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pluriel, tandis que le nominatif pluriel et l’accusatif singulier en sont dépourvus. Les autres cas sont déterminés par des particules, et l’article défini est formé du pronom démonstratif latin contracté. La conjugaison du provençal se fit à l’aide d’auxiliaires, et l’adoption de ces nouvelles formes grammaticales eut pour conséquences celle de nouvelles formes syntaxiques et l’usage de la construction directe. C’est dans la forme du langage que consistait surtout la grâce de la littérature provençale.

Au temps de sa plus grande extension, et en y rattachant les dialectes voisins, le languedocien, le périgourdin, le limousin, l’agenais, etc., le provençal était parlé dans toute la région circonscrite par la Loire, l’Atlantique, les Pyrénées, la Méditerranée et les Alpes. Sa littérature était fort riche ; les romans de chevalerie provençaux : Flor et Blancheflor, Fier-à-bras, Gérard de Roussillon, Renaud de Montauban, Lancelot du Lac, Geoffroy et Brunisende, Roncevaux, jouirent pendant tout le moyen âge d’une grande renommée ; mais en ce genre la littérature du Nord remporta sur celle du Midi, et c’est surtout dans la poésie lyrique, à laquelle ils donnèrent toutes sortes de formes savantes : tensons (dialogues), canzones (chansons), sirventes (satires), plants (plaintes), prézies (chants de guerre), qu’ils eurent une véritable supériorité. Leur poésie amoureuse, canzones, albas (aubades), chansons composées pour être chantées sous les fenêtres des belles, et leur poésie bucolique (pastourelles) sont aussi fort remarquables. Quoique moins cultivée, la prose a laissé encore quelques monuments dignes d’attention, entre autres un traité de Pierre Raymond contre les ariens, une Réfutation de la doctrine des albigeois et des tuschins par Raoul de Gassin. La plus grande partie de ces écrits étaient nés des controverses religieuses ; ils périrent pour la plupart dans les guerres des vaudois et des albigeois. Rudel, Bertrand de Alamannos, Sordello s’étaient exercés dans le genre historique ; on ne connaît plus que les titres de leurs ouvrages. Salviati mentionne une traduction toscane de Tite-Live, faite au XVe siècle, non sur le latin, mais sur une version provençale.

Le provençal reçut un premier coup au XIIIe siècle, lors de l’établissement de l’inquisition : déclaré suspect d’hérésie, il fut proscrit de la rédaction des actes publics, qui dut se faire en latin. Cependant l’emploi s’en prolongea, malgré l’Église, jusqu’à ce que l’ordonnance de 1525 rendît obligatoire l’usage de la langue française. Banni des universités, des collèges, des écoles, il a peu à peu abandonné les villes, mais il est encore parlé dans tous les villages et il jouit toujours d’une certaine faveur, même chez les lettrés. Il est surtout usité dans toute l’ancienne Provence et le Comtat-Venaissin, qui forment aujourd’hui les départements des Bouches-du-Rhône, du Var, des Basses-Alpes et de Vaucluse ; il anticipe, au nord, dans une partie du département de la Drôme, sur le patois dauphinois ; à l’ouest, il s’étend sur le comté de Nice, et à l’est le Rhône le sépare du languedocien. Le provençal moderne est vif et âpre ; chaque contrée de la Provence a sa manière de le prononcer. Les uns disent ami pour j’aime, les autres aimi ; mais la généralité dit eimi. Dans les montagnes, depuis Barcelonnette jusqu’aux rives du Var, on termine en ous la première personne du singulier du présent de l’indicatif des verbes. Par exemple : aimi, sabi, finissi se disent aimous, j’aime ; sabous, je sais ; finissous, je finis. Dans les mêmes endroits, le c prend le son du ch français dans tous les mots provençaux correspondants aux mots français qui ont cette articulation. Ainsi capeou, camie, cabro sont exprimés chapel, chapeau ; chamie, chemise ; chabro, chèvre. Les Marseillais ne connaissent pas le gn liquide ; ils retranchent le g de cette articulation et ne font entendre que le n dur. Ainsi le mot tigno, engelure, est prononcé par eux tino, et cette dernière expression signifie en provençal une cuve. Les Grassois retranchent la liquider ; aussi pour dire sant Harari, saint Hilaire, ils prononcent sant Aai. Aux environs de Fayence, le peuple fait sentir le r comme si c’était un s, et le mot parti, qui signifie, je pars ou un parti, se prononce pasti, qui veut dire je pétris ou un pâté. Dans le département du Var, le n entre deux voyelles ne se lie pas avec celle qui le suit. Ainsi fanaou, fanal, ne se prononce point fa-naou, mais fan-aou, d’une manière très-brève. Dans certaines communes, on retranche même les nasales et on prononce ocubicou, espèce de figue, au lieu d’ocubicoun. Le l est souvent prononcé comme un r ; il en est ainsi dans les mots palo, pelle ; pielo, pile, qu’on prononce paro, piero. Dans les environs de Bargemont, la syllabe la est prononcée comme si elle était écrite lia : ainsi lou bla, le blé ; la plaço, la place, sont exprimés lou blia, la pliaço, etc.

