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cle chaque jour. Il y fit preuve d’une certaine fécondité, mais ne sut point renouveler un genre fatigant à la longue et dépourvu de toute valeur littéraire. En 1869, il quitta le Petit Journal pour entrer, avec des appointements énormes, au Petit Moniteur, où il dut fournir deux articles par jour. Dans cette entreprise impossible, il perdit ce qui lui restait de valeur personnelle, n’augmenta que médiocrement les lecteurs de cette feuille et dut, au bout de quelque temps, résilier son traité. Depuis lors, il est devenu un des rédacteurs de l’Evénement. Outre ses innombrables articles de journaux, on doit à M. Léo Lespès : Histoires roses et noires (1842, in-32) ; les Mystères du grand Opéra (1843, in-8°) ; Histoire à faire peur (1846, 2 vol. in-8°) ; les Esprits de l’âlre (1848, in-S»), un de ses meilleurs romans ; les Soirées républicaines (1848, in-fol.) ; Histoire républicaine et illustrée de la révolution de Féurier 1848 (184S) ; Paris dans un fauteuil (1854) ; les Veillées de la Saint-Sylvestre (l&ZG) ; les Quatre coins de Paris (1803) ; les Filles de Barubous (1864, in-4u) ; Avant de souffler sa bougie (1860, in-18) ; Spectacles, vus de ma /e-Hé7re(1866, in-18) ; Promenades dans Paris (1867, in-18) ; les Huiues de Paris, chronique du Paris brûlé (1871, in-4»), etc.


LESPINASSE (Julie-Jeanne-Éléonore DE), femme de lettres française, née à Lyon en 1732, morte en 1776. Elle était fille de Mme d’Albon et d’un père inconnu : on a nommé le cardinal de Tencin. Placée au couvent par sa mère, qui se souciait peu de reconnaître cette fille adultérine, on l’y laissa le plus longtemps possible ; sa mère la prit ensuite comme demoiselle de compagnie et lui légua en mourant une petite rente. Elle passa de cette maison, en la même qualité, dans celle de la fille légitime de Mme d’Albon, la marquise de Vichy. Mme Du Deffant, déjà aveugle, entendit parler d’elle, de son esprit, de ses bonnes manières et résolut de se l’attacher ; elle la demanda à Mme de Vichy, sa belle-sœur, et sollicita pour l’obtenir l’appui de la duchesse de Luynes. On voit que c’était une négociation en règle : « Je suis aveugle, écrivait-elle à la duchesse (1754) ; je sens tout le malheur de ma situation, et il est bien naturel que je cherche les moyens de l’adoucir. Rien n’y serait plus propre que d’avoir auprès de moi quelqu’un qui pût me tenir compagnie et me sauver de l’ennui et de la solitude.... Le hasard m’a fait rencontrer une personne dont l’esprit, le caractère, la fortune me conviennent extrêmement. C’est une fille de vingt-deux ans, qui n’a point de parents qui l’avouent, ou du moins qui veuillent et qui doivent l’avouer. »

Le cardinal de Tencin, consulté, émit un avis favorable, et Mme Du Deffant put écrire à Mlle de Lespinasse : « Faites vos paquets, ma reine, et venez faire le bonheur et la consolation de ma vie ; il ne tiendra pas à moi que cela ne soit bien réciproque. »

Mlle de Lespinasse resta chez elle une dizaine d’années ; Marmontel a donné à leur rupture les proportions d’un événement : « Il ne fallait pas moins qu’un ami tel que d’Alembert pour adoucir et rendre supportable à Mlle Lespinasse la tristesse et la dureté de sa condition ; car c’était peu d’être assujettie à une assiduité perpétuelle auprès d’une femme aveugle et vaporeuse ; il fallait, pour vivre avec elle, faire comme elle du jour la nuit et de la nuit le jour ; veiller à côté de son lit, l’endormir en faisant la lecture ; travail qui fut mortel à cette fille naturellement délicate et dont jamais sa poitrine épuisée n’a pu se rétablir ; elle y résistait cependant, lorsque arriva l’incident qui rompit sa chaîne.

