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rets qui avoisinent la mer et les grands lacs ; on le rencontre communément pendant l’hiver sur les côtes de la Manche. Il vole moins haut et moins vite que les aigles proprement dits. Il chasse de nuit aussi bien que de jour ; il saisit les poissons en fondant dessus quand ils sont à fleur d’eau, ou même en plongeant, et se nourrit aussi de jeunes phoques, d’oiseaux de mer, de mammifères terrestres ; s’il voit un autre rapace plus faible que lui qui s’est emparé d’un poisson, il le poursuit avec acharnement, jusqu’à ce que ce concurrent malheureux lui abandonne son butin. Sa voracité lui est quelquefois funeste. Il se jette, dit-on, sur les phoques avec tant d’acharnement et se cramponne tellement sur leur dos, en y enfonçant ses griffes acérées, que souvent il no peut plus les dégager et se laisse entraîner par le phoque au fond de la mer.

Léopold de Buch attribue à cet oiseau une industrie qui ferait supposer en lui une combinaison d idées appartenant exclusivement aux animaux supérieurs. Il dit que le pygargue attaque même les bœufs ; pour réussir dans son entreprise, il se plonge d’abord dans la mer, se relève tout mouillé et se roule sur le rivage jusqu’à ce que ses plumes soient couvertes de sable et de gravier ; en cet état, il fond sur sa victime, lui jetant du sabte dans les jeux et la frappant en même temps de son bec et de ses ailes. Le bœuf court çà et là pour éviter un ennemi qui l’atteint partout ; il tombe enfin épuisé de fatigue et devient la proie du pygargue. Les Groenlandais recherchent le pygargue pour manger sa chair, et ils font des amulettes avec ses mandibules et ses griffes. La localité modifie singulièrement le genre de vie du pygargue ; dans la Russie méridionale, il n’est plus riverain et se tient au milieu des steppes, où il dévore les taupes et les rongeurs ; on l’y voit même dans l’hiver s’approcher des habitations et se jeter sur les charognes de mammifères et d’oiseaux. Dans les régions plus septentrionales, il émigré vers le Sud aux approches du froid et suit les grandes bandes d’oies qui émigrent comme lui ; c’est alors qu’il est de passage sur nos côtes, pour y reparaître de nouveau au commencement de mars et retourner vers le Nord, où il va se reproduire. Son aire, qu’il établit sur tes rochers escarpés ou sur les arbres, ou même à terre, et qui offre jusqu’à 2 mètres de largeur, contient deux ceuis d un blanc sale, à taches d’un roux vineux.

Le pygargue à tête blanche est une espèce américaine qui diffère du pygargue d’Europe, en ce qu’elle est un peu plus petite ; que le . bec et les doigts sont moins longs et que la dernière phalange du doigt médian porte huit écailles larges au lieu de six. Le plumage est d|un brun foncé, avec la tête d’un blanc pur, ainsi que les deux tiers du cou, la queue et les plumes qui la recouvrent. Le bec, la cire, les tarses et les doigts sont d’un jaune pâle ; l’iris est d’un blanc jaunâtre. Cette espèce, nommée vulgairement aigle à tête blanche, habite principalement l’Amérique septentrionale et ne se rencontre que très-accidentellement en Europe. Elle niche sur les rochers escarpés et les arbres à cime large et élevée. Ses mœurs sont les mêmes que celles du pygargue d’Europe ; c’est lui qui est représenté sur l’étendard des États-Unis d’Amérique. Nul oiseau ne possède un vol plus puissant, n’a plus de force, d’adresse et de courage ; mais son caractère est féroce et tyrannique ; Franklin n’approuvait pas le choix que ses compatriotes avaient fait de cet oiseau pour leur blason national, c Un brigand ailé, disaitil, qui profite de ses avantages pour ravir aux oiseaux plus faibles que lui le butin qu’ils ont conquis, n’est pas digne de représenter l’indépendance loyale et généreuse du peuple

