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PIRA

tre, dans Me 61 du fleuve et dans la ville d’Héléna. Une bande de pirates s’est organisée sous les ordres d’un homme éuergique, .le capitaine Kelly, qui exerce sur eux un ascendant absolu. Pillant, ravageant, égorgeant au besoin, les maraudeurs se rassemblent dans une lie, cm liée à tous les regards, pour délibérer sur leurs expéditions et rendre compte de leurs prouesses au chef de la compagnie. La bande a recruté beaucoup d’affiliés dans la ville d’Héléna, dont les magistrats capitulent avec les dollars. Kelly cumule deux rôles ; à la ville, il s’appelle de son vrai nom le squire Dayton. Autant il est craint et redouté dans son île par les brigands, autant le squire est aimé et respecté dans sa maison et dans l’enceiiUe de la ville. Mistress Dayton, pas plus qu’Adèle, sa jeune parente, ne se doute des méfaits de l’honorable gentleman. Le capitaine Kelly a dans sou île une autre compagne, Georgina, qui l’aime d’une passion jalouse. D’un caractère emporté et inflexible, cette Clorinde commande les bandits et fait exécuter ses ordres comme ceux du chef, quand ce dernier lui délègue le gouvernement de l’l !e. Cependant tout a un terme ; de nouveaux crimes, de nouveaux vols rendent bientôt la situation trop onéreuse pour les fermiers et les commerçants. Un Irlandais, que les pfrates ont maltraité et qu’ils auraient noyé sans l’intervention de l’aubergiste Smart, jure do découvrir leur retraite. iT regarde passer jour et nuit les bateaux qui descendent le cours du Mississipi, et, eu en suivant un, il s’assure de la justesse de ses conjectures. Aussitôt il vient informer de la chose le squire Dayton : c’était tomber juste. Dayton achète un bateau à, vapeur dans lequel il se propose d’entasser les rapines accumulées dans l’île, pour fuir plus loin. Pendant ces préparatifs, les colons du pays se réunissent en troupe ; James Lively, l’amoureux d’Adèle, les commande ; ils sont résolus il se faire justice par eux-mêmes. Dayton, un moment repentant, ne peut se décider à abandonner sa femme légitime, qui lui porte une profonde affection. Il veut s’éloigner avec elle et tâcher d’oublier son odieux passé. Mais, au moment de s’embarquer, il aperçoit Georgina, qui le dénonce aux fermiers en armes et qui leur signale le capitaine Kelly en la personne du squire Dayton. Se voyant démasqué, il appelle à. son aide les brigands ôpars aux environs. À son signal, on accourt lui prêter main-forte ; une affreuse mêlée s’engage. Un des colons, doué d’une force herculéenne, se jette sur le squire et lui plonge son couteau dans la poitrine. Avant ■ de mourir, Dayton frappe mortellement de son poignard Georgina, qui tombe à ses pieds. Les pirates épargnés par le combat sont tous ensevelis sous les eaux du Mississipi ; la chaudière du steamboat, trop fortement chauffée, éclate, et l’explosion lance dans les airs des débris de navire et des corps mutilés.

Ce roman, où s’enchevêtrent les aventures et los coups de main, fait honneur à l’imagination du conteur allemand. Son récit est plein d’intérêt et de mouvement. Les caractères des personnages, habilement opposés et rendus avec originalité, y mettent en relief les mœurs d’une contrée où la barbarie et la civilisation sont en état de guerre, de sorte que la civilisation s’y fait barbare et que la barbarie s’y fait civilisée. Aux traits de mœurs se mêlent des tableaux, des scènes empruntés à la riche nature qui encadre de ses magnifiques paysages la vallée du Mississipi.

