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Servan, et l’Avenir de Rennes, feuille démocratique qu’il dirige encore au moment où nous écrivons cette notice (1875). Comme écrivain, on lui doit : Histoire et panorama d’un beau pays ou Saint-Malo, Saint-Servan, Dinan, Dol et environs, illustré par M. V. Doutrelan (1853-1856, 24 liv. in-4o), ouvrage remarquable par les recherches et l’érudition,

3ui a été réédité en 1861 (in-4») et augmenté e l’histoire de la Révolution en Bretagne, écrite sur des documents inédits avec notes et pièces justificatives ; la République de Platon comparée aux idées et aux États modernes (1809, in-12) ; Elohim et Jawéh (1S73), poème inspiré par les idées les plus hautes et les plus généreuses, l’amour du genre humain, la foi au progrès, et dans lequel l’auteur fait un appel éloquent à l’apaisement des haines, à la concorde, au retour des vaincus politiques dans la mère patrie ; la Dame de Coëtquen (1875), roman historique ; Gilles de Bretagne (1875), drame, etc.

ROE1E (Jean-Baptisto), peintre belge, né à Bruxelles en 1821. Il est fils d’un serrurier qui lui apprit son état. Pendant ses rares loisirs, il. Robie étudia sans maître la peinture et obtint de son père la permission de suivre les cours de l’Académie de Bruxelles. 11 se mit au travail avec ardeur et ne tarda point à exposer son premier tableau, Une guirlande de fleurs. La fraîcheur, la finesse du ton, une facture légère recommandèrent ce morceau à l’attention des amateurs. Depuis 1848, il a exposé au Salon de Bruxelles de nombreux tableaux représentant des fleurs, des fruits, des natures mortes, notamment les Raisins, la Fenêtre, le Aire qui lui valurent une véritable notoriété. Deux toiles très-soignées, te Pain et le vin et une Nature morte, obtinrent a l’Exposition universelle de Paris en 1855 une mention honorable. En 1863, ses Fleurs et Raisins lui valurent une médaille d’or à Bruxelles. Citons encore de lui les tableaux suivants, exposés à Paris : Nature morte et les Jiuisins (ISG4) ; Massacre des Innocents ; la Terre promise (1S65) ; Fruits, à i’Exposilion universelle de 1SC7 ; le Printemps (18G7), etc.

nOBIEN (Christophe-Paul Gautron de), magistrat et historien français, né à Rennes en 1C08, mort vers 1750. Il était président à mortier au parlement de Bretagne, conseiller du roi et membre associé de l’Académie des sciences de Berlin. On a de lui : Dissertation sur la formation des trois différentes espèces de pieiTes figurées qui se trouvent dans la Bretagne (Paris, 1751, fort in-8") ; Nouvelles idées sur là formation des fossiles (11511 petit in-8o, rtg.) et deux ouvrages inédits : Description historique et iopographique de l’ancienne Armorique ou Petite Bretagne, depuis la conquête des Ilomains jusqu’au passage des Bretons insulaires dans celle province, enrichie de cartes, pians et dessins des monuments qu’on a pu découvrir jusqu’à présent (1758, 4 vol. in-fol.) ; Journal historique de ce qui s’est passé en Bretagne pendant les premières années de l’administration de Philippe, duc d’Orléans, régent du royaume (in-4°j. Ce dernier écrit est le récit de la coalition de 1720 contre le régent.

ROBIÈRE s. f. (ro-biè-re — rad. robe). Religieuse chargée du soin des vêtements dans sa communauté. Il Armoire où les religieuses d’une communauté tiennent leurs vêtements.

ROBIGALIES s. f. pi. (ro-bi-ga-lî — lat. rouiyulia ; de rabigo, rouille). Antiq. rom. Fête qu’on célébrait à Rome pour obtenir des dieux que les blés fussent préservés de la rouille. Il On dit aussi robigaLiîS.

— Encycl. Cette fête fut, dit-on, instituée par Nuiun. Elle se célébrait le 6 des calendes de mai (25 avril). Les sacrifices étaient oiferts en l’honneur du dieu Robigus, ou, suivant Ovide et Columelle, de la déesse Robigo. On immolait une chienne rousse et une brebis ; on faisait des libations de vin. Le prêtre prononçait une prière’pour apaiser la redoutable divinité : « Rigoureuse Robigo, épargne les herbes de Cérès » (Ovide) :

Aapera Robvjo, parcas cerealibus herbis. Les érudits modernes ont pensé que le nom même des robiyalies avait amené, par la suite des temps, la création de cette déesse Robigo ou de ce dieu Robigus, dont il n’est point parlé en dehors de cette fêle. Leur existence s’expliquerait mal autrement, car les Romains ne rendaient pas de culte aux divinités malfaisantes.

