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En comparant ces deux systèmes de formules, on remarque que les rapports entre les poids atomiques de l’hydrogène, de l’oxygène, de l’azote, du chlore, du carbone étant les mêmes dans les deux notations, les formules des composés qui renferment ces éléments sont nécessairement les mêmes, dans le cas où elles représentent les unes et les autres 2 volumes ; et que les formules de Berzélius sont nécessairement doubles des formules de Gerhardt, dans le cas où les premières représentent 4 volumes. Ainsi, pour Berzélius, la formule atomique de l’acide azotique est Az2O5,HO2 ou Az2H2O6, c’est-à-dire exactement le double de celle qu’emploie Gerhardt, AzHO3. Pourquoi Berzélius employait-il ces formules doubles répondant à 4 volumes de vapeur ? Pourquoi Gerhardt n’a-t-il pas hésité à les dédoubler, afin de ramener tous les composés volatils au même volume ?

C’est qu’ils avaient une conception toute différente des combinaisons, des réactions chimiques ; et c’est cette différence dans la conception des combinaisons qui sépare la chimie dite unitaire de la chimie dite dualistique. D’après Berzélius, les corps composés se forment toujours par addition de leurs éléments, de telle sorte que, dans une combinaison, chacun des composants occupe une place distincte ; toute combinaison est essentiellement binaire, c’est-à-dire renferme toujours deux éléments simples ou composés eux-mêmes, lesquels se sont unis parce qu’ils étaient le siège de forces opposées et tendant par cela même à se neutraliser. Cette manière d’envisager les forces chimiques conduisait naturellement à les rapprocher des force électriques, à les expliquer par les forces électriques ; tel est, en effet, le système de Berzélius : c’est le dualisme, doublé de la théorie électro-chimique, sur lequel il s’appuie. On voit maintenant pourquoi Berzélius représentait l’acide azotique par la formule Az2O5,H2O. C’était pour lui une combinaison de seconde ordre, renfermant intégralement tous les éléments de l’acide azotique anhydre d’un côté, et de l’autre tous les éléments de l’eau. Le premier formait l’élément électro-positif, le second l’élément électro-négatif. Dédoubler une telle formule, c’était déranger toute l’économie de son système. Dans la formule simple AzHO3, où était l’eau, où était l’acide azotique anhydre ?

La chimie unitaire a changé tout cela. Pour Gerhardt, aucune combinaison ne s’accomplit par addition moléculaire ; toutes se font par substitution ; la double décomposition est la forme générale de toutes les métamorphoses chimiques. Ampère avait déjà appliqué cette idée à la combinaison du chlore avec l’hydrogène. Si, disait-il, 2 volumes de chlore, qui représentent 2 atomes, se combinent avec 2 volumes d’hydrogène, qui représentent également 2 atomes, pour former 4 volumes d’acide chlorhydrique, il est évident que 2 volumes de cet acide contiendront 1 volume ou 1 atome de chlore, et les 2 autres volumes l’autre atome de chlore ; et de même pour l’hydrogène. Par conséquent, il y a un échange entre les atomes d’hydrogène et de chlore, c’est-à-dire double décomposition.

HH + ClCl = HCl + HCl

Gerhardt, généralisant cette vue, l’étendit à toutes les combinaisons. Par leur complication moléculaire, les corps simples furent rapprochés des composés, et, comme les corps composés, purent se prêter aux doubles décompositions ; le chlore libre devint du chlorure de chlore (ClCl), l’hydrogène libre de l’hydrure d’hydrogène (HH), le cyanogène libre du cyanure de cyanogène (CyCy) ; le terme molécule prit un sens très-net, distinct de celui du mot atome. Qu’est-ce que l’atome pour Gerhardt ? C’est la plus petite quantité d’un élément qui puisse exister dans un corps composé comme masse indivisible par les forces chimiques. Qu’est-ce que la molécule pour Gerhardt ? C’est un groupe d’atomes formant la plus petite quantité d’un corps simple ou composé qui puisse exister à l’état libre, entrer dans une réaction ou en sortir. Dans toutes les réactions chimiques, ce sont les molécules qui entrent en conflit et échangent leurs atomes à manière à donner naissance à de nouvelles molécules. Lorsque l’hydrogène se combine avec l’oxygène, il attaque une molécule d’oxygène qui se dédouble et se convertit en deux molécules d’eau.

