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même à l’éloquence quand il s’agit de repousser l’horrible accusation d’avoir elle-même corrompu son fils dans la tour du Temple : « La nature se refuse à répondre à une pareille question faite à une mère : j’en appelle à toutes celles qui sont ici ! »

Cette accusation, reproduite cyniquement par Hébert dans son témoignage, mais qui figurait déjà dans l’acte d’accusation, était basée sur des déclarations signées par le jeune dauphin et qui sont aux Archives nationales. Avait-on guidé la main de cet enfant ? C’est ce que beaucoup d’écrivains ont affirmé, mais, il faut le dire, sans fournir aucune preuve. On sent bien qu’il est impossible de se prononcer avec une certitude absolue, et nous nous hâtons d’abandonner ce sujet pénible.

Sur la déclaration unanime du jury, Marie-Antoinette fut condamnée à la peine de mort le 16 octobre, à quatre heures du matin. Elle entendit son arrêt avec impassibilité. Reconduite à la Conciergerie, elle reçut la visite d’un curé constitutionnel, mais supporta sa présence sans vouloir accepter son ministère. Après avoir dormi un instant et pris quelque nourriture, elle fut conduite au supplice à onze heures du matin. Elle était pâle et son visage avait subi une profonde altération ; mais elle mourut avec fermeté.

En ce résumé rapide et tel que nous le permettait notre cadre, nous avons forcément négligé beaucoup de détails, qui d’ailleurs n’ajouteraient rien à l’ensemble du récit, et qu’en outre on retrouvera en partie ailleurs. V. Autrichienne (l'), collier, Lamballe, Louis XVI, etc.

En présence de cette grande infortune, nous ne ressentons plus que la pitié, et, comme nous l’avons dit plus haut, nous pensons que la République eût pu sans danger accorder le pardon des injures anciennes à cette malheureuse femme, désormais impuissante, et se contenter de son bannissement. Quant à sa vie et à son rôle politique, nous n’avons, en terminant, aucune atténuation à apporter au jugement que nous avons soumis au lecteur au cours de cet article. Il faut choisir : ou la reine, ou la patrie et la Révolution. Les panégyristes ne nous laissent pas d’alternative et l’histoire ne nous en laisse pas non plus.

Eh bien, sans vouloir jeter une pierre de plus sur le cercueil de cette pauvre étrangère, qui a payé ses grandeurs et ses perfidies par quelques années de cuisantes souffrances et par une fin tragique, nous restons sans hésiter du côté de la nation et de la liberté, du côté de la Révolution, notre mère et la mère du genre humain.

Les ouvrages relatifs à Marie-Antoinette formeraient une bibliothèque volumineuse. On en trouvera la fastidieuse énumération dans les recueils bibliographiques. Les pamphlets surtout sont en nombre incalculable. Ceux d’avant la Révolution émanaient, comme nous l’avons dit, des gens de cour ; beaucoup sont d’une révoltante obscénité ; la Bibliothèque nationale en possède un grand nombre, dont beaucoup dans cette partie nommée l’Enfer, où sont enfouis les ouvrages qu’on ne communique pas. Ceux d’après 1789 sont surtout inspirés par la haine politique.

Quant aux biographies, on en connaît également beaucoup. Sans parler de celles qui ont le caractère de libelles, nous citerons : Histoire de Marie-Antoinette, par Montjoie, (1791, 2e édit. ; 1814, 2 vol. in-8o) ; Vie de Marie-Antoinette (attribuée à Babié) [Paris, 1802, 3 vol. in-12] ; Mémoires secrets et universels des malheurs et de la mort de la reine de France, par Lafont d’Aussonne (1824) ; Mémoires concernant Marie-Antoinette, par Weber, frère de lait de la reine (Londres, 1806, 3 vol. in-8o) ; enfin Mémoires de Mme Campan, qui, comme les précédents, peuvent passer pour de véritables ouvrages biographiques. Tous les ouvrages que nous venons de citer sont écrits dans un esprit exclusivement royaliste, ainsi que les biographies publiées de nos jours, l’Histoire de Marie-Antoinette, par Edmond et Jules de Goncourt ; Marie-Antoinette, par M. de Viel-Castel ; la Vraie Marie-Antoinette, par M. de Lescure, qui ne sont que des panégyriques romanesques, sans aucune espèce de critique. En réalité, il n’existe pas encore une biographie sérieuse et vraiment historique de la reine. Cependant nous devons signaler une étude intéressante de M. Geffroy, publiée dans la Revue des Deux-Mondes du 1er juin 1866 : Marie-Antoinette d’après les documents authentiques de Vienne.

