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Pour tracer sommairement le tableau des principales superstitions qui ont exercé et exercent encore une grande influence sur un grand nombre d’esprits, nous ferons quelques emprunts au Traité des superstitions par le chanoine Thiers et à l’excellent résumé de M. Chéruel. La croyance à l’existence des fées est une des superstitions les plus généralement répandues. Les fées résident dans des palais merveilleux, taillés dans le diamant et le saphir, et leur pouvoir n’est limité que par celui de leurs rivales. Les korigans bretons sont des nains bizarres et difformes . qui se cachent dans les sombres blocs de Karnae ; la nuit, ils entourent le voyag-eur assez imprudent pour s’aventurer sur les landes et ils l’entraînent dans leur ronde infernale. Les ondines pertides attirent et séduisent par leur beauté et précipitent dans les flots de la Moselle leurs nombreux adorateurs. Dans le Jura et la Franche-Comté, les herlequins se livrent à des chasses fantastiques dans les forêts profondes, et le paysan se signe avec crainte lorsqu’il croit voir leur essaim qui tourbillonne. L". drac du Languedoc et de la Provence poursuit et effraye les enfants de ses cris. Le follet et le fadet du Berry attirent les’paysans dans les marais. Dans les Alpes, les solèves aident aux travaux du jardinage. Le gobelin nettoie la maison en Normandie et fait la besogne de la ménagère. Le loup-garoti rôde toute la nuit et s’enfuit lorsque le jour parait. Partout enfin, au Nord et au Midi, dans chaque contrée, l’homme a peuplé l’air, les bois et l’eau d’êtres invisibles et mystérieux, et, dans chaque superstition, on retrouve le génie particulier du peuple qui lui a donné naissance, Agobard, archevêque de Lyon au ixe siècle, nous apprend que de son temps la croyance était répandue qu’il existait dans les nuayes une contrée mystérieuse nommée Mazonie. Des navires aériens apportaient là-haut les fruits que le vent, la grêle ou la tempête abattaient sur.terre. « J’ai vu, écrit Agobard, des hommes tellement aveuglés par la sottise, qu’ils amenèrent un jour devant moi, comme tombés de ces navires, trois hommes et une femme ; on les avait retenus plusieurs jours en prison, et on les conduisit en ma présence comme méritant d’être lapidés. » Il serait facile de multiplier ces tableaux à l’infini, mais nous nous bornons à grouper ici les superstitions dont l’usage était le plus répandu. Plusieurs d’entre elles ont dans ce Dictionnaire une place spéciale, et cette raison nous oblige à passer légèrement sur plusieurs points, pour ne point nous exposer à tomber dans des redites inutiles.

La divination a été également une des superstitions les plus profondément enracinées. Les Grecs et les Romains cherchaient des présages dans le vol des oiseaux, dans les entrailles des victimes, dans les vers d’Homère ou de Virgile. Les chrétiens, après eux, consultaient la Bible et les Écritures. Cette superstition fut plusieurs fois condamnée par les conciles, et Chariemagne s’exprime ainsi dans un de ses capitulaires : « Que personne n’ait la témérité de prédire l’avenir par le psautier ou par l’Évangile. » 11 faut croire que cette défense ne produisit qu’un médiocre effet ; car Guibert de Nogent raconte qu’au xiie siècle tout évêque ou abbé qui prenait possession de son évêché ou de son abbaye consultait les sorts avec les Écritures Si la page sur laquelle on tombait était blanche, le présage était regardé comme funeste. Lu divination se faisait aussi par des lettres et par des paroles. Le passage suivant de Grégoire de Tours fait comprendre comment avait lieu la divination par lettres : ■ Gontram-Bose, qui s’était réfugié dans la basilique de Saint-Martin, à Tours, était accusé d’avoir fait périr Théodebert. Le roi Chilpéric, pour s’assurer du fait, envoya des messagers avec une lettre écrite au saint. Dana cette lettre, il priait le saint de lui faire connaître dans sa réponse s’il lui était permis ou non de tirer Gontram-Bose de la basilique. Le diacre Beaudégésiie, chargé de cette lettre, la mit avec une feuille ûe papier blanu sur le tombeau du saint-, il attendit trois jours sans recevoir aucune réponse, puis retourna vers Chilpèric. • On voit que ce mode de divination restait quelquefois sans résultat ; mais l’exemple cité par Grégoire de Tours est peut-être unique. Les saints se montrent d’ordinaire fort empressés à répondre..., quand ce sont les rois qui les interrogent.

