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portera, plus vers.une-astre contrée ; relie va mourir là, ot sp rejoindre nu Dieu gui lui pardonnera, parce qu’elle a beaucoup aimé. • Suivant Gustave/Planche, « cette.Madeleine serait plus belle sur la toile qu’en carrare, et l’impression qu’on éprouve en la.regardant rappelle bjen plus Corrége que Phidias. ». Commandée à Canpva par un prélat italien, Mçr, Priuli, j cette-statue, devint la propriété d’un, Français, .-M. Juliot, qui^la céda au comte darSommairiva. Elle, a été longtemps admirée, à Paris, dans la galerie, de ce. dernier, amateur.- Quatremère de Quincy, d’ans son ilivre sur rCanova, ’ parle avec enthousiasme, de cet ouvrage. : « Il.faut’y reconnaltrej dit-ilj abstraction faite.de toute analyse sentimentale, unelsorte d’exécution magique, un je ne sais quoi de fondu dans, les formes, qui rsemblejexelure. la- réalité ; d’emploi d’un outil.» À ceux qui. ont reproché à Ganova. d’avoir, soit dans la manière dont, les ’cheveux, sont traités, soit’ dans, quelques autres, détails, affecté le goût et l’harmonie de la couleur ! en. peinturé, Quutr.emèrei répond : « Oui, Raccorderai ; qu^il.entre, quelque chose. de ce sentiment dans la Madeleine et la pliif part des autres ouvrages de l’auteur. Mais il néfaut pas sien étonner, quand ou sait que Canova aussi.fuf peintre et singulièrement porté au charmé, de.l’harmonie. Qui, nous dira, d’ailleurs, si ce n’est pas à ce senti- ; ra^nt-là même qu’il dut cette grâce empreinte dans toutes ses œuvres, ces. formes moelleuses et ce travail flatteuivdu, marbre qui distingue,

— toutes ses statues ? ». .., ., ,.

Madeleine (ANÇtÉN’COUVENT DE La). V. Ma-

DELÔNNETTE.

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Madeleine (la), < église de Paris, située sur la place du même nom, à la jonction de la rue Royale et ’du boulevard des Capucines. Il.existait.encore.au xvmo siècle, dans le quartier, de la. Villerl’Evèque, une église paroissiale dédiée à sainte Marie-Madeleine, et dont-la première pierre.avait été posée, le 8 juillet 1659, par Anne-Marie-Louise d’Orléans, plus connue sous le nom de Mademoiselle. Mois le quartier de la Ville-l’Evèque s’étant considérablement accru, cette église devint bientôt insuffisante. Ce, fut alors que,par lettres patentes du rot du 6. février 1763, fut, ordonnée la-çoustruction d’une nouvelle église « à l’extrémité de la rue Royale, entre le rempart et la rue de Chevilly, • et qui serait dédiée comme l’ancienne à la Madeleine. Coûtant d’Ivry, architecte du duc d’Orléans, fut chargé de l’exécution, et Louis XV posa solennellement la première pierre du nouvel, édifice le 3 avril 1701. Lorsque Contant d’Ivry mourut (1777), le monument était déjà élevé à 15 pieds du sol ; mais le plan adopté par-lui étàitïoin de ressembler à ce que nous connaissons. Il avait notamment conçu un portique mesquin, qui fut jugé insuffisant, par. son successeur, 1 architecte Couture. Couture démolit donc une partie du travail dé Coutant.d’Ivry, .et substitua au portique abattu la magnifique colonnade avec fronton qui finit.par être exécutée, Mais avant cette exécution’ définitivéijûè de traverses !’ Les cô-’ lonnes, au nombre de douze, étaient déjà dressées jusqu’aux chapiteaux quand la Révolution éclata. Les travaux durent être suspendus. Jusqu’en 1799 il n’exista, les historiens en font foi, que le péristyle, le portail principal et les deux murs latéraux, sans voûte ni couverture. Enfin MM. de Gisors et Vaudoyer > architectes, prirent l’initiative d’un projet de reprise des travaux. Le premier proposa au gouvernement de faire, du monument terminé, une bibliothèque nationale ; M..Vaudoyer voulait en faire un édifice dans le genre du Panthéon de Rome. Les deux projets furent, renvoyés aux bureaux, où ils étaient encore quand l’Empire succéda au Consulat et quand parut le décret du 2 décembre 1806, daté de Posen. Ce décret ordonna d’établir sur l’emplacement de la Madeleine un monument dédié à la grande armée, portant sur le fronton : L’empereur Napoléon à. la grande armée ! d’inscrire à l’intérieur les noms dé tous ceux qui étaient morts sur les champs de.bataille, et les noms de.tous ceux qui. avaient fait partie de la grande armée, de représenter sur des basreliefs les colonels de chaque régiment groupés autour de leurs généraux, de réunir dans l’édifice les armures, drapeaux, statues, etc., conquis par la grande armée, etc.

