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ou que ses branches donnent, quand on les coupe, produit le même effet sur les endroits de la peau où il tombe. On guérit l’enflure avec la décoction des feuilles du maiten ou du lierre terrestre pilé avec du sel. Il est probable que ces effets sont au moins exagérés.

LITHIASE s. f. (H-ti-a-ze — du gr. litkos, pierre). Pathol. Formation de la pierre dans les voies urinaires. « On dit aussi i.ithiasie. Il Tumeur dure au bord des paupières.

LITHIASIQUE adj. (li-ti-a-zi-ke — du gr. lithos, pierrej. Chim. Se disait autrefois de l’acide urique et de certains sels.

LITHIATE s. m. (li-ti-a-te— du gr. lithos, pierre). Chim. Ancien nom des urates.

LITHINE s. f. (li-ti-ne — rad. li’thium). Chim. Oxyde de lithium.

— s. m. Entom. Genre d’insectes coléoptères tétramères, de la famille des charançons, tribu des cléonides, comprenant deux espèces qui vivent à Madagascar.

LITHIQUE adj. (li-ti-ka — du gr. lithos, pierre). Chim. S’est dit de l’acide aujourd’hui appelé acide urique.

LITHIUM s. m. (li-ti-omm — du gr. lithos, Chim. Métal qui fait la base de la lithine. ’ — Encycl. Ce métal, découvert par Arfwedson en 1817, a pour équivalent 80,33. On le désigne par le symbole Li. Il est solide à la température ordinaire ; il possède l’éclat de l’arfeut et le conserve dans l’air sec ; dans l’air umide, il se ternit peu à peu. Il est plus dur que le potassium et le sodium. C’est.le plirs" léger de tous les métaux : sa densité est de 0,5936. Il fond à 180" ; à cette température comme à la température ordinaire il n’est pas attaqué par l’oxygène sec. À une température élevée, il s’enflamme et brûle avec une flamme blanche due à de la vapeur de lithium.

Le soufre attaque ce métal au-dessous de son point de fusion et donne avec lui un sulfure soluble dans l’eau. Le phosphore donne un composé brun qui se décompose au contact de l’eau, en dégageant de l’hydrogène phosphore. Le lithium attaque fortement l’or, Je platine et l’argent ; il décompose l’eau h la température ordinaire.

Davy a isolé le premier le lithium en décomposant le chlorure de lithium pur par l’action de la pile. Ce métal ne forme avec l’oxygène qu’un seul oxyde, l’oxyde de lithium ou lithine, qui entre dans la composition d’un petit nombre de minéraux r le pétalithe, le tri Îihane, la tourmaline apyre, le mica lépidoithe, ainsi que dans certaines eaux minérales de la Bohême.

L’oxyde de lithium (LiO + HO) est blanc, fortement caustique ; il se combine facilement avec l’acide carbonique de l’air. Il attaque les métaux en présence desquels on le fond. Pour le séparer des substances auxquelles il se trouve uni dans les minerais, on broie ces derniers et on les calcine dans un creuset de platine j le résidu est ensuite traité par l’acide chlorhydrique, et la liqueur est saturée avec le carbonate d’ammoniaque, puis on décompose par la baryte le sulfate, de lithine qui reste.

La lithine forme la base de plusieurs sels : le sulfate, le nitrate, la borate et le carbonate de lithine. Ils sont généralement blancs, mous, d’une saveur caustique. Leur composition n’a pas encore été parfaitement étudiée.

On extrait principalement la lithine de la lépidolilhe, minéral très-abondant en Bohème, où il forme des montagnes entières. Les sels de lithine chauffés au chalumeau communiquent à la flamme extérieure une belle teinte rouge caractéristique. Ils colorent en rouge la flamme de l’alcool. Au spectromètre, le fithium est caractérisé par deux raies, l’une jaune et très-faible, l’autre rouge et très-brillante. 8 millionièmes de milligramme évaporés dans la flamme suffisent pour faire apparaître ces raies très-nettement.

LITHIZONTE s. m, (li-ti-zon-te — du gr. lithizà, je ma pétrifie). Ancien nom de l’escarboucle des Indes.

LITHOBATE s. m. (li-to-ba-te — du gr. 'lithos, pierre. ; bateâ, je marche). Erpét. Uenre de batraciens anoures, formé aux dépens des grenouilles.

