Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 10, part. 2, Lep-Lo.djvu/92

Cette page n’a pas encore été corrigée

470

LIBE-

B

loi du 14 février 1817 autorisa transitoirement l’arrestation, par voie administrative et sans mise immédiate en jugement, des personnes inculpées ou soupçonnées de complot contre la personne du roi. Une autre loi, également transitoire et dont la durée fut limités par son texte même à l’intervalle de dfux sessions législatives, la loi du £8 mars 1320, renouvela, l’autorisation des arrestations par ordre ministériel des individus inculpés de machinations ou de complots contre la personne du roi ou des membres de la famille royale. Cetté dernière, loi, inspirée pur le meurtre du duc de Berry, fut heureusement temporaire et n’a pas laissé de trace durable dans la législation. La charte de 1830 et après elle la constitution de 1848 se sont bornées à reproduire le principe de la liberté individuelle tel’ que l’avaient consacré la constitution dé 1791 et la charte de 1814> La constitution du second Empire n’offre pas de disposition explicite touchant la liberté individuelle, mais elle en consacre virtuellement les garanties protectrices en déclarant que les principes dé1739 continuent de former la base de notre droit public. Mais personne n’a oublié les attentats des commissions mixtes sur tout le territoire, attentats dont le nombre et ^atrocité nous tirent reculer bien loin dans l^histoire de l’ancienne monarchie.

II.ne faut point, au reste, se dissimuler que ces grands principes formulés dans les chartes et les constitutions restent, dans une certaine mesure, à l’état d’abstraction et de conception’ spéculative jusqu’à ce qu’ils trouvent leur application dans des dispositions de lois pqsitives’et pratiques. Pour s’assurer jusqu’à quel point la liberté individuelle est garantie dans le droit d’une nation, c’est moins aux théories plus ou moins libérales de son droit public qu’il faut regarder, qu’aux lois organiques qui mettent en œuvre les principes d’une manière effective. À ce point de vue, notre législation laisse tout à désirer. L’Angleterre n’a pas eu comme nous une série de ehnrtes et de constitutions, prodigues de fastueuses déclarations de principes et de libertés spéculatives ; mais elle a son statut justement admiré et envié de Vhabeas corpus, une loi vivante et’pratique, qui fuit mieux que promettre la. liberté individuelle, qui l’organise, la réalise et la garantit. Jetons un coup d’œil rapide sur les dispositions, beaucoup plus iranarfaites, qui protègent, dans notre propre égislation, la liberté des.personnes.

Nous rencontrons d’abord dans la code pénal un premier groupe d’articles (art. 1U à 122) destinés à réprimer les attentats à la liberté. L’article IM est ainsi conçu : «Lorsqu’un fonctionnaire public, un «agent ou un préposé du gouvernement aura ordonné ou l’ait quelque acte arbitraire ou attentatoire soit h la-liberté individuelle, soit aux droits civiques d’un ou de plusieurs citoyens, soit à la constitution, il sera condamné k la peine de la dégradation civique. » Le paragraphe final de l’article 114 prévoit le cas où l’agent du gouvernement n’a pas pris’lui-même l’initiative de l’acte attentatoire à la liberté, et n’a fait, en agissant qu’exécuter l’ordre d un supérieur administratif. L’agent éri ce cas est amnistié, et la responsabilité remonte au supérieur hiérarchique duquel est émané l’ordre arbitraire : à Si néanmoins, ajoute l’art. 114, il (l’agent) justifie qu’il a agi par ordre de ses supérieurs, pour.des objets du ressort de ceux-ci, sur lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, il sera exempt’de la peine ; laquelle senv, iiluns e<> ■ cas, appliquée seulement aux’supérieurs qui auront donné l’ordre. :» C’est là, pour, le dire en passant ; une des.rares espèces, sinon la seule, où la responsabilité de l’auteur direct <Tun-crime se trouve, couverte-par la nécessité de. l’obéissance hiérarchique, et où cette muette et passive obéissance devient, une excuse absolvante de la, criminalité du fait. Une pareille disposition ouvre la porte toute large à l’arbitraire ; car, grâce à elle, -le supérieur est assuré.de ne rencontrer aucune résistance de la part de.son inférieur, et, d’un autre côté, il peut compter sur l’impunité qui couvre de fui t.tous les actes des hauts fonctionnaires.

