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Namur, Liège ; histoire, légendes, sites et monuments, industrie (Liège, 1S58, in-8o, avec 7 pi. gr.), ouvrage publié sous lu pseudonyme du docteur Trcuiiicr ; les Moralistes orientaux ; pensées, maximes, sentences et proverbes tirés des meilleurs écrivains de l’Orient (Paris, 1859, in-12) ; les Moralistes latins (Paris, 1859, in-12) ; VEsprit des Allemands (Paris, 1861, in-12) ; VEsprit des Grecs (Paris, 1861, in- !2) ; Histoire du diable pendant la mission de Jésus-Christ en Palestine (Liège, 1861, in-32) ; Histoire de la sagesse et du goût, depuis les plus anciens temps de la civilisation grecque jusqu’à Socrate (Paris, 1864, in-8o) ; De Paris à Cologne, à Bruxelles, à Sentis, a Laon, à Dinant, à Givet, à Luxembourg, à Trêves, à Maastricht, itinéraire descriptif et historique (Paris, 1864, in-12), etc.

MOREL (Jean), littérateur français, né près, de Lyon le 15 octobre 182S. Il fit : iu petit séminaire de Largentière (Rhône) la plus

grande partie de ses études, les acheva au lycée de Lyon, et compta parmi les élèves de 1 abbé Noirut, professeur de philosophie alors célèbre, qui enseignait la doctrine traditionnaliste. Désireux, toutefois, de ne pas s’enfermer dans un système qui appartenait au passé plus qu’à î avenir, il étudia, à peine sorti du collège, la philosophie rationaliste, sous la direction de M. Francisque Bouillier. En même temps il suivait, pour se fortifier dans la connaissance des langues, les cours de sanscrit de M. Eichhoff. Chargé bientôt d’une éducation particulière dans le département de l’Ain, près de la ferme modèle de la Saussaie, il s’y instruisit des choses de l’agriculture et s’adonna à l’étude de la botanique. Au mois d’août 1851, il vint à Paris avec une traduction de l’Electre de Sophocle et une lettre de recommandation pour Ozanam. Le célèbre professeur était alors sur le point de succomber à la maladie qui l’enleva prématurément ; il put à peine dire quelques

mots affables au jeune homme qui venait se jeter dans la rude carrière des lettres et que sa mort nllait laisser sans appui.

Quelques jeunes gens du quartier latin s’étant réunis dans le but de fonder un recueil littéraire, il fut choisi pour gérant et bientôt devint directeur de ce recueil, qui porta le titre de Jievue française, et dont le premier numéro parut en février 1855. CeUe revuo cessa de paraître au mois d’août 1859. Son directeur, frappé d’une maladie rhumatismale q^ui finit par lui enlever presque entièrement 1 usage des jambes, continua néanmoins, avec une active persistance, ses travaux littéraires.

Homme de goût et d’étude, M. More] est en France un des types de ce qu’en Angleterre on appelle les reviewers. Grâce à un style agréable et distingué, ferme et sûr, sobre et contenu, il a acquis dans le monde des lettrés une réputation honorable. Il a publié un grand nombre d’études historiques et littéraires, soit dans le recueil des Poètes français, publié par M. Crépet, soit dans diverses revues, comme la Revue moderne, la. Revue libérale, la Jievue de France, etc. Il a été l’un des plus assidus rédacteurs de la Nouvelle Biographie générale et du Supplément au Dictionnaire de ta conversation. Il a écrit aussi de nombreux articles pour notre Grand Dictionnaire.

MOREL (Eustache Deschamfs, dit), poète français. V. Deschamps.

MOREL (Abdias), chef camisard. V. Matj-

REL.

MOREL DE CHEFDEVILLE (Étienne), auteur dramatique français, né à Paris en 1747, mort en 1814. Il devint intendant des domaines du comte de Provence, trésorier des menus plaisirs, administrateur de la loterie, s’enrichit dans des spéculations heureuses et composa alors des livrets d’opéra d’un style fort négligé, mais dans lesquels on trouve une véritable habileté scénique et l’art de bien placer les morceaux de musique. De décembre 1802 à septembre 1803, Morel fut directeur de l’Opéra. Il passa les dernières années de sa vie dans une belle propriété qu’il possédait près de Villeneuve-Saint-Georges, et où il mourut des suites d’une maladie de la vessie. Nous citerons de lui : Alexandre aux Indes, opéra en 3 actes, musique de Méreaux (1783) ; la Caravane du Caire ou 'Heureux ssclavage, en 3 actes, musique de Grétry (17S3) ; Panurge dans Vile des Lanternes, en 3 actes, musique du même (1785) ; Aspasie de Milet, en 3 actes, musique du même (1789) ; Tamerlan, en i actes, musique de Winter (1802) ; le Pavillon du calife, eu 2 actes, musique de Dalayrac (1804), etc.

