une des merveilles de l’art. Nous lui consacrons ci-après un article spécial, où sont indiqués quelques autres portraits équestres du même prince, notamment celui qui passe pour avoir servi de modèle au sculpteur florentin Tacca, chargé de faire une statue en bronze pour les jardins du Buen-Retiro.
Le musée de Madrid possède cinq autres peintures de Philippe IV par Velazquez : deux représentent ce monarque dans sa jeunesse, et deux à un âge mûr ; le cinquième le montre agenouillé, la main appuyée sur le coussin d'un prie-Dieu,
D’autres portraits de Philippe IV en pied, à mi-corps ou en buste, en costume de cour ou en armure, se voient dans plusieurs musées et galeries particulières, notamment au Louvre (provenant de la collection La Caze), à l’Ermitage (provenant de la collection du roi Guillaume de Hollande), au Belvédère, au musée de Turin, au palais de Hampton-Court, dans les collections James de Rothschild et Schneider (à Paris), Banks, Henry Farrer et de Dulwich-College (Angleterre), etc.
La National-Gallery possède une belle peinture de Velazquez qui décorait autrefois le palais de Madrid et qui représente Philippe IV chassant le sanglier dans le parc du Pardo. Plusieurs peintres modernes, entre autres MM, Hillemacher (Salon de 1864), Édouard Ender (gravé par P. Cottin), H. Debon (Salon de 1870), ont représenté Philippe IV dans l’atelier de Velazquez.
Un portrait de Philippe IV attribué à Mazo Martinez, gendre de Velazquez, fait partie de la galerie Suermondt, à Aix-la-Chapelle. Le musée du Belvédère, à Vienne, a trois portraits de ce prince, dont deux sont attribués au peintre néerlandais Justus van Egmont, et le troisième à Jan van Hoeck. Un portrait équestre par Van Kessel est au musée de Madrid. Un portrait en buste a été dessiné et gravé par P. de Villafranca, en tête du livre du P. Francisco de los Santos sur l’Escurial (Madrid, 1657).
Philippe IV à cheval, tableau de Velazquez ; au musée de Madrid. Ce chef-d’œuvre représente le triste monarque sous un aspect plus favorable que celui qui lui est donné par les autres portraits du même maître. Le jeune roi, revêtu d’une armure bronzée à filets d’or, sur laquelle flotte une écharpe rouge, galope à travers la campagne et semble aspirer à pleins poumons l’air bienfaisant qui arrive des collines. De la main droite il tient un bâton de commandement, et sa tête est couverte d’un grand chapeau orné de plumes noires. Tous les accessoires, la selle, les harnais brodés, le mors lourd et aigu, sont traités avec un soin minutieux. Le cheval, évidemment peint d’après nature et d’après une des montures favorites du roi, est bai, avec la tête et les jambes blanches ; sa queue est une avalanche de crins noirs, et sa crinière tombe bien au-dessous de l’éperon doré ; il bondit en l’air par un élan vigoureux et justifie la réputation de force et d’élégance que les poëtes ont faite à la race andalouse. Ce portrait, qui a été gravé à l’eau-forte par Goya et lithographié par Jollivet, est exécuté avec une ampleur et une puissance extraordinaire. « L’artiste, dit M. Viardot, a placé son cavalier au beau milieu d’une campagne nue, contre un horizon sans fin, éclairé de tous côtés par le soleil d’Espagne, sans une ombre, sans un clair-obscur, sans un repoussoir d’aucune espèce ; et, malgré cette négligence hardie de tous les secours artificiels de l’art, n’a-t-il pas atteint les limites possibles de l’illusion ? N’a-t-il pas porté sur la toile tous les caractères de la vie ? Quel parfait naturel dans la pose et l’accord des membres, dans l’habitude générale du corps ! Ces cheveux ne sont-ils pas agités par le vent ? Le sang ne circule-t-il pas sous cette peau blanche et fraîche ? Ces yeux n’ont-ils pas le don du regard ? Cette bouche ne va-t-elle pas s’ouvrir et parler ? En vérité, quand on fixe quelques moments la vue sur cette toile, l’illusion devient effrayante. Oh ! c’est devant un tel tableau que l’imagination peut sans effort évoquer les hommes du passé et renouveler le miracle de Prométhée ! »