américain. •

« Voulez-vous, dit Audubon, connaître la rapine de l’aigle à tète blanche ? Permettezmoi de vous transporter sur le Mississipi, vers la fin de l’automne, au moment où des milliers d’oiseaux fuient le Nord et se rapprochent du soleil. Laissez votre barque effleurer les eaux du grand fleuve. Quand vous verrez deux arbres dont la cime dépasse toutes les autres cimes s’élever en face l’un de l’autre, sur les deux bords du fleuve, levez les yeux ; l’aigle est là jperché sur le faîte de l’un de ces arbres ; son œil étincelle et roule dans son orbite comme un globe de feu. Il contemple attentivement la vaste étendue des eaux ; souvent son regard se détourne et s’abaisse vers le sol, il observe, il attend ; tous les bruits sont écoutés, recueillis par son oreille vigilante ; le daim, qui effleure à peine le feuillage, ne lui échappe pas. Sur l’arbre opposé sa compagne est en sentinelle ; de moment en moment son cri semble exhorter le mâle à la patience. Il y répond par un battement d’ailes, par une inclination de tout son corps et par un glapissement aigre et strident qui ressemble au rire d’un maniaque ; puis, il se redresse, immobile et silencieux comme une statue. Les canards, les poules d’eau, les outardes passent au-dessous de lui en bataillons serrés, que le cours du fleuve emporte vers le Sud ; proies que l’aigle dédaigne et que ce inépris sauve de la mort. Enfin, un son loin* tain que le vent fait voler sur le courant arrive à l’ouïe des deux époux ; ce bruit a la retentissement et la raucité d’un instrumentde cuivre ; c’est la voix du cygne. La femelle avertit le mâle par un appel composé defleux notes ; tout le corps de l’aigle frémit ; deux ou

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trois coups de bec, dont il frappe rapidement son plumage, le préparent à son expédition. Il va partir. Le cygne vient comme un vaisseau flottant dans l’air, son cou de neige étendu.eu avant, l’œil rempli d’inquiétude. Le battement précipité de ses aife% suffit à peine à soutenir le poids de son corps, et ses pattes qui se reploient sous sa queue disparaissent à l’œil. Il approche lentement, victime dévouée. Un cri de guerre se fait entendre ; l’aigle part avec la rapidité de l’étoile qui file. Le cygne a vu son bourreau ; il abaisse son cou, décrit un demi-cercle et manœuvre, dans l’agonie de sa terreur, pour échapper à la mort. Une seule chance de succès lui reste, c’est de plonger dans le courant ; mais l’aigle a prévu ce stratagème ; il force sa proie à rester dans l’air, en se tenant sans relâche au-dessous d’elle et en menaçant de la frapper au ventre et sous les ailes. Cette habile tactique, que l’homme envierait à l’oiseau, ne manque jamais d’atteindre son but. Le cygne s’affaiblit, se lasse et perd tout espoir de salut ; mais alors son ennemi craint encore qu’il n’aille tomber dans l’eau du fleuve ; un coup de serres de l’aigle frappe la victime sous l’aile et la précipite obliquement sur le rivage. Tant de prudence, d’activité, d’adresse, ont achevé la conquête ; vous ne verriez pas sans effroi le triomphe de l’aigle ; il danse sur le cadavre, il enfonce profondément ses armes d’airain dans le corps du cygne mourant ; il bat des ailes, il hurle de joie : les dernières convulsions de l’oiseau semblent l’enivrer, il lève sa tête chenue vers le ciel et ses yeux se colorent d’un pourpre enflammé. La femelle vient le rejoindre ; tous deux ils retournent le cygne, percent sa poitrine de leur bec et se gorgent du sang chaud qui en jaillit. »

Audubon décritsous le nom à’aigle de Washington une espèce d’aigle pêcheur que Ch. Bonaparte réunit au pygargue à tête blanche. Ce pygargue, dans son vol, circonscrit un plus grand espace et plane plus près de la terre et de l’eau ; quand il fond sur sa proie, il décrit autour délie une spirale qui se rétrécit peu à peu ; dans l’intention évidente d’empêcher tout mouvement de retraite de la victime, il ne tombe sur elle qu’à quelques mètres de distance ; dès qu’il l’a saisie, il s’envole obliquement à une grande distance, mais il s’élève peu.