Le provençal moderne ou patois provençal a hérité d’une grande partie des caractères de l’ancienne langue et il a aussi sa littérature, qui est la plus importante des littératures populaires de la France. Parmi les principaux poètes provençaux modernes, on cite : Diouloufet et Ricard, d’Aix ; Morel, Peyrol et Dupuy, d’Avignon ; Garcin, de Draguignan ; Roumanille, de Saint-Remy ; Désanat, de Tarascon ; Estachon, Pascal, Laydet, de Marseille ; Gros, P, Bellot, Marius Trussy et Mistral, l’auteur de Miréio, Théodore Aubanel, etc.


Provençale (la), roman de Regnard (1731, in-12). Regnard a raconté dans ce roman, qui ne fut imprimé qu’après sa mort, des aventures invraisemblables qui pourtant furent les siennes ; c’est le seul livre qui jette quelque lumière sur une période très-obscure de sa vie, celle eu, parti de Gènes avec sa maîtresse et le mari de celle-ci, ils furent capturés tous les trois par des corsaires barbaresques et emmenés en captivité à Alger. La dame, dont il avait fait connaissance à Bologne, était Provençale ; d’où le titre du roman. C’est sous ce nom qu’il la désigne, ou parfois sous celui d’Elvire ; quant au mari, il l’appelle de Prade, etlui-meinesedonnele nom de Zelmis. Il est assez difficile de distinguer la part qu’il faut faire à la fiction dans ce récit, mais le fond est vrai et les principales péripéties n’ont probablement été qu’enjolivées. Regnard, qui aurait pu faire une relation véridique très-curieuse de son séjour à Alger, a tout gâté en voulant se donner un vernis romanesque. Il observe scrupuleusement toutes les règles de l’ancien roman. Comme il est le héros du livre, il commence par faire son portrait et voici comme il se peint:« Zelmis est un cavalier qui plaît d’abord ; c’est assez de le voir une fois pour le remarquer, et sa bonne mine est si avantageuse, qu’il ne faut pas chercher avec soin des endroits dans sa personne pour le trouver aimable ; il faut seulement se défendre de le trop aimer. » Tous les personnages sont montés au ton de l’héroïsme ; la belle Provençale a bien plutôt la dignité romaine que la vivacité marseillaise ; elle impose d un coup d’osil à Mustapha, le chef des pirates, qui a pour elle tout le respect que des corsaires africains ont toujours pour de jeunes captives. Le dey d’Alger se trouve au port à la descente des captifs et ne manque pas de devenir tout d’un coup éperdument amoureux d’Elvire. Il la mène dans son harem, où ses rivales frémissent de jalousie. Toujours Adèle à son amant, elle se refuse à toutes les instances du dey, qui, de son côté, ne brûle pour elle que de l’amour le plus pur et le plus respectueux. Elle parvient même à voir son amant, qui exerce dans Alger la profession de peintre, avec la permission de son maître. Ils concertent tous les deux les moyens de s’enfuir et ils en viennent à bout ; mais par malheur ils sont rencontrés sur mer par un brigautin d’Alger qui les ramène. Baban-Hassa, le dey, ne se fâche point du tout de la fuite de la belle captive ; il unit même par lui rendre la liberté, comme il convient à un amant généreux. Elle retrouve le beau Zelmis, dont la vie et la fidélité ont aussi couru les plus grands dangers. Deux ou trois.favorites de son maître sont devenues folles de l’esclave ; il fait la plus belle défense ; mais pourtant, surpris avec une d’elles dans un rendez-vous très-innocent, il se voit sur le point d’être empalé ; heureusement le consul de France interpose son crédit et le délivre. On arrive k Arles, dans la famille de la dame, dont le mari est resté en captivité. Les deux amants sont près de célébrer leurs noces, quand le retour imprévu du mari’, supposé mort et délivré k contretemps par les religieux de la Merci, vient séparer pour toujours Elvire et Zelmis. En réalité, il parait que Zelmis, ou Regnard, était tout simplement marmiton et non peintre; ses talents culinaires avaient été fort appréciés du bon musulman qui l’avait acheté au marché et ils lui épargnèrent une captivité trop rigoureuse. Quant à l’aventure du harem, qui faillit lui coûter la vie, ses biographes s’accordent à la croire véritable.


