dans le gouvernement actuel de Minsk). Mécontent du lot qui lui était attribué et confiant dans l’alliance du roi de Pologne Boleslas le Brave, dont il avait épousé la fille, il prit les armes et s’empara de Kiev. Mais il fut vaincu et emprisonné ainsi que l’évêque Reinbern, qui l’avait converti à la religion romaine. Il réussit k sortir de prison après la mort de Vladimir (1015), rentra à Kiev et justifia le surnom de Maudit (Qkaiannyï), qui lui fut attribué, en- faisant assassiner ses frères, Boris et Hleb, ainsi que Sviatoslnf, prince des Drevliens. Vaincu par Iaroslaf, duc de Novgorod, il s’enfuit auprès du roi de Pologne. Iaroslaf attaqua ce dernier, mais il fut défait et toute la Ruthénie y compris Kiev tomba entre les mains de Boleslas. Swientopelk, mécontent de la domination oppressive des Polonais sur Kiev, excita les Ruthènes k une insurrection. Attaqué k Ki fois par Iaroslaf et par Swientopelk, Boleslas fui forcé de se retirer en Pologne. Swientopelk s’efforça en vain de ressaisir le pouvoir k l’aide du concours des Pieczyngues ou Petchénègnes. Vaincu par Iaroslaf et ne pouvant plus compter sur l alliance de son oncle Boleslas qu’il avait trahi, il se retira dans les Carpathes, sur les frontières de la Bohême. Ce fut lk qu’il mourut k l’âge, dit-on, de cent vingt ans.

SWIENTOPELK ou SVIATOPLDK, fils d’Othon 1er, marquis d’ûlmutz, mort en 1109. Il chassa de Bohême Borziwoy et le força de se réfugier en Pologne. Appelé à rendre compte de sa conduite auprès de l’empereur Henri, il fut emprisonné et n’obtint sa liberté qu’au prix d’une forte rançon. Il accompagna l’empereur dans ses expéditions contre les Hongrois et contre les Polonais et fit massacrer sans pillé la famille Werszowiez dont un membre avait favorisé les Hongrois. Il périt assassiné par l’un des survivants de cette famille.

SWIENTOPELK, fils de Vladislas II, roi de Bohême, et de Gertrude, sœur de l’empereur Conrad, mort en Bavière vers 1180. Il accompagna le roi son père dans l’expédition de Hongrie, en 1164, et épousa la princesse hongroise Odile. Il tua de sa propre main le ministre Vegislas (1170) et fut forcé pour ce motif de quitter la Hongrie. Il se réfugia d’abord en Hongrie, puis en Bavière, mais il comprit bientôt combien était funeste l’immixtion des Allemands parmi les Slaves et appuya l’insurrection des Borusses (1243). Mais alors les Polonais et les Teutoniques se coalisèrent contre lui. Swientopelk dut conclure la paix à des conditions humiliantes. Il recommença bientôt la guerre en s’alliant aux Borusses et aux Lithuaniens, s’empara de Swiecie, mais, forcé de céder devant les chevaliers Teutoniques et les troupes des croisés que leur avait procurés la bulle du pape, il dut conclure de nouveau la pnix en 1249. Il fut plus heureux contre, les Polonais, leur enleva la ville de Nackel ou Naklo et repoussa les attaques des princes polonais qui s’efforçaient de reprendre cette place. Il eut ensuite k lutter contre Wurcislas, duc de la Poméranie occidentale (1259).

SWIENTOPELK 1er, duc de Poméranie au Xlie siècle. Il refusa de payer tribut à son suzerain, le roi de Pologne Boleslas Bouche-Torse, et se déclara indépendant. Assiégé par Boleslas dans Nackel, il se soumit, paya une rançon, donna son fiis eu otage et fut confirmé dans sa dignité. L’année suivante, il se souleva de nouveau, fut assiégé pour la seconde fois dans Nackel, livré par la garnison aux Polonais et emmené eu Pologne, où il fut renfermé pour le reste de sa vie.