On a publié de nos jours un très-grand nombre de lettres de la reine, recueillies un peu partout, dans les archives de famille et dans les archives publiques, en France et à l’étranger. Citons le recueil de M. d’Hunolstein ; la volumineuse collection de M. Feuillet de Couches, Louis XVI, Marie-Antoinette et Mme Élisabeth, dont le sixième volume vient de paraître (1873) ; enfin les deux recueils de M. Alfred Ritter von Arneth, Marie-Thérèse et Marie-Antoinette (Vienne et Paris, in-8o), et Marie-Antoinette, Joseph II et Lëopold II  ; ces deux dernières collections sont tirées, comme nous l’avons dit, des Archives impériales de Vienne.

Ces publications sont d’un grand intérêt et contiennent beaucoup de renseignements historiques ou simplement anecdotiques. Mais celle de M. d’Hunolstein, et surtout celle de M. Feuillet de Conches, ont été l’objet de vives et longues polémiques qui pourraient figurer dans l’histoire des grandes querelles littéraires de notre temps. On a contesté l’authenticité du plus grand nombre des lettres dont se composent ces recueils. Nous ne pouvons, on le comprend, entrer dans le détail de ces discussions, soulevées d’abord par le célèbre professeur allemand M. de Sybel et auxquelles prirent part MM. Sainte-Beuve, Geoffroy et d’autres critiques. M. Feuillet de Conches se défendit vigoureusement ; mais il est resté plus que des doutes sur l’authenticité de bon nombre de ces lettres, puisées un peu partout et reçues de toutes mains. Il paraît certain que le célèbre collectionneur a été souvent trompé. « Faites la part du feu, lui disait Sainte-Beuve ; si vous avez été induit en erreur pour une vingtaine ou une trentaine de lettres (ce n’est pas assez dire), dites-le et reconnaissez—le franchement… Pour un grand nombre d’esprits, et de bons esprits, la question d’authenticité soulevée pour une partie de ces lettres n’est plus douteuse et a été tranchée. »

Quant aux deux recueils de Vienne, leur authenticité est incontestable et incontestée. C’est là seulement que nous avons puisé.

Nous pensons qu’on ne doit employer les autres qu’avec réserve, jusqu’à ce qu’un triage sévère ait été définitivement fait par l’érudition.

Marie-Antoinette (MÉMOIRES SUR LA VIE PRIVÉE DE), par Mme Campan (Paris, 1822, 3 vol. in-8o). Ces souvenirs remontent aux dernières années du règne de Louis XV, vers 1767, et ne s’étendent que jusqu’au 12 août 1792. Agréée comme lectrice de Mesdames, à l’âge de quinze ans, Mme Campan ne pouvait être mieux placée pour apprendre à connaître et à juger la cour. Ses observations, dans les premières années de son séjour auprès de la famille royale, sont peut-être frivoles, mais elles sont justes. Ses souvenirs sont très-peu favorables à la mémoire de Louis XV. Elle nous apprend comment ce prince égoïste et dissolu cassait ses œufs, de quels noms singuliers il appelait ses filles, savoir : Coche, Loque, Graille, Chiffe. Honorée des bontés de Mesdames, leur lectrice les peint avec bienveillance, mais sans flatterie ; elle ne dissimule point les singularités de leur caractère. En traçant de petits tableaux plaisants, ou bien en racontant des anecdotes piquantes, Mme Campan montre qu’elle est femme d’esprit et qu’elle écrit avec naturel. Mais l’intérêt de son ouvrage augmente quand elle y introduit Marie-Antoinette, qui en devient le personnage dominant. Brillante de jeunesse et de grâce, la dauphine renouvelle l’atmosphère de la triste cour de Versailles, ennuyée de ses fêtes, divisée par les intrigues. Accueillie par des transports de joie, la jeune reine est poursuivie plus tard, dans son propre palais, par des menées sourdes et par de vives animosités. Mme Campan, qu’elle avait attachée à son service, a laissé aux historiens le côté extérieur, officiel, politique de cette carrière si inégale ; elle se tient à la vie intérieure, aux pensées secrètes, aux sentiments de l’âme, aux confidences intimes, aux détails familiers, aux douleurs ignorées. C’est elle, la femme de chambre investie d’une confiance entière, qui nous fait connaître les vœux, les espérances, les goûts de la dauphine dans ses jours de bonheur et de gloire, ses regrets d’avoir perdu l’affection du peuple ; puis, dans ses dernières années, les outrages dont elle est abreuvée, ses pleurs versés dans la solitude, ses angoisses sans répit, ses douleurs sans mesure. Mme Campan affirme que Marie-Antoinette n’était pas avide du pouvoir. Au moment où elle apprend la mort de Louis XV, elle tombe à genoux et dit à son mari : «  Ô mon Dieu ! nous régnons trop tôt ! » Au sujet de l’affaire du collier et du procès du cardinal de Rohan, Mme Campan s’attache à justifier complètement la mémoire de la malheureuse reine. Elle la montre sans cesse sous le jour le plus favorable. « Jamais, dit-elle, dans aucun rang, dans aucun âge, je n’ai trouvé de femme d’un naturel aussi séduisant que Marie-Antoinette ; à qui l’éclat éblouissant de la couronne laissât un cœur aussi tendre ; qui, sous le poids du malheur, se montrât plus compatissante aux malheurs d’autrui ; je n’en ai pas vu d’aussi héroïque dans le danger, d’aussi éloquente dans l’occasion, d’aussi franchement gaie dans la prospérité. » Ces mots suffisent pour faire apprécier l’esprit de l’ouvrage, les sentiments qui l’ont dicté.

