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— Hist. ecclés. V. Adoptien.

ADOPTÉ, ÉE (a-do-pté) part. pass. du v. Adopter. Reconnu comme enfant propre : Moïse fut adopté par la fille de Pharaon. Octave fut adopté par César. L’adoption française ne fait point sortir l’enfant adopté de sa famille naturelle.

Que vois-je ? l’étranger dépouille l’héritier,
Et le fils adopté succède le premier ?
L. Racine.

— Par anal. : René, adopté dans la tribu de l’Aigle, devait être de l’expédition commandée par le vieux chef. (Chateaub.)

Vous étiez des enfants dans son cœur adoptés.
Voltaire.


|| Reçu, accepté, accueilli, en parlant des choses : Ce règlement a été bientôt adopté par toutes les nations. (Volt.) Il y a une infinité d’erreurs qui, une fois adoptées, deviennent des principes. (Raym.)

— Législ. Approuvé, sanctionné, voté : La proposition fut adoptée. La loi n’a été adoptée qu’à la majorité de vingt voix.

— Elliptiq. Adopté ! Formule de vote qui indique que la proposition est adoptée, et dont on se sert souvent pour exprimer son adhésion à quelque chose.

— Substantiv. Enfant adopté : L’adopté n’est soumis à aucune autre condition qu’à celle de produire le consentement de son père et de sa mère. (Encycl.) L’adopté, passant sous la puissance du père de famille, exprimait quelquefois cette relation de dépendance en se laissant tondre comme le serf. (Michelet.)

ADOPTER v. a. ou tr. (a.-do-pté — Iat. adoptare, même sens ; de ad, pour ; optare, choisir). Reconnaître comme son propre enfant un enfant appartenant à une famille étrangère, en accomplissant les formalités Iégales : Adopter un orphelin. Antonin le Pieux adopta Marc-Aurèle. À Athènes, on ne pouvait adopter que des enfants légitimes. (Bouillet.) Le prince d’Edesse adopta Baudoin pour son fils en le pressant, selon la coutume du pays, contre sa poitrine nue et l’introduisant sous le vêtement le plus près de sa chair. (Michelet.)

          Jamais, sans ses avis,
Claude, qu’il gouvernait, n’eût adopté mon fils.
Racine.

— Absol. Dans l’ancien droit, les femmes ne pouvaient pas adopter, mais on le leur permit ultérieurement. (Encycl.) Nul époux ne peut adopter qu’avec le consentement de l’autre conjoint. (Code civ.) Junon, montant sur le lit, prit Hercule contre son sein et le laissa couler jusqu’à terre à travers ses vêtements, imitant la véritable naissance, ce que font encore aujourd’hui les barbares lorsqu’ils veulent adopter. (Michelet.)

— Par ext. Prendre soin d’un enfant, le traiter comme sien, mais sans formalités légales : Malgré la médiocrité de sa fortune, il avait en quelque sorte adopté les enfants malheureux de son village. (B. de St-P.)

Adopte nos enfants qu’on prive de leur père.
C. Delavigne.
Laisse-moi mon erreur, puisqu’elle m’est si chère…
Je t’adopte pour fils, accopte-moi pour père.
Corneille.


|| Admettre, embrasser, pratiquer : Adopter un parti, une proposition, une erreur. Adopter un plan. Adopter un genre de vie. Il est impossible de faire entendre raison à ceux qui ont adopté une façon de penser conforme à leur intérêt. (Clém. XIV.) Ce n’est pas la première fois qu’une assemblée savante a adopté une opinion sans examen. (B. de St-P.) Les hommes ont adopté différentes manières de rendre les derniers devoirs à leurs morts. (B. de St-P.) Les écoles d’Orient ont de bonne heure adopté Aristote. (Egger.) Lorsqu’on adopte un système, il faut l’adopter complètement. (B. Const.) On ne voit jamais ni sauvages ni barbares adopter spontanément nos mœurs sociales. (Fourier.)

L’Amérique à genoux adoptera nos mœurs.
Voltaire.
Il apprend mon dessein, l’adopte, l’autorise.
C. Delavigne.


|| Prendre par choix, suivre : Il adoptait l’hiver, le carrick noisette à trois collets. (Balz.) Jamais une femme qui se respecte ne doit adopter les modes qui choquent la décence et la pudeur. (Boitard.) || Ajouter foi à une chose, la reconnaître comme vraie : Ils croyaient aux devins et aux sorciers, et beaucoup trop aux miracles, qu’ils ont longtemps adoptés sans examen.(Anquet.) Des savants avaient adopté l’existence d’une atmosphère dont le soleil est le centre. (Cuv.) Les femmes adoptent volontiers les jugements de ceux qui les entourent. (Mme  Romieu.)