SWIENTOPELK II, fils de Mestwin, Mszczug ou Mistygniew, duc rie Poméranie, mort

k Dantzig en 1266. Il fut nommé en 1217, par

"le roi de Pologne Leszko le Blanc, gouverneur de la Poméranie Dantzicoise, avec obligation de lui payer annuellement J,000 mutes d’argent. Eu 1218, les poméraniens lui offrirent le titre de duc, qu’il refusa, ne se sentant pas encore assez puissant pour pouvoir rompre ouvertement aveu le roi. Il sema la division parmi les princes polonais, s’allia k l’un d’eux, Odonicz, surprit et tua Leszko (1227). Ensuite, de concert avec les chevaliers Teutoniques, il attaqua la Pologne.

SW1ERCKOWSKI, général de Cosaques. 11 vint au secours du palatin moldave Iwon ou louonia contre les armées de Sélim (1574) et remporta des succès éclatants sur les Toircs et sur les Valaques, leurs alliés ; mais, Sans une dernière bataille, il fut, par suite de la trahison d’un de ses officiers, vaincu, tait prisonnier et emmené k Constantinopie. Il réussit k s’écbappor et guerroya encore pendant plusieurs années contre les Turcs suites bords de la mer Noire.

SWIETEN (Gérard, baron Van), célèbre médecin, né k Leyde en 1700, mort à Scbœnbt-unn en 1772. Élève de l’illustre Boerliaave, il obtint le grade de docteur à l’âge de vingt-SWIF

cinq ans, professa la médecine à l’université de Leyde et fut appelé en 1745 k Vienne par Marie-Thérèse, qui le mit en possession de la chaire de médecine et d’anatoroio de l’université de cette capitale. Peu après, il fut créé premier médecin de l’impératrice et reçut le titre de baron. Van Swieten obtint de Marie-Thérèse la création à Vienne de plusieurs établissements utiles. Ce fut lui qui établit dans cette ville un amphithéâtre anatomique, un laboratoire public de chimie et un jardin botanique. Nommé directeur général des études et censeur, il montra une inflexibilité de caractère poussée k l’excès et fit prohiber un grand nombre de livres contraires à ses doctrines, ce qui le fit nommer le Tyran des esprits et I Assassin des corps. L’ouvrage qui lui a valu sa réputation a pour titre : Commentaria in H. Boerhaavii aphorismos de cognoscendis et curandis taorôis (Leyde, 1741-1778, 5 vol. in -40) ; il s’y est attaché k développer les principes de son maître. Ce traité a été traduit en français par parties séparées et sous les titres suivants : les Fièvres intermittentes (in-12) ; les Maladies des enfants (1769, in-12) ; Traité de la pleurésie (in-12) ; les Aphorismes de chirurgie (2 vol. in-12). On lui doit, en outre : Description des maladies oui régnent le plus ordinairement dans les armées (Venise, 1759, in-8«), en français ; Traité de la médecine des' armées, en allemand, mais qui a été traduit en français ; Essai sur les épidémies (Vienne, 1782, 2 vol. in-8<>).

SWIÉTÉNIE s. f. (svié-té-nl — de Van Swieten, méd. holhmd.). Bot. Genre d’arbres, de la famille des cédrélacées, type de la tribu des swiéténiées, dont l’unique espèce croit dans l’Amérique tropicale : La swibtknib fournit le bois bien connu dans t’ébénisterie sous le nom d’acajou. (A. Dupuis.)

SWIÉTÉNIE, ÉE adj. (sviété-ni-é —rad. swiéténie). Bot. (Jui ressemble ou qui se rapporte k la swiéténie.

— s. f. pi. Tribu de la famille des cédrélacées, ayant pour type le genre swiéténie.

