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gées de faire comme les enfants. En effet, au commencement, elles ont beau voir les objets avec lesquels le toucher les a familiarisées, elles ne les reconnaissent pas ; mais après une longue pratique, les particularités que la vue leur découvre deviennent des signes naturels qui leur font connaître indirectement une multitude de choses qui, primitivement, ne pouvaient être connues que par le toucher.

Pour les objets les plus proches, il y a un signe qui nous fait connaître la position relative de leurs différentes parties plus ou moins saillantes ou rentrantes, c’est-à-dire a situation de ces parties dans le sens do la profondeur. C’est la manière dont la lumière et les ombres sont distribuées sur la partie visible des corps. Ce qui le montre bien, c’est l’illusion produite par certaines peintures qui imitent le relief et qu’on appelle des grisailles.

Pour les objets dont on est plus éloigné, il y a un moyen de connaître leur position relative dans le sens de la profondeur et la distance où ils sont du point d’où on les observe. C’est la diminution de la grandeur visible de ces objets.

Il existe encore un autre signe qui peut servir, jusqu’à un certain point, à déterminer la distance. Comme l’air atmosphérique n’a presque jamais une transparence parfaite, lorsqu’un objet est loin de nous, son image visible est plus confuse que s’il était proche. Pourquoi cela ? Parce que la couche imparfaitement transparente qui nous en sépare est ■ plus épaisse dans le premier cas. Si la qualité de l’air était toujours la même, la confusion de l’image serait toujours proportionnelle à la distance, et le problème à résoudre pour évaluer la distance des objets serait des plus simples. Mais les degrés de transparence ou d’opacité de l’air étant très-variables, cela complique le problème et en rend la solution plus incertaine.

L’éducation de la vue se fait spontanément, sous l’influence de l’instinct. Lorsqu’elle est achevée, lorsque les habitudes que nous venons de décrire sont bien enracinées, la vue se substitue au toucher dans la plupart des cas, et l’on y trouve des avantages de plusieurs sortes. En effet, elle a une portée bien plus étendue, et, par conséquent, il y a des cas où la vision est possible et où le toucher ne l’est pas. De plus, il y aurait souvent du danger ou des inconvénients plus ou moins •graves à toucher les objets que nous avons besoin de connaître, tandis qu’il n’y en a aucun à les regarder. Enfin, par la vue, la connaissance est presque toujours plus rapide que par le toucher.

L’exercice des trois autres.sens externes, qui sont l’ouïe, l’odorat et le goût, donne lieu à des connaissances moins variées que celui "•• des deux premiers. Cependant on y trouve aussi les trois sortes de circonstances que nous avons déjà signalées.

La première est un fait physique. Pour l’ouïe, il faut d’abord le mouvement d’un corps sonore, tel qu’une cloche ou un tambour, et ensuite l’agitation de l’air, qui vient faire vibrer la membrane appelée tympan. Pour l’odorat, c’est l’émission de particules matérielles partant de certains corps appelés odorants. Ces particules entrent par les narines et viennent modifier la membrane muqueuse qui tapisse les nombreuses lamelles d’un os qui forme la base du nez et qui, à cause des trous dont il est percé, est appelé ethmoîde ou cribleux. Pour le goût, c’est l’introduction de certaines substances dans la bouche et leur mise en rapport avec la langue et le palais. La seconde circonstance est un fait physiologique, et ce fait varie selon les sens, à cau’ie de la différence des organes et des agents qui les modifient. Pour 1 ouïe, il faut que les ondes sonores mettent en vibration le liquide qui est contenu dans le labyrinthe de l’oreille et où flottent les rameaux du nerf de l’ouïe. Pour le goût et pour l’odorat, il est nécessaire que les substances sapides et odovantes se dissolvent, les unes dans les liquides qui baignent la bouche et les autres dans ceux qui humectent les anfractuosités du nez. Dans tous les cas, il y a une impression produite sur le cerveau par le moyen des nerfs qui le font communiquer avec l’organe externe.