Les bases ainsi posées, je décret ajoute que l’architecture va être mise de nouveau au concours, ’et qu’une somme annuelle do 100,000 francs sera affectée à sa construction et à son entretien. Sur 127 concurrents qui se présentèrent, l’Académie crut devoir décerner le prix à M. de Beaumont. Mais Napoléon voulut juger par lui-même, et se fit présenter les 127 plans. Or M. de Beaumont avait imaginé une véritable église, avec un style tout religieux. Napoléon rejeta le plan, annula la décision de l’Académie et, séduit par le projet de Pierre VIgnon, projet qui offrait un temple et non une église, il en ordonna immédiatement l’exécution (30 mai 1S07). On se mit à l’œuvre. Pondant que les travaux se poursuivaient activement, les trophées conquis sur l’ennemi étaient provisoirement déposés à l’hôtel des Invalides. Pour se conformer au plan do Vignon, on dut exhausser le sol et par" suite recommencer les fondations. Les constructions ytaient trei-jivuiicéus quand arriveront

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— lps désastres de 1814 et de 1815. On sait que l’ennemi nous enlova de nombreux trophées destinés à orner.le futur temple de la. Gloire. Une ordonnance du H février 1816 rendit au monument son titre primitif d’église de la Madeleine. Il était loin d’ailleurs à cettë-’épôque d’être en état de servir à sa nouvelle destination., On eut un instant l’idée d’y élever les mausolées expiatoires de Louis XVI, de Marie-Antoinette et de leur famille, L’idée fut ensuite abandonnée lorsqu’on eut décidé l’érection de la chapelle expiatoire. Les travaux, continués par Vigriori jusqu’en 1828,

; époque de sa mort, furent terminés par Iiuv.é.,

L’église de la Madeleine fut définitivement . consacrée le 4 mai 1842 par l’archevêque de Paris., La dépense totale nécessitée tant par la construction que par la décoration s’était élevééà 14,253,000 francs.

L’église de la Madeleine, en dépit de son attribution religieuse, n’est autre chose, extérieurement, qu’un véritable temple antique,

assez semblable à la Maison carrée défîmes. L’édifice est entouré de cqlonnes d’ordre corinthien, surmontées de riches chapiteaux : il mesure 102 mètres de longueur, et 140™,84 en comprenant les rampes et l’enceinte environnée d’une grilléde fer ; sa largeur est de 431n,50. Les colonnes extérieures ont l9m,50 de haut. À l’intérieur, des colonnes supportent également, la voûte. De. chaque côté de l’église court, au-dessus, une double rangée de tribunes, et dans, les bas-côtés des portiques on a taillé des hiiihes renfermant des statues. Le fronton méridional, porte une grande composition sculpturale due au ciseau de Lemaire et mesurant SS^S de long, sur 7m, 15 de hauteur à l’angle : au centre est le Christ, debout, ayant à ses pieds la Madeleine repentante ; à droite l’ange de miséricorde et l’Innocence, soutenue par la Foi et l’Espérance, sont suivis de la Charité protégeant deux pauvres enfants ; à gauche, l’ange des vengeances chasse tous les vices personnifiés, et l’extrémité du bas-relief est terminée fiar une figure précipitée dans l’abîme et sous aquelle on lit : Vs impiol (malheur à l’impie) en opposition avec la devise Ecce dies salutis qui termine.l’angle de droite. Au-dessous, sur le tympan, se lit l’inscription suivante :

