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Auguain (combat d’), tableau de L. Garneray, galeries de Versailles. L’auteur a choisi pour sujet le moment où le vaisseau du chevalier de Tourville force celui de l’amiral Ruyter, désemparé par la chute de son grand mat de hune, a laisser arriver pour gagner le port d’Augusta, tandis que le marquis de Valbelle, à l’avant-garde, coule à fond une des deux chaloupes ennemies qui lui disputent le passage (22 avril 1676). Ce tableau, commandé par Louis-Philippe, a été exposé au Salon de 1837.

AUGUSTA, capitale de l’État du Maine (États-Unis d’Amérique) depuis 1831 ; située sur la rive droite du Kennebec, dont les rives sont unies en cet endroit par un assez joli pont ; 15,000 hab. Il Ville des États-Unis, sur IaSavannah, dans l’État de Géorgie ; 6,700 hab. Ville très-florissante ; entrepôt considérable de coton et tabac. Il Ville des États-Unis, dans l’État de New-York, comté d’Oneida ; 3,100 hab. Il Ville de l’Australie, sur la côte occidentale,

jardin botanique ; 3,

AUGUSTA (Jean), théologien, de la Bohème, né à Prague en 1500, mort en 1575. Il était d’abord utraquiste, et, quoique lié avec Luther et Mélanehthon, il n’adopta pas entièrement leurs opinions. Nommé ministre des frères de Bohême, il devint ensuite évêque de tous les temples de cette secte, qu’il s’efforça dès lors de concilier avec les protestants. Le roi Ferdinand le fit emprisonner pendant seize ans, pour le forcer a rentrer soit dans l’Église romaine, soit dans la doctrine des utraquistes, seules doctrines tolérées en Bohême. Il finit par recouvrer sa liberté à la mort de Ferdinand, à la condition de ne plus enseigner ni prêcher. Il a laissé, entre autres écrits, un intéressant Abrégé de la doctrine des frères de Bohême.

AUGUST*UM s. m. (ô-gu-sté-omm —rad. Auguste, n. pr.). Antiq. Syn. d’abside. Il Nom donné à une place carrée de Constantinoplo, entourée do portiques à’ deux rangs de colonnes, au milieu de laquelle Constantin avait fait élever une statue a sa mère Hélène : On voyait sur J’august^eum le milliaire d’or où aboutissaient les grandes voies de l’empire. (Bachelet.)

Augustain s. m. (ô-gu-stain — du lat. augustanus ou augustaneus, qui concerne Auguste, qui a rapport à Auguste). Antiq. rom. V. Augustal.

AUGUSTAL, ALE adj. (ô-gu-stal — lat. auyustalis, même sens ; formé de Augustus, Auguste). Antiq. rom. Qui appartient, qui a rapport à Auguste ou à un auguste, a un empereur, il On dit quelquefois empereurs, au nombre que les règlements militaires fixaient pour chaque corps ; ils servaient de chefs de file dans les combats et les manœuvres, n Troupes augustales, Légion créée par Néron. Elle était composée de cinq mille hommes chargés d’applaudir l’empereur, quand il chantait ou jouait d’un instrument en public, ou qu’il se livrait à quelque exercice du cirque, il Officiers augustaux, Tous les officiers attachés au palais de l’empereur.

n Préfets augustaux, Préfets d’Alexandrie, ainsi nommés soit à cause de l’importance de leur charge, soit parce que les premiers avaient été institués par Auguste, après la défaite d’Antoine et de Cléopâtre. Certains préfets de municipes portaient aussi ce titre, mais on ignore pour quel motif, n Jeux augustaux, Jeux ^institues, dans Rome, pour célébrer l’anniversaire de ta bataille d’Actium. Ils avaient lieu le 23 septembre et duraient toute la journée, laquelle était remplie par des courses de chars, des chasses, et un repas offert, dans le Capitole, aux sénateurs et au prince lui-même. Des jeux semblables et portant le même nom furent établis dans presque toutes les provinces, n Confrèresaugustaux, Prêtres de la divinité d*Auguste, qui furent créés, dans Rome, après la mort de ce prince, et que l’on choisissait parmi les plus grands personnages de l’État, il Flamines ou prêtres augustaux, Prêtres chargés de desservir les temples d’Auguste, spécialement consacrés à la mémoire du souverain, surtout dans les villes de province. Ils veillaient au culte des dieux lares, associé dès lors à celui des divinités domestiques de la famille de l’empereur, et avaient aussi quelques attributions municipales, il Sévirs augustaux, Magistrats institues par Auguste dans les colonies et dans les municipes d’une grande partie de l’empire, pour y remplir des fonctions, moitié civiles, moitié religieuses, dont la nature n’est pas bien connue.

il Dans la plupart de ces cas, on dit aussi augostals au masc. pi.

