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Mémoire sur la figure des planètes, où, h l’aide des méthodes nouvelles instituées dans son mémoire de 1782, il démontrait le premier que la figure elliptique peut seule convenir à l’équilibre d’une masse fluide, homogène, animée d’un mouvement de rotation et dont toutes les molécules s’attirent en raison inverse du carré de la distance. Différents géomètres avaient déjà reconnu que l’ellipse est une des courbes qui satisfont à la condition d’équilibre ; mais on n’en savait pas davantage, et Laplace, dans son mémoire de 1772, disait positivement qu’il n’osait pas affirmer que l’équilibre fût impossible sous une autre forme, 11 ajoutait qu’il faudrait, pour le prouver, connaître en termes finis l’intégrale complète de l’équation différentielle du problème, et qu’il n’avait pu encore l’obtenir. C’est à quoi parvint Legendre. Plus tard, en 1790, il trouva que la figure elliptique est encore celle qui convient a l’équilibre, soit lorsque le sphéroïde est formé d’un noyau solide recouvert d’un liquide, soit lorsqu’il est formé de couches’fluides de densités variables.

Déjà, en 1789, il avait ajouté à son mémoire de 1783 ce nouveau théorème que, si deux sphéroïdes elliptiques ont leurs trois sections principales décrites respectivement des mêmes foyers, les attractions qu’ils exercent sur un point quelconque sont dirigées suivant la même droite, et proportionnelles à leurs masses. On sait que Maclaurin, qui avait étudié te premier la question, n’avait considéré que le cas où le point attiré se trouve sur l’un des axes communs aux deux ellipsoïdes. Ces beaux travaux annonçaient un géomètre de premier ordre. Nous allons voir Legendre se montrer tout aussi éminent dans des recherches plus pratiques, et qui ne semblaient pas exiger l’intervention d’un esprit aussi distingué.

Nommé, en 1787, l’un des commissaires chargés des opérations géodésiques qui devaient relier 1 Observatoire de Paris a celui de Greenwich, non-seulement Legendre prit une grande part aux observations journalières et aux calculs "logarithmiques, mais il améliora considérablement toutes les méthodes suivies jusque-là par les ingénieurs géographes. Les triangles qui font partie d’un même réseau ont de très-petites dimensions relativement à la sphère entière ; on ne peut cependatiàpas, comme on le faisait autrefois, considérer ces triangles comme plans ; les angles, mesurés aux trois sommets, formeraient toujours une somme un peu supérieure à deux droits. Legendre montra qu’il convient de réduire chacun d’eux du tiers de l’excès sphérique (v. triangulation). C’est aussi lui qui imagina, pour calculer la longueur de la méridienne, de se servir des parties interceptées sur cotte méridienne par les triangles consécutifs, au lieu de la diviser par les parallèles des différentes stations. On appliquait aux études géodésiques les formules ordinaires de la trigonométrie sphérique ; Legendre enseigna à tenir compte de l’aplatissement de la terre ; il démontre, dans un mémoire séparé, qu’on peut toujours, sans erreur sensible, considérer les triangles géodésiques comme tracés sur la sphère osculatrice à l’ellipsoïde.

Nous avons déjà dit qu’il prenait une part très-active à l’opération elle-même. Il calcula non-seulement tous les triangles situés en France, mais même ceux qui reliaient la côte d’Angleterre à Greenwich. Ce travail l’amena à Londres, où il fut accueilli avec la plus grande distinction et nommé membre de la Société royale. Ses recherches sur la question qui nous occupe ont été présentées-par lui à l’Académie des sciences en 1787, dans un Mémoire sur les opérations trigonométriques dont tes résultats dépendent de la figure de la terre. C’est dans ce mémoire qu’on voit appara !tre, pour la première fois, la dénomination de lignes géodésiques, attribuée aux lignes de longueur minimum tracées sur une surface donnée. La théorie des lignes géodésiques des surfaces du second ordre a, depuis, fait l’objet de ses études à différents intervalles.