OO + 2HH = H2O + H2O

Lorsque l’acide acétique se combine avec l’oxyde d’argent, il y a échange d’éléments entre deux molécules d’acide et une molécule d’oxyde d’argent : de l’eau et de l’acétate d’argent se forment par double décomposition.

2C2H4O2 + Ag2O = 2C2(H3Ag)O2 + H2O

Ainsi, l’acétate d’argent qui, suivant Berzélius, renferme tous les éléments d’une molécule d’argent, renferme, pour Gerhardt, un seul atome d’argent, qui s’est substitué à un seul atome d’hydrogène, dans une molécule d’acide acétique.

Nouveau système de poids atomiques. Nous avons vu que Gerhardt, en raison de l’analogie qu’il avait cru reconnaître entre les protoxydes métalliques et l’eau, avait dédoublé les équivalents des métaux pour obtenir leurs poids atomiques. Les recherches récentes de M. Regnault sur la loi de Dulong et Petit, en ramenant l’attention sur l’importance et la généralité de cette loi, ont montré que Gerhardt était allé trop loin dans sa réforme, et que le dédoublement des équivalents ne devait s’appliquer qu’au potassium, au sodium, à l’argent et au lithium. Ainsi, Gerhardt supposait que les protoxydes métalliques possèdent la composition atomique de l’eau H2O. Les expériences de M. Regnault commandent de restreindre cette supposition aux oxydes des métaux alcalins et à l’oxyde d’argent, dont les formules deviennent K2O (oxyde de potassium), Na2O (oxyde de sodium), Li2O (oxyde de lithium), Ag2O (oxyde d’argent). Les autres oxydes à 1 atome d’oxygène renferment non pas 2 atomes, mais 1 atome de métal, et leur composition doit s’exprimer par la formule générale RO, et non pas R2O. De là un changement notable introduit par les chimistes contemporains dans le système des poids atomiques de Gerhardt. Le tableau suivant permet de comparer les nouveaux poids atomiques avec ceux de Berzélius (rapportés à l’hydrogène) et avec ceux de Gerhardt.

noms
des éléments.
nouveaux
poids atomiques.
poids
atomiques de Berzélius.
poids
atomiques de Gerhardt.
Hydrogène 1,0 1,00 1,00
Oxygène 16,0 16,00 16,00
Azote 14,0 14,02 14,00
Chlore 35,5 35,52 35,50
Brome 80,0 80,09 80,00
Iode 127,0 127,08 127,00
Fluor 19,0 18,70 19,00
Soufre 32,0 32,17 32,00
Sélénium 79,5 79,37 79,50
Tellure 129,0 128,48 129,00
Phosphore 31,0 31,41 31,00
Arsenic 75,0 75,22 75,00
Carbone 12,0 12,04 12,00
Bore 11,0 21,82 11,00
dont la
1/2 = 10,91
Silicium 28,0 44,51 ˶
dont les
2/3 = 29,66
Zirconium 89,6 67,26 ˶
dont la
4/3 = 89,6
Potassium 39,1 78,47 39,00
Sodium 23,0 46,43 23,00
Lithium 7,0 13,08 7,00
Argent 108,0 216,29 108,00
Barium 137,0 137,06 68,50
Strontium 87,5 87,48 43,75
Calcium 40,0 40,32 20,00
Magnésium 24,0 25,34 12,00
Aluminium 27,0 27,39 13,75
Manganèse 55,0 55,23 27,50
Chrome 53,5 52,70 26,25
Uranium 120,0 118,88 60,00
Fer 56,0 56,17 28,00
Cobalt 59,0 59,07 29,50
Nickel 59,0 59,19 29,50
Zinc 65,2 65,16 32,60
Cadmium 112,0 111,66 5600
Cuivre 63,5 63,39 31,75
Plomb 207,0 207,47 103,50
Bismuth 210,0 213,20 210,00
Etain 118,0 117,83 59,00
Titane 50,0 48,30 25,00
Tungstène 184,0 190,44 92,00
Molybdène 96,0 95,53 48,00
Vanadium 68,6 137,32 ˶
Antimoine 122,0 129,24 122,00
Mercure 200,0 200,52 100,00
Rhodium 104,4 104,48 ˶
Palladium 106,6 106,64 ˶
Platine 197,5 197,44 98,50
Iridium 198,0 197,44 98,50
Ruthénium 104,4 ˶ ˶
Osmium 199,2 199,13 ˶
Or 197,0 196,98 ˶