Papier augustal, Nom donné, du temps d’Auguste, par la flatterie des fabricants, à la plus belle sorte de papyrus. Avant cette époque, on l’appelait papier hiératique, parce qu’on s en était primitivement servi pour la transcription des livres sacrés, à On disait ! PAPIER

« siècle après J.-C.

AUG

Frédéric IF, qui- prenait le titre d’auguste, comme empereur d’Occident.

— s. f. pi. Fête et jeux établis à Rome, dix-huit ans av. J.-C., pour perpétuer le souvenir du retour d’Auguste dans cette ville, après qu’il eut vaincu les Partlies et pacifie l’Orient. On la célébrait le 2 octobre de chaque année.

AUGUSTALÉ s. m. (p-gu-sta-lé — lat. augustale, même sens). Antiq. rom. Nom donné, sous l’empire, à la partie du camp où était dressée la tente de l’empereur, et que l’on appelait aussi augurale ou preetoriuni. il Terrain consacré à Auguste, dans les colonies, et. sur lequel les prêtres préposés au culte de cet empereur se réunissaient et célébraient les fêtes en son honneur.

" AUGUSTALITÉ s. f. (ô-gu-sla-li-té-rad. augustal). Hist. et antiq. rom. Nom d’une magistrature qin exista^ dans les colonies

jusqu

— Encycl. L’existence de Yaugustalité est attestée par plusieurs passages d’auteurs latins, surtout par des centaines d’inscriptions ; mais on n !est pas encore parvenu à découvrir quelle était sa nature véritable. Parmi les divers systèmes imaginés pour résoudre ce problème d’histoire, le plus probable sst celui oui considère Vaugustahté comme- uni espèce de magistrature ayant des attributions a la fois religieuses et municipales. Au "point de vue religieux, elle présidait au culte des dieux lares, qu’Auguste avait réformé et étendu à tout le monde romain ; sous le rapport municipal, elle, était chargée de pourvoir, à ses frais, à la construction de certains édifices, à la célébration de certains jeux, à l’entretien dç, s voies de communication, etc. Les magistrats de Yaugustalité se nommaient, suivant les lieux, maîtres des lares, maîtres augustaux, sévirs augustaux, ou simplement augustaux ou augustals. Us formaient Une corporation régulière, dont les membres, divisés en membres actifs et en membres honoraires, étaient en nombre illimité, et se recrutaient dans la classe moyenne des villes de province.

AUGUSTAMN1QUE, partie orientale de la basse Égypte, à l’E. du Delta. Sous Constantin, elle forma une des sept provinces du diocèse d’Égypte. Cette.province s’étendait depuis la branche du Delta jusqu’à la frontière

AUGUSTAT s.m. (ô-gu-sta— r&d. auguste). Antiq. rom. Dignité d’un auguste, d’un empereur romain.

AUGUSTATICUM OU AUGUSTICUM S. m. (ô-gu-sta-ti-komm, ô-gu-sti-komm — mot lat. formé de Augustus, Auguste). Antiq. rom. Gratification que les empereurs faisaient aux soldats lorsque ceux-ci prêtaient leur premier serment ou le renouvelaient.

— s. f. Sous l’empire romain, la tente de l’empereur. 7-Métrol. Monnaie d’or de Sicile, créée par