Le pygargue aguia est une espèce remarquable du sud de l’Amérique. Le dessus delà tète, du dos, du cou, de la poitrine, de la queue est noir, avec du blanc à la base des plumes ; l’extrémité des rectrices est d’un blanc sale ; la gorge est d’un bleu plombé clair ; le ventre est blanc, ainsi que les cuisses ; l’iris est roux, les tarses sont jaunes, ainsi que le bec, qui est noirâtre à son extrémité. La taille est de om,65. Cet oiseau habite les rivages escarpés des lacs, des fleuves et des mers ; on ne le voit jamais dans les bois ; il se perche de préférence sur les rochers et les arbres moru, dont il occupe le sommet pendant le jour, pour embrasser un plus vaste espace ; la nuit seulement il se pose plus bas, et c’est alors qu’on peut le tirer. Dèsla pointa du jour, il se réveille et commence sa tournée en côtoyant les falaises ; son vol est peu rapide, mais aisé ; il tournoie dans les airs et à une grande hauteur, tantôt guettant les pigeons voyageurs ou les petits mammifères des plaines voisines, tels que les rats, les cobayes, tantôt explorant les grèves maritimes où le flot a déposé des cadavres de poisffihs, de phoques ou d’oiseaux aquatiques ; il tombe d’aplomb sur sa proie, morte ou vivante, et dispute cette dernière aux cathartes et au condor ; il la dépèce toujours surplace. Quand il est repu, il reprend son vol et va se percher sur son arbre ou sur sa roche ; là, il digère, la tête rentrée dans ses épaules et le corps immobile ; mais son œil, toujours en mouvement, parcourt les lieux environnants. À l’approche du soir, il reprend sa tournée pour trouver son second repas. Il niche, diton, sur la cime des arbres les plus élevés ; son nid est très-volumineux et renferme deux œufs. Les habitants de l’Amérique du Sud le regardent comme un excellent hygromètre ; quand il s’élève en tournoyaut au-dessus du même lieu et que, du haut des airs, il envoie un cri aigu <jui arrive jusqu’à terre, c’est l’annonce certaine d’un orage prochain.

Le pygargue vocifère est une espèce africaine découverte par Levaillant. Le vocifère a les dimensions de l’orfraie ; l’envergure de ses ailes est de im,50 à lm, SQ. La partie supérieure du corps est blanche, ainsi que la queue ; le reste est d’un brun roux, mêlé de noir ; les plumes de la tête, du cou et les scapulaires sont également blanches à tiges brunes ; celles de la poitrine sont blanches et portent quelques taches rares longitudinales, d’un noir brun ; les rémiges sont noires et finement marbrées de blanc et de roux à leurs barbes extérieures ; le bec est d’un bleu de corne, à cire jaunâtre ; l’iris est d’un brun rouge ; les tarses sont robustes, jaunes ainsi que les doigts ; les ongles sont noirs. Le vocifère habite les rivages maritimes et l’embouchure des grandes rivières de la côte orientale et occidentale de l’Afrique. On ne le voit jamais dans l’intérieur des terres, parce que les rivières d’Afrique sont peu poissonneuses et qu’il fait sa principale nourriture de poissons ; il s’en empare en fondant sur eux du haut des airs et va ensuite les manger sur un rocher voisin ou sur les troncs

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d’arbres amoncelés le long des bords de la rivière ; ordinairement, c’est le même endroit qu’il choisit pour prendre ses repas, et l’on trouve souvent à cette place, qui iui sert de réfectoire, des ossements de gazelle et d’un grand lézard, commun dans ces rivières, attestant qu’il n’est pas exclusivement ichthyophage.

Quand ces oiseaux sont perchés, ils s’appellent et se répondent de fort loin par des cris différemment accentués, qu’ils produisent en faisant de grands mouvements de cou et de tête ; quand ils volent, ils s’élèvent à uns hauteur prodigieuse, avec une grâce toute particulière ; leur voix fait entendre alors un chant de quatre notes eahou, cou, cou, qui n’est pas désagréable et auquel l’oiseau semble aider par un mouvement remarquable de ses ailes, de même que les mouvements de son cou favorisent son cri lorsqu’il est perché. La voix éclatante du vocifère fait aisément découvrir sa retraite, mais il ne se laisse pas approcher. Levaillant, ayanf remarqué un arbre que fréquentaient deux de ces oiseaux, creusa a portée de cet arbre une fosse qu’il recouvrit de branchages et de terre ;

Ïmis, il s’y enterra et passa trois jours à épier es oiseaux qu’il voulait posséder. Ceux-ci conservèrent leur défiance et se tinrent à l’écart tant que la terre qui recouvrait le fossé fut humide ; mais, enfin, cette terre ayant pris, en se desséchant, la couleur du soi environnant, ils-revinrent à leur arbre et le patient naturaliste tua la femelle d’un coup de fusil ; quelques jours après, il s’empara du mâle, qui était venu chercher sa compagne jusque dans le voisinage du camp.