M. Wurtz, auquel nous empruntons ce tableau ainsi que les précédents, a démontré, dans ses Leçons de philosophie chimique, que le nouveau système des poids atomiques est mieux en harmonie que tous les autres avec les diverses données qui servent de critérium pour la détermination de ces poids (densités des vapeurs, chaleurs spécifiques, isomorphisme).

De l’atomicité. L’idée de l’atomicité ou de l’équivalence des atomes est né des développements de la théorie atomique. Contenu en germe dans la loi des proportions multiples, et surtout dans les lois de Gay-Lussac relatives aux rapports volumétriques qui président aux combinaisons des corps gazeux, il s’établit peu à peu dans la science lorsque l’idée d’échange atomique, de substitution, de double décomposition eut été pleinement généralisée. C’est surtout les travaux de MM. Wurtz, Kékulé, Odling, etc., qui l’y ont introduit. Qu’est-ce que l’atomicité ? C’est la puissance de combinaison, la capacité de saturation, la valeur de substitution que possède un radical simple ou composé. Développons cette définition.

Les chimistes appellent radical tout atome ou tout groupe d’atomes susceptibles soit de se transporter d’un composé dans l’autre par voie de double décomposition, soit d’exister à l’état de liberté et d’entrer directement en combinaison. Si le radical est constitué par un simple atome, on le dit radical simple ; s’il est constitué par un groupe atomique jouant le même rôle qu’un atome simple, on l’appelle radical composé. Les formules suivantes permettent de se faire une idée claire de ce qu’on entend par radicaux :

Acide chlor-
hydrique.
  Hydrate
de potasse.
  Chlorure
de potassium.
  Eau.
H
Cl
+ K
H
O = K
Cl
+ H
H
O

Les atomes H, Cl et K sont des radicaux simples, parce qu’ils se sont transportés d’un composé dans l’autre par voie de double décomposition, et qu’ils ne renferment chacun qu’un seul atome. Le résidu HO de la molécule de potasse, s’étant également transporté de la même manière, doit être appelé radical composé, bien qu’il ne soit point isolable.

Il faut noter maintenant la synonymie des expressions puissance de combinaison, capacité de saturation, valeur de substitution, par lesquelles nous définissons l’atomicité. Ces expressions nous éloignent singulièrement du dualisme et de la théorie électro-chimique. Se combiner avec un atome, ou s’y substituer, est, pour les chimistes unitaires, chose absolument semblable. « Tout corps stable, dit M. Naquet, peut être considéré comme un édifice moléculaire en équilibre. Or, dans une molécule, chaque atome représente représentant une force, il faut absolument, pour qu’il y ait équilibre, que la résultante des forces provenant de tous les autres atomes lui soit égale et contraire. Si nous considérons la molécule d’alcool C2H6O, nous ne pouvons pas en concevoir l’équilibre qu’à la condition que la force représentée par un des 9 atomes qui la constituent soit exactement équilibrée par la résultante des forces représentées par les 8 autres atomes. Ainsi, C2H6 doit représenter la même force que O ; C2H5O la même force que H ; C la même force que CH6O. »