ROB1GNOLEUR s. m. (ro-bi-guo-Ieur ; gn mil.). Argot. Variété d’escrocs appelés aussi

COCANCEURS.

110B1GO, déesse chez les Romains. V. robigalius.

ROBIGUS, dieu chez les Romains. V. robigalies.

ROBILANT (Esprit-Benoît Nicolis du), ingénieur militaire piémontais, né à Turin en 1724, mort en 1801. Il lit ses premières armes en 1742 et se distingua dans maints sièges ot combats auxquels il assista jusqu’à la paix d’Aix-la-Chapelle en 1748. Envoyé alors en Allemagne pour y étudier les progrès do la métallurgie, il suivit les cours de l’université de Leipzig et parcourut ensuite la Saxe, la Thuriuge, le Harz, le Hanovre, la Bohème et la haute Hongrie, visitant partout les mines, les usines et travaillant parfois comme

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un simple ouvrier. Nommé, à son retour en Piémont (1752), inspecteur général des mines, il établit à Turin une école de minéralogie, de géométrie souterraine et de docimusie, et fonda un laboratoire de chimie à l’arsenal de Turin. Il introduisit dans l’exploitation dee mines les procédés allemands et l’usage de nouvelles machines. En 1769, il fit une campagne d’exploration dans les Alpes et les Apennins, en dressa des cartes minéralogiques, rouvrit les mines fermées et entreprit des exploitations nouvelles. Partout il obtint les résultats désirés. À la mort du comte Pinto, premier ingénieur du royaume, le roi choisit Robilant pour le remplacer (1787) et il le nomma, en outre, lieutenant général d’infanterie et commandant du génie militaire. En 1789, Robilant fut chargé de refondre les monnaies du Piémont, de façon à les mettre en rapport avec le titre des nouvelles monnaies françaises. On trouve dans le recueil de l’Académie de Turin, dont il était membre, de bons ouvrages de Robilant, tels que : Essai géographique, suivi d’une Topographie souterraine minéralogique et d’une doeimasie des États du roi en terre ferme ; Description du duché d’Aoste et Mémoire sur les différents procédés qui ont été employés à l’hôtel des monnaies pour améliorer les traitements métallurgiques ; De l’utilité et de l’importance des voyages dans son propre paijs (l vol. pet. in-fol., pi.).

ROBILANT (Jean-Baptiste Nicolis du), général piémontais, neveu du précédent, né à Saint-Alban, mort en 1821. Il entra au service en 1775, passa ensuite dans le génie, où il parvint bientôt au grade de capitaine, fut chargé de diriger divers ouvrages dans la construction de la forteresse de Tortone et accompagna son oncle dans l’inspection de toutes les places fortes du royaume. Nommé aide de camp, puis chef d’état-innjor du duc de Moniferrut, général ’en chef des armées du Piémont, il lit avec distinction les campagnes de,1792 a 1706, ce qui lui valut le grade de lieutenant-colonel.» Pendant l’occupation du pays par l’armée française, Robilant refusa les divers postes qui lui furent offertset s’occupa, dans la retraite, do l’étude des langues. En 1814, il fut nommé général-major d’infanterie, et, l’annéo suivante, il commanda le corps d’observation en Savoie et contribua à la reddition de Gre-noble, il devint successivement directeur de l’Académie royale militaire (1815), ministre de la guerre (1817) et lieutenant général, inspecteur générai du génie et de i’état-major général (1820).

ROBILLARD s. m. (ro-bi’-llar ; Il mil.), Comm. Variété de tabac.

«OIlILLMiD D’ARGENTELLE (Louis-Mare-Antoine), naturaliste français. V. Aroen-

TliLLE.