D. p. M. SUB INVOCATIONS SANCTjE MAGDALENjE

(à Dieu très-bon, très-grand, sous l’invocation de sainte Madeleine). En pénétrant sous le portique principal (sous ce fronton), on.rencontre, à droite, la statue de Saint Philippepar Nanteuil ; à gauche, celle de Saint Louis pur le même. Le portique du nord, à fronton uni, est orné de quatre statues : à droite, Saint Matthieu par Desprez, Saint Marc par Lemaire ; à gauche, Saint Jean et Saint Luc par Ramey. La galerie de droite en renferme quatorze : Saint Gabriel par Duret, Saint Bernard par Husson, Sainte Thérèse par Feuohère, Saint ililaire par Huguenin, Sainte Cécile par Dumont, Saint Irènée par Gourdel, Sainte Adélaïde par Bosio neveu, Saint François de Salles par Molneeht, Sainte Hélène par Mercier, Saint Martin de Tours par Grevenieh, Sainte Agathe par Dan tan jeune, Saint Grégoire par Thérasse, Sainte Agnès par Duseigneur, Saint Raphaël par Dantan aîné. La galerie de gauche, quatorze également : Saint Michel par Raggi, Saint Denis par Debay fils, Sainte Anne par Desbœufs, Saint Charles Bor romée par Jouffroy, Sainte Elisabeth par Caillouette, Saint Ferdinand par Jaley, Sainte Christine par Valcher, Saint Jérôme par Larme, Sainte Jeanne de Valois par Guillot, Saint Ùrégoirede Valois par Maindron,5ai«(s Geneviève par Debay père, Saint Jean Clnysostome par Gœcther, Sainte Marguerite d’Écosse par Cauuois, l’Ange gardien par Bra. Enfin la frise qui court autour de l’édifice est toute sculptée d’anges, de médaillons et de guirlandes du meilleur travail.

La porto principale de la Madeleine est ouverte sous le fronton méridional. Elle est en bronze ciselé, et ses ciselures, ceuvre de Triquetti, représentent des scènes tirées des commandements de Dieu. Elle mesure 10n>)((3 de hauteur, sur5m,004 de largeur. L’intérieur de l’église offre cinq travées, surmontées, excepté la première, découpoles dorées. Les revêtements des murs sont en marbre. Les colonnes soutenant la galerie des tribunes, celles des petites chapelles sont d’ordre ionique, et revêtues également de marbre et d’or. La peinture joue aussi un grand rôle dans la décoration de la Madeleine : l’abside est couverte d’une grande composition de Ziegler ; l’Histoire du christianisme. Les six grands tableaux qui complètent cette décoration sont dus aux pinceaux de Signol, d’Abel de Pujol, de Schmitz, de Bouchot, de Léon Coigniet et de Couder. La Madeleine aux pieds du Christ, par ce dernier ; la Madeleine dans le désert, d’Abel de Pujol, et laMort de la Madeleine, de Signol, sont les plus remarquables. Parmi les sculptures, nous citerons celles des trois chapelles de la travée de droite : Sainte Amélie par Bra, la Sainte Vierge par Seurre, Sainte Ctotilde par Barye, et celles de la travée de gauche : Saint Vincent de Paul par- Raggi, le Christ par Darey et Saint Augustin par Etex. La chapelle des mariages possède un groupe en marbre blanc, dû au ciseau de Pradier : le M^ariage de la Vierge, et un autre groupe, de Rude, aussi eii marbre blanc, le Baptême de Jésus-Christ, orne la chapelle des fonts baptismaux. Donnons enfin un souvenir aux admirables bénitiers d’Antoniu Moine. Quant à

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l’autel principal, il est orné du Ravissement de la Madeleine, en marbre. C’est une fort remarquable composition.

