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prépos. à est toujours placée entre deux termes, dont l’un s’appelle l’antécédent et l’autre le conséquent. Ces deux termes, nécessaires à l’intégrité de la pensée, peuvent quelquefois se sous-entendre l’un ou l’autre, surtout le premier ; c’est-à-dire l’antécédent. En effet, il y a une foule de cas où, pour donner plus de rapidité à l’expression, on se contente de n’exprimer que l’idée principale, en supprimant des idées accessoires que l’esprit peut facilement suppléer. Citons les principaux cas où cette suppression a lieu.

— L’antécédent de à se supprime surtout après les interrogations : À qui devons-nous l’usage du sucre, du chocolat, etc. ? à des Indiens tout nus. (B. de St-P.)

Où le conduisez-vous ? ― à la mort ! à la gloire !
Corneille.

— Dans un danger ou un intérêt pressant, à s’emploie également sans antécédent : à moi ! au feu ! au voleur ! à l’assassin ! au secours ! aux armes !

À moi ! Girot ; je veux que mon bras m’en délivre.
Boileau.
L’enfant lui crie : Au secours ! je péris.
La Fontaine.
Charle éveillé. Charle bouillant d’ardeur,
Ne lui répond qu’en s’écriant : Aux armes !
Voltaire.

— On a dit de même, par imitation de cette tournure vive et rapide : J’entends déjà sonner le beffroi des villes et crier à l’alarme. (La Bruy.) Les ennemis des jésuites crièrent à l’arianisme. (D’Alemb.)

— L’ellipse de l’antécédent de à est surtout d’usage dans les inscriptions ayant pour objet une consécration quelconque : aux grands hommes la patrie reconnaissante. (Acad.) Ayant regardé en passant les statues de vos dieux, j’ai trouvé un autel sur lequel il est écrit : au dieu inconnu. (Actes des Apôtres.)

— L’antécédent de à se supprime généralement dans les dédicaces, les suppliques, les suscriptions de lettres : à très-illustre prince et révérendissime monseigneur Odet, cardinal de Chastillon. (Rabelais.) J’ai plusieurs lettres que je suis chargé de remettre à leurs adresses… Voyons celle-ci : « à M. Bredouillet, avocat au Parlement, rue des Mauvaises-Paroles… » Ce n’est point encore cela ; passons à l’autre : (à M. Gourmandin, chanoine de… » Ouais ! je ne trouverai point celle que je cherche ? « à M. Oronte… » (Le Sage.) Il débute par une épître dédicatoire « à M. de Cailhava de Lestandoux, président du grand musée de Paris. (Ars. Houss.)

— Cette ellipse est d’un fréquent usage, surtout en poésie et dans la prose élevée, toutes les fois qu’on fait un souhait, un vœu favorable ou défavorable, une menace, une imprécation, un appel, un avertissement : Honneur aux braves ! Gloire à Dieu ! Paix aux hommes de bonne volonté ! Honte à la bassesse et à la lâcheté ! (Acad.) Malheur à ceux qui remuent le fond d’une nation ! (Rivar.) Il y a aujourd’hui quinze siècles que ce cri, à la ville des Césars, s’est fait entendre pour la première fois. (Am. Thierry.)

à moi ! comte, deux mots.          Corneille.
Grâce aux dieux, mon malheur passe mon espérance.
Racine.
Une larme à mon fils ! à son vengeur, mon sang !
C. Delavigne.
Gloire à son ombre
Gloire et vengence à tous.
C. Delavigne.
La loi de l’univers, c’est : Malheur aux vaincus !
Eh ! malheur donc à Rome !……Saurin.

— Dans les santés, les toasts, on se contente de faire suivre à du nom de la personne à la santé de laquelle on boit, etc. : à votre santé ! à votre heureux voyage ! à ton retour ! à votre succès !

à la gloire civile ! ― au peuple ! ― au ministère !
au pays ! — Dans son toast, chacun son caractère.
C. Delavigne.

— L’ellipse est également d’usage pour désigner par l’enseigne une hôtellerie, une auberge, un magasin, etc. : au Cheval-Blanc. au Veau-qui-tette. à la Boule-d’Or. à l’Y grec. au Gagne-petit. (Acad.)

Aux Quatre-Nations ; l’auberge est assez vaste.
Delaville.