« Mme Du Deffant, après avoir veillé toute la nuit chez elle-même ou chez Mme de Luxembourg, qui veillait comme elle, donnait tout le jour au sommeil et n’était visible qu’à six heures du soir. Mlle de Lespinasse, retirée dans sa petite chambre, ne se levait guère qu’une heure avant sa dame ; mais cette heure si précieuse, dérobée à son esclavage, était employée à recevoir chez elle ses amis personnels, d’Alembert, Chastellux, Turgot et moi, de temps en temps. Or, ces messieurs étaient aussi la compagnie habituelle de Mme Du Deffant, mais ils s’oubliaient chez Mlle de Lespinasse, et c’étaient des moments qui lui étaient dérobés. Aussi ce rendez-vous particulier était-il pour elle un mystère ; car on prévoyait bien qu’elle en serait jalouse. Elle le découvrit : ce ne fut, à l’entendre, rien de moins qu’une trahison.

« Elle en fit les hauts cris, accusant cette pauvre fille de lui soustraire ses amis, et déclarant qu’elle ne voulait plus nourrir ce serpent dans son sein. Leur séparation fut brusque ; mais Mlle Lespinasse ne restait point abandonnée. Tous les amis de Mme Du Deffant étaient devenus les siens ; il lui tut facile de leur persuader que la colère de cette femme était injuste, et les sociétés de Paris les plus distinguées se disputèrent le bonheur de la posséder. D’Alembert, à qui Mme Du Deffant proposa impérieusement l’alternative de rompre avec Mlle de Lespinasse ou avec elle, n’hésita point et se livra tout entier à sa jeune amie. »

D’Alembert n’était pas le seul soupirant empressé auprès d’elle ; Turgot, Marmontel, le marquis d’Ussé la suivirent dans sa retraite ; le vieil ami de la marquise Du Deffant, le président Hénault, voulait même l’épouser. Elle eut à son tour un salon, où se rassemblèrent les esprits d’élite du temps, presque toute la société de la vieille marquise, ce qui faillit la faire crever de dépit. Bonne fille au fond, Mlle de Lespinasse voulut se raccommoder avec Mme Du Deffant et lui écrivit en ce sens ; mais celle-ci lui répondit sur un ton si aigre, qu’elle renonça à toute réconciliation. Elle en prit gaiement son parti ; cependant, au milieu de la vie insouciante et même un peu galante qu’elle mena dès lors, elle éprouva quelques vives contrariétés. Ce qui est absolument invraisemblable, tout en étant vrai, c’est qu’elle mourut d’un chagrin d’amour, malgré tous ses charmes et tout son esprit.

Mlle de Lespinasse a aimé, et aimé vivement ; sa nature passionnée se montrait extrême dans ses défauts comme dans ses qualités. On sait le profond attachement que lui portait d’Alembert ; il s’était déclaré son soupirant en titre. Lui, l’enfant sans famille, sans amitié, avait reporté sur elle tout l’amour qu’il aurait donné à une mère, à une épouse. Huit ans entiers, elle agréa ses soins, heureuse, orgueilleuse même, d'une célébrité qui rejaillissait sur elle ; mais elle ne l’aimait pas, et elle brisa son cœur ; d’Alembert mourut de cet amour dédaigné. À son tour elle souffrit, justifiant d’avance la strophe désolée de Henri Heine : « Un homme aime une femme qui ne l’aime pas et qui en aime un autre qui ne l’aime point non plus. C’est une histoire toujours vieille et toujours jeune, et ceux qui en sont les héros ont le cœur brisé. » Elle adora d’abord le comte de Moura, fils de l’ambassadeur d’Espagne en France, et qui avait dix ans de moins qu’elle. Cette affection devint si ardente que la famille du comte le rappela à Madrid. Mlle de Lespinasse fut désespérée de cette rupture forcée, et cependant, quelque temps après, elle s’éprit d'une passion insensée pour le comte de Guibert, alors simple colonel, auquel elle ne craignit point d’adresser ces lignes brûlantes : « Mon ami, je souffre, je vous aime, et je vous attends. » Marié à une femme distinguée qui lui portait un sérieux et vif attachement, Guibert se laissa aimer sans répondre aux avances de Mlle de Lespinasse ; et ce mépris la tua. « Oh ! que vous avez bien vengé M. de Moura ! » lui écrivit-elle un jour.

