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position de déchéance qu’il a déposée au nom de la gauche. M. Thiers, tout en déclarant ses préférences pour cette dernière, en dépose une autre qui lui paraissait de nature à rallier toutes les opinions :

« Vu les circonstances, la Chambre nomme une commission de gouvernement et de défense nationale.

« Une constituante sera convoquée dès que les circonstances le permettront. »

L’Assemblée vota en bloc l’urgence sur toutes les propositions et se retira dans ses bureaux pour les examiner ou plutôt pour se dérober à ses incertitudes. Toutefois, par cette conduite, elle semblait admettre implicitement que l’Empire avait cessé d’exister. À cette heure, personne ne se levait plus pour le défendre.

Au dehors, sur la place de la Concorde et autour du palais, comme dans tout Paris, la foule, impatiente d’une solution, n’avait plus dès lors qu’un cri : « La déchéance ! vive la République ! » Plusieurs bataillons de la garde nationale, de cette garde si bien épurée cependant par l’Empire, viennent résolument se ranger en bataille sur le quai, devant le Corps législatif, escortés par une foule immense. Les troupes, les gardes municipaux, les sergents de ville, noyés dans cette marée humaine et voyant bien qu’ils n’ont pas devant eux une simple émeute, mais le peuple entier et toutes les classes du peuple, n’opposent aucune résistance, cèdent la place et se retirent tambour battant. Toute la population, civile ou militaire, fraternisait dans un même sentiment d’indignation contre l’Empire et d’angoisse pour les dangers de la patrie.

La proposition Palikao, bientôt connue dans la foule, augmenta l’indignation. Cette régence déguisée, avec des pouvoirs plus étendus, puisqu’elle se fortifiait d’une sorte de dictature militaire, cette persistance de l’Empire à vouloir se perpétuer dans la personne d’un de ses serviteurs les plus compromis excitèrent une méfiance bien légitime ; les dernières hésitations s’évanouirent ; les gardes nationaux et la foule franchirent les grilles du palais Bourbon, inondant les cours et les jardins, sans aucune résistance de la pari des troupes restées dans l’intérieur. Soldats et citoyens étaient agités des mêmes sentiments et les chefs virent bien qu’il n’y avait pas de combat possible.

Des groupes de gardes nationaux et de citoyens sans armes pénétraient successivement dans la salle des séances, malgré les supplications de Gambetta et de Crémieux, qui voulaient que l’Assemblée prononçât la déchéance en toute liberté. Mais il n’était plus possible alors de dériver le torrent. Le juste mépris qu’on avait pour cette Chambre, qui avait contribué par sa servilité aux malheurs du pays, la méfiance légitime des citoyens, qui redoutaient les manœuvres de la dernière heure, ne laissaient plus dans les esprits d’autre idée que celle de précipiter la solution attendue et indiquée.

À trois heures, la salle, les tribunes, les couloirs étaient complètement envahis et les députés qui reprenaient un à un séance étaient accueillis par les cris formidables de : « Vive la République ! la déchéance ! » qui retentissaient avec unanimité dans tout Paris.

Ce qu’il y eut de remarquable dans ce mouvement, c’est que les seuls députés de la gauche luttaient contre l’invasion. Les gens de la majorité, les bonapartistes baissaient la tête en silence ou se réfugiaient dans les bureaux.

Il fallait cependant en finir. Gambetta monte à la tribune, et d’une voix de tonnerre :

« Citoyens, attendu que la patrie est en danger ;

« Attendu que tout le temps nécessaire a été donné à la représentation nationale pour prononcer la déchéance ;

« Attendu que nous sommes et que nous constituons le pouvoir régulier issu du suffrage universel libre ;

« Nous déclarons que Louis-Napoléon Bonaparte et sa dynastie ont à jamais cessé de régner sur la France. »

Un tonnerre d’applaudissements accueille cette déclaration. Jules Favre est porté à la tribune à côté de Gambetta. Les cris unanimes étaient : Pas de guerre civile ! vive la France ! vive la République ! un gouvernement provisoire !

« Oui, citoyens, vive la République, dit Gambetta ; allons la proclamer à l’Hôtel de ville. »

Et il part avec Jules Favre, suivi d’un certain nombre de citoyens. Mais beaucoup restent dans la salle, craignant que les députes ne reviennent pour restaurer l’Empire.