MOREL-FATIO (Antoine-Léon), peintre français, né à Rouen en 1810, mort en 1871. Issu d’une fumille riche, il put, à son début dans la carrière artistique, satisfaire sa passion pour les voyages et étudier la nature sous ses aspecLs les plus variés. Après avoir visité l’Angleterre et l’Algérie, il parcourut la Hollande, l’Italie, et se fit connaître comme peintre de marine. Nommé, en 1852, conservateur des galeries de marine au Louvre, dont il a publié le catalogue eu 1854 sous le titre de Notice des collections maritimes du Louvre, il fut attaché, en 1854, comme peintre officiel, à l’expédition deBomarsund, puis îl visita l’Orient et la Crimée. Il est mort au Louvre, de l’émotion qu’il ressentit de voir les Prussiens y pénétrer.

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Riche, protégé par le pouvoir, M. Morel-Fatio a pu, sans appréhension de l’avenir, s’abandonner à toute la fougue de son imagination féconde. Aussi son œuvre est-il considérable. Nous n’en citerons que les morceaux les plus importants, les plus connus : l’Ile de Wigkt (1833) ; la Bue Bab-Azonn, à Alger ; Mosquée des Coloughis (IS34) ; Coup de vent dans la rade d’Alger (1835) ; le Combat d’Algésiras (1836) ; l’Attaque d’Alger et les Cotes de Bretagne (1837) ; I Entrée du port du Havre, Y Entrée du port de Marseille (1S38) ; Combat duVengeur(1840) ; Saint-Jean-d’Ulloa (1841) ; le Transbordement de Napoléon à Cherbourg en 1840 ; Amsterdam en 1700 (1842) ; le Négrier (1843) ; Louis-Philippe allant rendre visite à la reine Victoria (1844) ; Bombardement de Tanger (1845) ; Incendie de ta Gorgone, Entrée du port (1846) ; Un coup de vent au sud d’Elbe (1848) ; Vue de Brest, Vue de Bomarsund (1855) ; Vue de Toulon (1857) ; Episode des fêles de C/œrbourg en 1S5S (1850) ; Vaisseau de ligne au plus près du vent, Naufrage de la corvette anglaise le Wolf, Vaisseaux anciens en 1700 (1861) ; Les Chasseurs de phoques en Norvège, le Yacht impérial la R»ine Hortense par un gros temps (1863) ; Hivernage devant Kinbum (1864) ; la Poste aux choux, Speronare (1865) ; le Port d’Amphion, la Pèche aux lançons (lsfiG) ; Environs de Fécamp, Port de la pointe Pescate (1863) ; Frégate fuyant devant le temps, la Plage de ViUervilte (1869) ; Tempête du 30 mars 1869 à Saint- Valéry - en-C aux, Bateau pêcheur de Trouville (1870). Morel-Fatio avait obtenu, outre plusieurs médailles, la croix d’officier de la Légion d’honneur en 1866. Peintre agréable et facile, il a rivalisé de popularité avec Gudin et Isabey. C’est l’Horace "Vernet do la peinture de marine. — Son frère, M. Arnold Morel-Fatio, s’est beaucoup occupé de numismatique. Il a publié plusieurs catalogues de collections et de médailles, des monographies et divers ouvrages. Nous citerons de lui : Monnaies inédites de Dezana, Frinco et Passerano (1865, in-S°). — Un frère des précédents, M. François-Étienne-Louis MoRel-Faho, est l’auteur d’un-ouvrage intitulé : Du monopole des professions lucratives en France (1836).