Et d’Alembert ! que devenait-il au milieu de ces amours qui lui enlevaient toute espérance de toucher le cœur de l’indifférente ? d’Alembert foulait aux pieds sa philosophie, oubliait sa propre dignité d’homme jusqu’à aller chercher et porter les lettres que le comte de Moura envoyait d’Espagne Mlle de Lespinasse, joyeux des bonheurs de l’infidèle, désespéré de ses douleurs. À l’heure de la mort seulement, elle parut avoir l’intuition des souffrances et du sacrifice de ce grand cœur. Elle le fit appeler, lui demanda pardon, le nomma son exécuteur testamentaire, et lui remit une liasse de lettres.... Hélas ! elle était femme, c’est-à-dire perfide jusqu’à la fin !... Ces lettres qu’elle lui recommandait avec tant d’insistance, c’était la correspondance qu’elle avait échangée avec M. de Guibert !

Les Lettres de Mlle de Lespinasse ont été publiées par Mme de Guibert avec une préface de M. Barere (Paris, 1809, 2 vol. in-8°). Il existe aussi un volume portant pour titre : Nouvelles lettres suivies d’un portrait de M. de Moura et d’autres opuscules (1830, in-8°) ; mais ces lettres paraissent apocryphes.

Le lendemain de la mort de Mlle de Lespinasse, son ancienne amie, Mme Du Deffant, écrivait : « Mlle de Lespinasse est morte cette nuit, à deux heures après minuit. Ç’aurait été pour moi, autrefois, un événement ; aujourd’hui, ce n’est rien du tout. »

Lespinasse (LETTRES DE Mlle DE), publiées par la veuve même de M. de Guibert (1809, 2 vol. in-8°). Ces lettres reproduisent la correspondance très-passionnée de Mlle de Lespinasse avec M. de Guibert de 1773 à 1776.

Pour trouver un pareil monument d’invincible et aveugle passion, il faudrait remonter dans le moyen âge, jusqu’aux lettres latines d’Héloïse. Les lettres de Mlle de Lespinasse, comme l’a fort bien dit M. Sainte-Beuve, « sont véritablement la nouvelle Héloïse en action, préférable même à celle de Rousseau, car l’amour n’y déclame point. Ces Lettres forment au reste un véritable roman, sans intrigue, sans péripéties, et dans lequel les joies et les tortures d’une âme enivrée parlent à l’âme. Une œuvre pareille ne s’analyse guère. La violence des sentiments y est trop capricieuse pour qu’on puisse en déterminer la marche régulière ; la lecture seule eut donner une idée de ce cri ardent et prolongé. Comme s’il eût fallu que rien ne manquât à ce puissant tableau de la passion peinte par elle-même, il y à lutte d’abord entre un ancien amour, paisible, doux et délicieux au souvenir (l’amour qu’elle avait éprouvé pour le comte de Moura), et le nouvel amour, tyrannique, plein d’angoisses et de déchirements : de cette lutte naissent les regrets, les remords, et cependant la passion redouble. Le bruit des succès de M. de Guibert la trouble, et son amour si violent ne se tourne point en jalousie : elle n’est point de ces « femmes du monde qui n’ont pas besoin d’être aimées, car elles veulent seulement être préférées. » Elle n’a point de ces fiertés de coquetterie, elle se dit avec Félix :

J’entre en des sentiments qui ne sont pas croyables ;
J’en ai de violents, j’en ai de pitoyables,
J’en ai même de...

