Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 12, part. 1, P-Pate.djvu/109

Cette page n’a pas encore été corrigée

PANA

longitudinales avec un instrument armé de deux aiguilles que l’on rapproche ou que l’on éloigne Tune de l’autre selon le degré de finesse que l’on veut donner à la paille. On fait subir ensuite un apprêt à ces bandes pour les rendre bianches, souples et fortes, puis on tisse le chapeau sur un billot ou sur une pierre, en commençant par le centre et en allant ainsi jusqu’aux bords. La plupart des panamas sont, tissés par les habitants de Moyobamba. Les enfants fabriquent les plus grossiers ; des tisseurs habiles font les plus fins. Ces chapeaux sont remarquables par leur légèreté, leur souplesse et leur solidité. On peut, sans inconvénient, les plier et le5 mettre dans sa poche, et il suffit d une brosse et d’un peu d’eau de savon pour les nettoyer. Dans le pays de production, le chapeau panama de moyenne quaiité se vend de 7 fr. 50 à 10 francs, et jamais, même quand il est fait sur commande et de la plus grande beauté, le prix ne dépasse 150 francs. Exportés, ces chapeaux atteignent parfois des prix fabuleux. Ceux qu’on vend à Moyobamba de

3 fr. 75 à 7 fr, 50 se vendent à Paris de 9 fr. 50 a 25 francs ; ceux de 15 à 20 francs atteignent le prix de 60 k 80 francs ; enfin, lus panamas de 40 à 150 francs s’ont cotés à Paris 200, 400, 500 et jusqu’à 1,000 francs. Les chapeaux Panama sont connus et appréciés depuis longtemps en Amérique, où ils servent à toutes les classes de la société, même aux esclaves. Les plus beaux sont faits avec la feuille appelée toquilta, qui sert aussi à fabriquer de très-beaux hamacs.

PANAMA, ville forte de la Nouvelle-Grenade, ch.-l. de l’État de son nom, sur le golfe de Panama, à 900 kilom. O.-N.-O. de Bogota et à l’extrémité d’un chemin de fer qui réunit l’océan Atlantique à l’océan Pacifique ; par 80 57’ 10 de latit. N. et 81° 50’ 22" de longit. O. ; 25,000 hab. Evêché, collège. Le port, qui a été érigé en port franc en 1849, est entouré par une côte très-plate, de sorte que les navvires doivent jeter l’ancre a une distance de près de 1,500 mètres de la ville. En revanche, la rade est protégée par de nombreuses îles, dont les plus grandes, Taboga et Taboguilla, sont complètement cultivées et offrent un ancrage sûr ainsi que d’excellente eau potable. Le commerce de Panama est très-important, surtout depuis la découverte des riches placers de la Californie et la création du chemin de fer qui relie les deux océans (v. plus bas Panama [isthme de]). Les marchandises principales qui forment l’exportation de cette place sont : les coquilles d’hultrea à nacre, les perles fines, les gommes, cuirs, peaux de chevreuil, bois de construction et de teinture, enlin les marchandises européennes destinées à la Californie, au Chili et k la république de l’Equateur. La houille, la bijouterie, la soierie, les confiseries, la farine, les viandes salées, la papeterie, la quincaillerie, la parfumerie et une grande quantité de marchandises européennes sont les principaux aliments du commerce d’importation. Le mouvement général du transit et du commerce de Panama s’élève annuellement à environ 500 millions de francs. La ville de Panama présente un quadrilatère un peu allongé, de forme presque régulière, qui, dans sa plus grande dimension, s étend de l’O. À l’E. et qui comprend dans son aire un peu plus de 1 Kilom. carré. Elle est assez bien bâtie et ses rues sont régulièrement percées de l’E. À l’O. et du N.