Pirates de la savane (les), drame en cinq actes et six tableaux, par MM. Anicet Bourgeois et Ferdinand Dugué (théâtre de la Caîté, 6 août 1859, repris en 1807). Par lui-même, ce drame n’offre rien d’extraordinaire ; depuis les Mohicans de Cooper, nous sommes trop familiarisés avec ce genre de personnages. Les Pirates de la savane font l’effet d’un roman de Cooper découpé en scènes pour produire l’émotion qu’avaient excitée, en 1858, les Fugitifs à l’Ambigu. Mais ce nouveau drame n’a pas l’intérêt que fournissait au précédent la terrible insurrection de l’Inde. L’imagination y tient plus de place et fait tous ses efforts cour suppléer par des fictions à la réalité ; mais ces efforts ne sont pas toujours heureux. Cette pièce est un tableau de mœurs étranges, de sites extraordinaires, de faits inouïs, de dangers horribles ; une lutte acharnée et à armes égales entre des scélérats qui persécutent une aimable petite fille et ses protecteurs dévoués, les uns et les autres aussi adroits, aussi redoutables que les tigres et les jaguars qu’ils font métier de chasser. On conçoit facilement qu’avec un pareil sujet la préoccupation littéraire doit être à peu près nulle, et que le principal souci des auteurs réside dans le choix de leur principal collaborateur, le machiniste. Les Pirates de la savane ont dû leur succès à l’habileté des trucs employés et surtout à une scène où l’on voit une jeune fille emportée à travers la savane, garrottée sur un cheval fougueux. C’est aussi cette scène qui a fait reprendre la pièce en 1867, à cause d’une écuyère fort en vogue, miss Menken, qui remplissait avec beaucoup de grâce le rôle de la jeune fille attachée et séduisait le public sous ses attitudes de Ma-Zéppa femelle.

Pirate (le) (il Pirata), opéra italien en dauï. actes, livret de Romani, musique de

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Bellini ; représenté pour la première fois à Milan en 1827. Cet ouvrage, la troisième œuvre dramatique du compositeur, fixa défimtivemens sur lui l’attention du public. On y remarqua une véritable originalité, et il ne tarda p»3 à être représenté sur les principales scènes de l’Europe, Cependant ce ne fut que le l*r février 1832 qu’il fut joué au Théâtre-Italien à Paris. La note fournie par le livret est lugubre. Gualtiero, de la famille des Montalti, ayant perdu sa fortune et son rang, cède au désespoir et quitte sa patrie, où il laisse Imogène, sa fiancée, dont il est tendrement aimé. Il devient chef de pirates. Pendant son absence, Imogène, pour sauver les jours de son père, a été contrainte d’épouser Ernest, duc de Calabre, ennemi de Gualtiero. Ce dernier est jeté par la tempête sur des éeueils contre lesquels son vaisseau se brise ; il parvient à gagner le rivage avec quelques umis et reconnaît son propre pays qu’il a quitté. Il apprend qu’Imogène est

I épouse d’Ernest. Dans sa fureur, il veut tuer le fils qu’elle a eu de ce mariage ; mais il cède aux angoisses maternelles et ne songe plus qu’à arracher la vie à son rival. Un combat s’engage ; Ernest succombe ; mais les chevaliers condamnent Gualtiero au supplice. Imogène devient folle. Tel est ce mélodrame, assez mal conçu au point de vue littéraire, mais riche en belles situations et en beaux vers. L’ouvercare du Pirate est assez médiocre, comme ia plupart des compositions instrumentales de Bellini. La cavatine de Rubini : Nel furor délie tempeste, que nous donnons ci-après, est d’un beau jet mélodique et a fourni au célèbre chanteur une occasion de triomphe. Le chœur des pirates est bien rhythmé et a de la couleur. Quant au duo d’Imogèae et de Gualtiero : E desso tu sciagurato, il brille au’premier rang des duos dramatiques ; l’expression en est juste, et c’est un morceau bien conduit. Le finale du premier acte, le- trio : Vient, vient, et l’air : Tu vedrai la sventurata, doivent encore être signalés parmi les bonnes inspirations du maître sicilien. Rubini, Santim et Mn« Schrœder-Devrient ont été les.interprètes de cet opéra au Théâtre-Italien. Cet ouvrage fut écrit à l’âge de vingt ans par le compositeur.

