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XLI
PRÉFACE.

M. d’Orbigny ; après plus de quinze ans, on le consulte encore, et l’on peut dire que, si d’autres ouvrages aspirent un jour à le remplacer, aucun d’eux n’aura le privilège de le faire oublier.

Sans doute, malgré les soins de l’habile directeur, malgré la science et les talents de ses collaborateurs, de graves omissions existent, certaines fautes ont été commises. Par exemple, aux articles sur les oiseaux, on voudrait plus de précision dans la distinction des caractères et dans la classification des genres. Mais ces défauts, qui nuisent à la perfection de l’ouvrage, ne doivent pas empêcher d’en reconnaître les qualités. D’ailleurs, ces imperfections sont largement compensées par une foule d’articles excellents, dans tous les genres. Quant au style, il est ce qu’il devait être, simple et correct, unissant la clarté à la concision, et une exactitude rigoureuse dans la pensée à une remarquable précision des termes.

Le Discours préliminaire, qui sert pour ainsi dire d’introduction à l’ouvrage, est dû à la plume de M. d’Orbigny. C’est un tableau vif et animé de l’histoire des sciences naturelles et de leur développement à travers les âges. Après avoir jeté un coup d’œil général sur l’ensemble de ce vaste panorama, l’auteur divise son exposé des sciences naturelles et des sciences physiques qui s’y rattachent en trois époques : l’antiquité, le moyen âge et les temps modernes. Pour lui, l’antiquité s’étend depuis les âges historiques jusqu’au septième siècle de notre ère. Pendant cette longue période, l’Orient reste le berceau des sciences, comme il était celui de la civilisation ; les Chinois, les Indiens, les Assyriens, les Babyloniens, les Égyptiens, etc., furent les premiers inventeurs des arts et les premiers observateurs de la nature. Ce fut par eux que la lumière se répandit en Occident, chez les Grecs et chez les Romains en premier lieu, puis chez les Barbares, qui leur succédèrent. L’histoire des sciences, à cette époque, se réduit à un petit nombre de faits qui n’exigent pas de longs développements ; il en fut de même au moyen âge. L’isolement des différents peuples, leurs guerres continuelles, et surtout le despotisme des rois, la tyrannie des prêtres, faillirent étouffer les sciences dans leur berceau. Elles survécurent cependant, et la Réforme inaugura une ère d’émancipation que 89 devait couronner. À partir du commencement du XIXe siècle, elles descendirent des hauteurs des théories philosophiques, pour devenir pratiques et se mêler aux détails les plus humbles de la vie. Alors le savant ne dédaigna pas de devenir tour à tour agriculteur, mineur, distillateur, chaufournier, tanneur, teinturier, etc. Tous les arts, toutes les industries, tous les métiers sont venus lui demander des lumières, et il a répondu à tous. Depuis que la science est entrée dans cette noble voie, les intelligences se sont agrandies, les préjugés ont, sinon complètement disparu, du moins diminué, et la civilisation a marché à grands pas. Depuis ce moment, les conquêtes de l’esprit humain ne sont plus livrées au bon vouloir d’un aréopage scientifique et subordonnées à l’existence incertaine d’une nation. Tous les peuples en sont solidairement les dépositaires, et quand les rivalités qui les séparent et les arment les uns contre les autres auront à jamais cessé, quand tous les hommes, jouissant des bienfaits des lumières, marcheront d’un pas égal dans les voies de la science, alors seulement on connaîtra les limites de l’esprit humain. La science, quelque incomplète qu’elle nous paraisse aujourd’hui, n’en est pas moins l’ancre de salut de l’humanité : la science pratique, expérimentale, c’est là que repose la vérité ; tandis qu’en dehors il ne peut y avoir qu’incertitude, erreur ou mensonge.

Tel est, en résumé, le Discours préliminaire qui précède le Dictionnaire universel d’histoire naturelle, et qui n’a pas moins de 232 pages.

Toutefois, cette œuvre toute française jouit aujourd’hui chez nous de peu de considération ; dans ces dernières années, son succès est allé chaque jour en s’affaiblissant, et l’œuvre de M. d’Orbigny ne compte plus guère de lecteurs qu’en Angleterre, en Allemagne, en Italie et en Espagne. Le savant auteur a été la victime de cet adage, vieux comme le monde, Nul n’est prophète dans son pays.

Dictionnaire des sciences philosophiques, par une société de professeurs et de philosophes, sous la direction de M. Franck, un des disciples aimés de M. Cousin et vice-président du consistoire israélite ; 6 vol. <span style="white-space:nowrap;"><abbr class="abbr" title="in-octavo">in-8<sup style="font-size:70%;">o, Paris, 1844-1852. La préface débute par cette réflexion qui ne serait déplacée en tête d’aucun dictionnaire : « Lorsque, après bien des tâtonnements et des vicissitudes, à force de luttes, de conquêtes et de préjugés vaincus, une science est enfin parvenue à se constituer, alors commence pour elle une autre tâche, plus facile et plus modeste, mais non moins utile peut-être que la première : il faut qu’elle fasse en quelque sorte son inventaire, en indiquant avec la plus sévère exactitude les propriétés douteuses, les valeurs contestées, c’est-à-dire les hypothèses et les simples espérances, et ce qui lui est acquis d’une manière irrévocable, ce qu’elle possède sans condition et sans réserve ; il faut que, substituant à l’enchaînement systématique des idées un ordre d’exposition plus facile et plus libre, elle étale aux yeux de tous la variété de ses richesses, et invite chacun, savant ou homme du monde, à y venir puiser sans effort, selon les besoins et même selon les caprices du moment. Tel nous paraît être en général le but des encyclopédies et des dictionnaires. » La philosophie et les sciences spéculatives ou expérimentales qui dépendent de cet ordre de connaissances manquaient de cet inventaire reconnu indispensable. Ce recueil, néanmoins, n’était pas sans antécédents dans l’histoire de la philosophie. Deux essais