Lfarticle 114 qu’on vient de reproduire punit.l’ageut.du pouvoir qui a ordonné ou exécuté un acte attentatoire k la liberté individuelle. Il fallait aussi prévoir-et réprimer le délit négatif, si l’on peut ainsi parler, des fonctionnaires de l’ordre administratif ou judiciaire auxquels des attentats1 de cette nature.auraient été dénoncés, et qui se seraient abstenus de les faire cesser ou d’en poursuivre la répression et la réparation. C’est à quoi a pourvu l’article 119 du code pénal : < Les. fonctionnaires publics chargés de la police administrative ou judiciaire qui auront refusé ou négligé de déférer à une réclamation.légale tendant à constater les détentions illégales el^arbitraires1, soit dans les maisons destinées à la garde des détenus, soit partout ailleurs, et qui ne justifieront i<as les avoir dénoncées à l’autorité supérieure, seront punis.de,1a dégradation civique, ’et’tenus de dommages-intérêts,1 lesquels seront" réglés comme iLest dit dans l’article 1<17.-» ’ ■ ■—■

Pour-compléter ce>système de garanties, il fallait créer une-responsabilité-à la charge des gardiens et geôliers-des -maisons d’arrêt et les obliger à s’assurer-, que les-individus écroués.dans les.prisons dont ils ont la garde on t.été arrêtés en exécution d’ordres ou mandats dans la forme légale et décernés par qui

LIBE

de droit. Cette disposition fait l’objet de l’article 120 du code pénal, qui est ainsi conçu : ■ Les gardiens et concierges des maisons de dépôt, d’arrêt ; de justice ou de peine qui auront reçu un prisonnier sans mandat ou jugement ou sans ordre provisoire du gouvernement-, ceux qui l’auront retenu ou auront refusé de le représenter à l’officier de police ou ou porteur de ses ordres, sans justifier de la défense du procureur de la République ou du juge ; ceux qui auront refusé d’exhiuer leurs registres à lofricier de police seront, cominer coupables de détention arbitraire, punis de six mois à deux ans d’emprisonnement, et d’une amende de 16 francs à 200 francs. •

L’article 122 termine cette première série . de dispositions ; il est relati f à la détention en, charte privée des personnes, quand cette détention procède du fait d’un fonctionnaire public. Voici, le texte de cet article : « Seront aussi punis de la dégradation civique les procureurs généraux de la République, ou les substituts, les juges ou les officiers publics qui auront retenu ou fait retenir un individu hors des lieux déterminés par le gouvernement ou par l’administration publique, ou qui auront*traduit un citoyen devant une cour d’ussises, sans qu’il ait été préalablement mis légalement en accusation. >

Le groupe tout entier des dispositions qui viennent d’être analysées a été le sujet dé justes critiques. D’abord, la peine édictée, contre les fonctionnaires publics auteurs d’arrestations ou de détentions illégales, la dégradation civique, est une peine relativement indulgente. Elle est beaucoup moins grave que celle qui atteint les séquestrations par voie de fait ccromises par les simples particuliers^ dont il va être parlétout à l’heure. On a dit ; il est vrai, pour pallier cette choquiintè disproportion, que les particuliers, en pareil cas, ne peuvent agir que mus par des mobiles odieux, tandis que Je fonctionnaire peut être égaré par un excès de zèle. Le palliatif est ingénieux, mais il ne saurait justifier une gradation de pénalité qui est en sens inverse du’degré de culpabilité réelle. Le simple particulier qui n’abuse que de sa force individuelle est, en thèse générale, moins. coupable que le fonctionnaire qui abuse de son autorité, c’est-à-dire de la portion de la force collective, sociale, dont il est investi.

Ajoutons que les dispositions protectrices de la liberté des citoyens, formulées dans les articles 114 et suivants du code pénal, furent, jusqu’à ces derniers temps, entravées dans leur application et rendues souvent illusoires par une disposition législative d’un autre ordre. Nous voulons parler de l’article 75 de la constitution de l’an VIII, article qui dispose en substance que les agents du.gouvernement ne peuvent être poursuivis devant les tribunaux criminels ou civils, pour faits se rattachant, à l’exercice de leurs fonctions, qu’autant que la poursuite a été préalablement autorisée par une décision du conseil â’État. Ce déplorable article 75, qui a protégé tant d’abus de pouvoir, a été heureusement abrogé.