Elle n’ose dire : J’en ai même de bas... Qu’importent les caprices de son amant pourvu qu’il lui fasse une place dans son affection ? Bientôt pourtant elle s’aperçoit que celui à qui elle a sacrifié M. de Moura n’a point un cœur digne de tant d’amour ; il la néglige pour courir de succès en succès, de soupers en soupers ; quand elle lui redemande ses lettres, il tire de sa poche une prodigieuse quantité de papiers et lui donne d’un air distrait un billet de Mme de Boufflers. Elle voudrait s’arracher à ce lien ; elle prépare le mariage de son amant ; elle s’intéresse à sa jeune femme ; elle essaye de calmer ses vives ardeurs, qui s’échappent malgré elle en mots de feu. « Mon ami, je vous aime comme il faut aimer, avec excès, avec folie, avec transport et désespoir.... Oui, vous devriez m’aimer à la folie ; je n’exige rien, et je pardonne tout. » Comme nous l’avons dit plus haut, Mlle de Lespinasse mourut de cet amour mal placé.

« Le mérite inappréciable de ses Lettres, dit Sainte-Beuve, c’est qu’on n’y trouve point ce qu’on trouve dans les livres ni dans les romans ; on y a le drame pur au naturel, tel qu’il se révèle çà et là chez quelques êtres doués : la surface de la vie tout à coup se déchire, et on lit à nu. Il est impossible de rencontrer de tels êtres, victimes d’une passion sacrée et capables d’une douleur si généreuse, sans éprouver un sentiment de respect et d’admiration, au milieu de la profonde pitié qu’ils inspirent. Pourtant, si l’on est sage, on ne les envie pas ; on préférera un intérêt calme, doucement animé ; on traversera, comme elle le fit un jour, les Tuileries par une belle, matinée de soleil, et avec elle on dira : « Oh ! qu’elles étaient belles ! le divin temps qu’il faisait ! l’air que je respirais me servait de calmant ; j’aimais, je regrettais, je désirais ; mais tous ces sentiments avaient l’empreinte de la douceur et de la mélancolie. Oh ! cette manière de sentir a plus de charme que l’ardeur et les secousses de la passion !... »


LESPINASSE (le comte Augustin), général français d’artillerie, né à Preuilly-sur-Loire (Berry) en 1736, mort à Paris en 1816. Il entra dans les mousquetaires noirs en 1760, contribua en qualité d’officier d’artillerie à améliorer la fabrique d’armes de Saint-Étienne, devint lieutenant-colonel en 1791, prit une part glorieuse aux succès de l’armée des Pyrénées-Orientales (1794) et commanda de 1795 à 1797 toute l’artillerie de l’armée d’Italie sous Bonaparte, qui disait de lui : « C’est un des généraux d’artillerie que je connaisse qui aime le plus à se trouver à l’avant-garde. » Lespinasse entra au sénat après le 18 brumaire, et fut élevé à la pairie par Louis XVIII. On a de lui : Traité sur la théorie et la pratique de la trigonométrie et du nivellement (1787) ; Essai sur l’organisation de l’artillerie (1801, in-8°).