AUGUSTE adj. (ô-gu-ste - latin augustus', même, sens. Voilà ce que disent tous les ditionnaires qui s’occupent d’étymologies ; mais cela ne nous apprend absolument rien, pas plus que si l’on nous dit que aimer, avare, homme, etc., nous viennent du latin amare, avarus, homo, etc., même sens. Le lecteur, qui est en général curieux quand il s’agit d’étymologies, a le droit de dire : « Eh bien, après ? Quel rapport y a-t-il entre ces termes latins et le sens intime du mot ? Nous sommes aussi avancés que si un savant géographe nous disait que les sources du Nil sont situées en Afrique. » Il nous semble à nous que ce lecteur indiscret n’aurait pas tout à fait tort. Voilà pourquoi le Grand Dictionnaire donnera toujours, chaque fois qu’il le pourra, des origines, des sources mieux déterminées. C’est ce que nous allons faire pour auguste. — Diverses étymologies ont été données de ce mot, qui est devenu un nom patronymique célèbre. Les anciens auteurs, tels que Festus et Suétone, s’en étaient tenus à des étymologies apparentes. Le premier voit dans ce mot le radical avis, oiseau, combiné soit à gestus, soit à gustatus, et il pense que, dans l’origine, ce terme s’appliquait à un endroit consacré par la présence de certains oiseaux. Le second exprime une opinion à peu près semblable. Il resuite de ces deux autorités qu’au mot augustus s’attachait primitivement une idée de sainteté, de consécration ; c’est une considération qui peut guider nos recherches en leur donnant une direction plus précise. Pott, dans ses Recherches étymologiques, voit dans le gus à’augustus, comme dans le gur à’augur, -le correspondant du verbe ancien haut allemand kins-an ; alors, suivant lui, augur signifierait littéralement vogel-kieser, avium elector, mot à mot celui gui choisit les oiseaux, tandis qu’augustus aurait le sens passif de avibus electus. Mais, comme le fait très-justement remarquer Corssen dans le Journal philologique de Kuhn, la signification du verbe latin gustare, qui diffère entièrement de celle du verbe germanique kinsan, ne permet pas d’admettre cette hypothèse, très-ingénieuse du reste, il faut le reconnaître. Corssen a alors recours, pour expliquer le mot augustus, au radical augere, augmenter, et démontra que le sens de ce dernier mot avait une valeur toute technique dans la langue liturgique des anciens Romains. C’est la racine a’augere qu’on retrouve dans le mot’macfare, macius, sacrifier, pour magis auctus, plus augmenté. Un ancien scoliaste dit, en effet,

AUG

à ce propos : « Toutes les fois qu’on versait sur la victime soit du vin, soit de l’encens, on disait : l’animal est mactus par le vin et l’encens, c’est-à-dire le sacrifice est complet. » Le mot attgmen avait un sens analogue, et servait à désigner en général un sacrifice solennel, accompli selon tous les rites. Dans cette hypothèse, aug-ur aurait été naturellement celui qui augmente, c’est-à-dire qui accomplit le sacrifice. Augur aurait ensuite donné naissance à augustus, comme robur à robuslus ; augustus voudrait donc dire celui qui est consacré, le saint. C’est dans ce dernier sens, que les prêtres appliquaient ce mot aux endroits consacrés, augusta, comme nous l’avons dit plus haut. « On appelait augusta, dit Ovide dans ses Fastes, les temples consacrés selon les ritespor la main des prêtres, ’ dernier détail qui concorde assez bien avec l’étymologieque nous donnons. Enfin, Corssen cito un nouvel argument en faveur de sa théorie, argument que lui fournit un idiome congénère du latin, l’ombrien. Dans les prescriptions sacerdotales que nous ont conservées certaines tables trouvées dans l’Ombrie, un prêtre est appelé uh-iur ; or, uh-tur est, d’après les lois de permutation phonétiques qui président aux rapports du latin " J"

Fombrien, l’éq ’ " * ’-""

lettre, du latii

1 ombrien, l’équivalent exact v lettre pour du latin auctor, auquel on rattache augur. L’analogie des fonctions et l’identité

