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s’armer contre l’autorité royale, que cette provocation eût été ou non suivie d’effet.

Ces attentats pouvaient, suivant l’appréciation des procureurs généraux, être déférés soit à la cour d’assises, soit à la Chambre des pairs ; ils étaient punis de la détention, peine infamante, dont le minimum est de cinq ans et le maximum de vingt. Les amendes pouvaient s’élever jusqu’à 50,000 fr.

En outre, il était interdit, sous des peines moins fortes, mais encore exorbitantes, de prendre la qualification de républicain, de mêler la personne du roi à la discussion des actes du gouvernement, de rendre compte des procès en diffamation et des délibérations intérieures du jury, de publier les noms des jurés, d’organiser des souscriptions en faveur des journaux condamnés, etc.

Le cautionnement des journaux fut porté de 48,000 francs à 100,000 francs, dont le versement dut être fait en numéraire ; des obligations plus onéreuses étaient imposées aux gérants, auxquels on faisait même une loi de dénoncer les auteurs des articles incriminés (on sait qu’alors la signature n’existait pas dans les journaux politiques).

En outre, les tribunaux eurent le droit de suspendre le journal condamné, et enfin les dessins, gravures et lithographies ne purent être publiés, ni les pièces de théâtre représentées sans avoir subi la censure préalable.

Il est intéressant de rappeler que plusieurs de ces aggravations avaient été introduites dans les projets ministériels par les trois commissions nommées et dont les rapporteurs furent MM. Hébert, Parent et Sauzet.

La discussion souleva une lutte assez vive ; les principaux opposants furent MM. Royer-Collard, Dufaure et Dubois (de la Loire-Inférieure). Mais le résultat était prévu, car on délibérait sous le joug de la passion. Grâce au zèle outré des commissions, le ministère obtint plus qu’il n’avait demandé (9 septembre). La Chambre des pairs s’empressa de ratifier de son vote ces lois fameuses, qui d’ailleurs furent impuissantes à entraver les développements du journalisme et qui furent abrogées par un décret du gouvernement provisoire le 6 mars 1848.


Septembre 1870 (RÉVOLUTION DU 4). Nous n’avons à résumer ici que l’événement final qui a déterminé l’effondrement de l’Empire. Ce régime funeste, après dix-huit ans de despotisme, venait de précipiter la France aux abîmes ; l’invasion submergeait nos provinces de l’est, et les destinées de la nation, la vie du peuple, toujours à la merci des rois, se jouaient en des tueries qui marqueront dans ce siècle et resteront l’horreur et l’effroi de l’avenir.

En présence de ces terribles réalités, qui comprimaient le cœur des patriotes, l’histoire de la veille semblait déjà une chose morte, et les événements politiques émouvants dont les années précédentes étaient remplies n’apparaissaient plus, pour ainsi dire, que comme des épisodes lointains appartenant à un drame terminé, sans liaison avec ce qui allait suivre. L’esprit public, douloureusement ému, était absorbé par de plus puissantes préoccupations.

Mais la haine de l’Empire n’avait fait que s’accroître en proportion des malheurs publics, dont il était le seul auteur.

Dans les dernières années, on avait vu se continuer avec un redoublement d’énergie le duel de la République contre ce régime détesté. C’était là le fait capital, l’action maîtresse qui occupait continuellement le devant de la scène. À côté de cette lutte, qui tenait la France en suspens, tous les autres épisodes ne paraissaient qu’accessoires et secondaires. Quand l’existence même de la dynastie était en question, quelle importance historique, en effet, pouvaient conserver et les prorogations multipliées du Corps législatif, dont la servilité a fait l’étonnement de l’Europe, et la formation de petites coteries parlementaires, aussitôt dissoutes qu’ébauchées, et les grimaces de libéralisme au moyen desquelles les réacteurs les plus déterminés comptaient escamoter le grand mouvement démocratique qui s’était accentué depuis les élections générales de 1869, enfin tant d’autres petite incidents dont le souvenir était déjà presque complètement évanoui ?