ROBILLARD DE BEAX’REPAIRE (Eugène dk), magistrat et écrivain français, né à Avranches (Manche) en 1S27. Il fit ses études de droit, puis entra dans la magistrature. Après avoir été substitut et procureur impérial, M. Robillard fut nommé substitut du procureur général de Bourges, puis conseiller à la cour d’appel de Caen, où il siège encore (1875). On lui doit un certain nombre d’écrits, notamment : Étude sur Guillaume de Saint-Pair, poêle anglo-normand (issi, in -40) ; Notice sur Jean Vauquelin de La Fresnaye (1851, in-S°) ; Étude sur ta poésie populaire en Normandie. (1856, in-8») ; Documents sur la captivité et la mort de Dubourg dans la cage de fer duMout-Saint-Michel(iS5S, hi-ï2)Satires de Soiinet de Cowval (18G5, in-S°) ; Notice sur George Besnard (1874, in-8o) ; Happort relatif au régime des établissements pénitentiaires (1874, in-8o), été.

ROBILLARD DE BEAUREPAIRE (Charles nu), écrivain français, frère du précèdent, né à Avranches en 1828. Il est devenu archiviste du département de la Seine-Inférieure, archiviste-bibliothécaire de l’académie de Rouen

et correspondant du ministère de l’instruction publique pour les travaux historiques. , SI. Robillard s’est fait connaître par des travaux sur l’ancienne province de Normandie. Nous citerons de lui : Notice sur maître Jean Masselin (1S51, in-8o) ; Entrée et séjour du roi Charles VII à Rouen en 1485 (1854, in-8o) ; lissai sur l’asile religieux dans l’empire romain et la monarchie française (1854, in-S") ; Notice sur l’hospice d’Avranches (1858, in-s°) ; Notice sur les maisons de force de la généralité de Rouen avant 1790 (1859, in-8") ; Des étals de Normandie sous la domination anglaise (1859, in-8o) ; Recherches sur les anciennes prisons de Rouen (t861, in-8<>) ; Inventaire sommaire des archives départementales antérieures d 1790 (1864, in-4<>) ; Notes et documents concernant l’état des campagnes de ta haute Normandie dans les dentiers temps du moyen âge (1865, in-s°) ; Notice sur un des amis et des correspondants de Voltaire (1870, in-S°) ; Séjour de Henri III à Rouen (1870, in-8o), etc.

ROBIN s. m. (ro-bain — rad. robe. Quant à Robin mouton, c’est une forme du nom propre Robert. Quelques-uns, cependant, prétendent que robin, dans ce sens, vient soit du latin rupinus, rupes, roche, à cause de la tète dure du mouton ou parce que les moutons se plaisent sur les rochers, soit de robe, à cause de la toison). Par dénigr. Homme de robe, magistrat, avocat, officier de justice :

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Comment souffrir leur troupe libertine. Et ce robin parlant toujours de lui ?

Voltaire.

... Je hais les cagota, les robins et les cuistres, Qu’ils servent Pimpocan, Mahomet ou Vîchnou. A. de Musset.

Robin mouton. Appellation imaginée par La Fontaine pour désigner un mouton du nom de Robin.

Robin et Marion, Couple de masques au moyen âge.

—Loc. fam. Un plaisant Robin, Un homme qui a plus de prétention que de valeur. || Faire comme Robin à la danse, Faire du mieux qu’on peut, il Vivre ensemble comme Robin et Marion, Vivre en parfaite intelligence. Il Toquer sur le Robin, Signifie, h Metz, Donner des croquignoles. Il Toujours souvient à Robin de ses flûtes, On oublie difficilement ses anciennes habitudes, on est toujours prêt à y revenir.

ROBIN, INE adj. (ro-bain, i-ne). Plaisant, amusant, facétieux, il Vieux mot.

ROBIN (Jean), botaniste français, né à Paris en 1550, mort dans la même ville en 1629. Il se fit recevoir apothicaire, se mit en relation avec les plus célèbres botanistes de son temps et établit près du Louvre un jardin qui devint bientôt le plus beau de la capitale. Robin, qui reçut vers 15S6 le titre d’arboriste et de simpliçisle du roi, fut chargé par Henri III de la direction du jardin du Louvre, et Henri IV et Louis XIII lui continuèrent leur protection. En 1597, le doyen de la Faculté de médecine de Paris chargea Robin de faire les travaux et semis du jardin que cette Faculté créa alors. Robin y naturalisa plusieurs plantes, ’ notamment la kelmie ou grande mauve et le robinier qui, depuis lors, s’est répandu en France. Avant ce botaniste, la tubéreuse n’avait guère été cultivée qu’en Provence et en Languedoc, et c’est à lui que cette plante doit la vogue dont elle jouit encore. Gui Patin dit que Robin était si jaloux de ses fieurs.qu’il aimait mieux en écraser les caïeux que d’en faire part a ses amis ; aussi l’appelle-t-il ironiquement eunuckus hesperidum, expression qui a été mal comprise par quelques biographes. On a de Jean Robin, que Tournefort appelle le plus célèbre botaniste de son temps : Catatogus stirpium tam indigeuarum quant exaticarum qus Lxttetite coluntur (ICOl, in-12 ; 1C07, in—8°) ; e Jardin du roi IJenri IV, par P. Vallet (160S, infol.), réimprimé sous le titre de ■’ le Jardin de Louis XIII (1623, 1638, in-fol.) ; Robin y décrit diverses plantes qu’il avait tirées de Guinée et d’Espagne ; Histoire des plantes aromatiques, augmentée de plusieurs plantes venues des Indes, lesquelles ont été cultivées au jardin de M. Robin, herboriste, du roi (1619, i’n-16) ; Enchiridion isagogicum ad notitiam stirpium qvx coluntur in horto. J. et. V. Robin (1S23 et 1624, in-12). Ce catalogue renferme plus de 1,800 plantes, tandis que celui qui fut publié en 1601 n’en contient que 1,317.