du radical plaident, en effet, assez éloquemment en faveur de la théorie de Corssen. Il faut donc, dans ce cas, rejeter l’opinion qui veut voir dans augustus la terminaison caractérisque du superlatif, comme cela a lieu dans fidustus). Digne de respect, vénérable, imposant ; qui a une sorte de grandeur solennelle. Se dit des personnes et des choses. : Monarque auguste. Personnage auguste. Une auguste princesse. Air auguste. Assemblée auguste. Une auguste infortune. Ce palais a quelque chose d’auguste. (Acad.) Lapuissance de votre auguste bisaïeul sur la nation a passé celle de tous les rois vos ancêtres. (Mass.) Il ne faut jamais s’appesantir sur les petits détails, qui ôtent aux grands événements tout ce qu’ils ont d’important et d'auguste. (Volt.) La religion était simple, sage, auguste. (Volt.) Ceux qui ont vu de quel front il a paru dans la salle de Westminster et dans la place de Whitehall peuvent juger aisément combien il était intrépide à la tête de ses armées, combien auguste et majestueux au milieu de son palais et de sa cour. (Volt.) Il suffit qu’un homme ait été assez heureux pour voir ^auguste visage de son prince, pour qu’il cesse d’être indigne de vivre. (Montesq.) Le grand homme mourant a je ne sais quoi d’imposant et d’w- guste. (Thomas.) Faut-il combattre, délibérer, apaiser une sédition, Bouillon est partout grand, partout auguste. (Chateaub.) Le silence de ta nuit est auguste. (Chateaub.) L’amour est une chose sainte et auguste. (Ballanclie.) Si Louis XIV nous parait avec raison un peu auguste et solennel, il était naturel aussi, il n’était jamais emphatique, il ne visait pas à l’effet. (Ste-Beuve.) Non, je ne trouble point ses augustes secrets.

/ Racine.

De votre auguste père accompagnez les pas.

De l’auguste chapelle ils montent les degrés. Boileau. auguste vieillard !

BÉRANGER.

ntérêt m’inspii Vengez la r<

augustes mânes.

La Fontaine. demander quel funeste nuage,

L’ i auguste visage ?

Racine.,

a pu

ts d’où dépend le destin des

Fontencor plusaujwie e

. Voltai

J’ose apporter, grand Dieu, dans cette auguste enceinte, Un cœur encor brûlant dédouleur et d’amour.

Lamartine. Tu ne saurais marcher dans cet auguste lieu, Tu n’y peu* faire un pas sans y trouver ton Dieu,

Ton hi

unrypeux]

ton Dieu qui t’éclaire.

11 Ironiq. : Ils usent, à for vils baisers, la semelle de mes augustes pantoufles. (Ch. Nod.)

— Chron. Nom que, sous l’empereur Auguste, les Romains donnèrent au sixième mois, appelé auparavant sextilis, et dont nous avons fait notre mois d’août. Voltaire préférait le mot auguste au mot août, qu’il trouvait barbare : Ces paquets étaient du commencement du mois d'auguste, (Volt.) Le roi ordonne au cardinal de Bouillon, par ses lettres du mois ^’auguste, que nous nommons si mal à propos août... (Volt.) Il Ere des Augustes, Ere qui commença le 20 août, vingt-cinq ans av. J.-C.

— Qui concerne Auguste ou les empereurs de sa famille, il Marbre auguste, Marbre découvert en Égypte, sous le règne de l’empereur Auguste, a Papier auguste, Papier de

Ïtremière qualité, compose des enveloppes es plus internes et les plus fines du papyrus. C’était le papier à lettres des anciens. On

ài ; g

S0 fr. 65 c. : Il y a aussi des doubles augustes et des demt-AUGUSTES.

— Hortic. Variété de tulipe, il Nom corri’mun à plusieurs plantes remarquables par la majesté de leur port, n Auguste-le-grand, aupuste-le-lriomphant, Nom de plusieurs variétés d’œillûts.

AUGUSTE s. f. (ô-gu-ste — lat. augusta, même sens). Hist. Nom que l’on donnait aux femmes des empereurs romains, et quo l’on donna plus tard à quelques reines. On dit plus souvent Augusta. V. ce mot.

AUGUSTE (Caîus Julius César Octave), premier empereur des Romains, connu d abord sous le nom d’Octave, était fils de Caîus Octavius et petit-neveu de César par sa grand’mère Julia ; il naquit à Rome l’an 63 av. J.-C. Certaines légendes adulatrices faisaient remonter sa noblesse au delà de Tarquin l’Ancien, tandi ? que ses ennemis lui composaient une généalogie où figuraient parmi ses ancêtres de» affranchis, des cordiers, des boulangers, des usuriers, etc. En réalité, sa famille, originaire de Vclletri, était riche et ancienne, mais appartenait à l’ordre des chevaliers. Son père, homme de guerre et administrateur, fut le premier sénateur de sa maison. Il mourut comme le jeune Octave n’avait encore que quatre ans. Élevé par sa mère Attia, qui se remaria à L. Philippus, l’enfant reçut une éducation brillante et fit éclater son génie précoce, s’il est vrai, comme on l’a dit, qu’à l’âge de douze ans il ait prononcé devant le peuple l’oraison funèbre de son aïeule Julia.