— Par une ellipse plus forte encore : Nous sommes fiche à, dix à, douze à, etc., se dit au jeu, pour Nous sommes fiche à fiche, dix à dix, douze à douze points ; nous avons chacun une fiche, dix points, douze points.

— On dit elliptiq. À demain, à ce soir, etc. :

Vers l’étoile du soir elle a levé la main,
Et s’est évanouie en disant : À demain !
C. Delavigne.

— La prép. à se supprime aujourd’hui dans un très-grand nombre de cas où on l’exprimait autrefois ; c’est ainsi qu’on ne dirait plus : Encore à ce matin ; il faut dire encore ce matin :

Encore à ce matin, je pleurais en rêvant
Au malheur inconnu qui me va poursuivant.
Mairet.

— Prov. et elliptiq. : À la vie et à la mort, Se dit pour exprimer qu’une chose, un sentiment, etc., doit durer toute la vie : Ah ! mignonne, s’écria le soldat, c’est entre nous maintenant à la vie et à la mort. (Balz.)

— Molière a fait un singulier usage de cette locution : Dis à ce Turc que je ne lui donne ces cinq cents écus ni à la mort ni à la vie.

à et au servent à former, lorsqu’ils sont joints à d’autres mots, des expressions adverbiales, prépositives ou conjonctives, dont nous n’indiquerons ici que les principales, les unes comme les autres devant être expliquées à la suite des mots qui entrent dans leur composition.

— 1o à placé devant un substantif : Il faut que la véritable religion connaisse à fond notre nature. (Pasc.) Les gens moins heureux ne rient qu’à propos. (La Bruy.) Ils vivent à l’aventure, poussés et entraînés par le vent de la faveur. (La Bruy.) Il fait déplier sa robe et la mettre à l’air. (La Bruy.) Muni de pouvoirs particuliers qu’il ne découvre quà l’extrémité. (La Bruy.) Ce progrès était plus dà moitié fait dans le cœur du libertin. (J.-J. Rouss.). Nous aimons mieux nous déterminer au hasard. (J.-J. Rouss.) Les diverses opinions qui m’avaient tour à tour entraîné. (J.-J. Rouss.) Voir deux objets à la fois, ce n’est pas voir leurs rapports, ni juger de leurs différences. (J.-J. Rouss.)

Que j’accusais à tort un discours innocent !
Racine.
Vous pouvez, à loisir, faire des vœux pour elle.
Racine.
L’amour enfin qui prit à cœur l’affaire.
La Fontaine.
Ayant tout dit, il mit l’enfant à bord.
La Fontaine.

— 2o à placé devant un adjectif employé substantiv. : Il se tourne à droite, où il y a un grand monde, et à gauche, où il n’y a personne. (La Bruy.) Supposons un progrès de causes à l’infini, c’est n’en point supposer du tout. (J.-J. Rouss.)

La mort de Séleucus m’a vengée à demi.
Corneille.
Il vous donne à présent sujet de le haïr.
Corneille.
Le dieu, le secouant, jeta les œufs à bas.
La Fontaine.

— 3o à placé devant un adverbe : Ma fille à jamais abusée. (Rac.)

Soyons-nous donc au moins fidèles l’un à l’autre.
Racine.
Il n’est encore au plus que sept heures du soir.
Regnard.

à et au se mettent aussi après les prép. sauf, quant, par rapport, attenant, jusque : Sauf à recommencer. (Acad.) Voilà mon premier doute, qu’il m’est, quant à présent, impossible de résoudre. (J.-J. Rouss.)

J’ai visité l’Élide, et, laissant le Ténare,
Passé jusqu’à la mer qui vit tomber Icare.
Racine.


Gramm. L’usage de la préposition à peut donner lieu à une foule de locutions vicieuses :

— La prépos. à, dit l’Académie, exprimait autrefois, comme la prépos. de, avec une énergie qui ne s’est conservée que dans le langage familier et populaire, un rapport de possession, et, par extension, de parenté. De là des manières de parler familières et proverbiales, telles que : La barque à Caron, la vache à Colas, la boîte à Perrette, etc. Cette forme irrégulière, mais que l’usage a consacré, est encore employée par nos écrivains dans certains cas : La fille unique à M. le maire aura cinquante mille francs de rentes, et m’a déjà été proposée. (Balz.) On dit aussi : C’est un frère à moi, pour C’est un de mes frères. Dans tous les autres cas, on doit faire usage de la préposition de.