On attachait une grande importance à. la divination par les paroles. C’est encore Grégoire de Tours qui nous donnera ici l’explication nécessaire. « Clovis, raconte cet auteur, sur le point de combattre la roi des Wisigoths Alaric, envoya des messagers’à la basilique de Saint-Martin de Tours. « Allez,

« leur dit-il, et vous trouverez peut-être dans

« le temple quelque présage de la victoire. » 11 leur remit des présents destinés au lieu saint et ajouta ces paroles : à Seigneur, si vous êtes mon aide, et si vous avez résolu de livrer en mes mains cette nation incrédule et toujours ennemie de votre nom, t daignez manifester votre faveur à l’entrée de la basilique de Saint-Martin, afin que je sache si vous daignerez être favorable à

« votre serviteur.» Les messagers se rendirent en toute hâte a la sainte basilique... Au moment où ils y entraient, le chantre commençait ce verset du psaume xvii : « Seigneur, vous m’avez revêtu de force pour la guerre

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et vous avez abattu sous moi ceux qui s’élevaient contre moi, et vous avez fait tourner le dos à mes ennemis devant moi, et vous avez exterminé ceux qui me haïssaient. » Après avoir entendu ces paroles’, ils rendirent grâce à Dieu, présentèrent les dons au saint confesseur et allèrent pleins de joie annoncer au roi ce présage de victoire. »

Nous ne ferons que citer la cartomancie, à laquelle nous avons consacré un article spécial. Nous ne ferons également que rappeler pour mémoire la coscinomancie, divination qui se pratiquait au moyen d’un crible ; les envoûtements, qui coûtèrent la vie à La Mole, accusé d’avoir percé d’une aiguille une statuette faite à l’image du roi ; les présages tirés des éternuments, des rencontres fortuites ; l’influence funeste du vendredi et du nombre treize ; la terreur causée au moyen âge par les comètes, les prophéties de Merlin, etc.

Empruntons encore au Dictionnaire infernal quelques croyances superstitieuses très-répandues parmi les classes peu éclairées et qui se traduisent par des espèces d’aphorismes : « Malheureux qui chausse le pied droit le premier, dit le Dictionnaire infernal. — Un couteau donné coupe l’amitié. — Il ne faut pas mettre les couteaux en croix ni marcher sur des fétus croisés. — Les fourchettes croisées sont aussi d’un sinistre présage ; il en est de même d’un miroir cassé, d’une salière répandue, d’un pain renversé, d’un tison dérangé.-Certaines gens trempent un balai dans l’eau pour faire pleuvoir. — La cendre de fiente de vache est sacrée chez les Indous ; ils s’en mettent tous les matins au front, sur la poitrine et aux deux épaules ; ils croient quelle purifie l’âme, et leurs moines en mêlent pendant leur noviciat dans tout ce qu’ils mangent.

— Quand une femme est en travail d’enfant, elle accouchera sans douleur si elle met la culotte de son mari. — Pour empêcher que les renards ne viennent manger les poules d’une métairie, il faut faire, dans les environs, une aspersion de bouillon d’andouille le jourdu carnaval. — Les chemises qu’on fait le vendredi attirent les poux. — On nedoifpas manger de choux le jour de Saint-Étienne, parce qu’il s’était caché dans des choux pour éviter le martyre.—Les loups ne peuvent faire aucun mal aux brebis et aux porcs si le berger porte le nom de saint Basile écrit sur un billet et attaché au bout de sa houlette. — On peut boire tant qu’on veut sans crainte de s’enivrer quand on a récité ce vers :

Jupiter his alla sonuit elementer ab Ida.

Toute croyance et toute pratique religieuses sont mises au nombre des superstitions par les libres penseurs, qui regardent comme fausse toute religion révélée et qui pensent que la vérité seule doit être enseignée au peuple si l’on veut assurer le triomphe des réformes que réclame la raison. Mais beaucoup d’hommes pratiques, aussi incrédulesau fond que les libres penseurs, mais plus disposés à tenir compte des erreurs qui entravent la marche de l’esprit humain, admettent que d’ici à longtemps encore le peuple aura besoin d’une religion et ne songent pas à détruire celle qui existe depuis une longue série de siècles ; seulement, ils déplorent la tendance actuelle du clergé à multiplier sans mesure les fêtes, les cérémonies, les processions, les indulgences et une foule de pratiques ridicules, qu’ils qualifient hautement de superstitions. A leur point de vue, il y a une religion utile, à laquelle ils donneront même, si l’on veut, le nom de sainte ; mais il ne faut pas la confondre avec la superstition, qui en est l’excès et qui ne peut servir qu’à abrutir les esprits.