au S. Malgré quelques travaux d’utilité publique exécutés dans ces dernières années, il arrive que, par suite des habitudes de paresse et d incurie propres à ce pays, on voit, sur un certain nombre de points, à la suite des averses, les eaux arrêtées et stagnantes ; les immondices s’amoncellent aussi dans les divers quartiers-et surtout dans les faubourgs. Les maisons sont presque toutes en bois, couvertes en paille ou chaume, et ont de deux à trois étages. Cependant, depuis quelques années, plusieurs ont été bâties en pierre, avec de belles cours intérieures. On y remarque une grande place sur laquelle s’élevait autrefois un collège de jésuites. Panama possède de nombreuses églises, parmi lesquelles on en remarque une assez belle, la cathédrale, quatre couvents d’hommes et un couvent de femmes. On a récemment construit dans cette ville de beaux magasins et des docks pour les marchandises, ce qui lui donne un peu l’aspect d’une ville anglo-américaine. Le climat de Panama n’est pas insalubre, ainsi qu’on le croit fénéralement ; il se trouve, au contraire, icn au-dessus de la moyenne admise en général pour les contrées placées dans le voisinage de l’équateur ou même dans l’espace compris entre les tropiques. Il est juste d’ajouter que l’influence de ce climat est énervante, comme l’est ordinairement celle des pays situés dans la zone torride, et que l’homme n’y est pas capable de travaux de corps et d’esprit aussi prolongés ni aussi assidus que dans la zone heureuse des régions tempérées. En général, l’esprit commercial règne à Panama ; les boutiques y sont nombreuses, tenues avec propreté et bien fournies de toutes sortes de marchandises.

Panama signifie lieu abondant en poisson. Lorsque les Espagnols s’établirent sur cette côte en 1518, sous le gouverneur Davila, ils fondèrent Panama à 16 kilom. de l’emplacement de la ville actuelle ; cette première ville fut détruite, en 1673, par le flibustier anglais sir Henri Morgan ; les habitants la reconstrui XII.

PANA

sirent plus belle et sur un meilleur plan au lieu qu elle occupe aujourd’hui. Aucune place peut-être, dans les possessions transatlantiques espagnoles, n’avait eu moins à souffrir du système vicieux de la mère patrie que Panama. Cette ville entretenait un commerce continuel avec les Indes occidentales ; c’était le point de réunion de toutes les marchandises européennes que l’on dirigeait par l’isthme sur le Pérou et sur les côtes méridionales du Mexique. Ses correspondances et son commerce lui avaient donné un haut degré d’importance et l’avaient mise a même d acquérir des richesses que la nature du système colonial refusait à toute autre ville de ces contrées. Il lui fut donc très-facile de secouer le joug des Espagnols et de conquérir la liberté. Panama, placée dans les mêmes circonstances politiques que Lima et Guayaquil, offrit avec, ces deux villes un singulier contraste. La révolution s’opéra de la manière la plus paisible. On enleva du fort le drapeau espagnol, on proclama la liberté du commerce et l’on déclara que les affaires resteraient sur le même pied qu’auparavant. L’idée du congrès de Panama, conçue par Bolivar, mais dont l’exécution avait été différée d’année ; en année, fut enfin réalisée le 22 juin 1825’ ; les députés des États-Unis, du Mexique, du Pérou, de la Colombie et de Guatemala y assistaient. Le but de cette confédération était de créer une politique et des intérêts américains sans qu’ils fussent pour cela en opposition avec la politique et Jes intérêts de ! Europe ; mais la fièvre jaune ayant apparu à cette époque à Panama, le congrès se hâta de se séparer et, après vingt-trois jours de session, il signa, le 15 juillet, un traité d’union, de confédération perpétuelle, lequel n’a empêché ni les révolutions, ni les dissolutions, ni les guerres d’État a État. Le congrès s’était donné rendez-vous pour l’année suivante à Cacubaya, au Mexique ; mais cette réunion n’eut jamais lieu.

Jusqu’en 1855, Panama fut le chef-lieu d’une des quatre provinces de la Nouvelle-Grenade. À cette époque, le congrès de cette république décida que l’isthme entier de Panama formerait un État qui devint peu après un des huit États indépendants de lu confédération Grenadine, et dont la capitale fut la ville de Panama. Cet État, qui compte 176,000 hab., constitue une petite république. Le pouvoir exécutif est confié à un président ou gouverneur élu tous les deux ans par les citoyens. Tous les deux ans, les électeurs nomment une assemblée de députés chargée de faire les lois. Quant au pouvoir judiciaire, il appartient à une cour suprême élue pour quatre ans et à des tribunaux de département et de district. Au mois d’avril 1873, le peupla de Panama déposa le président Neyra et rétablit l’ex-président Conesso. Au mois de septembre de la même année, l’assemblée de l’État vota une loi établissant une zone neutre à travers l’isthme, à l’effet de protéger le transit et de le garantir de toutes les entraves locales provenant de guerre civile ou d’autres causes ; toutefois, cette loi ne recevra sa pleine exécution que lorsqu’elle aura été sanctionnée par le gouvernement général de la confédération de la Nouvelle-Grenade. L’établissement du chemin de fer ouvert à travers l’État en 1855 et qui relie les deux océans a beaucoup contribué à son développement. Ce#qui fait le plus défaut k cette région au climat brûlant, ce sont les travailleurs. Pour la construction du chemin de fer, on dut introduire des coolies et des Chinois, dont un grand nombre furent emportés par

les fièvres. Depuis quelques années, on a fait venir de la Californie un certain nombre de machines agricoles qu’on met en mouvement par des mules et dont la direction n’exige que peu de bras.