Cette église possède un orgue, dû à M. Cavaillé-Coll, et qui passe pour un chef-d’œuvre, bien qu’il ne soit remarquable ni par l’ampleur de ses-proportions, ni par la majesté de sa structure, ni par.l’élégance architecturale de son buffet ; mais il est admirablement construit. Les innombrables parties de cette masse instrumentale sont coordonnées avec une rare intelligence, et, au point de vue de la.fraîcheur -des jeux, de la richesse de l’harmonie, c’est une œuvre achevée. Avec les. quarante-huit jeux dont il est seulement pourvu, l’orgue de la Madeleine acquiert une puissance de sonorité, possède une . suavité et une variété de mélodie qui laissent bien loin derrière eux les effets produits autrefois par des orgues en possession de soixanterdix ou quatre-vingts jeux. , La Madeleine est aujourd’hui la paroisse aristocratique par. excellence et la plus riche paroisse de Paris. Là ont lieu la plupart des mariages et des enterrements dont on parle. Cette faveur s’explique par la situation de cette église, placée en quelque sorte au point de jonction de trois quartiers également opulents ou nobles : le laubourg Saint-Honoré, le faubourg Saint-Germain et la Chausséed’Antin. Quant à l’église prise en elle-même, on s’aperçoit au premier coup d’oail que l’intention définitive qui a présidé à son édification n’a jamais eii en vue d’en faire un monument religieux. C’est un très-beau temple à l’extérieur, et à l’intérieur une splendide salle à deux galeries. Mais on n’y sent pas Dieu comme sous ces vieilles voûtes à arceaux de Saint-Germain-l’Auxerrois et de Notre-Dame. L’édifice, tout en devenant chrétien, a gardé comme un reflet théâtral de sa destination première.

MADELEINE DE’ PAZZI (sainte Marie-), religieuse italienne, née à Florence en 1566, morte en cette ville en 1607. Elle était fille de Camille Geri dé Pazzi, gouverneur de Cortone, et s’appelait Cuttici-îno. Élevée dans’ le monastère des hospitalières de Saint-Jean-le-Petit, elle tomba tout.enfant dans

une telle exaltation religieuse que, dès l’âge de dix ans, si l’on en croit un de ses biographes, « elle consacra sa virginité au Seigneur. » En 1584, malgré la volonté de ses parents qui voulaient la garder.auprès d’eux, puis la marier, Catherine prononça ses voeux dans un couvent de carmélites, et prit le nom de Marie-Madeleine- Elle exerça plusieurs charges dans son monastère, et elle était sous-prieure lorsqu’elle mourut. Le bruit ne tarda pas à courir que des miracles s’opéraient sur sa tombe, et, la crédulité aidant, on ne douta pas que l’intercession de Marie-Madeleine ne fût toute-puissante auprès de Dieu.

« Béatifiée le 8 mai 1626 par Urbain VIII, dit Baillet, Madeleine fut canonisée par Alexandre VII le 28 avril 1669, Outre les fêtes par lesquelles l’Église honore la sainte carmélite, on met encore au nombre des fêtes de cette sainte une dévotion publique qui se pratique à Florence, à Rome et en beaucoup d’autres endroits de l’Italie les cinq vendredis qui suivent le jour de sa canonisation : le premier de ces vendredis est destiné à honorer les prétendus stigmates de la sainte ; le second, ses fiançailles spirituelles avec Jésus-Christ, etc. Enfin on a inventé, une nouvelle fête de la sainte dans la ville et le diocèse de Florence, le 31 mai : c’est celle de la translation solennelle que l’on fit de son corps dans une chapelle neuve l’an 16S5. L’Église l’honore le 25 mai.