Des portraits équestres de Philippe IV jeune, répétitions plus ou moins exactes du tableau de Madrid, se voient en Angleterre dans les collections Grosvenor et Thomas Baring. Dans le palais de Gripsholm, le Versailles de la Suède, il y a un autre portrait équestre des plus remarquables : le roi est jeune et sans barbe, si jeune, dit M. Stirling, qu’il est possible que cette peinture soit une répétition de celle qui fit la fortune de l’artiste ; il est vêtu de noir, avec de hautes bottes, et il tient son chapeau dans sa main droite, contre la hanche ; le palefroi, d’un blanc de neige, sa longue crinière liée par trois nœuds de ruban rouge, marche le pas. Le cavalier et le cheval sont peints avec un esprit et une vivacité extrêmes, sur un fond simplement formé d’un mur et d’une colonne. Ce tableau fut donné à la reine Christine par Pimentel, ambassadeur d’Espagne en Suède. Au palais Pitti, à Florence, est un portrait équestre de Philippe IV, presque de profil, avec les moustaches et la royale, coiffé d’un chapeau orné de plumes, revêtu d’une armure avec une écharpe en sautoir, et tenant les rênes de son andalous qui galope à travers champs. On croit que ce tableau, qui a été gravé par L. Errant, est celui que Velazquez exécuta pour servir de modèle au sculpteur florentin Tacca. Un autre portrait équestre du même prince, qui a été attribué à Rubens et qui a été reconnu depuis comme étant de Velazquez, appartient au musée des Offices : le monarque est accompagné d’un écuyer qui porte son casque et, au-dessus de lui, sont des figures allégoriques que l’on suppose avoir été ajoutées par un artiste autre que Velazquez ; cette toile a été gravée par C. Mogalli.
Philippe IV (statue équestre de), chef-d’œuvre de Pietro Tacca, sur la place de l’Orient, à Madrid. Cette statue, exécutée à Florence d’après une peinture de Velazquez et fondue en 1840, a décoré les jardins du Buen-Retiro jusqu’en 1844, époque où elle a été transportée dans l’endroit qu’elle occupe actuellement. Elle est justement célèbre. Le cheval qui se cabre et qui n’est supporté que par ses jambes de derrière et par sa queue flottante fut longtemps regardé comme un miracle de la science mécanique, et Galilée lui-même suggéra, dit-on, à l’artiste les moyens qui furent employés pour maintenir l’équilibre. Paris, Copenhague et Saint-Pétersbourg ont eu, depuis, des statues dans la même attitude, et elles n’ont plus rien qui surprenne. « Mais l’œuvre de Tacca, dit M. Stirling, se recommandera toujours aux suffrages des connaisseurs, grâce à la hardiesse du dessin, à l’habileté attentive de la main-d’œuvre et à la vie qui anime le cavalier et sa monture. On peut dire, il est vrai, que les jambes de derrière du cheval ne sont pas placées suffisamment sous son corps, et que son attitude est plutôt celle d’un robuste cheval de chasse anglais, franchissant un obstacle, que celle d’un coursier caracolant au manège. Ce défaut est compensé par la beauté de la tête et de la partie supérieure du corps, par la pose gracieuse et l’air martial du roi, qui porte sa lourde armure et qui brandit son bâton de commandement d’un air tout à fait héroïque. L’écharpe, qui se termine en une large bordure de dentelle d’un effet heureux, flotte au vent avec une légèreté fort rare parmi les masses de marbre ou de métal qu’on a ainsi voulu représenter abandonnées au souffle de la brise. » Sur les sangles de la selle est l’inscription : Petrus Tacca f. Florentiae anno salutis MDCXXXX. Le piédestal sur lequel cette statue a été érigée en 1844 est décoré de deux bas-reliefs, dont l’un représente Philippe IV donnant à Velazquez la croix de Santiago, l’autre une allégorie relative à la protection que ce prince accordait aux arts.