II avait été désigné, en 1791, pour faire partie de la commission chargée de procéder a une nouvelle mesure de la méridienne entre Dunkerque et Barcelone, et à la détermination de la base du nouveau système des poids et mesures. Son nom ne fut pourtant pas porté sur la liste des commissaires nommés en 1795 pour présider à cette grande opération. Il ne prit donc aucune part effective aux opérations eiles-mêmes ; mais on peut dire qu’il les dirigea encore, même absent, Delambre ayant eu le bon esprit d’adopter toutes les méthodes que Legendre avait proposées dons les mémoires de 1787. Au reste, Legendre ne resta pas entièrement étranger à 1 entreprise ; on le retrouve dans les rangs de la commission internationale chargée de vérilier tout le travail, et il signa en 1799 le rapport à l’Institut qui décida de l’adoption du système métrique ; il continua de prendre part à tous les calculs de vérification nécessités par les quelques discordances qui troublèrent si fort les dernières années du pauvre Méchain et hâtèrent même sa mort. Legendre était regardé comme indispensable à toute grande opération de calcul. Aussi Prony, nommé directeur du cadastre en 1794, s’empressa-t-il de recourir à ses lumières et de réclamer sa collaboration. Chargé par la Convention de la construction de tables centésimales qui devaient compléter la réforme des poids et mesures et former le

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monument le plus imposant qui eût encore été connu en ce genre, Prony offrit à Legendre la présidence de la section d’analystes qui devait distribuer le travail, tracer la marche à suivre et donner les formules dont se serviraient les calculateurs. Legendre imagina, à cette occasion, les formules les plus élégantes pour exprimer les différences successives des sinus. Pour ne plus revenir sur ses travaux non exclusivement théoriques, nous mentionnerons de suite le nouveau mémoire lu par lui à l’Institut en 1806, Sur les triangles tracés à la surface d’un sphéroïde, mémoire où il généralise encore les méthodes qu’il avait données précédemment, et passe de nouveau en revue toutes les principales opérations de la géodésie. De la discussion à laquelle il s’y livre du grand travail de Méchain et Delambre, il conclut qu’il ne doit plus rester aucun doute sur l’exactitude des résultats obtenus, et que les anomalies remarquées dans les latitudes et les azimuts doivent être attribuées à des attractions locales. Toutes ces longues recherches presque pratiques ne l’avaient pas absorbé au point de le distraire complètement de la théorie pure. Outre un grand mémoire sur la théorie des nombres, lu à l’Académie en 1785, et qui contient le célèbre théorème de réciprocité connu sous le nom de toi de Legendre, il avait donné en 1786 une méthode pour distinguer les maxiraa des minima, dans les questions dépendant du calcul des variations ; deux mémoires sur les intégrations par. arcs d’ellipse, qui contiennent les premières bases de sa 2’héorie des fonctions elliptiques ; en 1787, un Mémoire sur l’intégration de quelques équations aux différentielles partielles, où, après avoir formé analytiquement l’intégrale d’une équation que Monge n’avait pu traiter que par des considérations géométriques, il discute les cas d’intégrabilité des équations non linéaires du premier ordre ; en 1790, un Mémoire sur les intégrales particulières des équations différentielles, où il prépare la voie suivie depuis par Poisson, dans son travail sur le même sujet ; enfin, en 1793, un nouveau Mémoire sur les transcendantes elliptiques.

Legendre avait accueilli avec joie le mouvement révolutionnaire, à son origine ; il fut cependant obligé, un instant, de se cacher pendant la l’erreur. C’est dans sa retraite, à Paris, qu’il connut M"» Marguerite-Claudine Couhin, dont il devint l’époux peu de temps après.

Il publia en 1794 ses Éléments de géométrie, dont le succès énorme vint assurer son existence matérielle et le mit pour toujours à l’abri du besoin.

Legendre ne fut porté, par le gouvernement, ni sur la liste des premiers professeurs de l’École polytechnique, ni sur celle des professeurs des écoles normales ; il ne fit pas partie non plus du premier noyau de l’Institut ; mais ses confrères se hâtèrent de réparer l’espèce d’injustice commise à son égard. Il entra à l’Académie des sciences aussitôt qu’elle se constitua, et fut nommé quelque temps après examinateur de sortie pour les élèves de l’École polytechnique destinés à l’artillerie. Il occupa cette dernière fonction jusqu’en 1815, époque où il s’en démit volontairement.