Le Corps législatif reste occupé jusqu’à la nuit. À cette heure, Glais-Bizoin vient annoncer que le nouveau gouvernement a prononcé la dissolution de la Chambre, obtient l’évacuation, fait mettre les scellés sur les portes et emporte les clefs.

Après l’orage, un certain nombre de membres de la majorité se réunirent cependant chez le président, comme pour protester contre l’événement. Ils finirent par voter la proposition Thiers, qui n’était en définitive quvune proclamation de déchéance. Ils s’associaient dans une large mesure à la révolution.

« Jamais révolution, d’ailleurs, ne s’était accomplie si aisément et à moins de frais, dit M. Thiers dans sa déposition d’enquête. L’Empire avait attiré de tels malheurs sur le pays, que personne n’avait pitié de sa chute et n’avait la pensée d’y résister. Ses amis eux-mêmes assistaient à ce singulier spectacle sans essayer d’y porter remède... Pourquoi ne se défendaient-ils pas alors ? pourquoi aucun effort de leur part pour résister à cette révolution opérée sans aucune difficulté ? Par une bonne raison : c’est qu’ils n’auraient pas trouvé quelqu’un, eux compris, qui songeât à les sauver. De violence, il n’y en avait aucune, etc. »

L’Empire, en effet, tombait sous la haine et le mépris public et sans que personne se levât pour le défendre. De tous ces bonapartistes si arrogants quelques années plus tard, pas un seul n’essaya de soutenir l’établissement fondé dans la boue et le sang du 2 décembre, pas un seul ne se mit en avant et n’eut la pensée de se dévouer et de risquer sa vie pour son principe et pour son parti ; tous ou presque tous n’eurent d’autre préoccupation que de se dérober aux périls de la défense, de s’enfuir à l’étranger pour y vivre en paix du fruit de leurs rapines. On n’a jamais vu pareille déroute. Louis XVI avait été défendu par ses hordes étrangères et ses derniers partisans ; Charles X avait été défendu, et avec une énergie terrible ; Louis-Philippe l’avait été moins, mais il y avait eu résistance ; la République de 1848 s’était défendue elle-même ; l’Empire seul, et cela est bien remarquable, a été renversé sans une résistance et sans un coup de fusil. Quoi de plus caractéristique, et que penser d’un régime qui ne trouve pas un seul défenseur, même parmi ceux qu’il a gorgés de richesses ?

Pendant que le peuple proclamait la république au Corps législatif et dans tout Paris, une scène assez grotesque se passait au Sénat. Les membres de ce corps avili délibéraient sans trop savoir à quel parti s’arrêter, quand le président Rouher, qui n’avait plus sa jactance habituelle et qui ne cherchait qu’un moyen d’évasion, finit par conclure : « Si une force tumultueuse était à nos portes, ce serait un devoir impérieux de l’attendre délibérément ; mais aucune force ne nous menace, nous pouvons attendre longtemps sans être saisis d’un projet de loi, et nous n’avons actuellement aucun sujet de délibération. »

Baioche vint à la rescousse pour sonner la retruite : « Qu’avons-nous à faire ? Si nous pouvions espérer qu’elles se dirigeraient sur nous, ces forces révolutionnaires qui ont pénétré dans l’enceinte du Corps législatif, je persisterais à penser que chacun de nous doit rester sur son fauteuil... Peut-être, au contraire, pourrions-nous mieux au dehors rendre service au pays et à la dynastie... En nous séparant, nous cédons à la force et non à l’intimidation, et notre but est de défendre par nos moyens personnels l’ordre et la dynastie. »

L’idée de défendre au dehors l’ordre et la dynastie, chacun avec ses moyens personnels, eut un succès décisif, et finalement chacun de ces Romains tira de son côté pour porter secours à la dynastie, soit en filant lestement à l’étranger, soit en allant s’ensevelir dans quelque retraite ignorée.

D’ailleurs, Barocha avait raison ; aucune « force révolutionnaire ■ ne fit au Sénat l’honneur de le menacer. (Je corps était tellement méprisé, qu’on l’avait complètement oublié.