PHILIPPE V, roi d’Espagne, le premier de
la maison de Bourbon, né à Versailles en 1683,
mort à Madrid en 1746. Ce prince, connu d’abord
sous le nom de duc d’Anjou, était fils de
Louis de France, dauphin, et petit-fils de
Louis XIV, et fut appelé au trône d’Espagne
par le testament de Charles II. Proclamé en
1700, il fut reconnu en Espagne. Il n’y avait
plus de Pyrénées, suivant le mot attribué à
Louis XIV. Mais bientôt la ligue d’une partie
des puissances de l’Europe vint protester
contre cet agrandissement de la maison de
France et déterminer cette longue et désastreuse
guerre de la succession d’Espagne,
dont la France supporta en grande partie le
poids, la gloire et les malheurs. Néanmoins,
Philippe V eut à défendre l’Espagne contre
l’archiduc Charles d’Autriche, le Portugal,
les Anglais et les Hollandais. Aidé par les
troupes de la France, il fut confirmé comme
roi d’Espagne par le traité d’Utrecht (1713),
à la condition de renoncer à ses droits éventuels
à la couronne de France et à la souveraineté
de Gibraltar et de Minorque, de la Sicile,
des Pays-Bas, du Milanais, de la Sardaigne
et de Naples. Dirigé par la princesse des Ursins,
puis par Alberoni, ce prince faible et
mélancolique fut entraîné à des résolutions
aventureuses, telles que la revendication des
provinces italiennes cédées à Utrecht et des
complots ourdis en France pour arracher la
régence au duc d’Orléans. Ces tentatives inconsidérées
armèrent contre lui la Quadruple Alliance (1719), et une suite de revers l’obligea
à renvoyer Alberoni et à signer la paix
(1720). En proie à une mélancolie noire, il
abdiqua en 1724 en faveur de don Louis, son
fils, dont la mort l’obligea, sept mois plus
tard, à reprendre le fardeau des affaires. De
nouvelles guerres contre les Anglais, les
Maures d’Afrique, une intervention dans les
guerres de la succession de Pologne et de
la succession d’Autriche, l’établissement de
son fils don Carlos sur le trône des Deux-Siciles,
des efforts pour conquérir à son autre
fils Philippe une souveraineté en Italie, remplirent
la dernière partie de sa vie. L’Espagne
dut à ce prince quelques sages réformes
dans l’administration, dans la justice, un code
de lois et la fondation de manufactures, de
l’Académie d’histoire, etc. Il ranima la vertu
guerrière des Espagnols, rétablit la discipline
et créa une marine aussi redoutable que l’avait
été celle du plus puissant de ses prédécesseurs.
Bien qu’il eût peu d’aptitude pour les affaires et qu’il se laissât facilement gouverner,
il mérita l’affection de ses sujets par
sa sollicitude pour leur bien-être et par son
esprit de justice. Philippe V était quelque
peu bossu, mais néanmoins de bonne mine,
affable, d’un excellent caractère et parlant
peu. Il tomba dans une profonde mélancolie
qui, vers la fin de sa vie, dégénéra en dérangement complet des facultés intellectuelles.
Il refusait de quitter son lit, de prendre de la
nourriture, de s’occuper d’affaires. Le castrat
Farinelli pouvait seul, par sa voix ravissante,
triompher par instants de l’état de
somnolence dans lequel son intelligence était
constamment plongée et lui faire donner
alors quelques signes apparents de volonté
et d’activité. Philippe V eut, de son premier
mariage avec Marie-Louise-Gabrielle de Savoie,
Louis et Ferdinand VI, qui furent rois
d’Espagne, et de son second mariage avec
Élisabeth Farnèse quatre fils, dont l’un fut
Charles III, roi des Deux-Siciles, puis d’Espagne.
— Iconogr. C’est par des artistes français que le petit-fils de Louis XIV fit le plus souvent exécuter son portrait. Quelques jours avant de quitter la France pour aller prendre possession de son royaume d’Espagne, en 1700, il fut peint par Hyacinthe Rigaud, dans un tableau qui se voit aujourd’hui au Louvre : il est debout, tête nue, la main droite appuyée sur la couronne placée sur une table recouverte d’un tapis de velours rouge, la gauche sur la hanche ; il porte le cordon du Saint-Esprit et le collier de la Toison d’or. Une gravure de Pierre Drevet exécutée en 1702, d’après H. Rigaud, représente le jeune prince vêtu à l’espagnole. On doit au même graveur un autre portrait de Philippe V d’après Fr, de Troy. R. van Àudenaerde en a gravé un à Rome, d’après P. Valentini. En Espagne, le portraitiste ordinaire de Philippe V fut Jean Ranc, de Montpellier ; le musée de Madrid a, de la main de cet artiste, trois portraits, dont l’un représente le roi à cheval, revêtu d’une cuirassa avec une écharpe rouge, la décoration de l’ordre du Saint-Esprit et un bâton de commandement à la main, précédé par la Victoire et suivi d’un écuyer qui porte son casque. À Palerme, sur la place de la Victoire, est une statue en marbre de Philippe V, qui a remplacé une statue de bronze détruite en 1848, et dont le piédestal est décoré de quatre figures d’Esclaves. J.-B. Berterham a gravé les Cérémonies du serment de fidélité prêté à Philippe V. Un tableau d’Ingres, peint en 1818 et qui appartient au duc de Fitz-James, représente Philippe V et le maréchal de Berwick ; il a été gravé par Réveil.
PHILIPPE D’ALSACE, comte de Flandre,
né vers 1143, mort au siège d’Acre en 1191.