MADELEINE DE FRANCE, régente de Navarre, née en. 1443, morte à Pampelune en 148S. Quatrième fille de Charles VU et de Marie d’Anjou, sœur de Louis XI, Madeleine fut d’abord fiancée à Ladislas, roi de Hongrie ; mais ce prince mourut empoisonné dans l’intervalle des fiançailles et du mariage, et la jeune femme fut unie, en 1462, à Gaston de Foix, prince de Viana, fils d’Éléonore d’Aragon, et qui, par celle-ci, devait hériter du. royaume de Navarre. Sept années après, en 1469, Gaston de Foix était tué dans un tournoi, à Libourne. Madeleine, devenue veuve à vingt-six ans, avait deux enfants, un fils, François-Phœbus, et uno fille, Catherine. En 1473, le jeune François hérita des comtés de Poix et de Bigorre, et, en 1479, du royaume de Navarre, Madeleine, comme tutrice de son fils, gouverna ces États avec une grande sagesse, empêcha les empiétements de ses voisins et parvint à apaiser les querelles particulières des Beaumont et des Grammont, qui jetaient le trouble dans la Navarre. Son fils François-Phœbus étant mort, empoisonné, dit-on, en 1483, Madeleine fit passer ses États aux mains de sa fille Catherine qu’elle maria, en 1484, à Jean d’Albret. Deux ans plus tard, elle mourut et fut inhumée dans la cathédrale de Pampelune.

MADELEINE DE FRANCE, reine d’Écosse, fille de François Ier, née à Saint-Germainon-Laye en 1520, morte en 1530. Douée de toutes les grâces de l’esprit^ de tous les charmes de la beauté, elle faisait l’ornement de la cour de France, lorsque Jacques V demanda et obtint sa main. Jacques V se rendit à Paris, où le mariage fut célébré le 1er janvier 1536. Le bonheur des, époux fut de courte durée ; six mois et sept jours après, la jeune

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I reine d’Écosse succombait à une fièvre intense, contractée au milieu des brouillards de sa nouvelle patrie. Ronsard a écrit sur sa mort les vers suivants :

La belle Madeleine, honneur de chasteté. Une Grâce en beauté, Junon en majesté, A’peine de l’Écosse avait touché le bord. Quand, au lieu d’un royaume, elle y trouva la mort. Ni larmes du mari, ni beauté, ni jeunesse, Ni vœu, ni oraison, ne fléchit la rudesse De la Parque qu’on dit la fille de la nuit, Que cette belle reine avant que porter fruit Ne mourut en sa fleur....,

MADELEINE, marchande de gâteaux de Nanterre, qui vendait ses gâteaux au Palais-Royal, à cette époque palais du Tribunal, au commencement du xrxe siècle. Elle était alors célèbre, et l’on parlait d’elle comme d’une des curiosités de Paris. • Je nomme cette femme célèbre, dit un journaliste du temps (13 pluviôse an XI). Qui ne connaît Madeleine, la marchande de gâteaux de Nanterre ! Toute sa personne est si remarquable qu’elle-même, s’il arrive à quelqu’un de la regarder avec un peu d’attention, elle dit aussitôt : «Eh bien ! quoi ? c’est moi, c’est Madeleine ; allez, mon enfant, je suis connue dans tout Paris. »

Madeleine a été représentée sur plusieurs théâtres ; des poètes lui ont adressé des couplets et des madrigaux. Avec ses premières économies, elle eutt’idée de créer aux ChampsÉlysées un café-jardin, qui ne réussit pas, et elle revint alors à son premier état. Chaque matin on la voyait venir en sautillant près du palais du Tribunat et crier les gâteaux de Nanterre sur un air qui était de sa composition ainsi que les paroles : C’est la belt’ Mad’ieine, c’est la beW Mad’teine, qui vend des gâteaux, des gâteaux tout chauds.