Après une domination si longue et si absolue, Napoléon III, vieilli, inquiet, voyant s’éteindre successivement autour de lui tous les complices de son guet-apens du 2 décembre, se sentant menacé par une opposition qui devenait de jour en jour plus formidable et voulant cependant assurer la couronne sur la tête de son fils, était en quête d’expédients nouveaux pour retenir sous sa main la France, qui lui échappait.

Le système autoritaire était usé sous sa forme brutale et sincèrement tyrannique ; on entreprit de lui redonner le ressort qu’il avait perdu en le masquant sous l’étiquette menteuse de la liberté ; on annonça avec éclat des réformes libérales ; un triste transfuge du parti républicain, M. Émile Ollivier, dès longtemps rallié, crut trouver Un rôle pour son ambition en s’offrant pour abuser la nation par cette comédie gouvernementale, qui n’était pas plus prise au sérieux par ceux qui la subissaient que par ceux qui la donnaient.

La France, en effet, la France éclairée et démocratique, regardait avec une curiosité ironique cette parade de l’Empire libéral et ne croyait nullement à sa durée ni à sa sincérité. On savait bien que Bonaparte ne se considérerait jamais comme lié par le prétendu régime constitutionnel qu’il feignait d’accepter comme couronnement de l’édifice. On ne voyait que trop clairement qu’il restait le maître de tout changer au gré de son caprice, au moyen d’un sénatus-consulte facile à obtenir d’un sénat qui ne croyait jamais pousser la servilité assez loin. Tous les pouvoirs publics, d’ailleurs, recrutés parmi tout ce que la nation comptait d’ambitieux sans scrupule et de cupides intrigants, offraient un point d’appui assuré et des instruments tout prêts pour les besognes les plus arbitraires et les plus violentes.

Le chef de l’État s’était follement jeté dans cette guerre lorsqu’il devait savoir mieux que personne que nous n’étions pas en état de soutenir la lutte, grâce à l’ineptie et aux dilapidations de son gouvernement (qui revendait clandestinement et à vil prix les armes neuves de nos arsenaux) ; il s’y était jeté sans espoir de succès, mais pour échapper aux embarras intérieurs, pour puiser dans les dangers publics des prétextes au rétablissement du régime autoritaire et à des proscriptions nouvelles, dont les listes étaient dressées, à moins que ce ne fût pour se venger à l’avance de sa chute infaillible et prochaine en entraînant avec lui la France dans l’abîme.

Pour comble d’infatuation autoritaire, il s’était attribué le commandement supérieur de l’armée, et l’on ne sait que trop comment il l’exerça.

Dans la journée du 5 août, Paris, surexcité par les émotions du patriotisme, avait été mystifié par une fausse dépêche annonçant une prétendue victoire de Mac-Mahon. Il y eut à cette nouvelle une explosion de joie, une ivresse qui se changea bientôt en stupeur au premier bruit de la défaite de Wissembourg, puis en colère quand on sut que l’armée française avait été vaincue à Frœschwiller et à Forbach.

Quelques troubles eurent lieu ; mais Paris, dont l’instinct est presque toujours si sûr, n’osa tenter alors le renversement de l’Empire, ce qui nous eût épargné sans doute le désastre de Sedan.

D’ailleurs, on n’avait pas encore une idée complète et de l’immense désarroi qui régnait dans nos armées, et de l’incurie de l’intendance, et de l’incapacité de bon nombre de nos officiers supérieurs ; et l’on pensait que la destitution du maréchal Lebœuf et la retraite de l’empereur, en tant que généralissime, suffiraient à changer la face des choses.

L’impératrice régente et son conseil des ministres multipliaient les avis et les proclamations, en même temps que les mesures de sûreté (état de siège, menaces aux journaux, etc.) ; mais, sous cette agitation fébrile, on sentait la désorganisation et l’affolement.

Le Corps législatif fut convoqué pour le 9 août. La veille, les députés de la gauche avaient demandé au ministre de l’intérieur l’armement de tous les citoyens ; la presse démocratique, dans un manifeste énergique et concis, réclamait en outre la nomination d’un comité de défense composé d’abord des députés de Paris.