Provençale (OBSERVATIONS SUR LA LANGUE ET LA LITTÉRATURE), par A.-W. de Schlegel (Paris, 1818, gr. in-8°). Schlegel a cherché à donner dans cet ouvrage l’histoire des diverses langues qui ont été parlées simultanément ou successivement dans les Gaules, dans les pays compris entre les Pyrénées et le Rhin. Son livre offre des vues générales pleines d’intérêt et des observations de détail très-précieuses.

Avant de parler de la langue et de la littérature des troubadours, Schlegel cherche à établir les principes généraux de la philologie grammaticale et indique la division des langues en trois grandes familles : langues sans aucune structure grammaticale, langues qui emploient des affixes et langues à inflexions, ou, pour employer la terminologie moderne, langues monosyllabiques, langues agglutinantes et langues à flexion. Il est le premier savant qui ait indiqué cette grande classification, sur laquelle repose aujourd’hui toute la science du langage. Schlegel divise aussi les langues à flexion en deux grandes familles : les langues synthétiques et les langues analytiques ; celles-ci emploient l’article devant les substantifs et les pronoms personnels devant les verbes ; elles ont recours aux verbes auxiliaires, suppléent par des prépositions aux désinences des cas et usent d’adverbes pour exprimer les degrés de comparaison, tandis que les synthétiques se passent de tous ces moyens. Mais cette division est peut-être trop absolue.

Ces préliminaires conduisent l’auteur à la langue provençale, « dont il parle, dit M. Raynouard, excellent juge sur ces matières, en homme de talent qui, par des études profondes et par une sagacité ingénieuse, a suppléé aux avantages inappréciables que procure à d’autres littérateurs l’usage habituel de l’idiome, car il a peu varié depuis les troubadours ». Schlegel repousse pourtant l’hypothèse chère à Raynouard d’une langue romane primitive, intermédiaire entre la langue latine et les langues romanes modernes, hypothèse qui est aujourd’hui universellement abandonnée ; il la regarde comme contraire aux analogies qu’on observe dans l’histoire des langues.


Provençales (LES), recueil de poésies en dialecte provençal, par divers auteurs contemporains (1852, in-18). Les trois principaux auteurs du recueil sont MM. Roumanille, Aubanel et Mistral, que d’autres œuvres ont rendus plus célèbres et autour desquels sont venus se grouper soit de simples amateurs, comme MM. d’Astros et Moquin-Tandon, soit de véritables poètes, comme MM. Crousillat, C. Reybaud et d’autres, à qui le loisir ou l’haleine ont manqué pour produire un livre. La plus grande partie du volume est remplie par divers poèmes des trois premiers, gracieuses compositions qui faisaient bien augurer du réveil de la vieille langue des trouvères. Tous les trois s’y manifestent complètement, avec les tendances particulières, intimes, qui sont restées comme le cachet de leur poésie. M. Roumanille, dans les pièces intitulées:les Crèches, les Deux séraphins, Pauvreté et charité, montre l’esprit religieux et tendre, un peu mystique, qui lui avait déjà inspiré Li Margarideto; sa manière s’y rapproche de celle d’Alfred de Vigny dans Eloa, mais il a un bien plus haut sentiment de la nature ou, pour mieux dire, des choses agrestes. Ce sentiment perce surtout dans le petit poème rustique:Se ren fasiam un avouca, qui est à la fois sentimental et railleur et dans lequel, pour prémunir les braves gens de la campagne contre des visées trop ambitieuses, le poète a trouvé moyen d’esquisser des tableaux de mœurs populaires d’une grande franchise.