LITHOBIBLION s. m. (li-to-bi-bii-on — du gr. lithos, pierre ; biblion, livre). Miner. Empreinte de feuille fossile : On trouve des lithobiblions dans une foule de localités. (Léman.)

LITHOBIE s. m. (li-to-bl— du gr. lithos, pierre ; bioô, je vis). Myriap. Genre de myria Ïiodes cholipodes, formé aux dépens des scoopendres, et comprenant une dizaine d’espèces qui habitent l’Europe, le nord de l’Afrique et l’Amérique.

— s. f. Genre de plantes, de la famille des mélastomacées, comprenant plusieurs espèces qui croissent au Brésil.

— Encycl. Les lithobies ressemblent beaucoup aux scolopendres, avec lesquelles on les confondait autrefois. Ces myriapodes se rencontrent dans toute l’Europe, sous les pierres, dans les endroits obscurs des jardins, ainsi que dans les bois, sous les mousses et les feuille» mortes. L’espèce la plus commune est le lilhobie fourchu, oiin est d’un rouge ferrugineux ou d’un brun noirâtre ; sa-lonn. ni-to-kar-pe — du gr. s, fruit). Fruit pétrifié.

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gueur totale ne dépasse pas oa>,03 ; ses antennes, longues et velues, se composent de plus de quarante articles ; les segments de son corps sont alternativement plus grands et plus petits. Dans le jeune âge, les lithobies sont de couleur blanche et comme étiolés, parce qu’ils vivent dans les lieux obscurs ; c’est seulement quelques jours après avoir pris toutes leurs pattes qu’ils commencent à devenir roux. Le lithobie fourchu est répandu dans presque toute l’Europe.

LITHOBOLIE s. f. (H-to-bo-lî — du gr. lithos, pierre ; bolé, jet). Antiq. gr. Supplice de la lapidation.

— s. f. pi. Fête grecque qu’on célébrait en l’honneur de deux jeunes filles Cretoises, lapidées dans une émeute par le peuple.

LITHOCALAME s. m. (li-to-ka-la-me — du gr. lithos, pierre ; Icalamos, roseau). Tige de roseau fossile.

LITHOCARPE S. m.

lithos, pierre ; karpos,

— Bot. Genre d’arbres, de la famille des cupulifères, dont l’espèce type croît à Java.

LITHOCHARE s. m. (li-to-ka-re — du gr. lithos, pierre ; chairo, j’aime). Entom. Genre d’insectes coléoptères pentamères, de la famille des brachélytres, comprenant une trentaine d’espèces, dont plus du tiers se trouve en Europe et le reste en Amérique.

LITHOCHROMATOGRAPHIE S. f. (li-tokro-ma-to-gra-fl— du gr. lithos, pierre ; chroma, couleur ; graphe, j’écris). Techn. Impression en couleur sur pierre.

LITHOCHROMATOGRAPHIQUE adj. (li-tOkro-mato-gra-fi-ke — rad. lithochromatogrci' phie). Techn. Qui a rapporta lalithochromatographie : Procédés lithochromatographiques.

LITHOCHROMIE s. f. (li-to-kro-mî — du gr. lithos, pierre ; chroma, couleur). Procédé

Par lequel on imite la peinture à l’huile, à aide de lithographies peintes à l’envers et collées sur toile.

— Tableau exécuté par ce procédé : Chaque panneau est surorné d’une lithochromie encadrée dans des cadres surchargés de festons en pâte qui simulent nos belles sculptures en bois. (Balz.)

— Encycl. On fabrique les lithochromies en imbibant d’un vernis gras, qui le rend transparent, le papier d’une lithographie au crayon noir ; étendant ensuite derrière le dessin, et de manière à obtenir des effets convenables, des couleurs à l’huile en couches épaisses et

. aussi régulières que possible, puis collant l’estampe sur une toile à tableau et vernissant de nouveau. La face extérieure étant formée par le papier transparent est ainsi parfaitement unie. On arrive par ce procédé à imiter grossièrement la peinture à l’huile.

LITOCHROM1QUE adj. (li-to-kro-mi-kedugr. lithos, pierre ; chro’ma, couleur), Techn. Qui a rapport à la lithochromie : Procédé li-

THOCHROMIQUE.

LITHOCHROMISTE s. m. (li-to-kro-mi-ste — rad. lithochromie). Imprimeur en lithochromie.