Le jour de l’ouverture de cette session extraordinaire, une foule immense entourait le palais Bourbon, réclamant l’armement de la population et la formation d’un ministère capable de faire face aux événements. Beaucoup pensaient que l’heure était venue de jeter à terre ce gouvernement funeste ; mais, malgré l’émotion publique, la majorité hésitait encore à tenter l’effort suprême.

Dans cette séance du 9, Jules Favre demanda que l’empereur quittât le commandement et proposa, en outre, l’armement des citoyens et la nomination d’un comité exécutif chargé de la défense et nommé par le Corps législatif.

Cette proposition fut repoussée ; mais l’Assemblée vota un ordre du jour hostile, qui renversa le ministère Ollivier. Cette majorité, si longtemps servile, commençait à se réveiller en présence des périls publics. Une quinzaine de députés de cette fraction avaient même signé une proposition qui n’était pas plus constitutionnelle que celle de Jules Favre et qui demandait, qui exigeait presque que le général Trochu fût chargé de former un cabinet.

Mais le nouveau ministère fut composé par l’impératrice de bonapartistes ardents, évidemment plus préoccupés du maintien de la dynastie que du salut de la patrie : le général Cousin-Montauban, comte de Palikao, Mague, Grandperret, Jérôme David, Clément Duvernois, etc.

Toutefois, on jugea utile de donner une satisfaction, plus apparente que réelle, à l’opinion publique ; on annonça la démission du maréchal Lebœuf, à qui on attribuait en partie nos revers, et la nomination de Bazaine comme commandant en chef de l’année, en remplacement de l’empereur, qui n’en continua pas moins à exercer un pouvoir réel.

Cependant, de tous côtés on demandait des fusils pour l’armement de la garde nationale et des volontaires. Mais le gouvernement restait sourd à ces appels, justifiant le mot du vieux Raspail : « Il a plus peur de la garde nationale que des Prussiens. »

Pendant ces jours d’angoisses, le rôle du ministère se borna à tromper l’émotion publique par des nouvelles fausses ou altérées. En réalité, les revers se multipliaient pour nous, et les armées allemandes continuaient à s’avancer sur notre territoire.

L’espèce de gouvernement qui restait à Paris continuait à entraver l’armement des citoyens et à repousser toutes les mesures énergiques de défense. Cependant l’opinion avait arraché la nomination de Trochu au poste de gouverneur de Paris (16 août). Ce général avait alors une popularité qu’il devait à un ouvrage publié par lui trois ans auparavant, et dans lequel il signalait l’affaiblissement de nos institutions militaires en en indiquant les causes. Sa nomination fut d’autant mieux accueillie qu’il fit des déclarations libérales de nature à rassurer la population parisienne, qui redoutait toujours, et avec quelque raison, un coup d’État in extremis. On savait qu’il n’était pas un séide de l’Empire ; il avait la réputation d’un bon stratégiste, et l’on crut avoir trouvé un homme. Il montra d’abord, en effet, quelque activité pour mettre Paris en état de défense, car il devenait d’heure en heure plus évident que la partie suprême se jouerait sous les murs de Paris.

L’idée générale était qu’on ramenât l’armée de Châlons vers la capitale ; pourvu d’une armée volante, Paris eut été couvert, eût pu se défendre, et peut-être cette manœuvre si simple et si naturelle eût été le salut.

Mais un mauvais génie semblait présider aux destinées de la France. Malgré les efforts de Rouher, qui, pour la première fois peut-être, donna à son maître un conseil utile au pays, l’impératrice et son gouvernement s’opposèrent obstinément à ce que l’armée revînt. Préoccupés surtout de l’intérêt dynastique, beaucoup plus que de la défense nationale, ils ne voulaient pas que l’empereur reparût sous le poids accablant de tant de désastres, comptant follement, tout en se plaçant dans les plus mauvaises conditions, sur quelque victoire remportée au loin pour redonner un peu de prestige à ce triste souverain si funeste à son pays.