On se servait autrefois d’un grand nombre d’observations fuites sur une même comète pour en déterminer, par interpolation, quelques positions que l’on croyait devoir être à peu près exemptes d’erreurs, celles qu’on avait commises dans les observations devant probablement se compenser. Cette méthode était rebutante par la longueur des calculs auxquels elle entraînait. Legendre montra, dans deux mémoires publiés en 1805 et 1806, qu’elle était plutôt nuisible qu’utile, et en donna une autre, fondée sur des principes purement analytiques. C’est ce problème des orbites des comètes qui lui suggéra sa. Méthode des moindres carrés, dont le but est de réduire le plus possible les chances d’erreurs dans toutes les circonstances où l’on doit faire concourir un grand nombre d’observations ou de calculs approximatifs à la détermination d’un résultat définitif. Cette méthode des moindres carrés a été un instant revendiquée, en 1809, par Gauss, qui y était parvenu de son côté ; mais il est certain que Legendre l’avait le premier rendue publique.

À la création de l’Université en 1803, Legendre en fut nommé conseiller titulaire, et il remplaça Lagrauge en 1812 au bureau des longitudes ; il faisait déjà partie de la commission des poids et mesures. À partir de 1815, il s’attacha presque exclusivement à ses travaux sur la théorie des nombres et sur les intégrales elliptiques.

La 2’héorie des nombres, qui parut en 1830, avait été précédée en 1785 des Recherches d’analyse indéterminée, et en 179S de VEssai sur ta théorie des nombres, qui l’ut réédité en 1808, avec deux suppléments. • Si l’on compare, dit M. Élie de Beaumont, le contenu de ce savant ouvrage à ce qu’on avait découvert pendant les deux mille ans qui ont précédé l’année 1785, on voit qu’aucun savant n’a marqué son passage dans cette branche des mathématiques par une trace comparable à celle des efforts de M. Legendre. » Ses premières recherches faisaient simplement suite à celles d’Euier et de Lagrange, qu’elles développaient en plusieurs points importants ; on remarque cependant déjà, dans son mémoire de 1785, le théorème

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entièrement neuf qu’on désigne sous le nom de loi de Legendre et qui est l’un des plus féconds de la théorie des nombres. Voici en quoi il consiste : deux nombres premiers m et 11 étant donnés, si l’on en forme les quantités

n — 1

et

m — 1

2 2

et qu’on divise les résultats obtenus respectivement par n et par m, les restes pourront s’exprimer par + 1 ou par — 1 ; ils pourront être d’ailleurs de même signe ou de signe contraire. Gauss en 1801, Jacobi et enfin M. Liouville ont donné depuis des démonstrations nouvelles de ce théorème, dont la Théorie des nombres fournit d’importantes applications. Ce grand traité des propriétés des nombres et les Recherches sur les intégrales eulériennes sont certainement des ouvrages de premier ordre ; mats la Théorie des transcendantes elliptiques, dont il nous reste à parler, dépasse tous les autres et eût suffi seule à la gloire de son auteur.

Les deux premiers volumes de la Théorie des fonctions elliptiques parurent en 1825 et 1826 ; ils furent suivis plus tard de trois suppléments qui formèrent le tome Ille. Outre les mémoires de 1786 et de 1793, Legendre avait déjà donné antérieurement, sur le même sujet, les Exercices de calcul intégral sur divers ordres de transcendantes et sur les quadratures, qui parurent en 1816 et 1817. On peut dire qu’il s’occupa seul de cette belle théorie pendant près de quarante ans ; et lorsqu’il s’y remit dans un âge déjà assez avancé, il déploya encore les plus hautes qualités intellectuelles, l’invention qu’on ne rencontre habituellement que dans les esprits encore jeunes, la force qui appartient à l’âge mûr, l’habileté à tourner les difficultés les plus ardues. et la persévérance nécessaire pour poursuivre des calculs d’une longueur souvent rebutante.