Voici maintenant le fait psychique. Dans l’exercice des trois sens, il y a d’abord une sensation ; mais elle diffère suivant que c’est tel ou tel organe qui l’apporte, et même suivant que chaque organe est impressionné par telle ou telle cause extérieure. Il y a ensuite la conscience de la sensation et enfin la connaissance de la cause extérieure qui l’a occasionnée. Par là, nous connaissons trois qualités nouvelles des corps : le son, l’odeur et la saveur. Elles nous apparaissent, de même que la résistance et la couleur, comme des causes extérieures de sensations et comme des causes différentes, puisque les sensations qu’elles produisent ne sont pas les mêmes.

La portée directe de ces trois sens ne s’étend pas plus loin, car aucun d’eux, s’exerçant seul, ne peut nous faire connaître ni l’étendue ni la figure des objets.

Au lieu de rapporter la connaissance des qualités des corps à cinq sens différents, c’est-à-dire à cinq facultés distinctes, on pourrait supposer quelles relèvent toutes d un sens unique que l’on appellerait le sens de la causalité externe. Cette supposition se justifie XIV.

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rait par la ressemblance des jugements qui succèdent immédiatement à la conscience de la sensation. En effet, ces jugements consistent, dans tous les cas, à rapporter une sensation de l’âme à une cause extérieure.

Certains physiologistes ont cru devoir admettre un sens delà douleur ; mais la douleur n’est autre chose que la sensation douloureuse elle-même, et celle-ci n’a ni appareil particulier ni des caractères identiques dans toutes les circonstances. Presque tous les tissus de l’organisme peuvent devenir douloureux à un moment donné. Faut-il donc admettre que le sens de la douleur existe presque partout comme celui du toucher ? La comparaison ne serait certainement pas exacte. La douleur peut affecter tous les sens et elle est inséparable de toutes les sensations trop vives ou trop prolongées. C’est ainsi qu’une lumière excessive blesse les yeux "et que des sons trop aigus agacent péniblement l’oreille, bien qu’on ne puisse dire que ces deux organes sont devenus des sens de douleur. Nous en dirons autant du se7is de la fatigue, décrit par quelques physiolpgistes trop subtils et trop disposés à confondre les sensations, qui ne sont que les impressions produites sur certains organes, avec les sens, qui sont ces organes eux-mêmes.

Dans tout ce qui précède, toutes les fois que nous avons parlé de l’âme ou de faits psychiques, c’est-à-dire se passant d’une manière spéciale dans l’âme, nous avons parlé le langage des spiritualistes les plus purs ; mais, comme nous n’avons point la prétention de trancher de notre autorité privée une aussi grave question que celle de la vraie nature de l’âme, et que, d’ailleurs, eussionsnous cette prétention, ce ne serait point ici le lieu de prononcer 1 arrêt irrévocable, nous devons dire en finissant que toutes nos explications sur le jeu extérieur et intérieur des sens sont aussi vraies au point de vue matérialiste qu’au point de vue spiritualiste ; la seule différence consisterait dans le sens donné à certains mots. Les matérialistes peuvent reconnaître l’existence d’une âme chez l’homme ; seulement, cette âme est matérielle comme le corps et ne s’en distingue que parce que le corps est tout ce qui est visible ou peut le devenir par des dissections ou par d’autres moyens analogues, tandis que l’âme est l’ensembla vivant de certaines parties intérieures, telles que le cerveau, les nerfs, les idées matérialisées, etc. Remarquez bien qu’il s’agit ici, non pas de chacune de ces parties isolément et non pas encore de leur ensemble tel qu’un anatomiste pourrait le montrer en étalant sur une table le cerveau et les nerfs qu’il aurait tirés d’un cadavre ; non, l’âme est 1 ensemble vivant de toutes ces parties, et cet ensemble ne peut pas être observé vivant. Maintenant, il est évident que les matérialistes peuvent admettre des faits psychiques, c’est-à-dire qui s’accomplissent dans l’ensemble vivant dont nous venons de parler, et que ces faits ne peuvent être observés que par les effets qu’ils produisent dans les parties visibles du corps. Ils peuvent admettre que l’âme a connaissance des impressions reçues par tel ou tel nerf, par telle ou telle partie du cerveau, bien que ce nerf, ce cerveau soient eux-mêmes des parties essentielles de l’âme, parce que l’ensemble n’est pas identique avec chacune de ses parties, et l’impression d’une partie n’est pas non plus identique à l’impression de l’ensemble.