On cite encore le pygargue blngre, observé par Levaillant en Afrique, et le pygarguecafre, qui présente dans ses mœurs beaucoup d’analogie avec les vautours ; ils se nourrissent de cadavres qu’ils mangent sur place, n’ayant pas les ongles assez puissants pour les enlever. Comme les vautours, ils sont obligés de marcher quelques pas avant de pouvoir s’envoler de terre ; mais ils ne votent pas en grandes troupes, et on ne^s rencontre que deux ensemble, Je mâle et la femelle. Le pygargue de Macé habite l’Inde et le Bengale. Le pygargue garuda est très-commun dans l’Inde, au Bengale et sur les rivages de toutes les lies de la Malaisie ; le plumage est d’un blanc de neige très-pur sur la tête, le cou et la poitrine, d’un marron vif sur le reste dii corps. Cet oiseau, décrit par Buffon sous le nom de petit aigle des grande» Indes, a été consacré à Vichnou par les brahmes ; ceux-ci l’accoutument à venir à des heures réglées prendre ses repas dans les temples de leur dieu, et ils l’appellent en frappant sur des plats de cuivre. La vénération que les Indiens ont pour lui est telle, que, quand le matin, sortant à jeun de leur maison, ils le voient se diriger vers le lieu où ils se rendent eux-mêmes, cette rencontre est pour eux le signe manifeste de la protection divine.

PYGABRH1QUES s. m. pi. (pi-ga-ri-ke). Ornith. Famille de passereaux, comprenant les genres grimpereau et dendrocolapte.

PYGAS ou GERANA, reine des Pygmées. Elle osa se comparer à Junon qui, pour se venger d’elle, la métamorphosa en grue, et, depuis lors, elle fait une guerre acharnée à son peuple.

PYGASTRE s. m. (pi-ga-stre — du gr-.pu^é’, fesse : aster, étoile). Echin. Genre d’échinides, de la famille des cassidulides, formé aux dépens des nuciéotites, et comprenant une dizaine d’espèces, toutes fossiles des terrains jurassiques et crétacés.

PYGATRICHE s. m. (pi-ga-tri-che — du gr.pugé, fesse ; thrix, trichos, poil). Mamm, Genre non adopté de quadrumanes, formé aux dépens des guenons et ayant pour type le doue.

PYGAULE s. ra. (pi-gô-le — du gr. pugé, fesse ; aulos, flûte). Echin. Genre d’échinides, de la famille des cassiiiulides, formé aux dépens des nueléolites, et comprenant plusieurs espèces fossiles des terrains crétacés.

PYGÊE s. m. (pi-jé). Ichthyot. Genre de poissons acanthoptérygiens ou cténoïdes, de la famille des squaniipennes, comprenant huit espèces fossiles trouvées au Monte-Bolca.

— Bot. Genre d’arbres, de la fuinille des rosacées, tribu des amygdalées, comprenant des espèces qui croissent dans l’Asie tropicale.

PYGÈRE s. f. (pi-jè-re). Entom. Genre d’insectes lépidoptères nocturnes, type de la tribu des pygérides, comprenant deux espèces qui habitent. l’Europe.

PYGÉRIDE adj. (pi-jé-ri-de — rad. pyyère). ible

pygère.

Entom. Qui ressemble ou qui se rapporte ù lu

s. f. pi. Tribu d’insectes lépidoptères nocturnes, du groupe des notodoutides, comprenant les genres pygère et clostère.

PYGIDICRANE s. m. (pi-ji-di-kra-ne — du gr. pugé, fesse ; idea, forme ; kranion, crâne). Entoin. Genre d’insectes orthoptères coureurs, de la famille des foificules, comprenant plusieurs espèces, dont les principales viveut au Brésil et à Java : Les pygidicka.nks se distinguent par leur tête grande et déprimée en dessus. (Guérin-Méneville.)

PYGIDIUM s. m. (pi-jt-di-omm — dimin. du

PYGM

gr. pugé, derrière). Moll. Bouclier de certaines coquilles.

PYGIRHYNQOE s. m. fp’t-ji-rain-ke — du gr. pugé, fesse ; rhugchos, oec). Entom. Genre d’insectes orthoptères coureurs, de la famille des phasmiens, comprenant deux espèces qui habitent l’Amérique du Sud.

