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peu la température, il se sépare un alliage très-fusible, composé de la équivalents de plomb pour 1 de cuivre, tandis qu’il reste un alliage solide, peu fusible, composé de 12 équivalents de cuivre pour 1 de plomb. On profite des propriétés remarquables de ces deux combinaisons pour atteindre le but dont nous avons parlé : on mélange le cuivre argent ! 1ère aune quantité convenable de plomb ; par l’action de la chaleur, l’alliage fusible, riche en plomb, s’écoule en dissolvant et en entraînant l’argent, que l’on isole ensuite par coupeliatioii.

Au contraire, la liquation est un obstacle des plus graves à ïa fabrication des alliages métalliques homogènes. Cette difficulté est surtout remarquable pour les alliages de cuivre et detaiii, c’est-à-dire les bronzes. Lorsqu’on maintient du bronze en fusion, il ne tarde pas à se séparer en deux portions, l’une, plus dense, très-riche en cuivre, qui tomba au fond du creuset, l’autre plus légère, très-riche en étain, et qui monte u la surface. Au’ moment du refroidissement, cette séparation s’opère d’une façon plus complète, et pour peu que la pièce que l’on veut couler ait de grandes dimensions, elle présente entre ses diverses parties des différences de composition extrêmement marquées. Cet inconvénient est très-grave dans une foule de cas, parmi lesquels nous citerons la fabrication des canons : si une pièce est formée d’alliages de duretés différentes, lorsqu’elle a servi quelque temps, le frottement des projectiles déforme l’âme en certains endroits moins durs et produit ce que l’on appelle des logements ou des sifflets ; l’arme ne tarde pas k être hors d’usage, ne possédant plus aucune justesse ; elle peut même manquer de solidité et donner lieu à des accidents. On ne connaît aucun moyen d’empêcher la liquation, pour arriver à couler des pièces tout à fait homogènes ; toutefois, on a indiqué diverses méthodes opératoires qui diminuent un peu les inconvénients de ce phénomène, mais elles sont presque spéciales k chaque fabrication.

LIQUÉFACTION s. f. Ci-kué-fa-ksi-on ou li-ké-fa-ksi-on — lat. tiquefactio ; de liquefacere, liquélier). Passage d un corps k l’état liquide : La masse centrale du globe est constamment dans un état de liquéfaction produite par la chaleur. (L. Figuier.) La pluie promeut de la liquéfaction des nuaqcs. (F. Pillon.) y v

— Ascét. État du cœur qui se fond, pour ainsi dire, par la ferveur de la dévotion :

Tout ce qui coule au cœur de doux saisissements, De liquéfactions, d’épanouissements.., .

, Corneille.

— Encycl. Appliquée aux corps solides, la tiquéfuction porte plus communément le nom de fusion ; appliquée aux vapeurs, elle s’appelle condensation. Il a été traité du phénomène à ces deux mots. Nous parlerons ici surtout de la liquéfaction des gaz.

La liquéfaction des solides, ou fusion, a pour cause soit la chaleur, soit la dissolution.

La liquéfaction des ga2 et des vapeurs a pour-causes le refroidissement ou la compression.

À l’égard des vapeurs, il n’y a aucune difficulté. Un simple refroidissement suffit pour les amener à l’état liquide. Tout le monde a vu des carafes remplies d’eau fraîche se couvrir de rosée en quelques instants : cette rosée provient de la liquéfaction par refroidissement de la couche de vapeur aqueuse qui touche au verre de la carafe.

La plupart des gaz offrent à la liquéfaction plus de résistance que les vapeurs. Il faut tantôt les refroidir, tantôt les comprimer, et souvent associer les deux moyens. Le premier gaz qu’on ait liquéfié est le gaz ammoniac. Van Marum, en le comprimant dans une éprouvette, le vit se transformer en liquide. Monge et Clouet ont liquéfié l’acide sulfureux en abaissant sa température k—10°. Davy et Faraday, en 1823, ont liquéfié un grand nombre de gaz, entre autres le chlore, par un procédé très-simple, qui est encore fréquemment’ employé. Ils prenaient un tube recourbé en forme d’U. À l’une des extrémités, ils enfermaient les substances qui, chauffées et mélangées, devaient produire le gaz. Le tube étant parfaitement fermé, ils plongeaient l’extrémité vide dans un mélange réfrigérant. Forcé par le refroidissement et par l’effet de sa propre tension k se condenser, le gaz produit se convertissait en liquide, k moins pourtant que le tube n’éclatât, ou que l’action chimique ne s’arrêtât.