MOREL DE VINDÉ (Charles-Gilbert), vicomte), littérateur et agronome, né à Paris on 1759, mort en 1842. Conseiller au parlement de Paris avant la Révolution, il adopta avec modération les idées nouvelles, devint président de l’un des six tribunaux de la capitale en 1790 et donna sa démission l’année suivante, après l’arrestation de Louis XVI à Varennes, pour ne plus s’occuper que de la culture des lettres et des sciences et de travaux d’agronomie. Membre correspondant de l’Institut en 1808, il fut promu à la pairie en 1815, entra au conseil supérieur d’agriculture en 1818 et devint membre de l’Académie des sciences en 1824. Après la révolution de Juillet, Morel de Vindé continua à siéger à la Chambre des pairs, où il remplit un rôle aussi effacé que sous les deux règnes précédents. Louis XVIII lui avait accordé les titres de baron, puis de vicomte. Nous citerons, parmi ses écrits : la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (1790) ; Etraînes d’un père à ses enfants ou Collection Se quatrains moraux (1790), fréquemment réimprimé sous le titre de Morale de l’Enfance ; Essai sur les mœurs de la fin du xvme siècle (1794) ; les Révolutions du globe (1797) ; Primerose (1797) ; Clémence de Lautrec (1798) ; Zélomir (1800) ; Essai sur les constructions rurales économiques (1824), etc. On lui doit, en outre, des mémoires : Sur les béliers mérinos (1807) ; Sur la monte (1813) ; Sur l’agnelage (1815) ; Sur la théorie des assolements (1822-1823), etc.

MORÉLIE s. m. (mo-ré-Il —de Morel, nom propre). Erpét. Genre d’ophidiens, du groupe des pythons, comprenant une seule espèce qui habite la. Nouvelle-Hollande.

— Bot. Genre de plantes, de la famille des rubiaeées, établi pour des arbrisseaux de la Sénégambie.

MOItELL (Juliana), femme savante espagnole, née à Barcelone en 1594, morte à Avignon en 1653. Son père, qui était un riche négociant, la fit élever avec soin. À douze ans, elle parlait déjà six langues différentes. Morel), obligé de quitter l’Espagne, vint s’établir à Lyon avec sa fille en 1606. Ce fut là qu’en 1607 Juliana soutint publiquement, en hébreu, en grec et en latin, des thèses de philosophie, de physique et de morale. Mais, aussi belle que savante, elle excita de violentes passions et fut enlevée à quatorze ans par un nommé La Cassaigne, de Nîmes. Revenue peu de temps après chez son père, elle éprouva de sa part toutes sortes de mauvais traitements, qui n’interrompirent pas cependant ses travaux, car Moreil partit avec elle pour Avignon, où il voulait la faire recevoir doctoresse es lois. Juliana, ayant réussi à tromper la vigilance de son père, s’enferma en 1010 dans le couvent des religieuses de Sainte-Praxède, où elle mourut. Elle a écrit des hymnes, des cantiques, quelques ouvrages de piété et traduit en français le Traité delà vie spirituelle de saint Vincent Ferrier (1617, in-so).

MORELL (André), numismate suisse, né à Berne en 1640, mort à Arnstadt en 1703. L’étude de l’histoire développa son goût pour la numismatique et, grâce à sa mémoire prodigieuse, à sa rare pénétration, il devint un des plus savants numismates de son siècle. S’étant rendu à Paris en 1680, il fut admis dans la société de savants et de gens de lettres que le duc d’Aumont réunissait chez lui, s’y lia avec Spanheim et entreprit, d’après son conseil, un grand travail sur les médailles des anciens. En 1683, il publia, sous le titre de Specimen universæ rei nummariæ antiquæ, un essai de ce grand ouvrage, dont il avait gravé lui-même les planches. Ce travail lui valut, peu après, d’être adjoint à Rainssant pour mettre en ordre le cabinet des médailles. Ce fut avec une ardeur infatigable que Morell se livra à la classification et à l’arrangement de la riche collection confiée à ses soins ; mais, lorsque son travail fut terminé, on tarda à lui donner la récompense qui lui avait été promise. Indigné, il se plaignit avec vivacité, fut mis à la Bastille par ordre de Louvois et ne fut relâché qu’après un emprisonnement de trois ans, sur les réclamations du canton de Berne, en 1691. Morell retourna alors dans sa ville natale, après avoir refusé la place de conservateur des médailles que Louis XIV lui offrit, se rendit en 1694 à Arnstadt et devint conservateur du riche cabinet de médailles du comte de Schwartzbourg. C’est dans cette ville qu’il passa les dernières années de sa vie. Morell ne put parvenir à se procurer les fonds nécessaires pour la publication de son grand ouvrage sur les médailles anciennes, ouvrage immense que, du reste, il n’eut pas le temps de terminer. Outre l’ouvrage précité et quelques lettres, on a de Morell : Thesaurus Morellianus, sive familiarum romanarum numismata omnia (Amsterdam, 1734,2 vol. in-fol.) ; Thesaurus Morellianus, sive commentaria in XII priorum imperatorum romanorum numismata (Amsterdam, 1752, 3 vol. in-fol.), ouvrages publiés par Havercamp.