Après avoir étudié rapidement l’histoire de la superstition et de ses pratiques, il nous reste à examiner par quels moyens la superstition, que les progrès accomplis ont déjà bien amoindrie, pourra être complètement détruite. Trois causes ont fait naître la superstition : les enseignements des prêtres, l’ignorance et la misère des populations. On détruira la superstition en supprimant ces causes. Toutefois, nous écarterons ici le prêtre du débat, parce qu’il faudrait étudier la question de la vérité ou de la fausseté des dogmes, ce qui nous entraînerait trop loin. D’ailleurs, son pouvoir n’est plus absolu ; il ne peut plus conduire les peuples en les dominant par la crainte. À côté de lui, il y a la science qui explique les mystères auxquels il assignait une origine surnaturelle. Il a abdiqué son pouvoir le jour où il a refusé de s’assimiler les progrès accomplis. L’ignorance est l’ennemi qu’il faut combattre ; c’est elle qui pèse de tout son poids sur les peuples et les empêche d’ouvrir leurs yeux à la lumière, leurs cœurs à l’espérance. Autrefois, la superstition a pu être l’alliée du faible ; elle l’a enivré de ses rêves doré3 ; elle l’a transporté sur la montagne et lui a montré, comme au Christ, la richesse et le bonheur. Mais aujourd’hui la science a pris sa place ; c’est elle, elle seule, qui peut soutenir l’homme au milieu des épreuves et lui montrer, au sein de la tempête, le port après lequel il aspire. Elle est le levier tout-puissant que demandait Archimède, qui soulève un monde et l’arrache à la fange dans laquelle il croupit. La misère est la troisième cause de la superstition. Il suffit, en effet, de jeter les yeux sur la liste des superstitions que nous avons énumérées

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pour bien comprendre que toutes ces pratiques mystérieuses n’avaient qu’un but : donner au malheureux un peu de ces jouissances que les riches réservaient pour eux seuls. Nous n’étudierons pas ici ce difficile problème ; i ! nous suffit de poser ce principe, incontestable, croyons-nous : L’humanité ne parviendra à se défaire de toutes ses superstitions que le jour où l’instruction prodiguée à tous rendra l’ignorance impossible. Elle n’arrachera le peuple à ses rêves qu’en lui faisant toucher du doigt la réalité et en résolvant les problèmes sociaux qui ont pour objet d’éloigner de lui autant que possible les maux qu’entraîne la misère.

Superstition (de la), traité religieux et moral de Plutarque. Cet ouvrage, qui offre plus d’une analogie avec le livre De divinatione de Cicéron, met en relief les qualités de l’auteur, son amour excessif pour le bon, le vrai et le beau. La superstition et l’athéisme, dit Plutarque, prennent leur source dans notre ignorance sur la nature de la divinité, ignorance qui se traduit dans les âmes dures et farouches par l’impiété, dans les esprits faibles par la superstition. L’athéisme est une opinion qui persuade à celui qui le professe qu’il n existe pas d’être immortel, souverainement bon et juste, et l’incrédulité le conduit à l’indifférence. La superstition, au contraire, est une croyance forte et vive, qui trouble l’imagination et imprime dans l’âme une frayeur accablante. L’athée n’a aucun sentiment pour la divinité, le superstitieux en a de faux et de mauvais ; le premier ne croit pas à l’existence d’un être bienfaisant, le second croit aveuglément à celle d’un être terrible qui secomplaîcdnnslessupplices. La superstition a souvent occasionné de grands malheurs et elle est plus dangereuse que l’athéisme. Elle fait perdre courage à 1 homme le plus énergique, au point de le rendre timide et presque lâche. On raconte, par exemple, que Tiribase, quand les Perses vinrent pour s’emparer de lui, tira son glaive. Il était fort et courageux et se défendit vaillamment ; mais, lorsqu’il sut que c’était par ordre du roi qu’on l’arrêtait, il se laissa choir sur les mains. La superstition rend mortels les maux les plus légers. Le roi Midas, étant légèrement indisposé, fut si troublé par une vision nocturne, qu’il s’empoisonna. On ne saurait s’imaginer, dit Plutarque, toutes les sottises dont la superstition est capable ; ainsi on voit des esprits faibles convaincus que, si l’on mange de certains poissons, Junon vous frappe d’une lèpre qui ronge la partie antérieure des jambes, vous couvre le corps d’ulcères et vous fait tomber le foie en pourriture. L’athée croit volontairement que Dieu n’existe pas ; le superstitieux, forcé d’ajouter foi à son existence, voudrait qu’il n’y en eût pas. La superstition est la maladie de l’âme la plus sujette à l’erreur et à la passion. Il faut s’en défendre avec le plus grand soin, mais par voie de raison et non par aveuglement ; gardons-nous d’imiter ces gen 3 que lu crainte d’un mal fait tomber dans un autre, comme ceux qui, par terreur de la superstition, se précipitent dans l’athéisme, au lieu de s’arrêter au point intermédiaire entre ces deux limites extrêmes, sur le domaine de la véritable religion.