La plupart des différentielles auxquelles conduit l’analyse des problèmes de géométrie supérieure, de mécanique et de physique, n’ont pas d’intégrales réductibles aux formes algébriques aujourd’hui connues. Les questions les plus simples conduisent déjà à des intégrations par arcs de cercle ou par logarithmes. À la fin du xvmc siècle, la plupart des questions qui n’exigeaient l’emploi d aucune fonction nouvelle étaient déjà résolues ; mais toutes celles qui n’avaient pas pu être réduites restaient confondues dans un seul groupe marqué du cachet commun d’impossibilité. C’est Euler qui, le premier, songea à former une nouvelle catégorie des questions résolubles par l’emploi des symboles d’arcs de courbes du second degré, et à dresser des tables équivalant, pour les fonctions analytiques relatives à ces arcs, aux tables des fonctions circulaires et des logarithmes. Il avait déjà ébauché la classification des différentielles dont l’intégration peut se faire par arcs d’ellipse ou d’hyperbole, et avait reconnu leur caractère commun, qui consiste dans la présence d’un radical du second degré, portant sur un polynôme du quatrième ; mais la plupart des difficultés de la question restaient entières. Legendre se proposa de comparer méthodiquement entre elles toutes les transcendantes rentrant dans la forme indiquée, de les classer en différentes espèces, et de réduire chacune d’elles à la forme la plus simple. « Reprenant, dit M. Élie de Beaumont, dans sa forme algébrique la plus générale, la différentielle déjà indiquée comme point de départ de ce genre de recherches, il la dégrossit avec une adresse infinie, met de côté toutes les parties qui s’intègrent, soit par des quantités purement algébriques, soit par des arcs de cercle ou des logarithmes, et la réduit ainsi à sa quintessence, c’est-à-dire aux parties dont les intégrales sont les transcendantes d’un ordre supérieur. Transformant ensuite ce résidu au moyen des fonctions circulaires, il le réduit à une forme d’une merveilleuse simplicité et conclut par séparer en trois classes distinctes toutes les transcendantes considérées. La première classe comprend des transcendantes plus simples que les arcs d’ellipse ou d’hyperbole ; on peut exprimer ces transcendantes au moyen d’arcs d’ellipse, sans réciprocité ; la seconde classe comprend les arcs d’ellipse ou d’hyperbole ; enfin la troisième classe comprend des transcendantes plus compliquées que les arcs d’ellipse. >

La théorie des propriétés et des transformations des fonctions elliptiques occupait le premier volume de la publication de 1825. Le second contenait les tables destinées à faciliter l’évaluation numérique des intégrales obtenues. Ces tables avaient été calculées par Legendre lui-même. « Par leur moyen, disait-il, la théorie des fonctions elliptiques pouvait, dès lors, être appliquée avec autant de facilité que celles des fonctions circulaires et logarithmiques, conformément aux vreux et aux espérances d’Euler. »

Après la publication de ces^deux volumes, Legendre eut enfin la satisfaction devoir ses immenses travaux dignement appréciés par ses contemporains. Jacobi et Abel venaient de débuter brillamment dans la carrière qu’il avait ouverte ; il leur rendit spontanément une justice entière.

■ Un jeune géomètre de Kœnigsberg, M. lacobi, dit-il dans l’avertissement pour le troisième volume, quoique n’ayant pu avoir con LEGE

naissance du Traité des fonctions elliptiques, était parvenu, par ses propres recherches, à découvrir un grand nombre de transformations nouvelles des fonctions de première espèce. Le premier mémoire de M. Abel de Christiania, digne émule de M. Jacobi, forme déjà une théorie presque complète des fonctions elliptiques considérées sous le point de vue le plus général. Son second mémoire offre des résultats très-remarquables... Nous n’entrerons pas dans d’autres détails, ajoutet-il, sur les travaux de ces deux jeunes géomètres, dont les talents se sont annoncés avec tant d’éclat dans le monde savant. » On conçoit maintenant que l’auteur de ce traité à dû applaudir vivement à des découvertes qui perfectionnaient beaucoup la branche d’analyse dont il est en quelque sorte le créateur. On a rarement rendu une justice aussi éclatante à de jeunes émules, dit M. Élie de Beaumont ; mais Legendre ajouta encore à cette justice, par la grâce partant du cœur avec laquelle il reporta sur ses deux disciples, qui firent la joie de ses derniers "jours, sa tendresse paternelle pour la théorie qu’il avait créée et développée seul pendant plus de quarante ans,

La vie de Legendre est l’une des plus belles qu’un savant puisse désirer. Elle a été remplie par des travaux glorieux et utiles, entrepris toujours dans une bonne voie, poursuivis avec zèle, achevés avec bonheur, et pas un dissentiment public ou privé n’en est venu altérer la sérénité.