M. Th. Aubanel a inséré dans les Provençales des morceaux d’une énergie peu commune. Ce n’est ni Jasmin ni Alfred de Vigny qu’il a pris pour modèles ; ce serait plutôt Dante, Barbier, les poètes concentrés et puissants. Sa forme est généralement sombre, sévère ; elle donne l’idée d’une gravure à l’eau-forte où les détails ressortent en traits vigoureux. Le rustique tableau intitulé Li Segaire (les Faucheurs), dit M. Saint-René Taillandier, « est l’œuvre d’un burin qui n’hésite pas ; chaque détail recueilli par l’observation est accusé d’une main ferme et les trivialités mêmes, s’il est possible d’en tirer parti, ne font pas reculer l’artiste. Voilà bien les rudes travailleurs, avec leurs culottes trouées et leurs visages bronzés au soleil ; voilà les faux qui reluisent comme des épées, la luzerne qui tombe, les sauterelles qui bondissent. Du matin au soir on les voit, sous l’ardent ciel de juin, frapper, tailler, suer à la peine, avancer, avancer toujours, jusqu’à l’heure où ils reviennent sous leur toit manger la soupe à l’ail. Le poète ne glorifie pas la vie active à la manière de M. Roumanille ; ce n’est pas une prédication affectueuse et souriante; il montre seulement par un petit coin du grand tableau du monde que le travail est la condition humaine et que dans le.plus humble des métiers manuels, chez les natures les plus incultes, il y a place encore pour une certaine joie d’artiste. » Dans un autre genre, le Neuf thermidor a la vigueur et la passion des ïambes, avec une lueur fantastique à la Henri Heine.

Il y a moins de sévérité, plus de grâce, dans les pièces de M. Mistral:la Belle d’août, la Folle avoine, l’Ode au mistral, la Course de taureaux, etc. La première pièce est une poétique légende, la seconde une satire, sous forme d’apologue rustique ; la Folle avoine, c’est l’oisiveté insolente qui se pavane, lève haut la tête et n’est en somme qu’une herbe inutile ; dans la Course de taureaux, le poète décrit avec beaucoup de vérité ces jeux hardis qui sont encore en grand honneur dans tous les villages de la vallée du Rhône.

En résumé, ce recueil des Provençales est d’une grande originalité ; mais, après avoir un moment intéressé le public, cette résurrection d’un vieil idiome a éprouvé du discrédit ; les poètes délicats qui l’ont composé n’écrivent évidemment que pour les lettrés et, de jour en jour, la langue dont ils se servent. n’est plus parlée ni entendue que dans les villages de la Provence.


Provençale (la), opéra en un acte, paroles de Lafont, musique de Candeille, représenté par l’Académie royale de musique le 1er juin 1778. Mouret avait écrit la musique de cet acte dans ses Fêtes de Thalie. Caudeille refit les parties de chant et ne conserva de l’ancienne partition que les airs de danse. C’était un compositeur estimable.


Provençaux (DÉFAITE DES). On désigne quelquefois sous ce nom un combat qui eut lieu, le 25 octobre 1568, à Mensiguac, près de Périgueux, entre un corps de catholiques et un corps de huguenots, composé de Dauphinois et de Provençaux. Les huguenots, sous les ordres de Mouvans, y furent vaincus, et ce dernier y trouva la mort.


