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ABSIDIOLE s. f. (ab-si-di-o-le — rad. abside). Chapelle secondaire bâtie en forme d’abside autour du sanctuaire et des nefs des églises.

ABSIN MENU s. m. (ab-sain-me-nu — rad. absinthe). Bot. Un des noms vulgaires de l’absinthe.

ABSINTHATE s. m. (ab-sain-ta-te — rad. absinthe). Chim. Sel produit par la combinaison de l’acide absinthique avec une base salifiable.

ABSINTHE s. f. (ab-sain-te — lat. absinthium, même sens, lequel dérive lui-même du gr. a priv., sans ; psintos, douceur ; selon d’autres, du gr. apsinthion, qu’il est impossible de boire ; forme de a priv. et de pinò, boire). Plante d’une odeur forte et aromatique, qui doit son nom à son extrême amertume : Les initiés aux mystères d’Isis portaient des rameaux d’absinthe. (Encycl.) Du côté du fleuve on voit, sur son sable jaune un gazon fin mêlé d’un peu de trèfle, et çà et là quelques touffes d’absinthe marine. (B. de St-P.)

Ainsi qu’une abeille au matin
Va sucer les pleurs de l’aurore
Ou sur l’absinthe ou sur le thym.
Voltaire.

— Liqueur faite avec les feuilles d’absinthe : Prendre un verre d’absinthe. De l’absinthe suisse.

— Par ext. Verre de cette liqueur : Boire une absinthe, deux absinthes. Nous buvons des absinthes qui me cassent la poitrine, et nous jouons au sempiternel domino qui m’abrutit. (A. Daudet.)

Absinthe panachée, Mélangée avec une autre liqueur telle que l’anisette, la menthe, le sirop de gomme, etc. On lui donne ce nom par analogie avec un panache, qui est ordinairement de différentes couleurs. Toutefois, le mot panaché n’a été appliqué aux liqueurs mélangées qu’après avoir été dit des glaces, où l’analogie est beaucoup plus frappante, puisqu’elles ont à la fois les couleurs variées et la forme du panache.

— Fig. Déplaisir amer, chagrin cuisant, amertume de cœur, peines morales : La vie est cruellement mêlée d’absinthe. (Mme  de Sév.) Je ne regrette point Pascal ; ses lumières étaient aussi étendues que sa société était triste : c’était de l’absinthe qu’il répandait dans ses communications. (Mme  de Créquy.) Zadig éprouva que le premier mois du mariage, comme il est écrit dans le livre du Zend, est la lune du miel, et que le second est la lune de l’absinthe. (Volt.) Elle lui répandit tout doucettement mille gouttes d’absinthe sur le miel de ses premiers mois de mariage. (Balz.) L’existence de l’homme détrompé est un long supplice… Il se nourrit d’absinthe et de fiel. (Ch. Nodier.)


Vous ne donnerez pas cette absinthe au lieu d’eau,
Au vieillard qui demande une goutte au bourreau.
Lamartine.
Sa main mystérieuse et sainte
Sait cacher le miel dans l’absinthe
Et la cendre dans les fruits d’or.
V. Hugo.


|| Critique amère : Leur style est mêlé de fiel et d’absinthe. (La Bruy.) Musset jette à la figure de Voltaire la lie de l’absinthe de Rolla. (Vacquerie.)

Bois d’absinthe. Méd. Bois jaune et dur, de saveur très-amère, produit par une espèce de carissa. Il croît à l’île de la Réunion. On l’appelle aussi bois amer de Bourbon. Il est employé en médecine.

Absinthe maritime ou absinthe de mer. Bot. C’est l’artemisia maritima de Linné. Elle possède des propriétés analogues à celles des autres absinthes. || Absinthe poutique ou petite absinthe (artemisia poutica de Linné). Plante vivace qui ressemble à la grande absinthe ; elle est plus aromatique, moins amère, et possède des propriétés analogues, quoique un peu plus faibles. Quelques praticiens la préfèrent. Elle est néanmoins d’un usage moins répandu.

Encycl. L’absinthe (artemisia absinthium de Linné) est une plante vivace, dont toutes les parties possèdent une odeur forte, aromatique, et une saveur amère. Elle habite les contrées centrales et méridionales de l’Europe, et se trouve surtout dans les lieux incultes et arides. On la cultive dans les jardins potagers, surtout au voisinage des grands centres de population. On emploie en médecine ses feuilles et ses sommités fleuries ; pour cela, on les récolte à l’époque de la floraison, qui a lieu en juillet et août, et on les fait sécher à l’ombre.

Une huile essentielle verte très-odorante, et deux matières amères, l’une azotée, l’autre résineuse, tels sont les principes actifs de l’absinthe. La plante, bien desséchée, conserve toutes les qualités qu’elle avait à l’état frais, et son amertume est même un peu augmentée.

L’absinthe est usitée en médecine comme stomachique, tonique, antiacide, antiputride, fébrifuge, vermifuge, emménagogue et stimulante. On l’emploie en décoction ; on en fait aussi un extrait, une eau distillée, des teintures vineuses et alcooliques, etc.

Cette dernière préparation, ou la liqueur d’absinthe, qui lui ressemble beaucoup, est d’un usage très-répandu pour exciter les organes de la digestion et de la circulation. On la prend avant le repas pour réveiller l’appétit ; on l’a même préconisée contre la chlorose. Mais si l’usage modéré de l’absinthe produit de bons résultats, l’abus qu’on en fait trop souvent entraîne les plus grands inconvénients. Ceux qui en boivent outre mesure et sans la mitiger avec de l’eau, sont sujets aux céphalalgies, aux étourdissements, aux vertiges, à l’affaiblissement de la vue, etc.