Il était fils de Thierry d’Alsace, qui l’associa
au gouvernement de ses États. Par son mariage
avec Isabelle, il devint comte d’Amiens
et de Vermandois (1157) et succéda à son
père en 1168. Il termina par le traité de Bruges
la guerre qui avait éclaté entre la Flandre
et la Hollande, accompagna en Angleterre
son ami Thomas Becket (1170), fit en
1172 un pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle,
se ligua avec les fils de Henri Plantagenet
révoltés contre leur père, envahit la
Normandie, opéra une descente en Angleterre,
où il pilla Norwick, puis mit inutilement
le siège devant Rouen. En 1177, Philippe
se rendit en terre sainte auprès de Baudoin
IV, roi de Jérusalem, son parent, revint
en Flandre en 1178, devint, après la mort de
Louis VII, tuteur de Philippe-Auguste et régent
de France, fit épouser au jeune roi sa
nièce Isabelle de Hainaut, refusa de le mettre
en possession immédiate de l’Artois, apanage
de cette princesse, et commença avec le roi
de France une guerre qui dura de 1185 à
1186. En 1190, Philippe d’Alsace suivit en
Palestine Philippe-Auguste et mourut de la
peste devant Saint-Jean-d’Acre. Sa sœur,
Marguerite d’Alsace, lui succéda dans la
souveraineté de la Flandre.
PHILIPPE Ier, comte de Savoie, fils de Thomas Ier, né à Aiguebelle en 1207, mort en
Bugey en 1283. Sans entrer dans les ordres,
il devint prévôt de Bruges, évêque de Valence,
archevêque de Lyon, fut en même
temps gouverneur du patrimoine de Saint-Pierre,
gonfalonier de l’Église romaine et commanda
l’armée du pape. En 1268, il succéda
à son frère Pierre, eut des démêlés au sujet
du Faucigny avec le dauphin du Viennois et
avec le duc de Bourgogne, entra également
en lutte avec Rodolphe de Habsbourg, n’eut
pas d’enfants de son mariage avec Alix de
Méranie (1267) et laissa le pouvoir à son neveu
Amédée, fils de son frère Thomas. Avant
de mourir, il fit publier dans ses États « que
tous ceux qui se croiraient lésés dans leurs
droits eussent à lui faire parvenir leurs réclamations
afin que justice leur fût sans délai rendue. »
PHILIPPE II, dit Sans Terre, duc de Savoie, né à Chambéry en 1438, mort à Turin en 1497. Il était fils du duc Louis et fut élevé à la cour de France. Ce prince, d’un caractère entreprenant, inquiet, ambitieux, posséda
pendant quelque temps le comté de
Bresse, que les Suisses lui enlevèrent, tua un
des favoris de sa mère, Jean de Varax, se
révolta contre l’autorité de son père, qui le
fit enfermer pendant deux ans dans le château
de Loches par Louis XI, se vengea du
roi de France en combattant contre lui dans
l’armée du duc de Bourgogne, se distingua
par sa valeur, puis s’attacha à Charles VIII,
qui le nomma grand chambellan et grand
maître de sa cour. Appelé en 1496, par la mort
de son petit-neveu Charles II, au trône ducal
de Savoie, Philippe avait alors fait oublier les
écarts de sa jeunesse par sa valeur et par les
services rendus à son pays. Il ne régna que
dix-huit mois, pendant lesquels il s’attacha à
introduire des réformes et à établir des institutions
utiles.
PHILIPPE, roi de Navarre, né en 1301,
mort à Xérès en 1343. Petit-fils du roi de
France Philippe III, il reçut le titre de comte
d’Évreux, d’Angoulême et de Longueville,
épousa, en 1318, Jeanne, fille de Louis X le
Hutin, et fut couronné roi de Navarre à
Pampelune en 1329. En 1335, il repoussa, avec
l’aide de Gaston de Foix, une invasion d’Aragonais,
prit une part active à la guerre contre
les Anglais, secourut, en 1343, Alphonse XI,
roi de Castille, assista au siège d’Algésiras et
mourut des blessures qu’il reçut pendant ce
siège. Son fils, Charles II, dit le Mauvais, lui
succéda.
PHILIPPE DE ROUVRE, comte, puis duc de Bourgogne, né en 1345, mort en 1361. Il
succéda à sa grand’mère, Jeanne de France,
dans la comté de Bourgogne (Franche-Comté)
et à son aïeul, Eudes IV, dans le duché de
Bourgogne (1350). Il resta sous la tutelle de
Jean le Bon, son beau-père, jusqu’à la bataille
de Poitiers, puis sous celle de sa mère,
Jeanne de Boulogne. Il mourut à seize ans.