SWIFT (Jonathan), écrivain satirique anglais, né k Dublin le 30 novembre 1667, mort dans la même ville le 19 octobre 1745. Lorsque Swift vint au monde, sa mère était veuve depuis quelques mois. Cette naissance posthume et l’intérêt que lui témoigna sir William Temple accréditèrent la supposition qu’il était le fils de cet homme d’État. Cette hypothèse, accueillie par quelques biographes, est sans fondement. Mistress Swift ne vivait que des rares et faibles secours fournis par ses parents, Élie laissa son enfant k une nourrice qui l’emmena dans son propre pays, k Whilehaven, en Angleterre, et l’y garda six années, au bout desquelles Jonathan fut remmené k Dublin, bien purtant, robuste, turbulent et sachant déjà lire dans la Bible. Un de ses oncles, Godwin Swift, homme de loi, le plaça k l’école de Kilkenny et, h l’âge de quatorze ans, au collège de la Trinité, dans la même ville. Les registres mentionnent qu’il y fut reçu, comme boursier et pensionnaire, le 21 avril 1682. Swift resta quatre années au collège et fut reçu bachelier à grand’peine. ■ En 1685, dit M. H. Taine, dans la grande salle de l’université de Dublin, les professeurs occupés à conférer les grades de bachelier eurent un singulier spectacle : un pauvre écolier, bizarre, gauche, aux yeux bleus et durs, orphelin, sans amis, misérablement entretenu par la charité d’un oncle, déjà refusé pour son ignorance en logique, se présentait une seconde fois sans avoir daigné lire la logique. En vain son tutor lui apportait les in-folio les plus respectables, Suieglesius, Keckerinannus, Bugersdicius, il en feuilletait trois pages et les refermait au plus vite. Quand vint 1 argumentation, le proefor fut obligé de lui mettre ses arguments en forme. On lui demandait comment il pourrait bien raisonner sans les règles ; il répondit qu’il raisonnait fort bien sans les règles. Cet excès de sottise fit scandale ; on le reçut pourtant, mais à grand’peine, speciali gratia, dit le registre, et les professeurs s’en allèrent sans doute avec des risées de pitié, plaignant le cerveau débile de Jonathan Swifc. » L’écolier fut ensuite admis k l’université de Dublin, où il semble avoir fait un meilleur emploi de son temps. Il s’y occupa avec ardeur de l’étude de l’histoire et de celle du droit. A cette époque, son oncle Godwin mourut. Swift eût été sans doute obligé d’interrompre ses études si un, autre oncle, Dryden-William Swift, 11e fût venu.généreusement k son secours.

Lorsque la révolution de 1688 éclata, Swift avait vingt ans. L’âge était venu pour lui de choisir une carrière. Il quitta l’Irlande avec l’insouciance de la jeunesse, sans projets d’avenir bien arrêtés, débarqua en Angleterre et, fort léger d’argent, se rendit k pied k Leicester, chez sa mère, qu’il voulait consulter. Mistress Swift, dénuée de toutes ressources, conseilla k son fils ds solliciter la protection de sir William Temple, auquel elle était alliée. Le jeune homme, las de subsister des bienfaits de ses oncles, humilié de sa dépendance et mécontent k l’avance de son sort dans une société où, pauvre, il devait se résigner à une situation toujours subalterne, vint pourtant, k litre de cousin de lady Tem-ple, demander sa protection k sir William, qui l’accueillit aveu cordialité, l’invita k rester chez lui et se l’attacha bientôt comme

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secrétaire. Swift, qui eut tout jeune une ambition démesurée, trouva cette situation humiliante. Il aurait voulu que sir William le traitât comme un purent et le fit manger à sa table. Ce qui l’ennuyait, c’était de toucher 20 livres de gnges par an et de manger k la table du maître d’hôtel ; il se croyait traité comme un simple laquais, ce qui n’était pas tout k fait vrai, et, tout en faisant des odes pindariques en l’honneur de son protecteur, il recherchait la familiarité de la valetaille avec laquelle il s’imaginait qu’on le confondait. Tout le fiel que Swift amassa en lui-même durant les dix années qu’il passa chez sir William Temple, il le conserva pieusement jusqu’à la fin de sa vie et lui donna une issue dans ces facétieuses Instructions aux domestiques, un de ses derniers ouvrages, et qui sont d’une ironie si mordante : « Pt-uvres hères I cadets du ciel, indignes de son soin, dit-il à ses anciens camarades, nous sommes trop heureux d’attraper les restes et le rebut de la table ! c’est pourquoi, quand vous trouvez que les années viennent sans espérance d’une place k la cour, d’un commandement dans 1 armée, d’un poste dans une administration, ce qui n’exige pas qu’on sache lire et écrire, lorsque vous avez perdu l’espoir d’enlever la fille ou la nièce de votre maître, je vous conseille expressément d’aller vivre sur la grande route, seul poste d’honneur qui vous soit laissé ; vous y rencontrerez beaucoup de vos vieux camarades et vousy ferez une vie courte et bonne. » Swift aurait pu être plus reconnaissant envers son protecteur. Chez sir William, délivré des soucis matériels et n’ayant presque rien k faire, il put s’occuper des choses de l’intelligence et consacrer k l’étude huit heures par jour. Il s’initia k presque toutes les connaissances humaines, se portant de préférence sur la littérature, la jurisprudence et la politique. Ses brillantes facultés se développèrent rapidement. L’apprentissage des affairés politiques, sous la direction de sir William, donna ii sa vigoureuse intelligence une trempo plus hardie et lui ouvrit tout k coup des horizons plus étendus.