Même après la publication de ces confidences, quelques esprits ont persisté à croire que l’auteur avait livré les papiers de la famille royale au gouvernement révolutionnaire ; ils expliquent son affectueuse vénération pour sa bienfaitrice par un habile calcul de prudence ; en tout cas, ils maintiennent que la narratrice ne dit pas tout, et que le premier éditeur, accédant au vœu de hauts personnages, a fait sur le manuscrit des suppressions. Mais jusqu’ici aucune preuve irréfutable n’a été donnée à l’appui de ces allégations. Les Mémoires de Mme Campan sont écrits avec grâce et, bien que le style manque de force et de relief, ils sont d’une lecture agréable.


MARIE-LOUISE, impératrice des Français, fille de l’empereur d’Autriche François Ier, née à Vienne en 1791, morte en 1847. « C’était, dit Lamartine, une belle fille du Tyrol, les yeux bleus, les cheveux blonds, le visage nuancé de la blancheur de ses neiges et des roses de ses vallées, la taille souple et svelte, l’attitude affaissée et langoureuse de ces Germaines qui semblent avoir besoin de s’appuyer sur le cœur d’un homme ; les lèvres un peu fortes, la poitrine pleine de soupirs et de fécondité, les bras longs, blancs, admirablement sculptés et retombant avec une gracieuse langueur… Nature simple, touchante, renfermée en soi-même, muette au dehors, pleine d’échos au dedans, faite pour l’amour domestique dans une destinée obscure. » Ce fut sur cette princesse, âgée de dix-huit ans, élevée par sa famille dans la haine de la France et du despote qui la gouvernait, que Napoléon jeta les yeux lorsque, désireux d’avoir un héritier, il résolut de divorcer avec Joséphine. Vainqueur de l’Autriche à Wagram, maître de Vienne, il demanda ou plutôt exigea la main de l’archiduchesse, qui lui fut accordée. Le 1er avril 1810, le mariage civil de Napoléon et de Marie-Louise fut célébré à Saint-Cloud, et, le lendemain, eut lieu dans la grande galerie du Louvre le mariage religieux. Bien que cette union parût offrir une chance de plus pour la conclusion de la paix générale que la France désirait ardemment depuis si longtemps, elle fut mal accueillie par le peuple, très-attaché à Joséphine et qui voyait avec regret une Autrichienne monter sur le trône. Après les fêtes splendides auxquelles donna lieu ce mariage, Napoléon fit visiter à sa jeune épouse la Belgique et la Hollande. « Les premiers temps de cette union furent assez heureux, dit Mme de Brady. L’empereur, très-amoureux, négligeait tout pour sa nouvelle épouse ; l’impératrice, toujours réservée, fut d’abord sensible à ce tendre sentiment ; mais les mœurs françaises n’étaient point faites pour lui plaire et elle inspira bientôt à ceux qui l’entouraient et à la nation entière l’indifférence qu’elle-même ressentait. Dans la conversation, sa réserve allait jusqu’à la froideur et elle avait un air constamment ennuyé ». Le 20 mars 1811, Marie-Louise, à la grande joie de Napoléon, lui donna un fils, salué du nom de roi de Rome. Nommée régente toutes les fois que son époux s’absentait pour une campagne, elle montra dans l’exercice de ses hautes fonctions une nullité absolue. Le 23 janvier 1814, Napoléon embrassa pour la dernière fois Marie-Louise et son fils, et marcha contre les armées coalisées qui venaient d’envahir la France. Lorsque, le 29 mars, les alliés approchèrent de Paris, Marie-Louise, obéissant aux instructions péremptoires de Napoléon, qui avait déclaré qu’il aimerait mieux voir sa femme et son fils au fond de la Seine qu’entre les mains de l’ennemi, quitta la capitale, gagna Blois avec le roi de Rome, refusa de suivre Joseph et Jérôme au delà de la Loire, se rendit, après l’abdication de Napoléon, à Orléans, d’où elle gagna Rambouillet avec le prince Esterhazy, y reçut la visite de son père l’empereur François Ier, et partit pour l’Autriche le 25 avril. Pendant les Cent-Jours, on la garda à vue dans son palais et on la sépara de son fils, qu’elle ne devait plus revoir qu’au moment de la mort. Elle eut, pour la dédommager du trône qu’elle perdait, la souveraineté viagère des principautés de Parme, Plaisance et Guastalla, dont elle prit possession en 1816 et qu’elle gouverna avec modération. Marie-Louise entretint des intrigues avec un obscur général autrichien, le comte de Neiperg, se maria secrètement avec lui après la mort du captif de Sainte-Hélène, et en eut trois enfants. En 1831, une insurrection la força de quitter ses États, où, grâce à l’intervention de l’Autriche, elle revint quelque temps-après. Le duc de Lucques lui succéda après sa mort.