Mettre de l’eau à chauffer, du linge à sécher, des pois à tremper, etc. Provençalismes qui sont à éviter. Il faut dire : Mettre chauffer de l’eau, mettre sécher du linge, mettre tremper des pois, etc., sans préposition, et en faisant suivre immédiatement les deux verbes : J’ai mis chauffer de l’eau, mettez sécher le linge, etc.

Je suis aîné à vous et cadet à monsieur ; je suis l’ainé à mon frère ; je suis cousin à votre notaire, ce sont là autant de solécismes ; il faut dire : Je suis votre aîné et le cadet de monsieur ; je suis l’aîné de mon frère ; je suis cousin de votre notaire.

Faire une partie aux cartes, une partie aux boules, une partie au piquet, etc. Ces expressions ne sont pas correctes, il faut dire : Faire une partie de cartes, une partie de boules, une partie de piquet.

— Dans plusieurs provinces, on emploie à pour de, en disant : Je viendrai à bonne heure, il s’est levé à bonne heure ; il faut dire : Je viendrai de bonne heure, il s’est levé de bonne heure. De bonne heure est l’expression consacrée pour désigner le temps considéré au point de vue de la diligence qui fait faire les choses plutôt avant qu’après le moment convenable.

J’ai ouï dire à votre frère que… Cette phrase peut, à la rigueur, être regardée comme amphibologique, car elle peut signifier j’ai ouï dire par votre frère, ou j’ai ouï dire à votre frère par quelqu’un ; cependant l’Académie la donne comme correcte et lui fait toujours signifier j’ai ouï dire par votre frère. C’est en effet le sens qui paraît le plus naturel, et dès lors on peut dire qu’il n’y aurait vraiment amphibologie que si l’on voulait lui faire exprimer l’autre sens. En général, il serait bon d’éviter toutes les tournures analogues qui peuvent être comprises dans le sens actif ou passif : Je lui ai vu faire une aumône, je lui ai vu donner un soufflet, je lui ai entendu dire, etc. Est-ce lui qui faisait l’aumône, qui donnait le soufflet, qui disait ; ou bien est-ce à lui qu’on faisait une aumône, qu’on donnait le soufflet qu’on disait ? Rien dans la construction même de ces phrases ne peut donner la solution de cette alternative. Il est vrai que presque toujours les circonstances suffisent pour indiquer le vrai sens, et par conséquent il serait bien rigoureux de proscrire absolument ces façons de parler. Cependant, si elles peuvent être tolérées dans la conversation, dans une lettre familière, on doit s’en abstenir quand on écrit pour le public ; elles ne sont pas précisément des fautes, mais ce sont au moins des taches qui nuisent à la clarté du style.

à dix que nous étions, pas un ne refusa, telle est la phrase d’exemple donnée par l’Académie, phrase qui n’est pas correcte ; il faut dire : sur dix que nous étions, pas un ne refusa.

Sept ôtés de dix, reste à trois, est une locution vicieuse ; il faut dire Sept ôtés de dix, reste trois. à est ici tout à fait vicieux.

J’ai vu monsieur à la rue St-Louis. Il faut dire dans la rue. On n’emploie ainsi la prép. à que quand le mot rue est pris dans un sens général, comme : Cet enfant est toujours à la rue ; il ne se plaît qu’à la rue  ; nous voilà, nous sommes à la rue. Encore ce langage est-il un peu vulgaire.

Mettez cela à la poche, expression doublement fautive ; il faut dire Mettez cela dans votre poche, car en disant à la poche, on ne sait de quelle poche il est question.

Il marchait à pieds nus ; il va, il est toujours à tête nue. Cette manière de s’exprimer est incorrecte ; il faut dire simplement : Il marchait pieds nus ; il va toujours tête nue. On dit bien aller à pied, mais cela ne se dit que pour indiquer qu’on n’est point à cheval, en voiture, etc. J’ai été obligé de faire une partie du chemin à pied.

Prendre quelqu’un à grippe est un solécisme. On dit prendre quelqu’un en grippe.

Couper à morceaux, couper à tranches, est un provençalisme qu’il faut éviter ; car de même qu’on dit Couper en deux, couper en trois, on doit dire Couper en morceaux, couper en tranches.