Quelques-unes des opinions contenues dans ce traité, notamment celles qui sont relatives aux déplorables effel3 de la superstition, ne manquent pas de justesse, et les sentiments sont conformes à la morale la plus pure. Plutarque montre partout l’horreur de l’hypocrisie et de l’intolérance. Le style du traité De la superstition est, comme la matière le comporte, simple, sans ornements, clair et précis. Ce n’est pas à dire pour cela que ce livre soit aride ; des traits historiques bien amenés, toujours à propos, et pour ainsi dire nécessaires à l’argumentation, jettent de l’agrément dans la monotonie de la dissertation philosophique.

Superstition et science, ouvrage publié

par (Jh. Vogt (Giessen, 1855). Dans ce livre, Vogt détruit d’abord les sophismes et les arguments de ces prétendus philosophes qui s’approprient les idées de Blumenbaeh sur l’anthropologie et n’ont plus d’autre but que d’intervertir les résultats de la science pour les faire concorder avec la Bible. La partie la plus importante de l’ouvrage. celle qui renferme des idées neuves et personnelles, est celle qui traite des races humaines. Vogt, s’appuyant toujours sur des documents authentiques, expose ainsi son système.

L’homme existait déjà à l’époque des formations diluviennes ; il est contemporain de l’ours des cavernes et du mammouth. C’est ce qui est prouve jusqu’à l’évidence par l’exploration de Schmerling et Spring dans les cavernes de la Belgique. Les recherches de Schmerling sont résumées dans le manuel de paléontologie de Pictet ; celles de Spring dans le Bulletin de l’Académie de Bruxelles (1853). L’homme n’est donc pas le dernier être créé sur notre globe. La plupart des êtres organiques de cette période ont fait place à d’autres plus récents. Il faut en dire autant des hommes eux-mêmes. Depuis longtemps les races primitives n’existent plus ; elles ont fait place à des races humaines arrivées beaucoup plus tard, mais de beaucoup supérieures. On a dit que la diversité des races humaines a pu se produire par suite d’influences climatériques et par celles de la

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nourriture. Vogt étudie cette grave question. Il compare l’homme aux animaux ; il montre cette diversité immense qu’on trouve dans la race canine, diversité sur laquelle le climat n’a aucune influence. Les unitaires ont prétendu que les siècles, en s’accumulant, ont pu changer la nature humaine ; mais ne voyonsnous pas, sur les anciens monuments de l’Egypte, le nègre à côté de l’homme blanc ? Puis, si les climats changent le type, comment expliquer cette persistance du type juif répandu partout et toujours le même ? La linguistique arrive ensuite et nous montre autant de races primitives que de langues. Après avoir rétorqué tous les arguments de l’école unitaire, Vogt conclut : « Les races humaines à types constants qui, de temps immémorial, ont peuplé toutes les parties de la terre sont des espèces d’origine diverse, qui ont la faculté d’engendrer parle croisement des bâtards féconds. • En terminant, Vogt énonce les grandes idées philosophiques que , ses successeurs ont développées. L’homme s’était créé un monde à rebours, monde que la science doit renverser. Qu’ils se consolent, ceux qui craignent de perdre, avec l’origine unique du genre humain, la base de toute morale I Ce qui fait la supériorité de l’homme, ce n’est pas d’avoir une origine unique, mais de pouvoir arriver par l’union à cette société fraternelle et libre qui est le fruit mûr d’un développement séculaire, à la palme d’un combat héroïque, le prix bien mérité de travaux longs et pénibles. »

Cet ouvrage, plutôt polémique que scientifique, est le plus populaire de ceux de Vogt. Il a été traduit en français par Hess. Le stylo de Vogt est clair et énergique ; il a toutes les qualités qui conviennent à un vulgarisateur.