Le soir seulement, vers dix heures, le nouveau gouvernement ayant reçu l’avis invraisemblable que le Sénat voulait tenir une séance de nuit, Floquet, adjoint au maire de Paris, fut délégué pour mettre les scellés sur les portes de la salle. Le grand référendaire et le général de Montf’ort, entourés d’escadrons de gendarmerie, déclarèrent sérieusement à cet homme seul qu’ils cédaient à la force, et tout fut dit ; le Sénat avait vécu.

L’évacuation des Tuileries eut lieu sans plus de résistance et avec la même facilité. En voyant le mouvement prendre les proportins formidables d’une révolution, l’impératrice, sentant bien qu’elle ne serait pas défendue, chargea le précepteur du prince impérial, M. Filon, d’envoyer à Maubeuge la fameuse dépêche, qui coïncidait si singulièrement avec le nom de celui qui l’expédiait : « Filons sur Belgique. Signe : Filon. » Puis après quelques récriminations contre la France, qui avait payé ses prodigalités et ses folies, cette étrangère, accompagnée de deux étrangers, le chevalier Nigra, ministre d’Italie, et le prince de Metternich, ambassadeur d’Autriche, quitte les Tuileries, monte clans un tiuore avec sa lectrice, Mme Lebreton, sur la place Saint-Germain-l’Auxerrois, et se réfugia chez son dentiste. Elle ne courait aucun danger, bien qu’on sût qu’elle était une des causes principales de la guerre ; le gouvernement de la Défense aurait au besoin protégé son départ ; elle avait à Paris des parents et des amis, mais elle préféra recourir à des moyens romanesques, et ce fut encore dans la mémo compagnie qu’elle gagna Deauville, puis Brighton et Hastings, où elle se réunit à son fils. Ce fut encore le dentiste qui fut chargé de trouver une résidence déliuitive et qui arrêta son choix sur Carobdeu-House, à Chiselhurst. V. Histoire du second Empire^ par Taxile Delord.

Pendant ce temps, le gouvernement nouveau s’installait paisiblement à l’Hôtel de ville, sans aucune résistance de la part des troupes qui gardaient le palais. L’inévitable

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dénoûment était si universellement accepté, que, lorsque Gambetta entra dans le cabinet du préfet de la Seine, le secrétaire général, M. Alfred Blanche, lui dit simplement : • Je vous attendais. >

Le peuple força les portes de la prison de Sainte-Pélagie, délivra Rochefort, qui était alors détenu, et l’amena en triomphe à l’Hôtel de ville, où il se réunit à ses collègues.

La question délicate avait été celle de la formation d’un gouvernement provisoire. Il s’agissait d’éviter des compétitions, des candidatures qui pouvaient effrayer, celles de Delescluze, de Félix Pyat, de Blafiqui, etc.

Ledru-Rollin, prévoyant ce danger, avait donné le conseil de ne nommer que des députés élus par Paris, qu’ils eussent d’ailleurs opté pour la capitale ou pour une autre localité.

Cette idée fut adoptée, puis ratifiée par l’acclamation populaire, et le gouvernement se trouva composé ainsi qu’il suit : Emmanuel Arago, Crémieux, Jules Favre, Jules 1 Ferry, Gambetta, Garnier-Pagès, Glais-Bi| zoin, Pelletait, Picard, Rochefort, Jules Simon. Il prit le beau titre de gouvernement de la Défense nationale et forma son ministère de J. Favre aux affaires étrangères, Gambetta à l’intérieur, général Lefiô à la guerre, amiral Fourichon à la marine, Crémieux à la justice, Picard aux finances, J. Simon à l’instruction publique, Dorian aux travaux publics, Magnin a l’agriculture et au commerce.

Le général Trochu gardait sa situation avec pleins pouvoirs pour la défense de Paris ; de plus, il était appelé à la présidence du gouvernement.

Étienne Arago était nommé maire de Paris, avec Floquet et Brisson pour adjoints, Kératry préfet de police.

La proclamation de la république causa une joie universelle, un espoir immense, et la garnison de Paris, mêlée à la population, s’associait aux élans patriotiques des citoyens.