PANAMA (isthme de), langue de terre qui unit les deux Amériques, entre la mer des Antilles au N. et l’océan Equinoxial ou Pacifique au S. 340 kilom. de longueur ; largeur variable de 40 kilom. À 100 kilom. Dans une acception plus large, les géographes modernes entendent par isthme de Panama tout le rétrécissement que subit le continent entre l’Amérique du Nord et l’Amérique du Sud, sur une longueur d’environ 63 myriam. Reconnu pour la première fois en 1513, par Nunez de Balboa, il appartient à la république de la Nouvelle-Grenade et est souvent désigné sous le nom d’isthme de Darien. Le chemin de fer qui, depuis 1855, traverse l’isthme américain de Panama à Colon, c’est-à-dire des côtes du Pacifique a celles de l’Atlantique, est aujourd’hui encore la seule voie de communication fa’cile qui s’ouvre entre les deux océans. Pour les envois d’Europe à destination des côtes du Pacifique, le Chili, le Pérou, San-Francisco, le N. de la Chine, le Japon et réciproquement, la traversée par l’isthme, sans doubler le cap Horn, abrège notablement le trajet, et le petit surcroîtde trais qu’occasionne ledouble transbordement des colis à Panama et à Colon est largement compensé par le temps que l’on gagne et aussi parce que les difficultés de la navigation du cap Horn se trouvent évitées. La compagnie concessionnaire du chemin de Panama jouit du monopole exclusif du transit entre les deux océans. Si l’on jette les yeux sur la carte, il est facile de se convaincre que ce transit ne tardera pas k égaler, si ce n’est à surpasser, en importance celui qui s’opère par l’isthme de Suez, à mesure surtout

PANA

que les échanges déjà considérables entre 1 Europe et les côtes asiatiques du Pacifique s’augmenteront. Le chemin de fer de Panama à Colon appartient, depuis longtemps déjà, non pas au gouvernement des États-Unis, mais à une compagnie presque exclusivement américaine. En Î846, le gouvernement de "Washington était intervenu dans le contrat passé primitivement entre la compagnie et le gouvernement de Bogota, Moyennant certaines concessions, telles que le droit exclusif de faire transiter en tout temps des fournitures et des munitions de guerre^ et même des troupes armées et équipées, il s’engageait à garantir la neutralité dans l’isthme. Le contrat primitif fut modifié, au plus grand avantage de la compagnie, par une nouvelle convention datée du 5 avril 1850. Les effets" de cette convention pouvaient cesser en 1868, k la condition d’être dénoncés douze mois à l’avance. Grâce à son admirable position géographique entre les deux moitiés du continent américain, position plus favorable que celle de San-Francisco pour centraliser dans son port le commerce du Pacifique, Panama, désormais reliée à l’Atlantique, grandit rapidement. Au commencement de 1866, elle recevait par mois soixante vapeuts’ faisant un service régulier entre les ports américains du Pacifique, de l’extrémité sud du Chili jusqu’à San-Francisco. Des lignes régulières touchaient aussi à Yokohama et à Hong-Kong ; enfin, depuis le 1er janvier 1867, un grand service y est organisé qui touche k Sanï’rancisco, aux Sandwich, en Chine et au