Cet enfant sent à la rose, ce ragoût sent au brûlé. Provençalisme et solécisme tout à la fois. Il ne faut pas de prép. Sentir est toujours actif, et, quelle que soit sa signification, on doit toujours dire, Sentir quelque chose, et jamais Sentir à quelque chose. On dira donc : Il sent la rose, il sent le brûlé.

Avoir quelqu’un à la dent, provençalisme qu’on emploie pour signifier avoir de l’animosité contre quelqu’un. On dit correctement : Avoir une dent contre quelqu’un, avoir une dent de lait contre quelqu’un.

— Nous avons vu jusqu’ici les emplois vicieux qu’on peut faire de la prépos. à, montrons maintenant qu’il est des cas où l’on supprime à tort cette même préposition. On entend dire quelquefois : Il ressemble son père ; elle ressemble sa mère, au lieu de Il ressemble à son père, elle ressemble à sa mère.

à et en. Devant les noms de villes ou de villages, c’est toujours à qu’on emploie : Aller à Paris, résider à Paris, à Meudon, à Saint-Cloud, à Rouen, à Bordeaux, etc. || On se sert de en devant les noms de continents, de pays, de provinces, lorsqu’ils sont féminins : Aller, voyager en France, en Afrique, en Algérie ; résider, voyager en Angleterre, en Normandie, etc. || Si les noms de lieux sont masculins, on met à : Aller, résider au Japon, au Mexique, au Canada, au Perche, au Maine. Il y a quelques exceptions à cette règle. En effet, on dit avec en : Aller en Portugal, en Danemark, en Béarn, etc., bien que ces noms soient masculins. || Autrefois cette distinction entre à et en n’existait pas, et l’on employait à où l’usage actuel veut que l’on mette en :

L’un des trois jouvenceaux
Se noya dès le port, allant à l’Amérique
La Fontaine.

|| On dit encore à la Chine, mais mieux en Chine.

à la campagne, en campagne. Il faut bien se garder de confondre ces expressions, car l’usage a donné à chacune d’elles une signification différente. Voy. campagne.

à la ville, en ville. Voy. ville.

à et sur peuvent s’employer dans des cas à peu près analogues ; mais à marque une habitude générale, et se dit d’une chose qui se pratique presque toujours de la même manière. C’est ainsi qu’on dit : Aller à pied. Aller à cheval. Transporter des bagages à âne, à dos d’âne. Monter à cheval pour partir, pour s’enfuir, pour se promener. Un chien fait à pied le voyage que son maître fait à cheval ou en voiture. Mais on emploie sur lorsqu’il s’agit d’une action qui n’est pas habituelle, d’une chose qui se fait parfois et momentanément : Aller sur un âne. Être monté sur un âne. Des bateleurs qui marchent sur leurs mains. Des soldats qui transportent sur leurs bras leurs camarades blessés. Monter sur un cheval, sur une charette pour mieux voir. On accoutume un chien à marcher sur les pattes de derrière.

à et par expriment ce qui nous sert à former une induction ; mais à s’emploie de préférence quand il s’agit de signes faciles, apparents, et dont la seule inspection suffit pour en faire comprendre le sens. On juge, ou plutôt on voit à l’air d’un homme, à sa contenance, à sa voix, à sa démarche, à ses manières, qu’il est en colère. Mais c’est par qu’il faut employer quand les signes sont particuliers, accidentels, et que leur interprétation n’est pas aussi facile. On peut donc également juger qu’un homme est en colère par une contraction instantanée de sa physionomie, par un mot qui lui échappe en passant : Un magistrat habile sait découvrir, par les réponses embarrassées d’un accusé, qu’il est coupable. (Lafaye.)

À l’œuvre on connaît l’artisan.   La Fontaine.
…Je vois à votre mine
Que vous voulez dormir…
La Fontaine.
Reconnaissez, Abner, à ces traits éclatants
Un Dieu tel aujourd’hui qu’il fut dans tous les temps.
Racine.
Si l’on en peut juger à l’air de son visage,
Elle se plaît ici bien mieux qu’en son village.
Regnard.