SUPERSTITIOSITÉ s. f. (su-pèr-sti-si-ozi-té

— rad. superstitieux). Tendance à la superstition.

SUPERSTRUCTION s. f. (su-pèr-stru-ksion

— du préf. super, et du lat. structio, construction). Construction au-dessus du sol.

SUPERSTRUCTURE s. f. (su-pèr-stru-kture

— du préf. super, et de structure). Construction inutile : Tout le reste n’est qu’une superstructure inutile à l’édifice. (Voit.) il Vieux mot.

— Constructions élevées au-dessus d’autres constructions.

— Chem. de fer. Ensemble des travaux exécutés par-dessus les terrassements et les ouvrages d’art : La superstructure embrasse tout ce gui renarde l’établissement de la voie proprement dite, c’est-à-dire le ballast et les rails, avec leurs accessoires.

SUPER-SUS s. m. (su-per-su — du préf. super, et de sus). Ane. mus. Voix de dessus, quand elle était très-aiguë.

SUPERVILLE (Daniel de), théologien et prédicateur protestant, né à Saumur e» 1651, mort à Rotterdam en 1728. Il commença ses études dans sa ville natale et fit de tels progrès que plusieurs fois il put remplacer Drouet, son professeur de philosophie. Ses études philosophiques terminées, Superville, en attendant l’âge réglementaire pour l’étude de la théologie, s’adonna tout entier aux langues savantes. En 1677, il alla à Genève, où il apprit la théologie sous la direction de Tronehin. La mort de son père le rappela à Saumur. Déjà les persécuteurs du protestantisme commençaient leur œuvre brutale. Superville eut l’intention de passer en Angleterre, mais il fut appelé par l’Église de Loudun. En 1GS5, on le mit en prison pendant trois mois, dans l’espoir de l’amener à une abjuration ; mais Superviile n’était pas de ceux que les jésuites pouvaient convertir par la menace du supplice, à défaut de bonnes raisons. Sur ces entrefaites, l’édit de Nantes fut révoqué. Ayant obtenu un passe-port, Superville passa en Hollande et fut nommé pasteur à Rotterdam, où il resta jusqu’à sa mort, aimé pour ses qualités, honoré pour ses talents. On a de lui : Lettres sur les devoirs de l’Église affligée ; ces Lettres, au nombre de douze, dont la première parut en 1691, ont été réunies en 1 vol. in-S», devenu très-rare ; les Véritez et tes devoirs de la religion chrétienne ou Catéchisme pour l’instruction de la jeunesse-(Rotterdam, 170G, iii-8°) ; Sei-mons sur divers textes de l’Écriture sainte (Rotterdam, 1700,2 vol. in-12 ; 1702-1705,3 vol. in-8° ; nouv. édit. augm., Rotterdam, 1700-1712, 4 vol. in-8o, etc.).. Supervillu, disent MM. Haag, est connu surtout comme orateur de la chaire. Ses sermons, dont quelques-uns peuvent soutenir, sans trop de désavantage, la comparaison avec ceux de Saurin, se font remarquer par la douceur et l’onction, par un style clair, net, mais un peu diffus. Superviile évite soigneusement < l’appareil du savoir, les questions, les recherches inutiles ; » cependant il ne traite pas exclusivement des devoirs du chrétien ; il ne fuit pas la discussion des questions dogmatiques ; mais quand il les expose, c’est par une suite de raisonnements à la fois ingénieux et profonds, qui charment tout en instruisant ; » le Vrai communiant ou Traité de la sainte cène et des moyens d’y bien participer (Rotterdam, 1718, in-8°).

SUPERVILLE (Daniel db), médecin hollandais, fils du précédent, né à Rotterdam en 1696, mort à La Haye en 1768. Il étudia d’abord la jurisprudence, puis la médecine et