LITHOCHROMOGRAPHIE s. f. (li-to-kromo-gra-fî — du gr. lithos, pierre ; chroma, couleur ; graphe, j’écris). Techn. Impression en couleur sur pierre. V. chromolithographie.

LITHOCHROMOGRAPHIQUE adj. (li-tokro-mo-gra-li-ke — rad. liiochromographie), Techn. Qui a rapport à la lithochromographie : Estampe lithochromographique. il On dit mieux chromolithographique.

LITHOCHRYSOGRAPHIE S. f. (li-to-krizo-gra-fî— du gr. lithos, pierre ; chrusos, or ; graphe, j’écris). Techn. Impression sur pierre en or et en couleur.

LITHOCHRYSOGRAPHIQUE adj. (Ii-to-krizo-gra-fi-ke-rad. lithochrysographie). Techn. Qui a rapport à la lithochrysographie : Estampes LITHOCHRYSOGRAPHIQUES.

LITHOCLASTE s. m. (li-tô-kla-ste — du gr. lithos, pierre ; clastés, qui rompt). Chir. Instrument dont on se sert pour broyer la pierre dans la vessie.

LITHOCLASTIE s. f. (li-to-kla-stî — rad. lithoclaste). Chir. Opération par laquelle on brise la pierre dans la vessie.

LITHOCLASTIQUE adj. (li-to-kla-sti-kerad. lithoclastie). Chir. Qui a rapport à la lithoclastie : Procédé lithoclastique.

LITHOCOLLE s. f. (li-to-ko-le — du gr. lithos, pierre, et de colle). Techn. Ciment dont se servent les lapidaires pour assujettir les pierres précieuses qu’ils veulent tailler sur la meule.

LITHODE s. m. (li-to-de —du gr. lithodês, pierreux). Entom. Genre d’insectes coléoptères tétramères, de la famille des charançons, dont l’espèce type habite l’Amérique du Nord.

— s. f. Crust. Genre de crustacés décapodes anomoures, formé aux dépens des crabes, et comprenant trois espèces qui habitent le» mers boréales et australes : La lithode arctique.

LITHODENDRON s. ra. (li-to-dain-drondu et. lithos, pierre ; dendron, arbre). Zooph. Genre de polypiers pierreux, — formé aux dépens des caryophylues et de3 oculines, et.

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comprenant un grand nombre d’espèces fossiles. (] On dit aussi lithodendre.

LITHODERME s. m. (li-to-dèr-me — du gr. lithos, pierre ; derma, peau). Echin. Genre d’échinodermes apodes, assez analogue aux holothuries, et dont l’espèce type habite la mer des Indes.

LITHODIALYSE s. f. (li-to-di-a-li-ze — du gr. lithos, pierre ; dialusis, dissolution). Méd. Traitement ayant pour but de dissoudre la pierre dans la vessie.

— Chir. Opération qui a pour but de réduire les calculs en fragments assez petits pour qu’ils puissent être expulsés par l’urètre.

LITHODOME s. m. (li-to-do-me — du gr. lithos, pierre ; dâmos, habitation). Moll. Genre de mollusques, formé aux dépens des moules, et comprenant les espèces qui vivent dans les pierres qu’elles perforent. V. modiole.

LITHODRASSIQUE adj. (li-to-dra-si-kedu gr. lithos, pierre ; drassà, je saisis). Chir. Qui sert à saisir les calculs : Appareil lithodrassique. H Qui sert à opérer la lithotritie par égrugement.

LITHODYTE s. f. (li-to-di-te — du gr. lithos, pierre ; dûtes, qui navigue). Erpét. Genre de batraciens anoures, formé aux dépens des rainettes.

LITHOÉCIEN, IENNE adj. (li-to-é-siain, iè-ne — du gr. lithos, pierre ; oikos, habitation). Qui croît sur les pierres.

LITHOFELLIQUE adj. (li-tô-fèl-li-ke — du gr. lithos, pierre, et du lat. fel, fiel). Chim. Se dit d’un acide extrait des bézoards orientaux, il On dit aussi lituofellikiquë.

LITHOGÈNE adj. (li-to-jè-ne — du gr. lithos, pierre ; gennaâ, j’engendre). Qui donne naissance à des pierres.

— Qui devient dur comme la pierre : Ciment

L1THOGÉNE.

— Zooph. Qui se pétrifie : Zoophyte lithogène.