Déterminer l’atomicité d’un corps, c’est déterminer la plus grande puissance de combinaison de ce corps, c’est-à-dire le nombre maximum d’atomes avec lesquels il peut se combiner ou auxquels il peut se substituer. 1 atome de chlore se combine avec 1 seul atome d’hydrogène ; 1 atome d’oxygène avec 2 atomes d’hydrogène ; 1 atome de bore avec 3 atomes de chlore ; 1 atome de carbone avec 4 atomes d’hydrogène ou de chlore ; 1 atome de phosphore avec 5 atomes de chlore : nous disons que le chlore est monoatomique, l’oxygène biatomique, le bore triatomique, le carbone tétratomique, le phosphore pentatomique. Pour trouver l’atomicité d’un radical simple ou composé, il faut toujours le rapporter à un radical monoatomique, tel qu’hydrogène, chlore, brome, iode, etc. On ne saurait déduire l’atomicité d’aucun radical de l’étude des combinaisons qu’il forme avec les radicaux polyatomiques, car ceux-ci ont la propriété de s’accumuler indéfiniment dans les molécules. M. Kékulé explique et représente cette accumulation toujours possible d’une manière très-ingénieuse.

Soit, par exemple, un atome biatomique. M. Kékulé le représente par le symbole , qui indique deux centres d’attraction distincts, deux unités de force chimique, deux points d’attache de l’affinité. Il est clair que si à chacun de ces centres d’attraction, de ces points d’attache, vient s’adapter un atome monoatomique, l’atome biatomique sera saturé et incapable de se combiner avec quelque autre corps que ce soit ; la molécule résultante aura la forme . Mais si cet atome se combine par chacun de ses centres attractifs avec un des centres attractifs d’un autre atome biatomique comme lui, la molecule prend la forme où l’on voit qu’il reste en a et b deux centres attractifs non saturés. On pourrait ensuite avoir la forme et ainsi de suite, jusqu’à ce que deux atomes monoatomiques soient venus compléter, et, selon l’expression de M. Kékulé, fermer la molécule en lui donnant la forme ou .

Ainsi, les combinaisons avec des radicaux polyatomiques ne donnent aucune indication sur l’atomicité, et c’est toujours aux combinaisons avec les radicaux monoatomiques qu’il faut avoir recours pour déterminer cette dernière.

L’atomicité des radicaux s’exprime, dans la notation, en surmontant les symboles qui les représentent d’un certain nombre d’apostrophes. Pour rendre la lecture plus facile, on met ordinairement les chiffres romains IV, V, VI, etc., au lieu de 4, 5 apostrophes, etc. Quand le radical est monoatomique, on ne met aucun signe ; ainsi

Cl, Oʹʹ, Bʹʹʹ, Civ, Pv
signifient chlore monoatomique, oxygène biatomique, bore triatomique, carbone tétratomique, phosphore pentatomique.

L’atomicité joue un grand rôle dans les spéculations chimiques ; elle permet d’établir des rapprochements très-curieux et souvent très-inattendus entre les radicaux organiques et les radicaux minéraux composés ou simples ; en nous rélévant la véritable cause de la complexité moléculaire des combinaisons du carbone, en nous montrant que cette complexité n’a rien de spécial, d’exceptionnel, elle supprime la barrière qui séparait la chimie organique de la chimie minérale ; elle fournit, pour les coprs simples et pour les corps composés, des éléments de classification dont l’importance ne saurait être méconnue ; elle nous rend compte des analogies d’après lesquelles M. Dumas avait distribué les métalloïdes en familles naturelles, et permet d’établir de pareils groupes parmi les métaux. V. Corps, Métalloïde, Métal.

IV.Les atomes considérés au point de vue de la physique générale et de la critique philosophique. « L’idée fondamentale, dans la doctrine de Démocrite, d’Epicure et de Lucrèce, dit M. Gournot, celle qui consiste à tout expliquer dans les phénomènes du monde matériel par des combinaisons passagères d’atomes indestructibles et inaltérables, est encore l’idée qui règne dans la physique moderne, et sous l’empire de laquelle la science va s’organisant et se développant. Aucune des idées que l’antiquité nous a transmises n’a eu une plus grande, ni même une pareille fortune. Il faut que les inventeurs de la doctrine atomistique soient tombés de prime abord, ou sur la clef même des phénomènes naturels, ou sur une conception que la constitution de l’esprit humain lui suggère inévitablement dans les efforts qu’il fait pour saisir les principes de la nature. » Descartes, nous l’avons vu, concevait la matière comme un tout continu. Avec Newton, l’idée du vide et de l’action à distance s’établit dans la physique ; l’action à distance expliquait les grands phénomènes cosmiques ; il était naturel d’étendre cette explication à tous les phénomènes. Par l’étude de la porosité, de l’élasticité, du son, de la chaleur, des trois états, solide, liquide et gazeux, la physique était conduite aux forces moléculaires ; elle marchait à la rencontre de la chimie ; aussi l’hypothèse de Dalton trouva-t-elle dans les esprits un terrain bien préparé. De tous les faits nouveaux, de toutes les connaissances acquises, une conception nouvelle de la matière devait se dégager avec l’hypothèse de Dalton pour base. Cette conception fut formulée par Ampère.