Beaucoup de gens penseront peut-être qu’il n’y a guère de différence entre l’âme. conçue de cette manière et l’âme des spiritualistes, et ils pourraient bien avoir raison ; car les deux systèmes qui se combattent depuis si longtemps avec tant d’acharnement ne sont peut-être séparés que par un simple malentendu. Si les spiritualistes voulaient convenir que l’âme est dans le corps et que, par conséquent, elle occupe une place déterminée dans l’espace, les matérialistes ne feraient aucune difficulté de reconnaître qu’elle n’est pas observable, de la même manière et par les mêmes moyens que ce que nous entendons ordinairement désigner sous le nom de matière ; d’où il résulte qu’en un certain sens elle est différente de la matière ordinaire et peut être appelée immatérielle. Mais les hommes aiment trop ce qui les met en lutte le3 uns contre les autres pour qu’on puisse espérer de voir l’accord s^tablir sur la question de l’âme, au moins d’ici à longtemps. Quoi qu’il en soit, nous croyons cette courte explication suffisante pour montrer qu’en ce qui touche le jeu des sens les matérialistes peuvent accepter tout ce que disent les spiritualistes les plus absolus. V. sensibilité.

Sens commun. V. raison.

— Gramm. Sens, en grammaire, veut dire signification. Les ouvrages qui traitent des matières grammaticales ont distingué plusieurs espèces de sens que nous allons passer en revue.

Sens absolu. Le sens absolu est celui qui est complet en lui-même et ne dépend en aucune sorte de sa relation avec une autre idée. Quand on dit, par exemple : « Le ciel est sans nuages, » il y a là une phrase complète en soi, dont le sens ne dépend d’aucune comparaison, d’aucune idée relative ou accessoire.

Sens relatif. C’est le contraire du précédent. Que l’on dise : • L’esprit est préféra SENS

We à la beauté ; » dans cette phrase, on considère l’esprit relativement à la beauté ; il y a relation, rapport d’une chose à une autre.

Sens abstrait. Si l’on se rappelle que le mot abstrait vient du latin abstrahere, arracher, détacher, et si l’on considère ensuite que l’on peut, en examinant un objet, séparer, détacher chacune de ses propriétés pour les voir séparément, ou n’en voir que quelques-unes, ou voir les propriétés sans l’objet, ou bien encore l’objet sans ses propriétés, i ! sera facile de conclure ce qu’il faut entendre par sens abstrait. Si, en examinant un corps, je ne vois que sa longueur, je sépare cette longueur, je l’abstrais des autres propriétés du corps ; de même, si je ne vois que sa longueur et sa largeur, je sépare, j’apstrais ces deux propriétés des autres, de la profondeur, du poids, de la forme. Si je dis : « La longueur de ce pendule, ■ le sens est abstrait»

Sens concret. C’est le contraire du précédent ; c’est l’objet considéré en bloc, avec une ou plusieurs de ses propriétés. J’unis le tout dans ma pensée, par exemple, quand je dis : ■ Ce long pendule. »

Sens déterminé. Quand la sujet auquel on attribue une manière d’être ou d’agir est exprimé nommément, est particularisé, alors le sens n’a rien de vague, rien de général ; il est déterminé. Ainsi : « Alexandre fit son entrée dans Babylone avec un éclat qui surpassait tout ce que l’univers avait jamais vu. » Le sens tombe sur un sujet bien défini, qui est Alexandre, et par là même il est déterminé complètement.

Sens indéterminé. Quand le sujet n’est pas exprimé nommément, qu’il ne représente pas un être, un objet défini, alors la phrase n’exprime qu’une pensée générale, le sens est vague, indéfini, indéterminé. Par exemple : « On est plein d’illusions dans ta jeunesse. • Le mot on ne désigne personne en particulier ; la pensée est générale et le sens indéterminé.

Sens littéral. C’est le sens qui résulte de la valeur naturelle des termes, pris purement et simplement tels qu’ils sont présentés.