La catastrophe de Sedan fut surtout l’œuvre de l’impératrice, qui agit impérieusement sur l’esprit de l’empereur pour le pousser à jeter l’armée de Châlons dans les Ardennes, quand il était visible que la défense de la capitale n’était possible qu’avec une armée de secours campant et manœuvrant autour de ses murs.

On trouvera ailleurs le récit de ces lamentables événements (v. Sedan), et nous devons nous borner ici à ce qui fait l’objet spécial de cet article.

Paris, comme nous l’avons dit, était, depuis le commencement de la guerre, en proie à toutes les angoisses du patriotisme alarmé ; il voyait de mieux en mieux chaque jour à quels chefs incapables et pusillanimes était livrée la nation ; mais, préoccupé surtout des dangers publics, il n’avait fait aucune tentative pour renverser ce gouvernement détesté.

Cependant, le 14 août, le vieux Blanqui, accouru de Belgique, avait essayé de précipiter le mouvement par un coup de main hardi. À la tête d’une poignée d’hommes résolus, il tenta de s’emparer des armes renfermées dans la caserne des pompiers du boulevard de la Villette. L’affaire échoua, comme il arrive le plus souvent pour tous les coups de surprise. Le peuple ne se laissa pas entraîner ; l’insurrection ébauchée ne fit pas une recrue ; le sentiment général était la stupéfaction, même la méfiance, car on voyait partout des agents prussiens, et la police exploitait ces soupçons avec autant de perfidie que d’habileté. En outre, on ignorait absolument qui était le chef de cette audacieuse entreprise.

Quelle que fût l’imprudence de cette tentative, il n’en est pas moins déplorable que l’Empire n’ait pas été renversé alors et même huit jours plus tôt, lors du désastre de Reischoffen. On eût peut-être évité les grandes catastrophes. Mais le peuple n’était pas prêt et tous les yeux étaient en ce moment tournés vers la frontière.

La nouvelle de l’immense désastre de Sedan ne fut connue à Paris que dans la journée du 3 septembre ; le gouvernement la dissimula jusqu’à la dernière heure, et quand il se résigna à l’annoncer au Corps législatif et au pays, ce fut encore avec des atténuations. Mais la population était fatiguée des mensonges officiels ; elle pressentit, elle connut bientôt toute l’étendue de nos malheurs, la lâche capitulation de l’empereur, l’armée prisonnière, nos armes et approvisionnements livrés à l’ennemi, les Prussiens sur la route de Paris, sans qu’aucun obstacle pût leur être opposé. L’explosion prévue, inévitable et nécessaire allait enfin éclater ; la nation, perdue par le gouvernement personnel et par l’incapacité de ses chefs, allait reprendre possession d’elle-même et tenter un suprême effort pour sauver son indépendance ou tout au moins son honneur. Elle devait sa décadence au despotisme ; il était naturel qu’elle cherchât à se relever par la liberté.

Au milieu de l’émotion publique, le Corps législatif fut convoqué pour une séance de nuit. Le ministre de la guerre, Palikao, compléta les vagues nouvelles qu’il avait données dans la journée. Le résumé de sa communication était que l’armée, refoulée dans Sedan, avait capitulé et que l’empereur avait été fait prisonnier. Cette manière de présenter les choses, imitée par les ministres dans leur proclamation, était un scandale de plus, un mensonge destiné à faire retomber sur cette héroïque armée la responsabilité qui appartenait tout entière à l’empereur,

Jules Favre déposa aussitôt une proposition de déchéance signée par 28 députés, ainsi que la nomination par la Chambre d’une commission de gouvernement.

Pas un ministre ne protesta, et tous les membres de la majorité courbèrent silencieusement la tête. Une seule voix s’éleva pour contester au Corps législatif le droit de prononcer la déchéance de la dynastie, celle de l’ex-ministre Pinard.

La séance fut aussitôt levée : elle avait duré vingt minutes. Un député de la droite, M. Dréolle, dit en quittant la Chambre : « Demain, plus d’Empire ou un coup d’État ! »

Jusqu’au dernier moment, les hommes de la faction comptaient donc sur un coup de force et ils le croyaient possible, car il y avait encore à Paris plus de 40,000 hommes prêts à marcher.