Japon. De Colon, plusieurs lignes de vapeurs se rendent à New-York et dans les divers ports américains de l’Atlantique. Du reste, les lignes anglaises et françaises de l’Atlantique y font également escale et se relient par l’intermédiaire du chemin de fer, à Panama, avec les lignes correspondantes du Pacifique. La compagnie du chemin de fer, maîtresse du transit entre les deux ports, n’a pas encore réussi à monopoliser entièrement entre ses mains les services maritimes qui s’y rattachent. Mais le monopole du transit est suffisant pour lui assurer des bénéfices considérables et une influence dont le gouvernement des États-Unis prend également sa part. Ce dernier entretient depuis longtemps une station navale à Panama et s’est efforcé, autant qu’il lui était possible, de faire prolongerle terme de la-concession. Dès 1865, le colonel Totten, représentant la compagnie et appuyé par la légation des États-Unis à Bogota, offrait au gouvernement de lui acheter la perpétuité de la concession et même la propriété des terrains voisins du chemin de fer dans un rayon assez étendu. Le gouvernement de la Nouvelle-Grenade, que présidait le docteur Murillo, ne se décida pas, malgré ses perpétuels besoins d’argent. Les négociations furent reprises en 1866, sous l’administration du général Marquera, plus besoigneuse encore que celle de son prédécesseur. Cette fois, elles aboutirent à un traité qui, sans aller jusqu’à déclarer la concession perpétuelle, l’a prolongée pour quatre-vingt-dix-neuf ans. La compagnie acquiert ainsi la propriété des terrains, sur lesquels elle pourra élever tells construction qu’il lui conviendra. Enfin, le gouvernement de la Nouvelle-Grenade s’engage à n’autoriser à l’avenir ni percement de canal, ni nouvelle édification de voie ferrée entre les deux océans, dans un rayon étendu qui s’étend jusqu’à l’isthme de Darien. Ce n’est donc désormais que sur des territoires indépendants de Bogota, dans le Honduras, par exemple, qu’un canal ou un chemin de fer pourront être établis.

Depuis longtemps il est question de percer par un canal l’isthme qui relie les deux Amériques. Dès 1528, quelques années après l’arrivée de Cortez au Mexique, un navigateur portugais, Antonio Galvao, proposait à l’empereur Charles-Quint de faire ouvrir une communication interocéanique, possible, affirmait - il, sur quatre points principaux, et ce qu’il y a de très-curieux, c’est que les points qu’il indiquait sont ceux qui aujourd’hui réunissent le plus de suffrages. Toutefois, le projet de Galvao ne parut point digne alors d’attention aux hommes pratiques, et il fallut des siècles avant qu’il revînt au jodr. En 1780, Nelson préconisa l’idée de percer un canal par le Nicaragua. En 1804, l’illustre de Humboldt visita l’Amérique centrale et étudia sur les lieux la question de faire communiquer artificiellement les deux mers. Il présenta cinq tracés : le premier unissant le rio Atrato au rio Naonatna ; le second allant du golfe de Darien au golfe de Sau-Miguel ; le troisième allant du rio Coatzacoalk àTehuantepec ; le quatrième coupant l’isthme dans sa partie la plus étroite, de Onagres k Panama ; enfin, le cinquième allant de San-Juan de Nicaragua à San-Juan del Sur, en traversant le lac Nicaragua. Ces tracés éveillèrent l’attention publique. En 1826, Guillaume de Nassau fit entreprendre de nouvelles recherches. De 1828 à 1829, Bolivar fit explorer le Panama. En 1841, Remy de Puydt conduisit au Honduras une colonie pour creuser un canal sur ce point. Deux ans plus tard, Gavella et de Courtines, envoyés par M. Guizot pour étudier le tracé d’un canal entre la ville de Panama et le Chagres, se prononçaient contre la possibilité de l’entreprise. En 1844, les États de Guatemala, de San-Salvador et de Honduras déléguèrent auprès de Louis-Philippe M. Castellan, pour lui demander de seconder