Sens spirituel. On donne ce nom au sens qui est caché, pour ainsi dire, sous l’écorce du sens littéral. Celui-ci résulte de la lettre

’ même ; mais le sens spirituel demande, pour être découvert, qu’on aille chercher l’esprit sous la lettre. Les grammairiens distinguent trois espèces de sens spirituels : l<> le sens allégorique ; 20 le sens moral ; 3° le sens anagogique. Dans le sens allégorique, les mots disent une chose pour en faire entendre une autre. Ainsi, Mme Deshoulières, sous le sens allégorique d’une bergère qui parle à ses brebis, rend compté à ses enfants de ce qu’elle a fait pour eux et se plaint des cruautés du sort :

Sans ces prés fleuris

Qu’arrose la Seine,

Cherchez qui vous mène,

Mes chères brebis...

Ainsi, Voltaire présente des conseils pour la direction dans la vie sous le sens allégorique de la conduite d’un frêle esquif : Le bonheur est le port où tendent le3 humains ; Les écueils sont fréquents, les vents sont incertains ; Le ciel, pour aborder cette rive étrangère. Accorde a tout mortel une barque légère. Ainsi que les secours, les dangers sont égaux ; Qu’importe, quand l’orage a soulevé les flots, Que ta poupe soit peinte et que ton mat déploie Une voile de pourpre et des câbles de soie ! L’art du pilote est tout, et pour dompter les vents, Il faut la main du sage et non les ornements.

Le sens moral se cache sous une fable ou une parabole. Quand l’Évangile fait dire à Jésus-Christ : œ Voyez comment croissent les lis de la campagne -} ils ne travaillent ni ne fitent ; cependant je vous déclare que Salomon même, avec toute sa magnificence, n’a jamais été si bien vêtu que l’est un de ces lis ; » il y a là un sens moral sous une forme parabolique. Les fables renferment aussi presque toujours un sensmoral. La Fontaine, par exemple, raconte qu’un rat dévot s’est retiré du monde dans un fromage de Hollande, où il vit comme un chanoine dans une riche prébende, et qu’un jour des ambassadeurs de la république des rats, pressés par un besoin extrême, venant lui demander quelque léger secours, le solitaire leur répond :

Les choses d’ici-bas ne me regardent plus. Ed quoi peut un pauvre reclus Vous assister ? Que peut-il faire, Que de prier le ciel qu’il vous aide en ceci ? J’espère qu’il aura de vous quelque souci. Ayant parlé de cette sorte. Le nouveau saint ferma sa porte.

Evidemment, le poëte ne veut pas qu’on prenne son récit à la lettre ; mais il y cache un sens moral ; les dévots et les moines retirés du monde ne sont pas toujours les plus secourables.

Le sens anagogique résulte de l’interprétation figurée d’un fait ou d’un texte des livres saints. Ainsi l’Ancien Testament parle des biens temporels promis aux observateurs de la loi ; les commentateurs trouvent là, dans le sens anagogique, l’emblème des biens éternels qui attendent les hommes vertueux dans la vie future.

Sens propre. La première signification

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d’un mot est son sens propre ; quand on dit, par exemple : • La lumière brille ; Le feu s’éteint ; Une pierre tombe. »

Sens figuré. Quand on change la signification propre d’un mot pour lui en donner une qu’on emprunte à un autre ordre de faits, ou, en d’autres termes, quand on transporto un mot de la chose qu’il signifie proprement à une autre qu’il ne signifie qu’indirectement, alors le sens devient figuré. C’est un sens figuré qui termine la belle péroraison de Bossuet, dans son oraison funèbre de Condé : « Heureux si, averti par ces cheveux blancs du compte que je dois rendre de mon administration, je réserve au troupeau que je dois nourrir de la parole de vie les restes d’une voix qui tombe et d’une ardeur qui s’éteint lu Le sens est figuré quand on dit une voile pour un vaisseau ; quand on dit.que le fourbe a un, masque sur le visage ; quand on dit des passions qu’elles sont un feu qui brûle.