William Temple avait bien vite reconnu les capacités de son jeune secrétaire et avait deviné en lui un polémiste de premier ordre. Il jugea k propos de le présenter au roi, qui souvent le visitait dans s» terre de Sheen ou k Moor-Park, et il lui fut désormais permis d’assister aux entrevues confidentielles du roi avec le célèbre homme d’État. Guillaume, qui reconnut au jeune homme une certaine intrépidité de caractère, lui offrit une compagnie de dragons. Swift, qui avait d’autres aspirations, refusa et préféra l’état ecclésiastique. Sir William, d’un autre côté, lui proposa un emploi dans la chancellerie ; il refusa encore et se rendit à Oxford pour prendre ses degrés eu théologie. Reçu docteur en 1693, il entra dans les ordres, k Dublin, l’année suivante. Ses lettres d’ordination comme diacre sont datées du 1B octobre 1694 et, comme prêtre, du 18 janvier 1C95. Il croyait qu’on allait d’emblée faire de lui au moins un évêque ; tout ce qu’il obtint fut un petit bénéfice de chapelain à Kilroot, diocèse da C011nor. Ne pouvant supporter un pareil mécompte et peu soucieux d’enfouir ses ambitions dans une cure de campagne, il revint ù Moor-Park, où sir William l’accueillit d’autant mieux, qu’il venait de so mêler imprudemment de la querelle des anciens et des modernes et que l’esprit de Swift pouvait lui servir. Ayant pris parti pour la supériorité des anciens, il avait contre lui le docteur Richard Bentley et Wotton, qui l’attaquui«înt k outrance. Swift riposta par lu Bataille des livres (1695), son premier pamphlet, composition rapidement écrite, leste d’allure, où il lance les uns contre les autres les auteurs anciens et modernes les plus distingues dans les différents genres. La mort de sir William, survenue en 1699, le laissa sans appui et sans fortune ; un legs modique en argent para pour un instant aux embarras de sa nouvelle situation, puis il retomba dans la gène. La publication dos ouvrages posthumes de son protecteur, qu’il fit imprimer avec une dédicace adressée au roi, fut peine perdue. Guillaume III ne se souvenait pîus d’un jeu ie homme qu’il avait k peine aperçu par hasard et qui se croyait avoir des droits k la familiarité du monarque. Swift lui adressa un mémoire pour réclamer sa protection. Le mémoire eut le sort de la dédicace. Alors, k bout de ressources, il accepta la position de chapelain et de secrétaire auprès de lord Berkeley, qu’il suivit en Irlande. Brouillé avec ce seigneur à la suite de quelques domêlés assez irritants, puis réconcilié avec lui, il obtint enfin le bénéfice de Dunlavin et les cures de Luracor, Agher et de Ratheggan, qui portaient son revenu annuel k environ 10,000 francs. Il se retira k Laracor et y vécut tranquille jusqu’en 1701, époque k laquelle il revint k Londres pour se jeter a corps perdu dans la politique. Le parti whig l’attira tout d’abord et ce fut pour lui qu’il combattit ; ses chefs, Somers, Halifax, Oxford et Portland, venaient d’être mis eu accusation k la suite d’émeutes populaires. Dans un brillant pamphlet, Discours sur les contestations survenues entre les nobles et le peuple à Athènes et à Rome, qui parut anonyme (Londres, 1701, in-8°), Swift prit leur défense, et, lorsqu’il sa nomma dans uno édition postérieure (17114), on le considéra dès lors comme un des chefs