— Législ. Approuver, sanctionner, voter : Les Chambres adoptèrent cette proposition. Le Sénat vient d’adopter une nouvelle loi. La Charte a adopté les réformes politiques et religieuses des xvie et xviie siècles, et la grande révolution du xviiie. (V. Cousin.)

S’adopter, v. pr. Être admis, accepté : Cette opinion ne peut s’adopter. || S’aimer, se choisir réciproquement : Je désirerais que les élèves pussent s’adopter mutuellement comme amis. (B. de St-P.) Pressées de s’adopter, mais incertaines et craintives, ces âmes sœurs s’appelaient et se repoussaient en même temps. (G. Sand.)

Syn. Adopter, aimer mieux, choisir, élire, opter, préférer. Choisir, c’est se déterminer en faveur d’une chose plutôt que d’une autre : L’écrivain ne doit choisir pour son Mécène qu’un homme digne d’être son juge. (La Serre.) Opter, c’est choisir, étant contraint de se décider : Qu’on est à plaindre en certaines situations, où il faut opter entre sa fortune et sa conscience ! (Mass.) Élire, c’est choisir, par la voie des suffrages, un homme pour occuper une place ou remplir une fonction : Pendant plusieurs siècles, les empereurs allemands furent en possession de choisir eux-mêmes les papes ou de les faire élire dans des conciles tenus en Allemagne. (Cond.) Préférer, c’est marquer le choix qu’on fait d’une chose relativement à l’emploi ou à l’usage qu’on en veut faire : Vous devez me le préférer, sans avoir égard à mon rang, sans avoir pitié de ma situation cruelle. (Le Sage.) Aimer mieux, c’est faire un choix par goût : Quoique je ne puisse rien alléguer pour préférer Cicéron à Démosthène, néanmoins je l’aime mieux. (Le Sage.) Adopter, c’est choisir une chose qui est à un autre ou dont un autre est l’auteur, la lui emprunter et la faire sienne : Il a fallu soixante ans pour faire adopter en France ce que Newton avait démontré. (Volt.)

ADOPTIEN s. m. (a-dop-si-ain — rad. adopter). Hist. ecclés. Membre d’une secte du viiie siècle qui eut pour chef Elipandus, archevêque de Tolède, et Félix, évêque d’Urgel, en Espagne. Les adoptiens prétendaient que, comme Dieu, Jésus-Christ était de sa nature fils de Dieu, mais que, comme homme, il ne l’était que par adoption. Charlemagne les fit condamner dans un synode tenu à Ratisbonne et dans plusieurs conciles, et ils tombèrent dans l’oubli après la mort d’Elipandus. || On dit aussi adoptant.

ADOPTIF, IVE adj. (a-do-ptif, i-ve — lat. adoptivus, même sens ; de adoptare, adopter). Qui a été adopté dans les formes légales : Fils adoptif. Fille adoptive. Le titre de fils adoptif est plus honorable que celui de légataire universel. (Dupin âiné.) Je lui demandai la main de sa fille adoptive. (G. Sand.) || Qui adopte, qui reconnaît comme son enfant : Père adoptif. Mère adoptive. Il faut que vous sortiez d’ici plein de respect pour la mère de votre fils, et de reconnaissance pour son père adoptif. (G. Sand.) Elles bénissent leur père adoptif, qui partage avec elles le produit de son travail. (Viennet.) || Dont on a fait choix, en parlant des choses L’étranger, naturalisé à Rome, prenait bientôt l’esprit de sa patrie adoptive. (Nisard.) || Se dit aussi des animaux : Si la brebis est morte, on donne son petit à une autre mère ; si la mère adoptive refuse de recevoir ce nouveau nourrisson à la place de celui qu’elle a perdu, on le couvre de la peau encore fraîche de l’agneau mort. (Belèze.)

— Fig. : Je regarde la bienveillance comme la sœur adoptive de la charité. ( Descuret.)

— Dans le langage religieux : Jésus-Christ nous a faits enfants adoptifs de son Père. Nous sommes les enfants adoptifs de l’Église.