On rencontre chez certains auteurs des passages où l’emploi du sens figuré est poussé a un point excessif. Par exemple, dans cette phrase où Fléchier parle de l’instruction religieuse qui disposa le duc de Montausier à abjurer l’hérésie : « Tombez, tombez, voiles importuns qui lui couvrez la vérité de nos mystères, et vous, prêtres de Jésus-Christ, prenez le glaive de la parole et coupez sagement jusqu’aux racines de l’erreur que la naissance et l’éducation avaient fait croître dans son âme.» Ce qui veut dire dans un langage plus simple : 11 se fit instruire, les prêtres lui enseignèrent les dogmes de la religion catholique et lui découvrirentles erreurs dans lesquelles il avait été élevé.

Sens par extension. Entre le sens propre et le sens figuré, d’Alembert en admet un autre qui tient, pour ainsi dire, le milieu entre ces deux-là, et qu’il appelle sens par extension. Il s’exprime ainsiKà ce sujet, dans ses Eclaircissements sur les éléments de philosophie ; • Quand o’n dit l’éclat du son, le mot éclat est transporté par.extension de la lumière au bruit, du sens de la vue auquel il est propre au sens de l’ouïe auquel il n’appartient qu’improprement ; on ne doit pourtant pas dire que cette expression, l’éclat du son, soit figurée, parce que les expressions figurées sont proprement l’application qu’on fait à un objet intellectuel d’un mot destiné à exprimer un objet sensible.... Voici encore ■■ un exemple simple qui, dans trois différentes phrases, montrera d une manière bien claire ces trois différents sens : Marcher après quelqu’un ; Arriver après l’heure fixée ; Courir après les honneurs. Voilà après d’abord dans son sens propre, qui est celui de suivre un corps en mouvement ; ensuite dans son sens par extension, parce que, dans la phrase Arriver. après l’heure, on regarde le temps comme marchant et fuyant, pour ainsi dire, devant nous ; enfin dans le sens figuré Courir après les honneurs, parce que, dans cette phrase, on regarde aussi les honneurs, qui sont ua être abstrait, comme un être physique fuyant devant celui qui le désire et cherchant à lui échapper. Une infinité de mots de la langue, ajoute dAlembert, pris dans toutes les classes et tous les genres, peuvent fournir de pareils exemples. «

Sens adapté. C’est une application, plus ou moins précise, d’un texte connu à une circonstance particulière. On trouve très-fréquemment, dans les discours des orateurs de" la chaire, des textes de l’Écriture employés ainsi dans un sens adapté. Ainsi Bossuet, dans l’oraison funèbre de la reine d’Angleterre, adapte à cette princesse les paroles suivantes de Jérémie : « Voyez, Seigneur, mon affliction ; mon ennemi s’est fortifié et mes enfants sont perdus ; le cruel a mis sa main sacrilège sur ce qui m’était le plus cher ; la royauté a été profanée et les princes sont foulés aux pieds. Laissez-moi, ja pleurerai amèrement ; n’entreprenez pas de me consoler. L’épée a frappé au dehors ; mais je sens en moi-même une mort semblable. » Ainsi Fléchier a adapté à Turenne ce passage de l’Écriture relatif à Judas Macchabée ; « Comment est mort cet homme puissant qui sauvait.le peuple d’Israël ? »

Sens équivoque. Quand une phrase est susceptible de deux interprétations différentes et qu’il y a amphibologie, on dit que le sens est équivoque. Par exemple : ■ François 1er érigea Vendôme en duché-pairie en faveur de Charles de Bourbon, et il le mena avec lui à la conquête du duché de Milan, où il se comporta vaillamment. » Ou ne sait.lequel des deux, de François Ier ou de Charles de Bourbon, se comporta vaillamment. L’Académie française a trouvé un sens équivoque dans le vers suivant de Corneille :

L’amour n’est qu’un plaisir et l’honneur un devoir.

•Elle a remarqué que, la conjonction liant un membre de phrase négatif avec un autre membre affirmatif, il en résulte une construction louche, et qu’il aurait fallu dire :

L’amour n’est qu’un plaisir, l’honneur est un devoir.

— Sens composé. C’est le sens qui résulte de tous les termes d’une proposition pris selon la liaison qu’ils ont ensemble, et de telle sorte que tous ces termes conservent leur signification propre dans toute l’étendue de la proposition.

— Sens divisé. Ici les termes de la proposition ne conservent pas à tous égards leur

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