Au dehors, la foule immense qui entourait le Corps législatif et qui remplissait les rues, les places et les boulevards était en proie à une fermentation qu’aucune plume ne saurait peindre. Le mot de déchéance était dans toutes les bouches, celui de république acclamé avec enthousiasme par la majorité. Toutefois, le sentiment dominant était la nécessité de l’union de tous les citoyens pour sauver la patrie. Mais on réclamait des mesures énergiques et on les eût acceptées même de cette Chambre méprisée et de ce gouvernement odieux. Personne ne dormit, dans cette nuit tragique ; le tableau de nos désastres pesait sur le cœur de tous comme un sinistre cauchemar.

Le dimanche 4 septembre, le soleil se leva radieux, comme si la nature, insensible à nos deuils, eût voulu néanmoins sourire à la révolution pacifique qui allait s’accomplir.

Paris se leva morne et désolé après une cruelle insomnie ; dès le matin, la population entière inondait les places et les rues, l’émotion était à son paroxysme ; cependant l’idée d’engager une lutte peut-être sanglante pour hâter de quelques heures la chute désormais certaine de ce gouvernement, qui semblait déjà ne plus exister, n’était pas ce qui prédominait dans les esprits. On était préoccupé surtout des périls de la patrie et des moyens de les conjurer, et le peuple, les gardes nationaux, les gardes mobiles échappés du camp de Saint-Maur, presque tous sans armes et qui remplissaient la place de la Concorde et les quais, songeaient bien moins à combattre qu’à se serrer autour du pouvoir nouveau qui ne pouvait manquer de surgir.

Le ministère et le préfet de police Pietri avaient enveloppé le Corps législatif de troupes, de sergents de ville, de gardes de Paris, de nuées de chefs de service, d’inspecteurs et d’agents. Mais malgré les dispositions qu’il avait prises et qu’il croyait sans doute formidables, Pietri n’en était pas moins à trois heures et demie sur la route de Belgique, laissant la préfecture de police déserte et tout son personnel sans direction.

Il n’y avait pas d’ailleurs de combat possible ; l’Empire s’effondrait de lui-même, il n’y avait pas à le renverser.

Les cris de : Vive la France ! la déchéance ! vive la République ! retentissaient dans tout Paris, et en beaucoup d’endroits la troupe s’y associait. Vers onze heures du matin, le ministère-apprenait par un télégramme que la garnison de Lyon fraternisait avec le peuple et que la deuxième ville de France avait proclamé la république.

Indépendamment des projets de la gauche de faire nommer une commission de gouvernement par l’Assemblée, il en existait d’autres. M. Buffet et ses amis du tiers parti (orléanistes pour la plupart) s’épuisaient en efforts désespérés pour que l’impératrice, de son propre mouvement, remît ses pouvoirs au Corps législatif, qui nommerait une commission de gouvernement ; car chacun sentait bien que la régence ne pouvait plus être à la hauteur de la situation. D’un autre côté, la droite gouvernementale, les bonapartistes violents, les Cassagnac, les Jérôme David et autres ne voyaient de salut que dans une dictature exercée par le général de Palikao au nom de l’impératrice et dans des mesures de force, des proscriptions. C’était l’expédient obligé de cette odieuse faction. En pleine séance, Granier de Cassagnac menaçait du conseil de guerre tous les signataires de la proposition de Jules Favre ; et comme nous l’avons dit, on savait bien dès longtemps que l’Empire ne reculerait pas pour se maintenir devant les moyens de violence et de sang qui avaient servi à le fonder.

Dès l’ouverture de la séance du 4, qui devait être la dernière, le ministre Palikao déposa un projet de loi portant nomination par le Corps législatif d’un conseil de gouvernement et de défense nationale composé de cinq membres ; les ministres seraient nommés sous le contre-seing de cette commission, dont Palikao serait le « lieutenant général ». Cette belle combinaison portait cette mention : « Fait au palais des Tuileries, » et cette signature : Eugénie.

Cette proposition est froidement accueillie. Jules Favre demande le priorité pour la pro-