Les articleâ 341, 342, 343, 344 du code pénal sont relatifs aux arrestations, détentions et séquestrations de personnes commises par ° de simples particuliers. La peine, beaucoup plus grave que celle qu’encourent les fonctionnaires publics pour des délits dé même

nature, est celle des travaux forcés à temps, dont la durée varie de cinq à vingt ans. 11 esta remarquer’que la loi punit également, et d’une peine identique, les trois fujts d’arrestation, de détention et de séquestration, de sorte que les travaux forcés à temps, sont toujours’encourus dans le cas où 1 un de ces trois faits se produirait isolément, par exemple s’il n’y avait eu que simple arrestation, non suivie de détention, ou s il n’y avait eu que séquestration, non précédée d’arrestation.

Du reste, dans les délits de cette nature, comme en général dans toute espèce de délit, l’intention criminelle doit nécessairement s’ajouter au’fait matériel pour en constituer la criminalité et rendre la peine applicable. Sur cette question d’intention, les arrétistes ont relevé une espèce curieuse. Un individu allait être incarcéré pour dettes ; l’huissier, assisté du juge de paix, avait pénétré dans son domicile pour opérer la prise de corps. Le débiteur se dégagea de la main des recors, etj pour se donner du champ et avoir le temps de s’évader avec plus de sûreté, il enferma huissier, juge de paix et recors dans la pièce de sa maison où ils s’étaient présentés, en prit la clef et s’évada. Le débiteur fut mis en accusation pour ce fait, par application de l’article 341 du code pénal, et son pourvoi contre l’arrêt de la chambre des mises en accusation fut rejeté par la cour de cassation. Dalloz, qui cite cet arrêt, fait observer avec raison que, dans l’espèce, l’intention criminelle ’ était au moins fort douteuse et que l’acte du déuiteur-s’expliquait fort naturellement par le seul désir d’échapper à-la contrainte par corps, bien plus que par la volonté délibérée de mettre en charte privée le juge de pajx et l’huissier. ’"■ L ■

À propos de ces diminutifs de séquestration qui ne s’élèvent pas au niveau des crimes prévus par l’article 341, il est naturel de dire un mot des corrections infligées quelquefois par des pères ou des tuteurs à des enfants mineurs indisciplinés, et consistant à les enfermer momentanément dans une pièce de la

LÏBE

maison. Il est clair que de pareils actes, quand ils ne dépassent pas les bornes d’une correction modérée, ne tombent sous l’application d’aucune loi pénale, et ne pourraient même motiver aucune ingérence de l’autorité. Il en serait tout autrement si le fait prenait des proportions plus graves et offrait les caractères d’une véritable séquestration.

Mise en liberté. La mise en liberté s’applique soit aux individus déclarés innocents, soit aux individus absous, soit enfin aux condamnés qui ont subi leur peine.

La grave question de l’arrestation d’un ou de plusieurs citoyens, sous l’inculpation d’un crime dont ils seront peut-être déclarés plus tard innocents, donne un vif intérêt à tout ce qui touche à la mise en liberté. Quand il s’a. git d’une contravention de simple police, telle que tapage, sans accompagnement de cris séditieux, in fraction aux arrêtés de police, etc., si le délinquant est arrêté, il est conduit devant le commissaire de police qui doit, s’il ne reconnaît qu’une contravention sans gravité, le renvoyer immédiatement. VoilÈt le cas le plus ordinaire. Mais si un crime a été commis et qu’un individu soit accusé par la rumeur publique, il est conduit devant le procureur de la République ; si, après avoir examiné les antécédents de l’individu et après l’avoir interrogé, ce magistrat acquiert la conviction qu’il est étranger au crime pour lequel il a été arrêté, son devoir est de le relâcher immédiatement. S’il lui reste un doute, ce qui

est malheureusement le cas ordinaire, il garde l’individu en prison et requiert du juge d’instruction un examen nouveau des dépositions et un nouvel interrogatoire. Le juge d’instruction, une fois requis, acquiert un pouvoir absolu. Il peut, selon les inspirations de sa conscience, prononcer ou la mise en liberté ou le renvoi devant la chambre des mises en accusation. La mise en liberté peut être encore prononcée par cette chambre ; mais il est rare qu’elle use de ce droit. Dans la plupart des cas, elle renvoie le prévenu devant une cour d’assises. Dès lors, c’est au jury qu’appartient le droit de confirmer ou de repousser l’opinion exprimée par les trois juridictions qui se sont prononcées avant lui. Si le jury déclare l’accusé innocent, le président de la cour d’assises doit prononcer sa mise en liberté immédiate, sous cette réserve : « s’il n’est retenu pour autre cause ; » encore cette formalité n’est-elle pas exigée à peine de nullité. Si une autre accusation pesait sur l’accusé, malgré l’acquittement prononcé par le jury, il pourrait être retenu en prison.