Jusqu’à la fin de sa vie, Napoléon se fit une illusion complète sur les sentiments de Marie-Louise à son égard. « Soyez bien persuadés, disait-il quelque temps avant de mourir, que si l’impératrice ne fait aucun effort pour alléger mes maux, c’est qu’on la tient environnée d’espions qui l’empêchent de rien savoir de tout ce qu’on me fait souffrir, car Marie-Louise est la vertu même. » Il disait un autre jour : « J’ai été occupé en ma vie de deux femmes très-différentes : l’une (Joséphine) était l’art et les grâces ; l’autre (Marie-Louise), l’innocence et la simple nature. » En prononçant ces paroles, il ne se doutait guère que Marie-Louise, après avoir consenti sans murmurer à se séparer complètement de son fils, oubliait dans d’indignes affections celui qui expiait son despotisme et son ambition démesurée sur le rocher de Sainte-Hélène.


MARIE-AMÉLIE DE BOURBON, reine des Français, née à Caserte en 1782, morte à Claremont en 1866. Elle était fille de Ferdinand IV, roi des Deux-Siciles, et de Marie-Caroline, si célèbre par sa haine contre les Français et par ses déportements. Elle fut élevée avec soin par Mme d’Ambrosio, suivit sa mère à Païenne, en 1798, lorsque les Français conquirent Naples, passa de là à Vienne, où elle resta deux ans, et retourna en 1802 à Naples, qu’elle quitta bientôt pour aller en Sicile. C’était une princesse bonne, pieuse, douée de toutes les vertus domestiques. Le duc d’Orléans, alors banni de France, vit Marie-Amélie, l’aima, en fut aimé et l’épousa à Palerme le 25 novembre 1808. De cette union, qui fut constamment heureuse, naquirent un grand nombre de princes et de princesses, qui durent en partie aux soins vigilants de leur mère une éducation libérale. La Restauration rouvrit au duc d’Orléans les portes de sa patrie. Arrivée en France en 1814, la duchesse y séjourna peu de temps, se rendit en Angleterre et revint à Paris en 1817. Lorsque éclata la Révolution de 1830, elle éprouva, dit-on, une certaine répugnance à monter sur le trône, car elle craignait qu’on ne vît dans son mari qu’un usurpateur. Devenue reine des Français, elle se tint complètement à l’écart des affaires politiques, et resta ce qu’elle avait toujours été, une épouse irréprochable, une mère tendre, entièrement occupée de sa famille, une femme compatissante et d’une inépuisable charité. Cette princesse se vit cruellement frappée dans ses affections les plus chères. En 1839, elle perdit la princesse Marie, qui s’était fait connaître comme un sculpteur distingué et en 1842 elle eut la douleur de voir expirer dans ses bras son fils aîné, le duc d’Orléans. Lorsque la révolution du 24 février 1848 eut renversé la monarchie de Juillet, Marie-Amélie accompagna seule Louis-Philippe en Normandie, puis en Angleterre, et se fit remarquer par son attitude courageuse et digne ; à partir de ce moment, sous le nom de comtesse de Neuilly, elle habita le château de Claremont, où elle ferma, en 1850, les yeux de celui dont, pendant quarante ans, elle avait été la compagne dévouée. Bien que, comme par le passé, elle se tînt à l’écart des affaires politiques, elle manifesta, dit-on, le désir de voir s’opérer un rapprochement entre sa famille et le duc de Bordeaux, représentant de la branche aînée de Bourbon. Elle avait eu de son mariage cinq fils, le duc d’Orléans, le duc de Nemours, le prince de Joinville, le duc d’Aumale, le duc de Montpensier, et trois filles, la princesse Marie, la princesse Louise, qui devint reine des Belges, et la princesse Clémentine, mariée au prince de Saxe-Cobourg. M. Trognon a publié une Vie de Marie-Amélie, reine des Français (1871, in-8o).