Ampère admet trois modes de division des corps : division mécanique, division physique, division chimique, et, par la même, trois ordres de fragments matériels : les particules, mécaniquement indivisible, et dont l’état physique ne diffère pas de celui des corps qu’elles forment ; les molécules, qui sont les vrais composants des particules, et qui, à distances variables entre elles, affectent divers états d’équilibre auxquels correspondent les états physiques des corps, et, bien que plus ou moins composées elles-même, ne souffrent pourtant pas de division de la part des forces physiques ; enfin, les atomes, qui forment les molécules en se groupant et en se disposant, par des forces propres, en différentes figures polyédriques dont ils occupent les sommets. Les particules sont divisibles par les seules forces physiques ; les molécules, par les seules forces chimiques ; les atomes sont indivisibles mécaniquement, physiquement et chimiquement. Les atomes ne sont pas juxtaposés de manière qu’il y ait contact entre eux ; ils sont maintenus à certaines distances par des forces dont les unes sont attractives et les autres répulsives ; il en est de même des molécules. Nous pouvons nous représenter cette matière discontinue en réalité, bien que continue en apparence, en jetant les yeux sur ce qu’on appelle des nébuleuses résolubles. Ces nébuleuses se présentent au ciel comme des simples lueurs uniformément étendues, et sont, en réalité, composées d’une infinité de points divers peu éloignés les uns des autres, et qu’on n’aperçoit qu’à l’aide d’un instrument suffisamment puissant.

Si nous voulons approfondir cette conception de la matière discontinue, nous sommes conduits à nous demander ce qu’il faut entendre par l’indivisibilité de l’atome. Cette indivisibilité doit-elle être considérée comme absolue ou comme simplement relative aux forces de la nature ? La plupart des physiciens et des chimistes s’arrêtent, dans leurs speculations, à l’indivisibilité relative ; l’esprit positif leur défend d’aller au delà ; ce serait, disent les uns, vouloir pénétrer l’essence des choses, entrer dans la région des questions métaphysiques, c’est-à-dire inaccessibles. N’est-ce pas sur la divisibilité de la matière que porte la deuxième antinomie de Kant ? Les autres distinguent la divisibilité mathémathique et la divisibilité physique et chimique. On ne peut prétendre, disent-ils, que les atomes ne soient pas doués d’étendue. Si, avec des microscopes plus parfaits, on finissait par les apercevoir, on verrait des corpuscules analogues aux corps que nous connaissons, seulement plus petits ; mais ils jouiraient de toutes les propriétés de la matière. Or, toute étendue, par sa définition, suppose la divisibilité. L’atome est étendu, donc il est divisible mathémathiquement ; mais cette division, qui peut être conçue, ne peut être effectuée ; une force de la nature s’y oppose. Il y a là, entre concevoir la divisibilité et réaliser la division, une grande différence. Un exemple le fera comprendre : tous les corps s’attirent les uns les autres, d’après la loi de Newton ; il n’en est aucun qui ne soit soumis à la gravitation, et cependant nous concevons très-bien qu’il pourrait exister des corps qui ne s’attireraient pas. L’indivisibilité des atomes est, comme l’attraction universelle, une loi qui pourrait ne pas exister. Cela ne serait pas absurde en soi ; seulement la nature serait constituée autrement qu’elle ne l’est, et