Le bris des vases dans lesquels s’effectue la liquéfaction a été longtemps, en effet, le principal obstacle au succès de l’opération, à cause des dangers qui en résultaient. On n’a pas oublié, dans les laboratoires, l’accident qui signala, en 1835, les débuts de l’application de l’appareil Thilorier, fonctionnant pour liquélier, puis solidifier l’acide carbonique : c’était à l’Keole de pharmacie ; le vase se rompit sous la tension du gaz et les éclats emportèrent les deux jambes de l’infortuné préparateur, M. Hervy. L’effort des constructeurs se porta donc sur les moyens de consolider les récipients dont les parois ont à supporter des pressions qui peuvent aller jusqua 150 atmosphères. L appareil de Thilorier a été perfectionné par Al. Deleuil, puis par Mil. Mareska et Donny. Il est fondé sur la principe qu’appliquèrent Davy et Faraday. Comme il uo peut servir que pour l’acide carX.

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bonique, Pouillet imagina un autre appareil dans lequel les gaz sont foulés par une pompe, mais qui ne donne que de très-petites quantités de liquide. C’est alors que M. Dumas, voulant obtenir à l’état liquide une grande quantité de protoxyde d’azote, donna à Bianchi des indications d’après lesquelles celui-ci construisit l’appareil suivant, qui a l’avantage de pouvoir être appliqué à tous les gaz.

Le gaz bien desséché arrive par la tube A dans un corps de pompe. Là, un piston, dont la tige est mue par une manivelle, pousse le gaz dans un réservoir B, qui plonge dans un seau rempli de glace. Comme certains gaz liquéfiés attaquent le fer, l’intérieur du réservoir B est formé d’une enveloppe de cuivre, laquelle est entourée et soutenue par une seconde enveloppe de fer, capable de supporter des pressions de G00 k 700 atmosphères. Au fond du réservoir est une soupape ; elle est soulevée par le {jaz qui entre ; puis elle retombe par l’effet d un ressort, et s’oppose à la sortie du liquide formé. Enfin, au sommet du même réservoir, on voit un bouchon à vis, qui ferme un orifice par lequel on retire le liquide.

La plupart des gaz ont pu être liquéfiés avec cet appareil. En général, les gaz liquéfiés sont incolores et très-fluides ; le chlore et l’oxyde de chlore seuls donnent des liquides colorés. Ils ne se mêlent point à l’eau, et se dissolvent dans l’alcool et dans l’éther. « Quand on les enferme dans des vases, ils ne s’y conservent cju’k la faveur d’une pression énergique, et c est une portion de leur masse maintenue k l’état gazeux qui comprime la partie devenue liquide. Aussitôt que l’on ouvre le vase, le gaz s’échappe très-bruyamment, et le liquide, ramené tout k coup a la pression atmosphérique, commence et continue k bouillir activement. Bientôt sa température baisse jusqu’à atteindre une limite fixe pour chacun d’eux, et qui est, par exemple, égale à — 570 pour l’acide sulfureux, et à — 88" pour le protoxyde d’azote. À mesure que le liquide se refroidit, son ébullition se ralentit ; elle devient régulière et se continue indéfiniment aussitôt que le liquide est arrivé à la température limite, qui est celle de son ébullition. Ces phénomènes se conçoivent aisément, car ils sont identiques avec ceux que nous offrent les liquides ordinaires placés dans les mêmes conditions. 1 (Jamin.)