LITHOGÉNÉSIE s. f. (li-to-jé-né-sî — du gr. lithos, pierre ; genesis, naissance). Miner. Recherche des lois d’après lesquelles se sont formées les pierres.

LITHOGÉOGNOSIE S. f. (li-to-jé-ogh-nô-zl — du gr. lithos, pierre ; gnôsis, connaissance). Miner. Connaissance des pierres.

LITHOGLYPHE s. m. (li-to-gli-fe — du gr. lithos, pierre ; gluphô, je grave). Graveur sur

pierre.

LITOGLYPHIE s. f. (li-tho-gli-fî — du gr. lithos, pierre ; gluphô, je grave). Art de graver sur pierre.

LITHOGLYPHIQDE adj. (li-to-gli-fi-kerad. lithoglyphie). Qui a rapport a la lithoglyphie : Instruments lithogi.ypHiQUES.

— s. f. Art de graver sur pierre, lithoglyphie.

LITHOGLYPHITE s. f. {li-to-gli-fi-te — rad. lithoglyphe). Miner. Pierre sur laquelle sont empreintes des figures qui semblent avoir été gravées.

LITHOGRAPHE s. m. (li-to-gra-fe — du gr. lithos, pierre ; graphe, j’écris). Celui qui pratique la lithographie.

— Adjectiv. : Imprimeur lithographe.

LITHOGRAPHIE S. f. (li-to-gra-fï — rad. lithographe). Art de dessiner sur pierre et de prendre des empreintes des dessins au moyen de la presse. Il Feuille, estampe imprimée par ce procédé : Selle lithographie. Collection de lithographies.

— Atelier d’un lithographe : Etablir une lithographie. t

— Industrie de la lithographie : La lithographie va mal.

— A signifié Traité sur les pierres : Lithographie suédoise de Bromelli.

— Encycl. Ce genre d’impression, inventé au commencement de ce siècle, a remplacé, en plusieurs cas avec avantage, tant à cause de la célérité que du bon marché de son exécution, la taille - douce, la gravure sur bois et la typographie elle-même. Elle est d’une grande utilité surtout pour les impressions en couleur qui exigent la rapidité dans l’exécution jointe à la modicité du prix.

La lithographie fut découverte, vers 1796, par le Bavarois Senefelder. C’était un assez médiocre auteur dramatique, dont les éditeurs repoussaient les productions, et qui, voulant s» passer d’eux, rêvait de suppléer à l’impression typographique par la gravure. Ses essais sur cuivre achevèrent de le ruiner ; il essaya alors de se servir d’une pierre commune.en Bavière et qui ne se trouve que là, la pierre de Solenhofen, une pierre lisse, susceptible d’un beau poli et facilement attaquable par les acides. Il poursuivait ses recherches de ce côté, sans grand succès, lorsque le hasard le servit. Il a raconté lui-même qu’ayant à écrire une note de sa blanchisseuse, et ne trouvant pas de papier sous la main, il l’écrivit sur une pierre qu’il était en train de polir, avec une encre chimique de sa composition, qui était un mélange de cire, de savon, dégomme laque et de noir de fumée. En passant ensuite de l’eau-forte sur les caractères pour voir ce qui adviendrait, il s’aperçut que la’ pierre baissait de niveau sur tous les points, hors ceux que l’encre avait touchés,

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et que l’on obtenait ainsi l’écriture en relief. Ce fut le commencement de l’invention ; il perfectionna peu à peu ses procédés, et l’ensemble des manipulations lithographiques était complètement trouvé par lui en 1799. Ses voyages à Munich, à Vienne, à Londres et à Paris répandirent très-rapidement la connaissance de l’art nouveau ; toutefois, il ne divulguait ses secrets qu’à peu de personnes, et il fallut les deviner ou reconstituer une a une toute la série de ses expériences. Pendant longtemps, il n’avait cherché à obtenir qu’une impression lithographique des caractères ; il montra même à Paris, lithographie de cette sorte, l’ouvrage qui avait été la cause première de ses recherches. Mais il ne tarda pas a s’apercevoir que sa découverte était bien plus merveilleuse encore, appliquée au dessin, et c’est à cette application que tendirent tous les efforts des artistes français.

De l’Allemagne, où elle arriva dès son commencement à un haut degré de prospérité, la lithographie fut introduite avec succès à Rome et à Londres dans le courant de l’année 1807. Vers la même époque, M. André Offenbach l’apporta en France ; mais ses essais furent si peu satisfaisants que le gouvernement français lui refusa toute espèce d’encouragement.