ADOPTION s. f. (a-do-psi-on — lat. adoptio, même sens ; de ad, pour ; optio, choix). Action d’adopter : Entrer dans une famille par adoption. L’adoption confère le nom de l’adoptant à l’adopté. (Acad.) La loi ne devrait pas permettre l’adoption d’un enfant au-dessus de dix ans, afin que les sentiments de père et de fils pussent s’établir entre l’adoptant et l’adopté. (Napol. Ier.) L’adoption par la femme seule est inconvenante ; l’adoption par le mari seul l’est également. Il n’y a donc de raisonnable que l’adoption en commun. (Napol. Ier.) Chez les bohémiens, l’adoption équivaut à la maternité. (G. Sand.) S’il avait de bons sentiments, il donnerait à sa mère par adoption une partie de ses gages. (G. Sand.)

Tu n’as de fils qu’Octave, et nulle adoption
N’a d’un autre César appuyé ta maison.
Voltaire.


|| S’emploie au pluriel : Rien ne s’oppose à ce que les adoptions soient faites par un acte du corps législatif. (Napol. Ier.)

— Par ext. Attachement, préférence, liaison intime : L’adoption de deux âmes l’une par l’autre. Il résulterait de ces adoptions réciproques et publiques le goût de la vertu, l’habitude des secours mutuels et la constance dans les liaisons. (B. de St-P.) Le professeur fit de cet élève son enfant d’adoption. (Cuvier.) || Choix, préférence : Étude, travail d’adoption. La France est sa patrie d’adoption.

Les peuples nés aux bords que la Vistule arrose
Sont par adoption devenus tes enfants.
J.-B. Rousseau.
… Rome vous permet cette haute alliance
Dont vous aurait exclu le défaut de naissance,
Si l’honneur souverain de son adoption
Ne vous autorisait à tant d’ambition.
Corneille.

— Fig. Introduction, admission : Les langues ne s’enrichissent pas toujours par l’adoption irréfléchie des mots étrangers. (Encycl.) L’adoption dans une langue des mots étrangers ne saurait se faire avec trop de précaution. (Volt.)

— Législ. Sanction, vote, approbation : La plupart des membres de la Chambre des députés se sont opposés à l’adoption de ce projet de loi. (Dict. polit.) Il proposa l’adoption de l’unité des poids et mesures. (Mignet.)

— Théol. Grâce spéciale par laquelle, dans le baptême, les chrétiens deviennent enfants de Dieu et héritiers du royaume du ciel, dont les avait exclus la prévarication du premier homme : Nous sommes tous enfants de Dieu par adoption. Enfants d’adoption, que vous coûtez au Père céleste ! (Boss.)

Encycl. L’adoption établit entre deux individus des rapports de paternité et de filiation purement civils. L’un des deux est appelé adoptant, l’autre adopté. L’adoption n’était point admise en France sous l’ancienne jurisprudence. Elle y a été introduite par un décret de l’Assemblée législative du 18 janvier 1792 ; le principe de l’adoption fut consacré de nouveau par divers décrets de la Convention nationale  ; mais il ne fut organisé que par le titre VIII du Code civil. L’adoption s’opère au moyen d’une inscription faite sur les registres de l’état civil, après un jugement prononcé par le tribunal de première instance et confirmé par la Cour d’appel. L’adoption n’est permise qu’aux personnes de l’un ou de l’autre sexe âgées de plus de cinquante ans, qui n’ont, à l’époque de l’adoption, ni enfants, ni descendants légitimes, c’est-à-dire des petits-enfants, et qui ont au moins quinze ans de plus que les individus qu’elles se proposent d’adopter. Malgré l’adoption, l’adopté reste dans sa famille naturelle et y conserve tous ses droits ; l’adoption ne lui confère que le droit d’ajouter à son nom celui de l’adoptant et de lui succéder comme s’il était enfant naturel et légitime. La faculté d’adopter ne peut être exercée qu’envers l’individu à qui l’on a, dans sa minorité et pendant six ans au moins, fourni des secours, ou qui aurait sauvé la vie à l’adoptant. L’adoption ne peut jamais avoir lieu avant la majorité de l’adopté, et celui-ci est obligé, s’il n’a pas vingt-cinq ans, d’obtenir le consentement de ses père et mère. L’adoption peut être conférée par testament à un mineur dont l’adoptant a été pendant cinq ans le tuteur officieux.

L’adoption remonte à la plus haute antiquité. Elle existait à Sparte, à Athènes. À Rome, elle se liait à l’organisation de la famille et à celle de l’État. L’histoire nous apprend qu’elle y fut une source féconde de vertus, de gloire et de grandes actions. On distinguait deux sortes d’adoptions : l’adoption proprement dite et l’adrogation. La première ne s’appliquait qu’aux fils de famille ; elle s’opérait par la vente fictive, appelée mancipation, suivie de la cession en justice, qui transportait du père naturel au père adoptif la puissance paternelle. L’adrogation s’appliquait à un homme qui, étant indépendant de toute puissance paternelle, consentait à se soumettre à la puissance paternelle d’un autre. L’adrogation ne pouvait avoir lieu sans l’intervention du peuple.