Lagrange, Laplace, Monge, et plus tard Cuvier, Arngo, Poinsot, ont joui peut-être, durant leur vie, d’une réputation plus étendue que la sienne ; mais la modération de Legendre lui a permis de voir sans amertume la faveur dont étaient entourés ses brillants collègues, et de se laisser sans chagrin presque oublier, pendant les longues années qu’il consacra à son dernier et immortel ouvrage. On ne saurait trop honorer les hommes qui unissent un tel caractère à une aussi belle intelligence.

Comme Euler, Legendre a travaillé jusqu’à ses derniers jours sans avoir vu s’affaiblir ses belles facultés.

Il n’avait pas oublié les services que lui avaient rendus, dans sa jeunesse, les savants qui avaient su deviner ce qu’il devait être un jour, et lui-même "fut toute sa vie disposé à aider, même de sa bourse, les jeunes gens que des difficultés matérielles eussent arrêtés dans leur carrière scientifique. Sa veuve continua de fournir, comme lui, à l’École polytechnique, un fonds annuel pour la création de quelques bourses. Lorqu elle mourut en 1856, elle légua à la commune d’Auteuit la maison de son mari, pour en faire un presbytère et une école.

LEGENDRE (Louis), conventionnel montagnard, né à Paris en 1756, mort en 1797. Il fut dix ans matelot dans sa première jeunesse, puis devint maître boucher à Paris. La puissante corporation des bouchers avait joué, comme on le sait, un grand-rôle dans toutes les révolutions populaires de la capitale, et spécialement au xvo siècle, dans les luttes des Bourguignons et des Armagnacs. Il était de tradition qu’il y eût toujours quelque boucher à la tête des mouvements, et Legendre pouvait sembler un héritier des Saint-Yon, des Thibert et autres chefs fameux. Son nom est mêlé à toutes les journées de la Révolution. Au 12 juillet 1789, il fut un dé ceux qui promenèrent par les rues les bustes de Necker et du duc d Orléans ; le lendemain, il entraîna les habitants de son quartier aux Invalides, pour en enlever les armes, figura au premier rang des combattants de la Bastille, et fut avec Danton, Desmoulins et autres un des fondateurs du club des Cordeliers. Dès cette époque, il était déjà fameux comme chef populaire et comme l’une des notabilités révolutionnaires de ce district des Cordeliers, qui était un des plus ardents de Paris : ce fut lui qui protégea Marat contre les persécutions delà police et qui, à plusieurs reprises, le cacha pour le soustraire aux poursuites. Au 5 octobre, il alla à Versailles, dans les rangs de la garde nationale, signa la pétition du Champ-de-Mars, pour la déchéance du roi, et fut obligé de s’enfuir, après cette journée, comme beaucoup de patriotes menacés d’arrestation. Il reparut à la suite de l’amnistie qui fut décrétée lors de l’acceptation de la constitution, fut désigné plusieurs fois Comme orateur de Sa section pour présenter des pétitions à la barre de l’Assemblée législative, contribua à l’envahissement des Tuileries, au 20 juin 1792, et enfin combattit dan3 la grande journée du 10 août, qui consomma la ruine de la monarchie. Elu par les électeurs de Paris député à la Convention nationale, il prit place à la Montagne et fit partie du groupe des dantonistes. Comme orateur, il montra, sinon ia l’éloquence proprement dite, au moins une verve pittoresque, du bon sens, de l’énergie, souvent aussi un peu de cette emphase déclamatoire qui était dans la manière du temps. Quant à cette sauvage éloquence de paysandu Danube qu’on lui attribue communément, c’est une pure fiction, tout au moins c’est là une assertion fort exagérée. Le bouclier Logendre, comme on affecte de l’appeler, n’était pas un homme inculte ni grossier ; c’était, avant la Révolution, un paisible bourgeois de Paris, riche, estimé, et, pour employer une