II a été chanté au Théâtre-Italien, à Paris, en 1846, par Mario, Coletti et MUeGrisi, qui était admirable dans le rôle d’Imogène. Le chœur ce la tempête et celui des pirates font de l’effet à la représentation.

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P1RATJBN ou PIBATES (îles des), groupe de petites îles situées près de ia côte, au fond du golfe de Tonkin, par 21» 15’ de latit. N. et 1060 5’ de longit. E.

PIRATER v. n. on intï. (pi-ra-té — rad. pirate). Faire le métier de pirate : Un jour, j’étais à Narbonne, quelques barques de ces maudits vinrent pirater jusque dans le port. (E. Sue.)

— Fig. En parlant des œuvres del esprit : Quelqu’un a dit que de prendre sur les anciens, c’était pirater au delà de la ligne. (Chain f.)

PIRATERIE s. f. (pi-ra-te-rî — rad. pirate). Métier de pirate : La Méditerranée a toujours été une mer malheureuse pour le èommerce, car la piraterie y était depuis plusieurs siècles organisée d’une manière régulière, surtout dans la régence d’Alger. (Teulet.) Les Arabes, dans le temps de leur grande puissance, ont eu recours aussi à la piraterie pour ajouter à leurs richesses, et leurs nauires ont infesté la mer des Indes. (Depping.) La piratbrik, c’est le brigandage maritime àmain armée ; c’esi la profession de voleur de grand chemin sur la mer. (Do Broglie.) Il Acte de pirate : Les Cretois étendaient leur commerce et leurs pirateries jusqu’en Italie et en Égypte. (Malte-Brun.) Les héros grecs sont aussi bien des entrepreneurs de piraterie que des chefs d’État. (Proutlh.)

— Par ext. Exaction, pillerie : Ce gouverneur a fait d’énormes pirateries. (Acad.) Il Plagiat : La piraterib fait vivre une partie de la presse.

— Encycl. Hist. Les poètes ont fort mal à propos idéalisé ces brigands, véritables fléaux de la mer et du commerce maritime, que tous les codes ont poursuivis des pénalités les plus sévères. Leur existence aventureuse, en dehors des lois sociales, a quelque chose de séduisant, comme celle des bandits napolitains et espagnols ou des outlaws, et il n’est personne qui, un moment du moins, ne se soit promené, en imagination, sur la crête des vagues, à la recherche d’une proie fantastique, en compagnie du Lara de lord Byron, du Corsaire rouge de Cooper ou du