Les Germains possédaient, sous le nom d’adoption militaire une institution remarquable : Deux guerriers, liés d’estime et d’amitié, creusaient en terre un trou avec le fer de leur lance, y répandaient de leur sang qu’ils mêlaient la terre fraîchement remuée ; puis ils s’embrassaient et plaçaient sur le trou une pierre qui portait leurs chiffres entrelacés. Cette adoption réciproque, qu’on nommait association du sang, ne liait pas seulement pour la vie un guerrier à un autre, mais associait encore sa famille et jusqu’à ses amis à la fortune du survivant.

ADOPTIONNISTE s. m. (a-dop-si-o-ni-ste — rad. adoption). Théol. Nom donné à des hérétiques du viiie siècle, qui professaient que Jésus-Christ est fils de Dieu, non par génération, mais par adoption. Cette hérésie, soutenue par quelques évêques d’Espagne, fut condamnée en 794 par le concile de Francfort et par le pape Adrien Ier

ADOPTIVEMENT adv. (a-do-pti-ve-man — rad. adopter). D’une manière adoptive, par adoption.

ADORABLE adj. (a-do-ra-ble — lat. adorabilis, même sens ; de adorare, adorer). Qui est digne d’être adoré, qui a droit à l’adoration : Les mystères de la religion sont adorables. Vous êtes, ô mon Dieu, seul adorable ; seul immortel ! (Mass.) Cet adorable maître nous a dit que son joug est doux et son fardeau léger. (Bourdal.)

Jeune peuple, courez à ce maître adorable.
Racine.
Seigneur, dans ta gloire adorable
Quel mortel est digne d’entrer ?
J.-B. Rousseau.

— Par exag. Qui est digne d’être aimé avec passion : Femme, maîtresse adorable. Les poëtes ont dit que leurs Philis étaient plus adorables que les divinités de la Fable, et personne ne peut les en blâmer. (Volt.) Dans ce siècle-ci, quand un mari laisse faire à sa femme tout ce qu’elle veut, c’est un homme adorable. (Regnard.)

Moi, j’aime tout de bon l’adorable Henriette.
Corneille.
O dieux qui, comme vous, la rendez adorable,
Rendez-la, comme vous, à mes yeux exorable.
Molière.


|| Qui mérite toute notre amitié, toute notre estime : Prince adorable. Mère adorable. Ami adorable. Il a un caractère adorable. Quelle adorable bonté ! Il est adorable du bon courage qu’il a de vouloir venir. (Mme  de Sév.) Sous toutes ses faces, la vérité est adorable. (Jouffroy.)

— Fam. En parlant des choses, il signifie Parfait, exquis : Vin adorable. Breuvage adorable. L’adorable jus de la treille. Il avait un costume adorable. Joseph Platon déclara ces gentillesses adorables. (Rog. de Beauv.)

Et dans les bouts-rimés je vous trouve adorable.
Molière.

— Iron. Ah ! vraiment, monsieur, je vous trouve adorable. Il est une demi-douzaine d’adorables mauvais sujets qu’on ne retrouve que là. (Mme  E. de Gir.) Pourquoi, disait un malcontent dans sa naïveté adorable, pourquoi messieurs les astronomes s’avisent-ils de prédire de grandes marées ? (Ph. Busoni.)

— S’empl. quelquefois substantiv. en parlant d’une femme : Eh quoi ! mon adorable, allez-vous commencer par une querelle ? (Stern.) Si bien qu’un jour le financier, averti que Lauzin était chez son adorable, monte et trouble le tête-à-tête. (E. Sue.)

ADORABLEMENT adv. (a-do-ra-ble-man — rad. adorable). Par exag. D’une manière adorable, exquise, parfaite : Vous êtes adorablement bien mise. (Balz.) Elle est adorablement spirituelle. (Balz.)

ADORANT (a-do-ran) part. prés du v. Adorer :

J’aime encor mon honneur en adorant Camille.
Corneille.