MORELL (Thomas), philologue anglais, né à Eton, comté de Buckingham, en 1703, mort en 1734. Il prit le diplôme de docteur en théologie, remplit diverses fonctions ecclésiastiques et consacra la plus grande partie de sa vie à l’étude. C’était un excellent helléniste. Nous citerons de lui : Poems on divine subjects (Londres, 1832, in-8o) ; Hope-, essai poétique (1745) ; Thésaurus grunx poeseos, sive lexicon grmeo-prosodiacum (Eton, 1762, in-4o), travail neuf et utile, mais dans lequel Moreil eut le tort de ne pas indiquer la quantité métrique, etc. Cet érudit a écrit les paroles des oratorios de Haendel, donné de bonnes éditions des Contes de Canterbury, par Chaucer (Londres, 1737), de plusieurs tragédies d’Euripide avec des scolies (1748) ; une traduction des Épîtres de Sénèque (1787) ; dos Notes et annotations sur ^’Entendement humain de Locke (1794), etc.

MORELLA, autrefois Bisgarri, ville et municipalité d’Espagne, province et à 60 kilom, N. de Castellon-de-la-Plana, chef-lieu de juridiction civile ; 6,530 hab. Fabrication de draps, huile, teinturerie. Cette ville est très-pittoresquement située sur les pentes d’une

montagne escarpée, presque isolée au milieu d’un cirque de hauteurs. Cette montagne est couronnée par un énorme rocher inaccessible qui porte une forteresse imposante dominant de deux ou trois fois leur hauteur les clochers de la ville. Cette forteresse est remarquable par un puits d’une grande profondeur et par des souterrains creusés dans le roc, qui servent de magasins. La ville est, en outre, ceinte de solides murailles flanquées de tours.

Morella, considérée de tout temps comme une des clefs de l’Aragon, fut occupée en 1810 par le général Montmarie et elle resta au pouvoir des Français jusqu’en 1813. Pendant les dernières guerres civiles, Cabrera surprit la citadelle de Morella et y soutint avec succès une série d’attaques de la part des troupes de la reine. Espartero réussit à s’en emparer en 1S40, après lui avoir envoyé près de 20,000 projectiles.

MORELLE s. f. (mo-rè-le — rad. moreau, dont le fém. est marelle). Bot. Genre de solanées. Il Morelle tubéreuse, Pomme de terre. Il Morelle grimpante, Vigne de Judée, il Grande morelle des Indes ou à grappes, Phytollaque à dix étamines. [I Morelle des Indes, Herbe delà laque. H Morelle du Canada, Méehoacan. [I Morelle furieuse ou marine, Belladone commune. Il Morelle à quatre feuilles, Parisette. il Morelle de muraille, Pariétaire.

— Arboric. Douce morelle, Pomme à cidre de la haute Normandie, appelée aussi durepeau. || Douce morelle d’Aumale, Autre variété de pomme à cidre.

— Ornith. Nom vulgaire d’une foulque.

— Icbthyol. Nom vulgaire du véron.

■— Encycl. Bot. Le genre morelle se compose de plantes herbacées et arborescentes, qui croissent dans les parties tropicales et tempérées des divers continents. Les feuilles sont simples, entières ou divisées ; les fleurs sont le plus souvent blanches ou violacées, . rarement jaunes, ordinairement assez grandes et très-variables pour leur groupement et leur mode d’insertion sur la tige. Les caractères botaniques sont : un calice de cinq à dix lobes ; une corolle de cinq à dix pétales ; de quatre à dix étamines à. anthères conniveutea enlifli des fruits en baie à ovules nom MORE

breux. Parmi les centaines d’espèces que renferme le genre, nous ne nous occuperons que de celles, fort peu nombreuses, que recommande leur importance alimentaire.

L’espèce la plus intéressante du genre au point de vue économique, la morelle tubéreuse, sera traitée à part (v. pommede tbrre). Il en est de même de la morelle mélongène (v. aubergine et mr-.ongene), de la morelle fanx-piment (v. cerisette), de la morelle douce-amère (v. douce-amère).

La morelle noire (solanum nigrum), vulgairement morelle, mourelle, crève-chien, est une plante fort commune dans les lieux cultivés, le long des enclos, etc. Elle est glabre, d’un vert sombre ; sa tige est herbacée, rameuse, anguleuse ; ses feuilles sont ovales, dentées ; ses fleurs petites, blanches, et ses fruits sont des baies noires à leur maturité. La morelle noire, malgré son odeur musquée, est utilisée depuis l’antiquité comme plante alimentaire dans certaines contrées ; ses feuilles perdent en effet, par la cuisson, les principes nuisibles qu’elles renferment et peuvent être mangées comme les épinards ; Ses fruits, bien que regardés comme très-suspects, sont inoffensifs, d’après le témoignage de M. Duvat. En médecine, cetto

plante est employée comme narcotique léger, sédatif, et en cataplasme.