ROBIN (Vespasien), botaniste, fils du précédent, né à Paris en 1579, mort dans la même ville en 1662. Associé de bonne heureaux travaux de son père, auquel il succéda dans le titre d’arboriste du roi, il fit plusieurs voyages d’exploration dans le midi de la France, dans les Alpes, dans les Pyrénées, en Espagne et jusque sur les côtes barbaresques. Il naturalisa en France quelques plantes qui n’y étaient point cultivées, et donna à Gui de La Brosse, pour le Jardin royal, toutes les plantes rares qu’il cultivait. En 1635, il fut nommé sous-démonstrateur dans cet établissement, et, a la mort de La Brosse(1641), il fit seul les leçons de botanique. Il avait planté, en 1635, le premier acacia qui ait été cultivé dans ce jardin. En 1653, Denis Jonquet remplaça Robin ; mais celui-ci conserva le titre honorifique de démonstrateur des plantes médicinales du Jardin du roi. Vespasien Robin a publié, en collaboration avec son père, un catalogue de plantes : Enchiridion isagegicum, etc.

ROBIN (DuNKtx, dit), célèbre prestidigitateur, né en Hollande vers 1805, mort à Paris en 1874. La seule partie connue de la vie de M. Robin est celle qu’il passa sur le boulevard du Temple, alors qu’il y tenait un petit théâtre où il faisait les expériences de prestidigitation les plus curieuses. M. Robin était non-seulement un praticien très-remarquable, mais un homme fort instruit. C’est par l’application des phénomènes le3 plus curieux de la science qu’il était parvenu à composerun spectacle des plus attrayants. Chacun se rappelle son appareil d’optique au moyen duquel il projetait sur la scène des ombres blanches qui avaient un air de fantômes fort réussi. On se souvient aussi de la confusion dont il couvrit les frères Davenport, " ces charlatans spirites, en exécutant seul et dans une armoire construite sur le modèle de celle des deux frères, tout le tapage que Ces messieurs y prétendaient faire exécuter par des esprits. Vers 1S69, M. Robin quitta son petit théâtre dont il fut exproprié et tint, jusqu’à sa mort, un hôtel garni sur le boulevard Mazas. M. Robin, qui savait ù quoi s’en tenir sur les fantômes et les prestidigitateurs de toute espèce, était libre penseur et se fit enterrer civilement. On a de lui : Almanach illustré de Cagliostro, qui parut durant plusieurs années ; Histoire des spectres vivants et impal-

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pables ; Secrets de la physique amusante (Paris, 1864, in-4»).

ROBIN (Charles), anatomiste français, né à Jasseron (Ain) le 4 juin 1821. Il vint à Paris en 1840 pour étudier la médecine. Dans le cours de ses études, il fut nommé externe, et interne au concours, et il obtint, en 1S44, le grand prix de l’École pratique. Il fut reçu docteur en 1845, agrégé en 1847. Il ouvrit bientôt un cours d’anatomie pathologique et organisa un laboratoire d’anatomie comparée dans l’aile droite des bâtiments de l’ancienne mairie du XIe arrondissement. L’agencement de ce laboratoire, les instruments et appareils qu’il y a accumulés, les précautions qu’il a prises pour en écarter les dangers que présentent trop souvent les établissements de ce genre, ont fait du sien un vrai modèle d’institution scientifique et hygiénique. C’est là que, pendant de longues années, M. Robin s’est cousacré tout entier à l’étude de la nature vivante et à la divulgation des résultats de ses recherches. C’est la que la Faculté est venue le chercher pour le faire monter dans la nouvelle chaire d’histologie qu’on avait créée pour lui (novembre 1862).