PYGMALION, roi de Tyr, né en 885 av. J.-C, mort en 827. II succéda, à l’âge de onze ans, en 874, à Matgen ou Mat tan, dont on croit qu’il était fils. D’après les dispositions testamentaires de son prédécesseur, il devait régner conjointement avec sa sœur Elissaou Didon, mariée à son oncle Sichée, grand prêtre de Melkart. Ce dernier fut investi de toute l’autorité pendant la minorité de Pygmalion ; mais bientôt le parti démocratique, opposé à Sichée, fit casser les volontés testamentaires de Matgen. À la suite de guerres intestines, Pygmalion fut seul reconnu roi et Sichée périt assassiné, victime, d’après une tradition, de la cupidité du jeune roi, alors âgé de dix-huit ans, qui voulait s’emparer des trésors cachés dans le temple. Mais, toujours d’après la légende, Didon empêcha son frère de mettre la main sur ces trésors, prit la fuite avec les principaux membres de l’aristocratie sur des vaisseaux destinés à aller chercher à l’étranger des provisions de blé, passa en Afrique ot y fonda Carthage vers 867 av. J.-C. Ajoutons que les renseignements que nous ont transmis les anciens auteurs sur ces divers événements sont totalement divergents, et tout porte à croire que les Carthaginois se sont attachés à ternir la mémoire de Pygmalion. D’après une tradition, ce prince avide et cruel tut empoisonne par son épouse Astarbé, qui, trouvant trop lente l’action du breuvage, accéléra la fin du roi en l’étranglant.

PYGMALION, célèbre sculpteur de l’Ile de Chypre, suivant la légende. Pour se livrer tout entier à son art, ou, suivant une autre version(indigné de la prostitution à laquelle se livraient les femmes d’Amathonte, ou s’élevait un temple consacré à la déesse des amours, il prit le mariage en horreur et résolut de vivre dans un célibat absolu. Vénus, irritée de cette résolution qu’elle considérait comme une insulte faite à ses autels, voulut se venger de ce dédain sacrilège et le rendit éperdument amoureux d’une magnifique statue d’ivoire, prodige de grâce et de beauté sorti de son ciseau, et qu’il avait appelée Galatée. Mais une déesse des amours ne saurait être inflexible ; Vénus, fléchie par les prières de l’infortuné, anima la froide statue du feu de la vie. Pygmalion l’épousa, et, de cet hymen, symbole de la puissance créatrice de l’art sur la matière inerte, naquit un fils nommé Paphus, qui fonda la ville de Paphos, également dédiée aux amours.

La littérature et surtout les postes font de fréquentes allusions à cet épisode, un des plus gracieux de la mythologie grecque. Voltaire s’en est inspiré dans ces vers dédiés à MUe Lecouvreur :

Certain sculpteur, d’Amour je sais le (ait En façonnant une sienne statue, La tâtonnait, tout tâtonnant disait : Que de beautés ! si cela respirait. Que de plaisirs ! Notez qu’elle était nue. Bref, dans l’extase et l’âme tout émue, Laissant tomber son ciseau de sa main. Avide, baise, admire et baise encore-Dans ses regards, dans ses vœux incertains, Des yeux, des mains, de tous ses sens dévore, Presse en ses bras ce marbre qu’il adore, Et tant, dit-on, le baisa, le pressa {Mortels, aimez, tout vous sera possible), Que de son âme un rayon s’élança, Se répandit dans ce marbre insensible, Qui par degrés devenu plus flexible, S’amollissant sous un tact amoureux, Promet un cœur à son amant heureux. Sous cent baisers d’une bouche en&<umnée La froide image à la Un animée

Respire, sent, brûle de tous les feux. Etend les bras, soupire, ouvre les yeux, Voit son amant plus tôt que la lumière. Elle le voit, et déjà veut lui plaire, Craint cependant, dérobe ses appas, Se cache au jour, dompte son embarras. En rougissant & son vainqueur se livre, Fuis, moins timide, et souriant tout bas. Avec transport de tendresse s’enivre, Presse & son tour son amant dans ses bras, S’anime enfla a. de nouveaux combats, Et semble aimer même avant que de vivre.

0 Lecouvreur, 6 toi qui m’as charmé. Puissent mes vers transmettre en toi ma flamme ! Permets qu’Amour pour moi te donne une âme. Qui n’aime point est-il donc animéï

Les poëtescontemporuins ont souvent aussi rappelé cette légende poétique :

Dans mon obscur Eden pourtant j’avais une Eve Que je m’étais créée et que j’aimais en rêve.

De ma blanche statue, ici-bas sans modèle. Je fus longtemps l’époux et le prêtre fldele ; Mais je t’ai vue. ô toi dont j’ignore le nom. Je t’ai vue, et soudain, honteux Pygmalion, T’inuugurant déesse en mon âme exaltée, J’ai sur son piédestal brisé ma Gatatie. Contre un doux souvenir j’ai lutté, mais en vain : L’ange a ployé Jacob sous son genou divin.

Héa&sippB Mopb4u.