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Pirate de Walter Scott. Ces peintures où domine l’amour du sang et de l’or, où des scènes de meurtre et de pillage alternent avec des scènes de débauche, sont cependant plus propres à dégrader qu’à élever l’iroajrination. Vus de près et dépouillés de l’auréole poétique, les pirates ne sont que de hideux et grossiers pillards ; mais les mauvais instincts de l’homme sont aussi anciens que l’homme même et les premiers monuments de l’histoire et de la littérature en témoignent suffisamment. L’expédition des Argonautes n’est, h la regarder avec les idées modernes, qu’une expédition de flibustiers ; les croisières dont Ménélas se vante et dans lesquelles il a recueilli 122 talents de butin sont des faits de piraterie ; le sac de la ville des Cicons, par Ulysse, dans l’Odyssée, met te roi d’Ithaque au-dessous d’un négrier. Cependant, au milieu de ces violences, au milieu de ces actes féroces, à travers tous ces massacres et ces incendies, apparaissent quelques rayons lumineux qui laissent entrevoir les premiers jalons de l’élément social. Embarquez-vous avec les Phéniciens, avec les Grecs ; allez a Tyr, visitez Colchos, remontez le Simoïs, passez à Argos, voguez jusqu’aux colonnes d’Hercule, la où s’étendent les champs heureux des Tartessieus, et vous trouverez partout les germes de la civilisation que les premiers navigateurs ont laissés derrière eux. Aussi les poBles de l’antiquité, ne s’arrètant qu’aux résultats, chantèrent ces aventuriers comme des dieux qui avaient signalé par des bienfaits célestes leur pèlerinage sur la terre. Après la poésie, l’histoire ; aux peuples inconnus, dont il ne nous reste que le nom et des souvenirs aussi vagues que les réminiscences d’un songe, succèdent des peuplea connus, ceux qui nous ont légué leurs pensées, leur langue et cet espace immense où les sociétés modernes s’élèvent. Ils passeront devant vous le livre de leurs, annales a la main, et vous lirez encore à la première page les mêmes traditions qui ont inspiré les poètes ; vous trouverez toujours l’homme bandit sur le continent et pirate sur la mer. L’amant et l’époux, le père et le fils, le chasseur et le berger ont disparu sans laisser la moindre trace de leur passage. Des souvenirs de brigandage ou âepiralerie furent les seules traditions conservées dans l’enfance des sociétés ; résultat nécessaire de cette ébauche de civilisation. À cette époque, où il n’y avait encore pour l’homme d’autre vertu que le courage, rien ne devait tant exalter l’imagination que cette vie aventureuse et vagabonde. Les lois d’Athènes autorisaient les associations des pirates ; ils étaient obligés de compléter la flotte de fa république en temps de guerre, de protéger le commerce pendant la paix, de donner aide et secours, moyennant une rétribution, aux navires des alliés. Quand le nombre des armateurs ne suffisait pas pour le service de la marine, le sénat pouvait expédier des autorisations temporaires aux citoyens qui lui en demandaient. La flottille qui recouvrait les deniers de l’impôt était une escadre de véritables écumeurs da mers. La réponse du pauvre corsaire à Alexandre résume la morale de cette époque ; le pirate et le roi représentaient alors le inonde. Non-seulement on ne concevait pas d’horreur pour cette vie de meurtre et d injustice, mais elle s’offrait aux yeux de la société comme une profession généreuse, dont le courage et la fortune rachetaient les forfaits. Les Phocéens considéraient la piraterie comme une espèce de chevalerie ; les plus grands seigneurs parmi les Germains étaient fiers de commander une troupe de brigands ; les lbériens pillaient, lesLusitaniens volaient. Alors tout était de bonne prise : hommes, meubles ou bestiaux. Le plus fort traînait la vaincu au marché. Mais les progrès de la civilisation devaient nécessaîrement apporter quelques modifications dans ces actes de violence. On en vint à surprendre par la finesse, à conquérir par la ruse, et insensiblement le commerce fut le seul moyen d’obtenir les ri« chesses, qu’on ne s’était d’abord procurées que par la force. Comme instrument de civilisation, le commerce agit dès lors en pacificateur ; mais, comme industrie, ce fut longtemps encore une profession guerrière. Aucun navire ne s’éloignait du port sans être en état de se défendre ; souvent même dans les chances du voyage entrait la possibilité d’un combat, l’espoir d’une prise ; tel fut le retour vers un ordre de choses plus rationnel. Ainsi la piraterie, après avoir produit la navigation, perfectionné la science nautique et créé l’esprit des" entreprises commerciales, avait accompli sa destinée. N’étant donc plus utile, elle devenait un mal ; aussi la société qui résume toutes les forces, parce qu’elle accumule tous les droits, imposa ses lois a la mer, comme elle les avait imposées au continent. Un successeur de Busiris défend les croisières ; les descendants de Ménélas condamnent les écumeurs de mer ; la traite des esclaves est persécutée par les Grecs ; et le conseil des amphictyons alla même jusqu’à fixer l’équipage de chaque navire : un vaisseau marchand ne pouvait avoir plus de cinq hommes à son bord. Puis on institua les déripoles, corps civique composé de toute la jeunesse d’Athènes, qui montait la garde au Pirée et faisait des rondes sur les côtes pour prévenir l’approche des pirates ; enfin Ptolémée Philadelphe, dans sa sollicitude pour le commerce, voulut que deux escadres fussent