En matière correctionnelle, le procureur de la République et le tribunal correctionnel prononcent également la mise en liberté, le premier, avant les débats, s’il trouve les charges insuffisantes, le second, en audience publique, s’il juge l’accusé innocent.

On confond souvent, mais à tort, l’absolution et l’acquittement. Il y a entre ces deux faits une différence notable qu’il est indispensable d’indiquer. L’acquittement implique la constatation de l’innocence de l’accusé ; l’absolution laisse peser sur l’individu non condamné la charge d’un fait blâmable, mais que la’loi n’a pas prévu. Aussi, la forme de ta mise en liberté se modifie en raison de cette distinction. Quand la chambre des mises en accusation constate l’existence d’un fuit blâmable, sans trouver dans le code aucun article qui puisse lui être appliqué, elle ne peut renvoyer l’inculpé devant la cour d’assises ; elle doit donc le mettre en liberté, mais sans le déclarer innocent. De même, si l’affaire est venue devant la cour d’assises et que le jury ait déclaré la culpabilité de l’accusé, sans que la cour puisse lui appliquer aucun article du code pénal, le président ne peut ni formuler une condamnation ni ordonner la mise en liberté. Alors, la cour rend un arrêt par lequel, reconnaissant que le fait reproché justement à l’accuse est blâmable, mais, non puni par la 101, °el !e prononce la mise en liberté.

Après l’expiration de la peine, la mise en liberté n’a plus rien de judiciaire, et elle n’a besoin d’être ordonnée par aucun magistrat ; ce n’est plus qu’une simple formalité administrative, une levée d’écruu. Plusieurs difficultés peuvent cependant se présenter dans l’exercice des fonctions de directeur d’une prison. Nous nous bornerons à citer le cas où il y a recommandation. On appelle ainsi l’acte par lequel l’Etac créancier signifie au directeur delà prison que, le jour de 1 expiration de sa peine, le prisonnier doit être retenu pour n’avoir pas payé telle somme à laquelle un jugement a donné comme consécration la contrainte par corps.

Les art. 114 et 117 condamnent à 25 francs de dommages-intérêts par chaque jour, au minimum, tout fonctionnaire qui aura détenu illégalement un citoyen. Pour donner un exemple de la circonspection qu’exige la mise en liberté ou la détention d’un individu condamné, nous allons citer un fait qui s’est passé assez récemment k la cour d’Alger. Un imiividu est condamné, ’ en appel, à six semaines de prison pour vagabondage. Le greffier recueille -l’arrêt et porte sur le registre six semaines. En copiant l’extrait destiné au greffe de la prison, le commis greffier de la cour se trompe et écrit six mois. Eu l’absence du procureur général, l’extrait est apporté à l’un des avocats généraux pour qu’if y appose la signature exigée. Sans se faire représenter le registre, sans collationner, l’avocat général

Ë

LIBE

signe et ne s’aperçoit pas de l’erreur matérielle qui entache cette pièce. Cinq mois après, le procureur général, faisant une visite à la prison, voit un condamné qui semblait se dissimuler derrière ses camarades, et qui, à ses questions, ne répond qu’en balbutiant. Le magistrat interroge le directeur et apprend que le détenu a été condamné à six mois de prison pour vagabondage. Etonné d’une peine si forte pour un tel dèiit, le procureur général se fait représenter l’extrait du greffe et constate que cet acte porte bien six mois. Il regarde la signature de l’avocat général et se rend immédiatement au greffe de la cour. Là, il lit sur le registre, non plus six mois, mais six semaines. Il ordonne la mise en liberté immédia’te du détenu. Mais celui-ci, le soir même, déposait une plainte pour incarcération illégale et une demande en dommagesintérêts. Voici ce qui était arrivé : quand les six semaines avaient été sur le point d’expirer, il avait demandé quel jour il serait élargi. On lui avait répondu qu’il avait encore près de cinq mois devant lui. Etonné, il écrivit à l’avocat qui l’avait défendu. L’avocat, après avoir constaté l’erreur du greffier contre-signée par l’avocat général, dit à son client : « Vous avez deux partis à prendre : ou réclamer votre mise en liberté, et je me charge de faire prouver l’erreur, ou rester en prison pendant les six mois, et réclamer, k votre sortie, une indemnité de 25 francs pur jour, au minimum. • Le vagabond n’hésita pas : il resta, laissant accumuler une somme respectable. L’avocat général fut condamné k payer tout ce que demandait son adversaire. On voit que la mise en liberté demande chez les magistrats, comme chez les agents de l’autorité administrative, une attention sérieuse.