La belle Madeleine avait le teint fort brun,1a bouche grande, les yeux saillants, te regard un peu égaré. Dès que sa chanson était finie, elle portait son panier à terre, et pendant toute la journée elle ne cessait de dire aux passants : « Des gâteaux tout chauds 1 messieurs, mesdames, régalez-vous, c’est la joie du peuple. »

Madeleine, qui était restée sage, malgré tout ce qu’on avait fait pour l’empêcher de l’être, fit au commerce de ses gâteaux une sorte de fortune, et s’étant mariée, vécut rentière, bienfaisante et honorée à Nanterre, son pays natal.

Madeleine, roman par M. Jules’Sandeau (Paris, 1847). Maurice a mené joyeusement la vie pendant plusieurs années, et le jour où il s’est aperçu qu’il ne lui restait plus rien de son patrimoine, il a fait comme Rolla, il s’est assigné un jour pour mourir. Il connaît trop les nommes pour compter sur les secours de l’amitié ; il est trop orgueilleux, d’ailleurs, pour les implorer, et il s’est trop longtemps bercé dans l’oisiveté pour soupçonner seulement que, en dehors de la fortune, il soit encore un moyen de vivre : le travail. Ainsi donc, encore un jour ou deux, le temps de manger ce qui lui reste, et il se tuera. Maurice a un oncle auquel il a quelquefois écrit, et sa cousine a su découvrir dans ces lettres la situation désespérée qu’elles cherchaient à dissimuler. Son père vient à mourir, et aussitôt, comprenant la sainte mission qui lui est offerte, elle se fait pauvre comme Maurice, vient à Paris, et lui dit : « Je suis ruinée, j’ai compté sur votre appui.» Dès lors, Maurice renonce à mourir ; il a désormais une tâche à accomplir ; il vivra, non pour lui, mais pour Madeleine. Seulement, comme il estime que deux ans lui suffiront pour mettre Madeleine en état de ne plus craindre la misère, c’est ce délai qu’il se donne pour mettre à exécution son projet de suicide, auquel il ne peut renoncer tout à fait. Rien n’est simple et touchant comme le récit de l’existence de Maurice et de Madeleine dans une mansarde de la rue de Babylone, Madeleine peint des boîtes de Spa, Maurice fait de la sculpture sur bois, et tous deux, rivalisant d’affection et de dévouement, marchent purs et souriants dans les sentiers de la vie. Un jour Maurice reçoit d’un Anglais la commande d’une statuette d’Elisabeth de Hongrie, et, sans le vouloir, ayant à représenter la pudeur et la grâce souveraines, c’est le visage de Madeleine qu’il se surprend à. modeler. Cependant sir Edward n’a pu voir Madeleine sans l’aimer, et il lui a offert sa fortune et son nom. Maurice, comprenant qu’un tel mariage assurerait le bonheur de sa cousine, lui conseille d’accepter l’offre qui lui est faite, et, pour que sa présence ne soit pas un obstacle, il s’éloigne en laissant pour adieux à Madeleine une lettre pleine de résignation. Il part, mais il a totalement renoncé à l’idée de se tuer ; le travail l’a régénéré, l’accomplissement du devoir lui a purifié l’âme, et sa seule pensée, avant de s’éloigner pour toujours de Madeleine, àlaquelle il ne peut s’empêcher de penser, est de revoir l’ancien château de ses pères qu’il n’a aucun espoir de pouvoir jamais racheter. Il y arrive en effet ; mais sur le seuil de la porte une femme lui tend les bras : c’est Madeleine qui lui révèle le secret de sa ruse. Elle a feint la pauvreté pour le forcer au travail, et maintenant qu’il est régénéré, elle lui avoue sa richesse et lui demande de la partager avec elle dans le château qu’elle vient de racheter. Nous avons omis une foule de détails pleins de charme et de fraîcheur, des épisodes d’une gaieté attendrisssante, qui accompagnent le récit principal. Nous en