    1. L’ESPINE (Jean DE), en latin Spina ou Spinaena,

théologien protestant français ## L’ESPINE (Jean DE), en latin Spina ou Spinaena, théologien protestant français, né à Daou (Anjou) vers 1506, mort à Saumur en 1597. Il était moine dominicain lorsqu’il jeta le froc aux orties et embrassa le protestantisme vers 1561. À la clôture du colloque de Poissy, il fut nommé pasteur à l’Église de Fontenayle-Comte, cure qu’il abandonna peu de temps après pour aller desservir celle de La Rochelle. En 1564, il se rendit à Provins dans le but d’y établir le culte protestant, passa ensuite à Paris en 1566, échappa par miracle au massacre de la Saint-Barthélémy, et après l’avènement de Henri IV fut envoyé comme ministre à Saumur, où il resta jusqu’à sa mort. Nous citerons parmi ses ouvrages, qui ne sont pas sans valeur : Traicté consolatoire contre toutes les afflictions qui adviennent ordinairement aux fidèles chrestiens (Lyon, 1565, in-8°) ; Traicté des tentations et moïen d’y résister (Lyon, 1566, in-8°) ; l’Excellence de la justice cfirestienne (Genève, 1577, in-so) ; Traicté de l’apostasie (1583, in-12) ; Excellais discours touchant le repos et contentement d’esprit (La Rochelle, 1588, in-8°), ouvrage plusieurs fois réimprimé et qui place L Espine au nombre des bons prosateurs du xvi» siècle ; Traicté de la providence de Dieu pour le repos et contentement des consciences fidèles (Genève, 1591, in-8"), etc.

LESPINE (René-Timothée), poète français, né dans le xvje siècle, mort en 1610. Il est auteur d’un petit poërae curieux, intitulé : la Parure des dames (Liège, 1610, in-iï).

LESPINE (René de), poëte français, fils du précédent, né eu 1610. Ce rimeur, qui fut honoré du titre de Puëio royul à l’occasion d’un impromptu de quarante vers composé chez le prince de Condé, à propos d’une chute du tonnerre sur une couronne ducale surmontant un pilier de l’escalier, n’a publié qu’un petit recueil de 100 pages in-12, sans date, contenant quelques-unes de ses poésies, qui excitèrent toutes un vif sentiment de curiosité, lors de leur apparition.

I.’ESPINE (Charles de), poète français, né a Paris. Il vivait dans la première moitié du xvne siècle. On ne possède aucun délail sur l’existence de cet écrivain. Outre des chansons, des stances, des épigrammes réunies sous le litre de : Conceptions diverses, on lui doit une tragédie en cinq actes et en vers, dans laquelle les scènes ne sont pas indiquées. Cette tragédie, intitulée : la Descente d’Orphée aux enfers, a été publiée avec les autres poèmes de l’auteur (Louvain, 1614, in-8»), et

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rééditée sous le titre de : Mariage d’Orphée (Louvain, 1623).

L’ESPINE (Hubert de), voyageur français. V. Hubkrt.

L’GSPINOEIL (Charles de), pseudonyme pris par le Père Garasse. V. Gakassb.


LESQUE s. f. (lè-ske). Agric. Nom donné aux terres en friche ou incultes, dans le Médoc.

— Pèche. Espèce de cibaudière. || On dit aussi LISQUE.


LESSART (Antoine de Valdec de), homme d’État français, né en Guyenne en 1742, assassiné à Versailles en 1792. Employé d’abord par Necker dans ses opérations financières, il devint successivement maître des requêtes, contrôleur général des finances (déc. 1790), ministre de l’intérieur (janv. 1791), puis remplaça de Montmorin aux affaires étrangères. Lorsque, au commencement de 1792, lus girondins poussèrent la France à la guerre européenne, de Lessart lutta de toutes ses forces contre le sentiment belliqueux qui avait déjà gagné la nation tout entière. De Lessart ayant affirmé que l’empereur Léopold d’Autriche lui avait témoigné le désir de maintenir la paix, on fit courir le bruit que le ministre avait fabriqué les pièces produites comme preuves à l’appui de son assertion. Décrété d’accusation pour ce fait le 10 mars, à la suite d’un rapport fait par Brissot à l’Assemblée législative, de Lessart se vit traduit devant la haute cour d’Orléans, et fut massacré à Versailles, au mois de septembre de la même année, avec les autres prisonniers que l’on ramenait à Paris.