La morelle faux-quinquina (solanum pseudoquina) se fait remarquer par son amertume extrême et par les, propriétés fébrifuges de son écorce. Elle forme un petit arbre sans épines ; ses feuilles sont oblongues, aiguës, glabres en dessus, un peu poilues en dessous ; ses fruits, ou baies globuleuses, sont réunis en grappes courtes.


MORELLET (André), littérateur et philosophe français, né à Lyon le 7 mars 1727, mort à Paris le 12 janvier 1819. Il fit ses études chez les jésuites de Lyon, puis vint à Paris et fit sa théologie à la Sorbonne (1748-1752). Ce fut là qu’il connut Turgot et Loménie de Brienne. Vers la même époque, par l’intermédiaire de l’abbé de Prades, il entra en relation avec Diderot, qui le produisit dans le monde philosophique. Mais Morellet cessa de le fréquenter lorsqu’il quitta la Sorbonne, en 1752, pour devenir précepteur du fils de M. de La Galaizière, chancelier de Lorraine, et, peu après, il partit pour l’Italie avec son élève. Sa première œuvre littéraire est un opuscule intitulé : Petit écrit sur une matière intéressante (1756), qui promettait un adepte de talent aux encyclopédistes. C’était un pamphlet où, sous prétexte de défendre les protestants persécutés par l’Église et les jansénistes du parlement, il se moquait agréablement des mœurs du clergé et des croyances catholiques. Diderot et d’Alembert furent enchantés de leur néophyte. On lui offrit immédiatement de collaborer à l’Encyclopédie, ce qu’il accepta. Ses patrons lui donnèrent à faire des articles de théologie et de métaphysique. Quelques-uns, par exemple les articles Fatalité, Figures, Fils de Dieu, Foi, Fondamentaux (articles), méritent encore d’être cités. Il s’occupait en même temps des arts industriels, et un nouvel opuscule : Réflexions sur les avantages de la fabrication et de l’usage des toiles peintes (1758), provoqua de la part du gouvernement une décision conforme à ses vues. Pendant son voyage en Italie, l’abbé Morellet avait rencontré dans une bibliothèque privée le Directorium inquisitorum. Il en publia, avec l’autorisation de M. de Malesherbes, un extrait sous le titre de Manuel des inquisiteurs (1762, in-12). Depuis son retour à Paris, il était admis dans les salons les plus courus, notamment chez Mme  Geoffrin, où se réunissaient les gens de lettres et les gens du monde les plus distingués du temps, et sa conversation spirituelle y était fort goûtée.

Lorsque Palissot eut fait paraître sa comédie intitulée : les Philosophes, dans laquelle il attaquait avec une ardeur venimeuse l’école encyclopédique, l’abbé Morellet se chargea de lui répondre, dans un écrit plein de verve spirituelle et mordante : la Préface de la comédie des Philosophes (1760), qui eut un énorme succès. Mais un trait décoché en passant à la princesse de Robecq, ennemie des philosophes, et l’envoi de la brochure à cette dame par Palissot, comme de la part de l’auteur, valurent à celui-ci deux mois de séjour à la Bastille, d’où le tira l’intervention de la maréchale de Luxembourg, intéressée par J.-J. Rousseau en faveur de Morellet.

Au sortir de prison, l’abbé philosophe put se poser en martyr et n’y manqua point : sa réputation était faite. Le public le lisait ; l’élite de la société le choyait, et il trouvait un ami dévoué dans le baron d’Holbach, dont il devint un des hôtes assidus.

En 1766, l’abbé Morellet publia une bonne traduction du Traité des délits et des peines de Beccaria. Les travaux économiques qu’il publia vers la même époque contribuèrent activement à la suppression du privilège de la compagnie des Indes en 1769. Il mettait au jour presque en même temps le Prospectus d’un nouveau dictionnaire du commerce. Vingt ans de travail, employés à la rédaction de cette œuvre importante ou à la réunion des matériaux nécessaires, furent infructueux, car l’auteur dut abandonner l’entreprise quand la Révolution française éclata. Cette besogne ardue ne l’empêchait pas d’intervenir chaque année dans les querelles littéraires et