On devine aisément que les plus grandes précautions doivent accompagner la manipulation-de liquides dont l’évaporation est capable de produire de tels abaissements de température. « L’oxyde d’azote, ajoute l’auteur que nous venons de citer, arrive, par exemple, k — 88°. À ce moment, il est fort dangereux de tenir à la main les vases qui le contiennent, car ils refroidissent instantanément les organes, congèlent le sang, et les tissus se désorganisent ensuite avec une sensation de cuisson tout k fait pareille k celle qui résulte d’une brûlure. Si l’on verse peu à peu de l’eau dans le vase, elle s’y congèle aussitôt : le mercure lui-même y prend l’état solide et affecte ensuite toutes les propriétés d’un métal malléable analogue au plomb. On a donc ainsi un moyen de déterminer des abaissements de température extrêmement considérables. »

En mêlant de l’acide carbonique solidifié avec de l’éther, Faraday a obtenu un réfrigérant dont la température est de — 790 ; il spen est servi en 1845 pour liquéfier d’autres gaz jusque-là rebelles. Il plaçait le mélange (l’éther et d’acide carbonique solidifié sous la cloche d’une machine pneumatique. À mesure que le vide se faisait, l’acide s évaporait et conséqueminent perdait de la chaleur. Il obtint de cette manière un froid qui alia jusqu’à

— lioo. Alors il plongeait un réservoir u-èssolide au milieu de cet énergique réfrigérant le tout maintenu dans le vide ou dans l’air raréfié, et, h l’aide d’une pompe foulante il comprimait les gaz dans ce réservoir, jusqu’à 5o atmosphères. Il put ainsi liquélier tous

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les gaz, excepté cinq, savoir : l’oxvgène, l’azote, l’hydrogène, l’oxyde de carbone et lo bioxyde d’azote. Il est à remarquer que ces gaz sont précisément ceux qui entrent, eux ou leurs éléments, dans ia constitution des êtres organisés. > Ce n’est pas à dire que ces gaz ne puissent se réduire à l’état liquide ; il ne faut en conclure qu’une seule chose, c’est que, tout énergiques qu’ils ont été, les moyens d’action étaient encore insuffisants pour ces substances ; et, comme tous les autres gaz ont pu se liquéfier, c’est une loi générale, que des exceptions peu nombreuses, et qui s’expliquent, ne suffisent pas à infirmer. »

La compression nécessaire pour obtenir la liquéfaction des gaz varie avec la température : plus celle-ci est basse, moins il faut de pression pour obtenir le même résultat. Tandis, par exemple, qu’à la température de — 1°, il faut des pressions énormes, il suffit, dons bien des cas, d’une seule atmosphère, lorsque la température arrive à — 75». S’il existe quelque part un monde où la température normale soit de 80 à 100° au-dessous de zéro, on voit que le nombre des gaz différents doit y être fort petit, et que la plupart des corps qui nous sont connus comme gazeux doivent, dans ce monde, être liquides, comme l’eau chez nous.

LIQUÉFIABLE adj. (li-ké-fi-a-ble — rad. liquéfier). Qui peut être liquéfié : La fonte est liqukfublu à 1,200<>. (Chevreul).

LIQUÉFIANT, ANTE adj. (li-ké-fi-an, an-te

— rad. liquéfier)* Qui est propre à produire la liquéfaction : Chaleur liquéfiante.

LIQUÉFIÉ, ÉE (li-ké-fi-é) part, passé du v. Liquéfier : Nos aliments solides ont tous besoin d’être liquéfiés avant d’être absorbés. (F. Pillon.)

LIQUÉFIER v. a. ou tr. (li-ké-fi-ê — lat. liquefacere ; de liquere, être liquide, et de facere, faire ; prend deux 1 de suite à la première et a la deuxième pers. de l’imp. de l’imlicat. et du prés, du.subjonct. : Nous liquéfiions, que vous liquéfiiez). Rendre liquide : La chimie est parvenue à liquéfier, par la voie sèche, la matière des montagnes primitives, qui sont toutes composées de gneiss, de granit, etc. (G. Cuvier).

Se liquéfier v. pr. Devenir liquide : La cire SE liquéfie par la chaleur. (Acad.)

— Ascét. Se dit du cœur qui est complètement absorbé dans l’amour divin.

LIQUENTIA, nom latin de la rivière de Li VENZA.

LIQUET s. f. (li-kè). Hortic. Très-petite espèce de poire, dite aussi poire de la vallée.

LIQUEUR S. f. (li-keur — lat. liquor ; de liquere, être clair, qu’Ëichhoff rapporte a la racine sanscrite laïcs ou lauc, voir paraître). Substance liquide : Les beaux jours de no-tre vie sont ceux de notre jeunesse, comme les premières liqueurs qui sortent d’un vaisseau sont les plus pures, (LaMotheLe Vayer.)