LESSAY, bourg de France (Manche), ch.-l. de cant., arrond. et à 21 kil. de Coutances, sur l’Ay, à l’extrémité d’une grande lande ; pop.aggl., 493 hab. — pop. tot., 1,509 hab. Salines ; teinture de laines. Lessay doit son origine à une abbaye de bénédictins fondée dans la première moitié du xie siècle par les seigneurs de iaHaye-du-Puits, qui lui accordèrent de nombreux privilèges. Dès l’origine, l’abbaye de Lessay posséda des fermes, des forêts et des rivières entières dans les arrondissements de Coutances, de Valognes et de Cherbourg. La plupart des seigneurs normands accablèrent de bienfaits les moines de Lessay. Certains donataires mettaient à leurs libéralités des conditions singulières, témoin les seigneurs de Pérou, qui s étaient réservé le droit d’enterrer leurs deux premiers chiens de chasse dans le cloître de l’abbaye. En 1326, à la requête des religieux eux-mêmes, le roi de France, Charles IV, remplaça lu charte originaire de l’abbaye par une charte nouvelle qui ajoutait encore à ses immunités. L’abbaye de Lessay fut mise en uommende dans les premières années du xvie siècle. A la fin du siècle suivant, Léonor II, de la famille Goyon de Maiig’non, alors abbé commendataire de Lessay, y introduisit des réformes utiles qui maintinrent intactes la puissance et les richesses du monastère. Lorsque la Révolution éclata, l’abbaye de Lessay était dirigée par l’évêque de Besançon, l’abbé de Durfort. Les bâtiments du monastère furent vendus comme propriété nationale, mais ils échappèrent heureusement au morcellement et à la ruine. La maison abbatiale, le couvent proprement dit et l’égiise subsistent encore et sont dans un état parfait de conservation. La maison abbiitialéet le couvent, qui servent aujourd’hui d’habitation particulière, paraissent remonter à la fin du xvne siècle ou au commencement du xvm». L’église est un remarquable spécimen de l’architecture romane du xte siècle. Les nombreuses restaurations dont elle a été l’objet ne lui ont pas heureusement enlevé son caractère primitif. « L’église de Lessay, dit M. Renault, a la forme d’une croix dont les branches s’étendent du nord au midi et dont la tête est figurée par le choeur. Elle a deux bas-côtés qui se prolongent parallèlement au choeur, mais s’arrêtent, là où commence lu courbure de l’abside, en sorte qu’ils ne font pas complètement le tour de l’hémicycle du chœur. Cette disposition est celle de presquetoutes les églises du xie siècle en Normandie... Le chœur s’ouvre entre deux arcades surmontées de fenêtres k plein cintre, qui fout partie du croisillon ou transsept, et ensuite entre deux autres arcades au-dessus desquelles s’élèvent de fausses fenêtres semicirculaires, qui, au XIe siècle, décoraient

souvent les murs des bâtiments, et qu’on peut considérer comme l’origine de ces galeries élégantes du xme siècle, qui ont reçu’plus taru le nom de trifurium. Ce triforiuin, à Lessay, n’est ouvert que dans les deux croisillons. De chaque côté de la nef régnent sept arcades cintrées ; au-dessus des plus rapprochées du chœur existent des fenêtres superposées. Les trois du bas sont fausses ; ta plus élevée éclaire seule I édifice ; les arcades qui descendent vers la porte de l’occident ne sont plus couronnées que de trois fenêtres, deux fausses et une troisième au-dessus, qui e^t ouverte. Les piliers sont ornés de chapiteaux offrant des figures grimaçantes ; mais on remarque que plus ces chapiteaux s’avancent vers le chœur, plus ils sont ornes... Les piliers de la partie inférieure de l’église n’ont pas la forme cylindrique de ceux un haut, et paraissent appartenir à une autre époque. ■ À l’extérieur de l’édifice, la tour carrée, ornée de gargouilles, et le portail occidsutal, très--