MARIE, surnommée Marie-roi, reine de Hongrie, fille de Louis d’Anjou, roi de Hongrie et de Pologne, née en 1370, morte à Bude en 1395. Elle avait douze ans lorsque, à la mort de son père, elle fut proclamée roi de Hongrie (1382), pendant que sa sœur Hedwige recevait de son côté la couronne de Pologne. Pendant la minorité de la jeune reine, la régence fut confiée à sa mère Élisabeth, princesse artificieuse, qui accorda toute sa confiance au palatin Gara, non moins artificieux et avide de pouvoir qu’elle-même. La façon déplorable avec laquelle gouvernèrent ces deux personnages excita le mécontentement des grands, particulièrement de la puissante famille Horwathi, et amena une vive fermentation dans la Dalmatie. À l’appel des magnats mécontents, Charles le Petit, roi de Naples, se rendit à Agram avec une armée, sous le prétexte ostensible de rétablir la paix en Hongrie, mais en réalité pour s’emparer de la couronne (1385). À cette nouvelle, Élisabeth s’empressa de faire conclure le mariage de sa fille Marie avec Sigismond de Luxembourg, qui devait monter sur le trône impérial, et qui alla chercher des troupes et de l’argent en Bohême ; puis elle se rendit avec Marie à Bude, auprès du roi Charles, pour connaître ses dispositions. Ce prince les tira rapidement d’incertitude en se faisant proclamer roi de Hongrie et en exigeant que Marie renonçât au trône. La jeune princesse voulut résister ; mais sa mère lui conseilla de céder à la violence et, qui plus est, la fit assister au couronnement de Charles. Quelques jours après, Charles était assassiné par un sicaire d’Élisabeth et de Gara, les italiens composant la garde royale étaient massacrés et Marie était de nouveau proclamée reine de Hongrie. Ce meurtre ne devait pas rester longtemps impuni. Élisabeth ayant conduit la jeune reine en Croatie pour y rétablir l’ordre, Ladislav Horwathi fondit sur l’escorte royale, fit décapiter Gara, noyer Élisabeth sous les yeux de sa fille et conduisit la jeune reine prisonnière à Novigrod, d’où elle fut envoyée à Naples pour être livrée à la vengeance de la veuve de Charles. Mais les Vénitiens, qui s’étaient prononcés en faveur de Marie, établirent une croisière sur les bords de la Dalmatie, firent prisonnier Jean Horwathi, geôlier de la reine, et délivrèrent cette princesse (1387). Après une année de captivité, Marie arriva à Agram, où elle trouva son époux, Sigismond, qui, à la têt d’une armée levée en Bohème, était rentré en Hongrie pour y comprimer l’insurrection. Lorsque les deux époux furent arrivés à Ofen, la diète décréta qu’ils régneraient conjointement ; mais Marie abandonna complètement à son mari la direction des affaires. Sigismond s’attacha à réduire les rebelles, s’empara de Ladislav Horwathi, qu’il fit supplicier d’une manière effroyable, pour venger la mort d’Élisabeth, et battit complètement, en 1392, Étienne, prince de Moldavie. Quant à Marie, qui eut beaucoup à souffrir des infidélités de son mari, elle mourut à vingt-cinq ans.


MARIE D’AUTRICHE, reine de Hongrie, puis gouvernante des Pays-Bas et sœur de Charles-Quint, née à Bruxelles en 1503, morte en Espagne en 1558. Elle épousa en 1521 Louis II, roi de Hongrie, qui fut tué à