César, qui n’avait point d’enfant, manifesta de bonne heure l’intention d’adopter son petitneveu. A quinze ans, il lui donna pour robe virile le laticlave, insigne de la dignité de sénateur. D’un tempérament frêle et maladif, Octave resta longtemps sous la tutelle do sf

lui

lagne

, qui, dans sa tendresse inquiète,

permit pas de prendre part à la campagne d’Afrique contre les Pompéiens. Toutefois, il alla rejoindre le dictateur en Espagne, et s’attacha à gagner de plus en plus son affection. L’Espagne soumise, César résolut une expédition contre les Parthes, et il envoya Octave passer l’hiver à Apollonie, au milieu des légions qui s’y réunissaient, à la fois pour achever ses études et se faire connaître des soldats. Le futur maître du monde avait alors dix-huit ans. Il était à Apollonie depuis quatre mois, lorsqu’un soir un affranchi de sa mère, accouru de Rome, vint lui ’ apporter la nouvelle du meurtre de César. Il partit sur-le-champ pour Rome, où s’agitaient les factions, incertain de sa destinée, mais dévoré déjà de l’ambition de recueillir le périlleux héritage de son père adoptif. Accueilli triomphalement à Brindes par les vétérans, il n’hésita plus à prendre le nom de César et à accepter sa succession, ce qui l’obligeait à acquitter les legs faits au peuple et aux soldats. En attendant, il n’oublia point de s’approprier au passage tout l’argent des caisses publiques de Brindes, d’intercepter les tributs des provinces et d’envoyer chercher en Asie les approvisionnements et le trésor militaire destinés à l’expédition contre les Parthes, comme si tout cela eût été un bien personnel. À Rome, Antoine, chef actuel du parti césarien, et qui exerçait une autorité presque absolue, accueillit avec une sorte de mépris ce faible compétiteur ; mais sous sa ■ "froideur hautaine perçait cependant la crainte de rencontrer un rival, un obstacle à sa propre ambition. En outre, il s’était approprié les sommes laissées par le dictateur (environ vingt millions), et, soit qu’il les eût dissipées, soit que les nécessités politiques du parti en eussent exigé l’emploi, il ne put ou ne voulut les restituer, alléguant, ce qui était vrai, que cet argent appartenait à l’État, puisque César s’était en réalité approprié les revenus publics. D’un autre côté, la mère et le beaupère d’Octave tentèrent de le dissuader de son projet de revendiquer le nom et l’héritage du dictateur, en lui représentant les périls d’une telle entreprise. Mais l’opiniâtre adolescent demeura inébranlable dans ses desseins secrets. Timide, maladif, dépourvu de courage, il puisa dans l’ardeur de ses convoitises l’audace politique nécessaire à la lutte qu’il osait entreprendre contre tous les partis. Il ne pou- ■ vait songer encore à employer la force ouverte, et il marcha à son but par les voies de l’astuce, de la prudence et de la dissimulation. Il affecta une profonde douleur de la mort de César, se porta comme son vengeur et son exécuteur testamentaire, vendit ses biens et ceux de sa famille, acquitta les legs, et acheva ainsi de gagner le peuple et surtout les légions, qui étaient à l’encan. Il s’assura en même temps la bienveillance du sénat par Cicéron, dont il flattait la vanité, et prépara son élévation en activant, avec une ténacité et une habileté singulières, la destruction des partis les uns par les autres. Poursuivi par la haine d’Antoine, il tenta lui-même de le faire assassiner, du moins il en fut accusé. Les soldats, par leur3 murmures, les contraignirent plusieurs fois à se réconcilier ; mais l’union de tels rivaux, dont l’ambition était la même, ne pouvait être durable ; ils s’embrassaient pour satisfaire leurs factions, qui réclamaient l’unité en face des républicains encore debout ; mais leur cœur n’en était pas moins dévoré de haine et de jalousie. Ces démêlés remplirent sept à huit mois entre l’arrivée d’Octave et la guerre de Modène. C’est une histoire obscure, compliquée, toute en complots, en menées souterraines, en intrigues diplomatiques, bien plus