à et avec s’emploient très-souvent, l’un ou l’autre, pour désigner l’instrument dont on se sert pour faire quelque chose, mais à indique plus particulièrement l’instrument dont on fait habituellement usage. C’est ainsi qu’on dit pêcher à la ligne, mesurer à l’aune, se battre à l’épée, au pistolet. Lorsque l’instrument dont on se sert n’est pas celui qu’on emploie généralement en pareil cas, il faut préférer avec ; on dira donc mesurer avec une canne, se battre avec une fourche, etc. || Cette distinction a également lieu quand à et avec indiquent la manière dont on fait une chose, ou la matière que l’on emploie. On dit : Charger un fusil à balles, un canon à mitraille ; mais on doit dire : Charger un fusil avec des pois, avec du son, avec des lingots ; charger un canon avec des pierres. Il faut donc préférer avec toutes les fois que l’instrument et la matière ne sont pas généralement employés à l’usage auquel on les fait servir, et que des raisons particulières ou extraordinaires ont dû présider à ce choix, et encore quand on veut spécifier le genre d’instrument ou la matière qu’on a dû choisir de préférence. On dira donc : Combattre avec des pistolets à piston ; se battre avec l’épée de son frère ; pêcher avec une plus longue ligne ; charger des fusils avec des balles de fer ; il chargea son fusil avec la dernière balle qui lui restait, etc. || à et avec servent aussi à marquer une certaine convenance entre les personnes ou les choses ; mais il y a cette différence entre à et avec, que à exprime une convenance générale, et avec une convenance particulière, spéciale. C’est ainsi qu’on dit : Avoir affaire à un ministre puissant ; cette garniture va bien à votre robe ; on s’accoutume au travail ; on accommode ses paroles à la circonstance ; on allie l’argent au cuivre ; ce qui a rapport à nous ; comparer Achille à un lion, etc. Mais on dit, au contraire, en faisant usage de la prép. avec : Avoir affaire avec un associé, avec des usuriers ; ces deux choses vont bien l’une avec l’autre ; on s’accoutume avec un maître impatient ; allier sa famille avec une autre par un mariage ; ce sont des vérités abstraites, et qui n’ont aucun rapport avec nous ; comparer Corneille avec Racine, etc.

à peine, avec peine. Il y a aussi une différence de signification entre ces deux expressions ; il ne faut donc pas les confondre. Voy. peine.

à et pour sont synonymes en tant qu’ils marquent tous deux la destination, l’usage des choses ; mais à exprime une destination naturelle ou habituelle : Bois à brûler, table à jouer, etc. ; pour indique une destination tout accidentelle et soumise à des circonstances passagères : Faire avec des bancs, avec des tables, des chaises, etc., du bois pour brûler ; faire avec des planches, etc., des tables pour jouer. || Ces deux prép. sont également synonymes quand il s’agit de marquer la fin, le but qu’on cherche à atteindre ; mais à s’emploie dans les phrases où le sens est général : Hercule cherchait des monstres à combattre ; et pour dans les phrases où le sens est particulier : Hercule cherchait le lion de Némée pour le combattre. || On dit de même Avoir attention à et avoir attention pour. Le premier s’emploie quand on ne veut exprimer qu’une attention ordinaire, ou même une attention superficielle, médiocre : Avoir attention à ce qu’on fait, à ce qu’on dit ; c’est un homme qui n’a attention à rien. Mais pour doit être préféré, toutes les fois qu’il s’agit d’une attention particulière, sérieuse ou constante : On découvre dans les abeilles la plus soigneuse attention pour les plaisirs de leur reine. (Buff.) Cette connaissance engage à avoir plus d’attention pour vos auteurs. (Pascal.) || Il en est de même d’une foule d’autres expressions. On dit : Avoir de la fermeté à faire quelque chose, et avoir de la fermeté pour faire une chose ; mais fermeté à est l’expression courante ou communément usitée : Une autre qualité caractérisait encore davantage Fabius, c’était une fermeté à se tenir au parti qu’il avait pris. (Rollin.) La fermeté de Votre Majesté à réprimer l’hérésie, à exterminer l’erreur, abolir le schisme… (Bourdal.) ; tandis que fermeté pour, s’emploie quand il s’agit d’une fermeté pour quelque chose de particulier : Notre roi s’est acquis beaucoup d’estime par sa fermeté pour régler les finances, pour discipliner les troupes, pour réprimer les abus. (Fén.)