C’est toi, divin caTé dont l’aimable liqueur. Sans altérer la tête, épanouit le cœur.

Deluxe.

— Boisson obtenue par la distillati’on ; boisson dont l’eau-de-vie ou l’alcool fait la base : Liqueur spiritueuse. Liqueur foj-te. Liqueur douce. L’amour est comme les liqueurs spiritueuses ; moins il s’exhale, plus il acquiert de force. (Duclos.) C’est l’alcool affaibli qui donne l’eau-de-vie, basa de toutes les liqukurs. (A. Rion.) L’abus des liquhurs fortes fait chaque année 50,000 victimes en Angleterre. (L. Cruve il hier.)

— Alcool qui se trouve dans le vin et qui lui donne de la force : Ce vin a beaucoup de liqueur, u Douceur du vin : Ce vin a trop de liqueur, manque de liqueur.

Vins de liqueur, Vins doux et capiteux, qu’on boit à l’entremets et au dessert.

Liqueurs fraîches. Boissons rafraîchissantes, telles que la limonade, l’eau de groseille, etc.

— Poétiq. La liqueur bachique, Le vin.

— Teehn. Eau de sou avec laquelle les teinturiers préparent les étoffes destinées à la teinture.

— Pharm. Nom donné k un grand nombre de préparations liquides, il Liqueur arsenicale de Fowler, Préparation qui contient de l’acide arsénieux étendu de carbonate de potasse. Il Liqueur de cailloux ou Verre soluble, Composé de 1 partie de silice et de 3 parties de potasse, soluble dans l’eau, obtenu en faisant bouillir des cailloux dans une solution de potasse, et qui est employé dans les pansements chirurgicaux. 11 Liqueur de Goid- îand, Mélange de deutochlorure de mercure, de sel ammoniac et de lait d’amandes amères, employé à l’extérieur contre le prurigo.

Il Liqueur iodo-tannique, Mélange d’iode et de tannin dans les proportions de 1 à 3, étendu de 100 parties d’eau, réduites au dixième par évaporation. || Liqueur des Hollandais, Chlorure d’hydrogène bicarboné liquide, employé en topique contre les douleurs névralgiques et rhumatismales. Il Liqueur de Labarraque, Dissolution de 200 parties de carbonate de soude et de 100 de chlorure de chaux dans 4,500 d’eau, qu’on emploie dans le pansement des plaies. Il Liqueur mercurielle normale, Mélange d’eau distillée, de blanc d’œuf, de sel marin, de sel ammoniac et de

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sublimé corrosif. Il Ligueur minérale anodine d’Hoffmann, Mélange k poids égaux d’alcool et d’éther sulfurique, employé dans les mêmes cas et aux mômes doses que l’éther sulfurique. Il Liqueur minérale anodine nitreuse, Liquide fortement coloré en jaune, trêséthéré et préparé par le mélange de 2 parties d’alcool k 36u avec une partie d’acide azotique à 330. il Liqueur de Pearson, Arséniate de soude dissous dans de l’eau distillée, que l’on emploie comme la liqueur arsenicale de Fowler. il Liqueur de Van-Swieten, Liqueur formée de 1 gramme de deutochlorure de mercure, que l’on fait dissoudre dans 100 grammes d’alcool, à quoi l’on ajoute 000 grammes d’eau distillée, il Liqueur de Villate, Dissolution de s’ous-acétate de plomb, de sulfate de zinc et de sulfate de cuivre ; qu’on emploie surtout en médecine vétérinaire.

— Chim. Ligueur de Cadet, Liquide que l’on obtient en distillant un mélange de partics égales d’acide arsénieux et d acétate de potasse anhydre. Il Liqueur d’épreuve, Liquide qui sert à mesurer la force décolorante d’une substance chlorée, pour en conclure ia quantité de chlore qu’elle contient, il Liqueur fumante de Jioyle, Sulfhydrate d’ammoniaque liquide. Il Liqueur fumante de Libavius, Chlorure d’étaiu liquide. Il Liqueur de AJonro, Dissolution de 4 gr. d’acide azotique fumant dans 800 grammes d’alcool à 22», qu’on a employée pour la conservation dés pièces anatomiques.

n Liqueur Ldes savonniers, Solution de soude caustique employée dans la fabrication du savon, il Liqueurs titrées ou normales, Nom donné k des solutions liquides contenant en solution des sels, acides ou oxydes, ou toute autre substance de nature soit minérale, soit organique, en proportion déterminée.