PHILIPPE LE HARDI, duc de Bourgogne, quatrième fils du roi Jean, né en 1342, mort
en 1404. Il avait à peine quinze ans lorsqu’il
combattit auprès de son père à la bataille de
Poitiers (1356) et mérita son surnom de Hardi.
Blessé en défendant son père et fait prisonnier
avec lui, il le suivit à Londres. À son retour
en France, il fut investi par le roi des
duchés de Touraine et de Bourgogne, donations
qui furent ratifiées par Charles V. Son
mariage avec Marguerite de Flandre (1369)
le rendit héritier, à la mort du père de cette
princesse (1384), des comtés de Flandre, d’Artois, de Rethel, etc., et l’éleva au rang d’un des plus puissants souverains de l’Europe.
Dès le règne de Charles V, il s’était signalé
en combattant les Anglais dans la Beauce et
la Bourgogne (1364), puis devant Calais (1369)
et à La Rochelle (1374). En mourant, Charles
V lui confia la tutelle du jeune Charles VI
(1380). Il s’associa aux dilapidations de ses
frères, les ducs d’Anjou et de Berry, et se
montra impitoyable dans la répression des
mouvements populaires excités à diverses
reprises par leur insatiable cupidité. Lors de
la démence du roi, il reprit la régence (1392)
et se trouva en rivalité d’ambition avec son
neveu Louis d’Orléans ; mais son influence
fut presque toujours prépondérante. Plus
d’une fois la guerre civile faillit ensanglanter
Paris, et cette compétition de pouvoir fut le
prélude des inimitiés qui divisèrent depuis les
maisons de Bourgogne et d’Orléans et des
malheurs que leur ambition réciproque préparait
à la France. Philippe mourut en 1404.
S’il servit utilement la France sous Charles
V, il la ruina sous son successeur par ses
exactions et son excessive prodigalité. Son
fils aîné, Jean sans Peur, lui succéda.
« Philippe le Hardi, dit Michelet, était dans son intérieur un homme rangé et régulier. Il fut toujours bien avec le clergé ; il le défendait volontiers au conseil ; du reste, donnant peu aux églises. On ne lui reproche aucun acte violent. Ce politique mettait dans toute chose un faste royal qu’on pouvait prendre pour de la prodigalité et qui sans doute était un moyen. Le culte était célébré dans sa maison avec plus de pompe que chez aucun roi ; la musique surtout nombreuse, excellente. Dans les occasions publiques, dans les fêtes, il tenait à éblouir et jetait l’argent. » Il mourut en état de banqueroute. De son mariage avec Marguerite de Flandre, il avait eu cinq fils, dont Jean sans Peur, qui lui succéda, et quatre filles.
PHILIPPE LE BON, duc de Bourgogne, fils de Jean sans Peur, né à Dijon en 1396,
mort à Bruges en 1467. Après le meurtre de son père (1419), il lui succéda et, sacrifiant
sa patrie à ses inimitiés, traita avec Henri V,
roi d’Angleterre, le reconnut comme régent
de France et héritier présomptif de Charles
VI, joignit ses armes aux siennes, entra à
Paris avec lui et servit le parti anglais jusque
sous Charles VII. Il fit ensuite alliance
avec ce prince par le traité d’Arras (1435) et
se réconcilia même avec la maison d’Orléans
en contribuant au rachat du duc d’Orléans,
prisonnier des Anglais, et en lui faisant
épouser une de ses nièces. La création de
l’ordre de la Toison d’or, la répression de
plusieurs révoltes des Gantois, sa participation
à la ligue du Bien public, la fondation
de l’université de Dôle, la rédaction des coutumes
de Bourgogne, des encouragements
donnés aux lettres, des efforts efficaces pour
la prospérité de ses États, occupèrent la dernière
partie de sa vie. Philippe le Bon joignait
à un grand courage une rare modération,
une courtoisie chevaleresque, une humeur
affable, un esprit de justice et une
promptitude à pardonner qui lui valurent son
surnom. Néanmoins, il fit preuve parfois d’une
ambition peu scrupuleuse et d’une colère vindicative.
Il avait la passion du faste et ses
mœurs étaient très-relâchées, on lui connaît
quatorze enfants naturels. Il aimait les lettres
et les arts, attirait à sa cour des littérateurs,
des poètes, des peintres, des musiciens
envers qui il se montrait d’une grande libéralité.
Nul souverain de son temps ne possé-