ADORATEUR, TRICE s. (a-do-ra-teu r, tri-se — lat. adorator, même sens ; de adorare, adorer). Celui, celle qui adore une divinité : Certains peuples étaient adorateurs du feu, du soleil. Les adorateurs de Brahma. Je suis un adorateur très-zélé de la divinité. (Volt.) La fin essentielle du christianisme est de former, au milieu de tous les peuples de la terre, un peuple d’adorateurs en esprit et en vérité. (Frayssin.) De tous les adorateurs d’idoles, il n’y en a pas de plus insensé que celui qui s’adore lui-même. (Boiste.) L’amour divin a de plus encore sa présence perpétuelle devant les yeux et dans l’âme de l’adorateur. (Lamart.)

. . . . . Soyez à jamais confondus,
Adorateurs impurs de profanes idoles !
J.-B. Rousseau.
D’adorateurs zélés à peine un petit nombre
Ose des premiers temps nous retracer quelque ombre.
Racine.

— Par. ext. Celui qui aime une chose avec excès : Un adorateur du pouvoir. Un adorateur de la fortune. Si le monde n’attachait les hommes que par le bonheur de leur condition présente, comme il ne fait point d’heureux, il ne ferait point d’adorateurs. (Mass.) La vertu simple et négligée trouve peu d’adorateurs. (D’Aguess.) || Celui qui aime une femme, qui lui fait assidûment la cour : Les femmes du monde font vanité de traîner à leur suite une foule d’adorateurs. (St-Evrem.) Les adorateurs de mademoiselle Clairon lui feront tourner la tête et finiront par la brouiller avec le public. (Grimm.) Il y a des femmes qui ont trop d’adorateurs pour avoir un favori. (Balz.) Il fut décidé par la tante, un mois durant, que M. de Lorgues était l’adorateur. (A. de Musset.) Quelle est la femme qui n’a pas un adorateur inconnu ? (Mme  E. de Gir.) || Admirateur excessif : Ce poëte est l’adorateur de ses ouvrages. (Trév.) Madame Dacier, l’adoratrice d’Homère, y trouverait son compte. (Ste-Beuve.)

— S’empl. adjectiv. :

Mais pour me faire voir, je n’ai percé qu’à peine
Les flots toujours nouveaux d’un peuple adorateur.
Racine.
Je ne suis plus ce roi craint, chéri, vénéré,
D’un peuple adorateur à toute heure entouré.
P. Marion.

Épithètes. Vrai, soumis, convaincu, fidèle, constant, sincère, fervent, zélé, humble, tremblant, ignorant, faux, hypocrite, aveugle, impur, lâche, mercenaire, sot, stupide.

ADORATIF, IVE adj. (a-do-ra-tif, i-ve — rad. adorer). Qui a le caractère de l’adoration : Culte adoratif.

ADORATION s. f. (a-do-ra-si-on — lat. adoratio, même sens ; de adorare, adorer). Action d’adorer, de rendre un culte, des honneurs divins : Ils rendaient à Jésus-Christ une adoration extérieure. (Boss.) Le plus grand des crimes est l’adoration des idoles. (Trév.) L’homme doit à Dieu son adoration et ses hommages. (Mass.) L’adoration est l’acte d’hommage que l’homme fait de lui-même à son créateur. (Bautain.) L’adoration n’est que l’amour qui se prosterne. (Ventura.) Dieu ne peut nous inspirer qu’un genre d’adoration, auquel rien ne se compare et qu’aucune langue ne peut exprimer. (G. Sand.)

— Par ext. Amour extrême, attachement excessif ; dans ce sens, il s’emploie souvent au pluriel : L’amour que les peuples ont pour un prince vertueux et bienfaisant va jusqu’à l’adoration. (Trév.) L’humanité va où vont ses adorations. (Le. P. Félix.) La reconnaissance a ses adorations et ses enthousiasmes. (Proudh.) Je me sens au cœur pour elle d’enivrantes adorations. (Balz.) Le respect et l’amour composent ce qu’on appelle l’adoration. (V. Cousin.)

Je l’admirai longtemps ; oui, j’eus pour Scipion
Ce sentiment qui tient de l’adoration.
M.-J. Chénier.


|| Démonstrations de respect, de zèle, adulations : Vous êtes accoutumée à ne recevoir jamais que des hommages et des adorations de tout le monde. (Mol.) Le roi se hâta de venir jouir des acclamations des peuples et des adorations de ses courtisans. (Volt.)

Aimer à l’adoration, Éprouver une très-vive passion pour : Je me sens même de la disposition à vous aimer un jour à l’adoration, à la fureur. (***) || Avec adoration, Avec amour, avec respect, avec idolâtrie : Et la duchesse, se laissant doucement couler aux pieds de Henri, joignit ses belles mains en tremblant, et le regardait avec adoration. (E. Sue.)