PANA

105

le percement de l’isthme ; mais ce prince n’accueillit pas ces ouvertures. L’année suivante, le gouvernement de Nicaragua, qui cherchait un nom retentissant pour le mettre à la tête de l’entreprise et attirer les capitaux européens, fit proposer à Louis Bonaparte, alors prisonnier à Ham, de se mettre à la tête de l’entreprise, en lui promettant que le canal qui traverserait le lac de Nicaragua prendrait le nom de Canale Napoléons di Nicaragua, Ce dernier, s’étant échappé de Ham en 1846, publia, peu après son arrivée en Angleterre, une brochure intitulée le Canal de Nicaragua et fit appel aux capitaux.’ Mais le profond discrédit dans lequel était tombé à cette époque cet aventurier politique n’était point fait pour attirer la confiance, et le projet avorta. La découverte des placers de la Californie vint peu après appeler l’attention publique sur les avantages que le commerce des deux inondes retirerait du percement d’un, canal transocêanien. En 1849, l’État de Nicaragua passa avec une compagnie américaine un traité par lequel elle lui concédait le monopole de la navigation à vapeur sur le rio San-Juan et le lac Nicaragua, et le droit d’ouvrir, avant l’achèvement du canal du lac au grand Océan, une route ordinaire ou un chemin de fer pour assurer le transit. Cette compagnie, après avoir percé une route carrossable de San-Juan del Sur à Vivgin-Bay, établit des bateaux à vapeur sur le Pacifique, le lac Nicaragua et le fleuve San-Juan et, en juillet 1851, des voyageurs purent, par cette route, se rendre en vingt-huit jours de San-Francisco k New-York i cela fait, la compagnie ne s’occupa plus du canal, et elle fut légalement déchue de son privilège quelques années plus tard. De 1845 a 1857, plus de vingt-cinq ingénieurs de toutes nations explorèrent le fleuve Atruto et ses confluents. Le 1er mai 1858, les gouvernements de Nicaragua et de Costa - Rica passèrent avec un Français, M. Félix Belly, une convention par laquelle ils lui concédèrent le droit de faire creuser, entre Salinas et San-Juan de Nicaragua, un canal ouvert à tous les peuples et placé, sous la garantie du droit public universel. Le gouvernement français plaça alors sous sa protection l’entreprise, dont les travaux préparatoires furent confiés k M. Thomé de Gamond, et les puissances signataires du traité de Paris lui donnèrent la consécration du droit public européen. Faute d’argent (les dépenses étaient évaluées de 120 à 200 millions), la réalisation de ce grand projet dut être encore ajournée. Depuis cette époque, l’idée de-créer une communication transocéanienne n’a point été abandonnée, car on a vu successivement se produire une trentaine de projets. Une commission de savants américains, instituée, en 1870, par le congrès des États-Unis, pour explorer l’isthme entier depuis Panama jusqu à Tehuantepec, s’est livrée k des travaux approfondis pour trancher définitivement cette grande question et fournir au monde entier les documents scientifiques les plus complets et les plus propres à éclairer 1 initiative individuelle. En 1873, cette commission a commencé la publication de ses1 rapports officiels. Notons en passant que les Américains du Nord, peu favorables au percement d’un canal, préféreraient, si le percement a lieu, voir le canal ouvert au Nicaragua sur le territoire d’une petite république qu’ils peuvent dominer et, au besoin, absorber, que sur celui de la Colombie, où leur influence serait d’autant moins grande que le passage du canal par le Durien rendrait bientôt cette nation plus puissante.

Parmi les projets mis au jour, une douzaine sont relatifs au percement de 1 isthme do Panama proprement dit, qui est la partie la plus étroite de tout l’isthme. C’est ainsi que le percement à Panama n’aurait que 48 kilom. de longueur. Par malheur, cette région est traversée par les Cordillères. On se trouve donc en présence de difficultés topographiques considérableset l’on ne pourrait résoudra le problème que par le creusement d’un immense tunnel. Or, le gouvernement des États-Unis rejette tout projet de canal qui entraînerait des percements de tunnels, ce qui est le cas de presque tous les canaux projetés et en particulier des plus directs. Toutefois, dans l’isthme de Panama ou de Darien, il est un endroit par lequel on pourrait creuser un « anal a ciel ouvert. Cet endroit a été découvert, en 1865, par M. Lucien de Puydt, chargé par une commission française d’étudier un projet dans cette région. Ayant appris que les Indiens Caraïbes passaient facilement des affluents de la haute Tuyra dans les cours d’eau qui descendent vers le golfe Uraba en portant leurs pirogues sur leurs épaules, il prit, en 1865, la Cordillère k revers et découvrit, après mille traverses, la col de Tanéla-Paya, situé seulement à 46 mètres d’altitude. Cette découverte lui permit de faire le tracé d’un canal pouvant faire communiquer les deux océans au moyen d’une tranchée de niveau dans toute sa longueur, entre le golfe de San-Miguel d’un côté et te port d’Escondido, dans te golfe Uraba, de l’autre. Ce canal suivrait, pendant une grande partie du trajet, le cours de la Tuyra, rencontrerait la vallée du LJucro et, après avoir franchi la Cordillière sur une largeur de 6 kilomètres, traverserait les vallées de la Tanéla etduTurgandi. Les dépenses pour le creusement de ce canal ne dépasseraient pas

14