Les premiers actes du gouvernement furent la dissolution du Corps législatif, l’abolition du Sénat, la liberté accordée à la fabrication et à la vente des armes, l’amnistie pour toutes les condamnations politiques, etc.

Avec la république, lu révolution du 4 septembre entra dans une phase nouvelle, la défense à outrance, et cela sans armée, car la dernière, celle de Bazaine, était bloquée ; tout était à recréer, les hommes, les ressources, les moyens d’action. Mais l’enthousiasme du peuple était si grand, qu’on se croyait assuré de triompher de toutes les difficultés. Tous les hommes s’enrôlaient dans la garde nationale et s’exerçaient hâtivement au maniement des armes. Il n’y avait encore uucune division sérieuse ; toutes les classes étaient unies et confondues dans un même sentiment, l’amour de la patrie et l’énergique résolution de la sauver.

Cependant le flot de l’invasion s’avançait toujours, et, le 15 septembre, les premiers uhlans parurent entre Creteil et Neuilly-sur-Marne. Paris allait être investi. Le gouvernement se scinda alors en deux ; il délégua à Tours deux de ses membres, Glais-Bizoïn et Crémieux, que leur âge ne rendait guère propres à porterie poids d’une aussi redoutable situation. M. Clément Laurier les accompagnait, représentant, comme directeur du personnel, le ministère de l’intérieur. Paris les vit partir sans confiance ; lu province les accueillit avec déférence, mais sans ardeur. Dans cette délégation de Tours, l’amiral Fourichon était chargé de la direction militaire.

On trouvera les détails de cette guerre tragique qui se poursuivait en province pendant le siège de Paris à l’article guerre ob 1870. En ce qui concerne les événements dont la capitale fut le théâtre et tous les faits militaires, ils sont développés atec l’ampleur qui convient à un aussi grand sujet dans notre article Paris et dans la série des sièges des Paris, g 6, siège de Paris par les armées allemandes (1870-1871), tome XII, page 264 et suiv.

Nous devions nous borner ici à l’esquisse de la révolution du 4 septembre, éviter avec soin le double emploi et tes répétitions.

Cependant il nous reste à dire un mot sur les hommes qui avaient accepté en un moment aussi terrible le fardeau écrasant des affaires. Ils étaient alors soutenus par l’enthousiasme de la population, attaques seulement par une minorité ardente qui les accusait de manquer de vigueur et de décision, mais eu réalité tuut-puissanis et disposant d’une force immense. II faut reconnaître que, maigre leur bouue volonté, ils ont été tout à fait au-dessous de leur tâche, comme nous le constatons dansmoue récit du siège.

La province était bien plus encore livrée au désarroi et à l’inaction, grâce à l’administration sénile de la délégation de Tours. Le gouvernement de Paris, sans connaître exactement la situation, mais semant bien la fauta qu’il avait commise, résolut d adjoindre a cette délégation un élément plus viril, et, le 7 octobre, Gambetta monta sur le ballon l’Armand-Barbès, avec un homme d’une haute valeur qui était son aller ego, M. Eug. Spuller. il avait pour mission d’aller organiser la défense en province (v. Gambetta). Il était temps qu’un homme vigoureux, énergique et passionné comme le jeune tribun vint donner a la résistance nationale une impulsion dont elle manquait k peu près complètement. Mais c’est dès l’origine qu’on aurait du lui donner

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cette mission. Par le rôle glorieux qu’il a joué, par ce qu’il a pu faire, réduit pour ainsi dire à lui seul, on peut juger ce dont il eût été capable un mois auparavant, dans cette crise suprême ou les minutes étaient des siècles.

Après la capitulation de Paris, Gambetta, indomptable dans son énergie, croyait lai itte encore possible ; mais, écrasé par la rapidité foudroyante des événements, combattu par ses collègues de la Défense nationale, qui avaient envoyé à Bordeaux J. Simon pour le contrecarrer, jugeant d’ailleurs que dans l’état où était la France toute résistance devenait impossible, il donna sa démission.

Les élections du 8 février, accomplies sous le canon prussien, produisirent l’Assemblée que l’on a vue à 1 oeuvre. Elle se réunit à Bordeaux le 13, animée du plus haineux esprit de réaction, décidée à tous les sacrifices et à toutes les concessions pour obtenir la paix.