C’est alors que M. de Lasteyrie, prévoyant toute l’importance que la lithographie pouvait avoir dans les arts du dessin, se rendit en Allemngne, s’engagea comme simple ouvrier lithographe, et dépensa des sommes considérables pour connaître les secrets de cet art. Eu 1SU, il vint fonder en France un établissement lithographique qui produisit plusieurs compositions remarquables et servit d’école et de modèle à tous ceux qui s’établirent ensuite.

En 1818, le gouvernement français prodigua à la lithographie beaucoup d’encouragement. Elle prit alors un développement immense. Artistes, amateurs, gens du monde accueillirent cet art nouveau comme une merveille. Les Tuileries eurent leur-presse lithographique. La duchesse de Berry, avant 1830, le duc d’Orléans, sous le règne de Louis-Philippe, aimaient beaucoup à dessiner sur pierre.

Parmi les hommes qui on t le plus concouru, en France, au perfectionnement et à la vulgarisation de la lithographie, il faut citer, après M. de Lasteyrie, Éngelman, de Mulhouse ; Marcel de Serres, Raucourt, Vilain, Legros d’Anizy et Lemercier, dont l’établissement, fondé par lui rue de Seine, est connu de tout le monde.

Dès l’apparition de cet art nouveau, les plus grands artistes français, Girodet, Carie et Horace Vernet, Prudhon, Géricault, s’y adonnèrent avec un vif plaisir et lui donnèrent l’empreinte de leurs talents si variés. Spirituelle et légère avec Carie Vernet, vaporeuse avec Prudhon, rude et presque féroce avec Géricault, la lithographie se plia merveilleusement à tous les caprices de la touche et eut tout de suite une vogue considérable. «Bien qu’un Allemand l’ait inventée, dit M. Ch. Blanc, la lithographie est un art français, français par les qualités qu’il exige et qui sont nôtres. Tout ce qu’il faut, nous le possédons : l’observation prompte, la facilité, l’esprit, l’habitude d’un langage preste et vif qui, de peur d’ennuyer, s’abstient de tout dire, enfin une manière superficielle d’exprimer des choses quelquefois profondes... Au début de la lithographie s’est révélé un artiste qui en a I deviné la vraie destination, un artiste de génie, Charlet. Le premier il emploie ce genre de gravure cursive à, improviser l’expression ’ des sentiments populaires, il inaugure le journalisme de l’art. Par elle, Charlet sait nous montrer, quelquefois grotesques, mais toujours intéressants, les «anciens du Camp de la lune, » les grognards qui s’attardent au cabaret pour oublier les hontes de l’invasion, l’intrépide Lefèvre qui traverse l’estampe comme un ouragan, le conscrit qui est aujourd’hui ridicule et qui demain sera un brave, le gamin qui veut emboîter le pas des tambours, et les hussards qui guettent la poule du fermier après s’être battus à outrance pour défendre la ferme. L’avantage de la lithographie, c’est de se prêter mieux peut-être que tout autre procédé, et avec plus de souplesse, à mettre en lumière le génie, le caractère et le tempérament de chaque maître, par la raison qu’elle ne demande l’intervention d’aucune main étrangère. Que Prudhon y touche un moment, et aussitôt une exquise douceur succède aux touches franches de Charlet, aux rudesses de Géricault. Le crayon ’ caresse la pierre et s’y attendrit. Si Ingres, à son tour, dessine sur la pierre une odalisque, il y met l’empreinte du style. Son crayon, conduit ’ par une volonté émue et contenue tout ensemble, précise non la volupté des chairs, mais la volupté des formes, et il les modèle discrètement, d’un grain serré, ferme et pur.

La lithographie est donc susceptible de prendre les physionomies les plus diverses. Elle a sous la main de Bonnington la ^consistance et les glacis d’une peinture profonde ; sous la main de Gigoux, elle est vivante dan3 ses beaux portraits de Gérard, d’Eug. Delacroix et des frères Johannot, qui semblent formulés dans un rayon de soleil ; elle est corsée, empâtée et comme.pôtrie avec de la lumière dans les estampes de Decamps ; elle est d’un» pâleur austère et solennelle dans la sainte frise de Flandriu. Seule aussi elle peut