Le professeur officie ! obtint le même succès qu’avait obtenu le professeur libre. Mais, comme professeur officiel, M. Robin a un vice radical, qui no devait pas tarder à ameuter contre lui toutes les voix de l’ignorantisme et de la réaction cléricale : il est le partisan avoué des doctrines positivistes d’Auguste Comte. Un concert d’injures accueillit, dans les organes du cléricalisme, l’enseignement de l’illustre micrographe ; on essaya d’interrompre ses leçons par des cris et des sifflets ; on no lui épargna même pas les voies de fait : on lui jeta des sous à la face. Le jeune savant lutta avec une rare énergie et un ’ sang-froid admirable contre cette odieuse cabale, et, grâce à l’appui que le courage, la science et les fortes convictions trouvent toujours dans la jeunesse do la capitale, il put rester ferme à ce poste, dont on avait entrepris de le chasser.

En 1866, M. Robin, déjà membre de l’Académie de médecine, de la Société de biologie et de presque toutes les sociétés savantes de l’Europe, tut nommé membre de l’Institut. Cette élection fut un véritable événement scientifique. « C’était bien d’une élection qu’il s’agissait le 15 janvier 18SG, disait M. A. Guillemin dans la Morale indépendante ; mais la personnalité de l’un des candidats lui donnait une importance exceptionnelle. Nonseulement la science, mais la philosophie et l’esprit même de la science étaient en cause. On se demandait si l’Académie des sciences, suivant l’exemple de sa voisine, l’Académie française, allait ou non obéir au mot d’ordre parti, il y a quelque deux ans, d’une petite Église intolérante, dont MM. Cousin, Guizot et Dupanloup sont les apôtres. On se rappelle les anathèmes dont l’évêque d’Orléans accabla les Littré, les Taine, les Renan et tous les modernes. impies qui osent déclarer la science supérieure k-la foi et l’esprit d’examen et de liberté préférable à l’esprit de soumission et d’obéissance. L’Avertissement aux pères de famille porta coup et les objurgations du prélat académicien convainquirent les Quarante du péril où ils eussent exposé la société tout entière en permettant ail, Littré de s’asseoir sur un de leurs fauteuils. On put croire un instant le positivisme terrassé dans la personne de son plus illustre représentant ; mais l’hydre de la libre pensée a plus d’une.tête.

Malheureusement pour les défenseurs de la foi et des traditions, une porte s’est trouvée ouverte, dans leur voisinage, à l’esprit nouveau, qui s’est empressé de faire irruption, grâce a la complicité de trente-quatre membres de l’Académie des sciences. La mort de M. Valenciennes avait laissé une place vacante dans la section d’anatomie et de zoologie. Les candidats en présence étaient, d’une part, M. Ch. Robin, que des travaux considérables et du premier ordre désignaient depuis longtemps aux suffrages de l’Académie ; de l’autre, M. Lacaze-Duthiers, nouveau venu dans la science et qui méritait certes le second rang. Mais M. Robin, nous n’apprendrons rien à personne en le constatant, est un des plus éminents parmi les disciples d’Auguste Ôomte et, depuis la mort de ce dernier, un des chefs de l’école positiviste. JEn un mot, selon le fougueux prélat, Ch. Robin, est un matérialiste, un athée. Comment admettre au sein de l’Académie un savant compromis de la sorte ? D’autre part, comment éliminer, passer sous silence une candidature que tous ceux qui s’occupent au monde de physiologie, d’histologie, d’histoire naturelle auraient spontanément provoquée, si de précédentes élections ne l’eussent depuis longtemps mise en évidence ? Tel était le problème qu’avait à résoudre la section et qu elle crut avoir résolu en offrant aux suffrages de l’Académie une liste où le nom de M. Robin.se trouvait inscrit au second rang. Il paraît clair que l’esprit de M. Dupanloup avait passé par là. Nos lecteurs trouveront peut-être étrange que les hommes de science aient encore des préoccupations pareilles et qu’ils s’inquiètent, ayant à nommer un physiologiste, de savoir à quelle école, spiritualiste ou matérialiste, déiste ou athée, panthéiste ou sceptique, appartiennent les candidats.

« L’indépendance de la science est une thèse