— Physiol. Liqueur de t’amnios, Liquide dans lequel le fœtus est complètement immergé, il Liqueur du sang, Partie liquide du sang, composée de sérum et de fibrine.

— Encycl. Les anciens ne connaissaient pas les liqueurs, l’art de distiller n’ayant été découvert qu’au moyen âge ; ils les remplaçaient par des vins fermentes, dont quelques-uns se rapprochaient de nos tiqueurs. Le falerne vieux, mêlé avec du miel, était si enivrant que les femmes avaient défense d’en boire. À l’imitation des anciens, nos ancêtres se composaient une liqueur avec du moût de vin, dans lequel ils faisaient infuser des baies de lentisque ou du bois tendre de cet arbuste. Les vins artificiels, faits, soit avec des lentisques, soit avec d’autres herbes aromatiques, appelés par Grégoire de Tours vina odoramentis ûnmixta, furent leurs seules ligueurs, longtemps même après la découverte de l’eau-de-vie. Parmi ces vins-tiqueurs, il faut citer le vin cuit, composé de moût qu’on faisait réduire sur le feu au tiers ou à la moitié. Les capitulaires de Charlemugne en parlent sous le nom de vtiiuni coctum, et les provinces méridionales l’appelaient sabe, du mot latin sapa, qui avait chez les Romains la même signification (v. Pline, Histoire naturelle, xiv, 11). Les vins artificiels, qui ne consistaient que dans des infusions de plantes aromatiques ou médicinales, telles qu’absinthe, myrte, aloès, anis, hysope, romarin, etc., étaienta ppelés vins herbes, et on les employait souvent comme remèdes. C’est avec du vin d’absinthe au miel que Frédégonde empoisonna le seigneur qui lui reprochait le meurtre de Prétextât. Les plus célèbres de ces vins étaient ceux dans lesquels, outre le miel, il entrait des épices et des aromates d’Asie, et auxquels ou dormait lo nom de piments. Les poètes du xiu® siècle n’eu parlent qu’avec transport et comme d’une chose délicieuse ; aucun festin n’eût été complet si on ne les y avait vus figurer, et lo concile d’Aix-la-Chapelle, tenu en 817, ordonna que, dans les couvents, on ne servirait de cette liqueur voluptueuse qu’aux jours do grande fête seulement. L’hydromel et l’hypocras rentraient dans cette catégorie de boissons fermentées et presque alcooliques ; mais ce n’étaient pas des liqueurs, et nous ne faisons que les mentionner. Enfin, il y avait certaines liqueurs composées uniquement des sucs de fruits, et qui portaient le litre de vins. Tels étaient les vins de cerises, de groseilles, de framboises, de grenades et autres. Le vin fait avec des mûres s’appelait moré ; il est souvent cité par nos postes du xmo siècle.

Les liqueurs véritables, étant dérivées de l’eau-de-vie de vin, ne commencèrent k paraître que longtemps après que la distillation du vin eut été reconnue possible, probablement vers le xivo siècle (v. eau-de-vië) ; il fallut bien des années avant que ces préparations sortissent du domaine des alchimistes, et les religieux, qui employaient la distillation k la confection de baumes et de panacées, paraissent avoir les premiers trouvé certaines liqueurs. Montaigne, dans la curieuse relation qu’il a laissée de son voyage eu Italie, parle des jésuites de Vicence, qui fabriquaient des eaux de senteur et des liqueurs médicinales, et de ceux de Vérone, qui distillaient et vendaient des liqueurs, entre autres une eau de marc fort estimée. Nous consacrons plus loin un paragraphe spécial aux liqueurs monastiques.

Les alchimistes s’attachèrent de bonne heure aux préparations alcooliques, qui devinrent la panacée universelle ; au lieu de faire infuser des épices dans du vin, on les

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