Mise en liberté provisoire. À Rome, l’accusé pouvait être laissé libre sous sa fui jurée ou sous le cautionnement d’un tiers ; le juge avait un pouvoir discrétionnaire pour apprécier s’il fallait détenir l’accusé ou lui laisser provisoirement sa liberté. En France, tant que l’action publique ne fut pas développée, et que les poursuites, même pour crimes, eurent lieu à la requête des parties lésées, pour aboutir surtout à des réparations pécuniaires, la liberté provisoire fut de droit ; mais à partir du xv et du xvie siècle, le pouvoir royal tend de plus en plus à faire prédominer l’action publique ; lu procédure inquisitoriale adoptée pour la recherche des crimes n’est pas compatible avec les droits de la liberté « rivée. L’ordonnance criminelle de 1670 ètalit la détention préventive comme une nécessité de toute poursuite. Elle fait une exception en faveur des domiciliés, lorsqu’ils ne sont pas accusés de crimes punis de peines afilictives et infamantes ; mais les peiuesdépourvues de ce caractère sont si rares à cette époque que l’exception ne profite guère à la liberté : un accusé, une fois décrété de prise de corps, n’obtenait presque jamais son élargissement provisoire.

En 1789, le comité de constitution proclama le principe de l’élargissement facultatif. Le décret du 19 juillet 1791 en restreignit l’application aux poursuites correctionnelles. Après avoir dit que tout inculpe arrêté pour délits pouvait être mis en liberté provisoire sous caution, on décida ensuite (16 septembre 1791) qu’en cette matière la liberté provisoire était de droit sans caution. La constitution de l’an III et le code de l’an IV rétablirent la nécessité de la caution. Le cautionnement fut d’abord fixé invariablement à 3,000 livres ; mais une loi du 22 thermidor an IV établit des catégories suivant l’importance des inculpations et gradua les cautionnements de 2,000 à 6,000 francs, lorsque le fait pouvait entraîner des peines infamantes, et de 1,000 francs au moins jusqu’au triple de l’amende à encourir en cas ce poursuites correctionnelles. C’était, comme l’observe avec

raison un criminaliste, rendre illusoire, dans beaucoup de cas, la faculté de l’élargissement provisoire.

Le code d’instruction criminelle promulgué en 1808 formula des règles qui ne subirent aucune modification jusqu’en 1848 (art. 113-126). Le législateur refusa la liberté provisoire lorsque l’inculpation porte sur un fuit passible de peinesai’ilic.iivesetinfaniante3, et, dans le cas où le fait n’entraîne que des peines correctionnelles, à moins qu’il ne s’agisse de vagabondage et de repris de justice, n’autorisa la chambre du conseil à accorder la liberté provisoire que sous valable caution en espèces ou en immeubles, dont le minimum fut fixé à 500 francs. En 1842, le gouvernement Saisit la Chambre des députés d’un projet de loi qui rendait l’élargissement obligatoire dans certains cas et fixait à 100 francs le minimum du cautionnement ; ce projet, après une épreuve favorab.e, fut rejeté. En 1848, un décret du gouvernement provisoire du 2 mars supprima la limite minimum fixée par l’article 119 du code d’instruction criminelle.

Ce code, quand il s’agissait d’une inculpation de crime, défendait au juge d’instruction de lever le mandat de dépôt ou d’arrêt qu’il avait décerné, lors même que l’inculpation perdait de sa gravité : il fallait attendre qu’une ordonnance fût rendue pour décider qu’il n’y avait lieu à suivre ou que le fai’ n’emportait qu’une poursuite correctionnelle alors seulement le mandat était levé.

La statistique officielle a prouvé que, su»