Le gouvernement de la Défense déposa ses pouvoirs et, le 17, l’Assemblée nomma M. Thiers chef du pouvoir exécutif. La majorité comptait sur lui pour préparer le rétablissement de la monarchie. Un gouvernement nouveau était fondé, et d’une espèce •nouvelle : le provisoire indéfini.

Nous résumons ailleurs les événements de cette période (v. Thiers), qui prit fin lors de la révolution parlementaire du 24 mai 1873, date du renversement de Thiers et de la nomination de Mac-Mahon à la présidence de la République. V. septennat.


SEPTEMBRISADES s. f. pl. (sè-ptan-bri-za-de — rad. septembre). Hist. Nom donné quelquefois aux événements plus connus sous le nom de massacres de Septembre.


SEPTEMBRISEUR s. m. (sè-ptan-bri-zeur — rad. septembre). Hist. Nom donné à ceux qui prirent part aux massacres, de Septembre.

— Encycl. Ce nom sinistre est resté aux exécuteurs des massacres de septembre 1792, à tous ceux qui, à tort ou à raison, ont été accusés d’avoir trempé dans les égorgements ou de les avoir conseillés, organisés ou dirigés.

Nous n’avons pas à répéter ici les détails qui figurent à l’article consacré à ces tragiques événements, et nous devons nous borner à quelques notes sur les malheureux qui se sont souillés en y prenant part.

Rappelons d’abord que beaucoup des hommes politiques qu’on a plus tard accusés, au milieu des luttes violentes des partis, y sont pour la plupart restés étrangers et ne sont coupables que de n’avoir rien fait pour les empêcher. Nous renvoyons, au surplus, le lecteur aux notices biographiques relatives à ces personnages, dans lesquelles nous nous sommes efforcé de faire à chacun sa part de responsabilité.

Nous avons rapporté qu’on attribuait l’horrible initiative au comité de surveillance de la commune, où figurait Marat, et nous avons cherché à établir dans quelle mesure cette accusation pouvait être fondée. Quant aux massacreurs proprement dits, à ceux qui trempèrent leurs mains dans le sang, il semble certain qu’ils n’étaient pas en très-grand nombre. Nous ne parlons ici que de ceux qui exécutaient, non de ceux qui excitaient, qui approuvaient ou qui assistaient aux tueries comme à un spectacle. On a fait la remarque qu’il se trouvait parmi les égorgeurs bon nombre de ces fédérés marseillais qui étaient depuis quelque temps à Paris et qui avaient combattu au 10 août. Cela est constaté par les relations des prisonniers qui ont échappé au massacre, notamment par l’abbé Sicard, par l’abbé Saurin, par Journiac-Saint-Méard, par le frère de Bertrand de Molleville, etc. Les trois derniers durent même leur salut à la connaissance qu’ils avaient du patois provençal.

Cependant, il y avait aussi, et probablement en majorité, des habitants de Paris et même des gens établis ; dans l’enquête qui fut faite plus tard, on voit figurer sur las listes des joailliers, des avocats, des bouchers, des fruitiers, etc.

Il faut dire que, du temps de la réaction, la meurtrière accusation de septembriseur était devenue fort banale ; on l’appliquait aux meilleurs patriotes, à tous ceux qui avaient manifesté des opinions républicaines un peu ardentes, et il est certain que la plupart de ceux qui en furent flétris ne la méritaient pas. Nous verrons encore Bonaparte, devenu premier consul, déporter les républicains en les classant pêle-mêle sous cette odieuse épithète, afin de les déshonorer en les sacrifiant. Terroriste ! septembriseur ! ces appellations étaient devenues les injures courantes par lesquelles le flot de la réaction montant toujours, on en arriva peu à peu à désigner indistinctement tous les républicains. Sous la Restauration, c’était tout à fait consacré. L’académicien Tissot fut lui-même victime de cette stupide accusation, comme nous le racontons dans la biographie de Mme de Lamballe. Quant aux vrais septembriseurs, la plupart restèrent inconnus et impunis. Nous donnerons ici quelques renseignements sur ceux qui sont signalés dans les documents historiques et judiciaires.

Dès les premières séances de la Convention, les girondins (qui d’ailleurs, eux non