Provençaux (LES Frères). Sous ce nom, on désigne encore aujourd’hui un restaurant longtemps célèbre dans les fastes de la vie parisienne. Le restaurant des Frères-Provençaux est situé au Palais-Royal, galerie Montpensier. Il doit son nom à trois jeunes gens, tous trois fils de la Provence, unis par une étroite amitié, MM. Barthélemy, Manneilles et Simon, qui, en 1786, commencèrent par créer une maison analogue aux abords du Palais-Royal. Peu de temps après la construction des galeries de pierre actuelles, ils ouvrirent sous ces galeries l’établissement et les salons qui forment encore aujourd’hui le restaurant dit des Frères-Provençaux. La maison primitive, ouverte en 1785, était d’une simplicité pour ainsi dire patriarcale, et le service de table était celui des plus humbles gargotes ; mais on y trouvait des vins naturels, une cuisine excellente et saine ; ces qualités, jointes à l’attrait de mets spéciaux, dits à la provençale, y avaient attiré, dès le début, une nombreuse clientèle, qui la suivit lorsqu’elle émigra sous les galeries. L’un des trois Provençaux prit alors seul la direction et la surveillance du nouvel établissement ; les deux autres, tout en conservant un intérêt dans la maison, étaient attachés, dans la maison du prince de Conti, au service des cuisines et de office. Parmi les hôtes les plus anciens, en même temps que les plus célèbres, des Frères-Provençaux, il faut citer le général Bonaparte et le directeur Barras, qui y dînaient régulièrement toutes les fois qu’ils devaient assister le soir à la représentation du théâtre de la Montansier (aujourd’hui théâtre du Palais-Royal). L’Empire vit croître encore la renommée des Frères-Provençaux, dont la fortune date surtout de 1808, époque de la première guerre d’Espagne. « On fit venir alors, dit un historien contemporain, des troupes pour cette guerre de tous les points de l’Allemagne ; ces troupes traversaient Paris ; généraux et officiers avaient choisi les salons des trois frères provençaux pour y faire bombance. L’or était rare à cette époque et les recettes étaient telles, que plusieurs fois dans la journée et dans la soirée on était obligé de vider la caisse surchargée d’argent dans des caisses supplémentaires. Les recettes ne s’élevaient pas à moins de 12, 000 à 15, 000 francs par jour. » En 1814 et en 1815, le restaurant eut un regain de ces beaux jours, grâce à la fréquentation assidue des alliés, pressés de juger par eux-mêmes de nos célébrités dans tous les genres, et Prussiens, Anglais et Russes envahirent les salons du Palais-Royal. Après une exploitation de cinquante ans par les propres fondateurs, le restaurant des Frères-Provençaux fut acheté, en 1836, par les frères Bellenger, qui ne s’y maintinrent que pendant un an. Ils furent remplacés par M. Collot, qui n’a pas fait déchoir dans ses mains la vieille renommée de l’établissement. Il serait injuste d’oublier, dans ce rapide historique, le fidèle Lionnet qui, naguère encore, exerçait aux Frères-Provençaux les fonctions de sommelier. Il conserva cette charge pendant plus de cinquante ans et datait de la fondation. Le restaurant des Frères-Provençaux est, indépendamment de sa clientèle ordinaire, choisi pour les dîners d’apparat, ou réunions, banquets à propos d’anniversaires, rendez-vous annuels de sociétés diverses, etc. C’est aujourd’hui, avec la maison Véfour, le meilleur restaurant du Palais-Royal.



PROVENCE, en latin Provincia, ancienne province et grand gouvernement de la France méridionale, au S.-E., baignée au S. par la Méditerranée, séparée à l’O. du Languedoc par le Rhône et confinant au N. au Comtat-Venaissin et au Dauphiné, et à l’E. à la Savoie et au comté de Nice. Chef-lieu, Aix. On la divisait en deux parties : la Basse Provence, appelée souvent au moyen âge comté d’Arles ou de Provence, laquelle comprenait les huit sénéchaussées d’Aix, Arles, Brignoles, Grasse, Draguignan, Hyères, Toulon et Marseille ; la Haute Provence, qui renfermait les quatre sénéchaussées de Castellane, Forcalquier, Sisteron, Digne et la vallée de Barcelonnette. Sa superficie était de 21,281 kilom. carrés. Un sol poudreux et aride, entrecoupé de montagnes nues et décharnées, ramification des Alpes occidentales ; un ciel toujours bleu, dont la beauté rappelle celui de l’Italie ; un climat doux, tempéré et qu’on pourrait dire délicieux, si le terrible mistral ne venait trop souvent, par ses rafales désastreuses, en modifier l’agréable douceur, tels sont les caractères physiques de cette contrée qu’arrosent le Rhône, la Durance, la Sorgues, l’Argens, l’Arc, le Verdon et le Var, De tout temps, la Provence a été célèbre par ses fruits exquis et par ses productions variées ; l’oranger, le citronnier, les figuiers, les oliviers y abondent ; les roses, les œillets, le jasmin y sont cultivés avec succès pour la fabrication des essences. On y fabrique une huile d’olive excellente, et les céréales y sont de qualité supérieure.

Les vins de la Provence sont loin de jouir de la même réputation que ceux des autres pays du Midi. Les vins muscats et surtout les vins cuits sont seuls recherchés. Il s’en fait une certaine quantité que l’on exporte ; quant aux vins ordinaires, ils sont peu prisés du commerce et les cultivateurs sont, dans beaucoup de localités, forcés de faire sécher leur raisin pour en tirer profit. « Il n’est aucune province de France, dit l’abbé Rozier, dans