L’absinthe doit être entièrement proscrite pour les tempéraments doués d’une sensibilité ou d’une irritabilité très-grande, et dans les cas où l’on peut soupçonner ou craindre l’inflammation de quelque organe.

Les feuilles d’absinthe sont encore employées à l’extérieur, sous forme de cataplasmes résolutifs.

Les animaux la broutent quelquefois, et leur lait, ainsi que leur chair, en contracte une saveur amère et désagréable. On l’emploie cependant en médecine vétérinaire, contre la pourriture ou les vers intestinaux.

Dans quelques localités, on a l’habitude de mettre de l’absinthe dans les vins faibles, afin de leur donner plus de saveur et d’assurer leur conservation. Dans le nord de l’Europe, on s’en sert pour remplacer le houblon dans la fabrication de la bière, qui devient alors, à ce qu’il paraît, plus enivrante.

L’absinthe suisse, la plus renommée, est faite, non pas avec la plante dont nous venons de parler, mais avec quelques espèces voisines, qui sont confondues sous la dénomination collective de génépi. V. ce mot.

ABSINTHÉ, ÉE (ab-sain-té) part. pass. du v. Absinther. Mélangé d’absinthe : Liqueur absinthée. Potion absinthée. Sirop de gomme absinthé. Anisette absinthée.

— Fig. Se dit des tristes effets que produit la liqueur d’absinthe sur toute l’organisation : Je me rends presque toujours à mon étude la bouche pâteuse et l’œil absinthé ; ces petites débauches sont d’un salutaire effet pour la discipline. (A. Daudet.)

ABSINTHER v. a. ou tr. (ab-sain-té — rad. absinthe). Néol. Mêler de l’absinthe à quelque autre liquide : Absinther de l’anisette. C’est une liqueur qu’il faut absinther. Absinther une potion.

S’absinther, v. pr. Fam. et triv. Boire de l’absinthe, se gorger d’absinthe : Il s’absinthe dès qu’il est levé. Ils vont tous venir ici s’absinther. (Journ.) Après, nous nous absintherons quelque part, et nous dînerons n’importe où. (P. Cairaud.) Dans le doute, absinthe-toi. (Aphor. de brasserie.)

ABSINTHEUR s. m. (ab-sain-teur — rad. absinthe). Néol. Celui qui a pris l’habitude de boire de l’absinthe en grande quantité et qui s’est fait un besoin des surexcitations factices que procure ce liquide : Ce jeune absintheur était dans le plus déplorable état ; il a été transporté à l’hôpital Necker. (Journ.)

ABSINTHIER s. m. (ab-sain-tié — rad. absinthe). Néol. Synonyme d’absintheur : Tel qu’il est cet étudiant est peut-être de tous le plus heureux ; ce n’est pas un pilier d’estaminet, un culotteur de pipes, un absinthier, un coureur de filles. (Edm. Robert.)

ABSINTHINE s. f. (ab-sain-ti-ne — rad. absinthe). Chim. Principe amer de l’absinthe. L’absinthine a une légère odeur d’absinthe et une saveur extrêmement amère : elle est fort peu soluble dans l’eau, très-soluble dans l’alcool ; elle se dissout aussi dans l’éther et dans l’acide acétique concentré ; elle a une réaction acide assez tranchée.

ABSINTHIQUE adj. (ab-sain-ti-ke — rad. absinthe). Chim. Se dit d’un acide particulier qui a été trouvé dans l’absinthe : L’acide absinthique se trouve, d’après Braconnot, combiné à la potasse, dans les tiges d’absinthe. (Orfila.)

ABSNÉ s. m. (abss-né). Linguist. Idiome parlé par les Abases : L’absné est un idiome particulier, différent des autres langues du Caucase. (Béraud.)

ABSOLU, UE adj. (ab-so-lu — lat. absolutus, même sens ; formé de ab, de ; solutus, dégagé). Indépendant de tout être, de tout accident qui subsiste par lui-même. Dans ce sens, il ne peut se dire que de la Divinité et de ses attributs : Dieu seul est absolu.

Ô Dieu ! maître absolu de la terre et des cieux…
Racine.
Les chrétiens n’ont qu’un Dieu, maître absolu de tout.
Corneille.

— Qui n’a ni contrôle, ni limites, en parlant d’un souverain et de son autorité : Pouvoir absolu. Puissance absolue. Autorité absolue. Gouvernement absolu. Monarchie absolue. Souvenez-vous que les pays où la domination des souverains est plus absolue sont ceux où les souverains sont moins puissants. (Fén.) Son pouvoir absolu fait autant d’esclaves que de sujets. (Fén.) Le pouvoir absolu n’est que la conquête de l’intérieur. (Villem.) Le pouvoir absolu fut le premier en date des gouvernements. (Lerminier.) On conçoit que, dans un gouvernement absolu, l’inamovibilité soit une garantie. (Lerminier.)


Mais songez que les rois veulent être absolus.
Corneille.
Je hais ces mots de puissance absolue.
Pibrac.


Et vous quittez ainsi la puissance absolue !
Racine.


De l’absolu pouvoir vous ignorez l’ivresse.
Racine.


Je suis dans ma maison plus absolu qu’un roi.
Étienne.

— Par anal. Celui qui a un pouvoir entier, complet, sans limites : Un père de famille absolu chez lui. Il craignait d’avoir un rival qui, tout éloigné qu’il eût été, eût pu l’empêcher d’être heureux, même dans un pays où il était absolu. (Scarr.) Les femmes ont un empire absolu sur les hommes. (Pasc.) Vous êtes le maître absolu de sa destinée. (Fonten.) Le pouvoir paternel est le seul pouvoir absolu qui offre peu de danger. (Ségur.)

— Qui est considéré en soi-même, dégagé de toute relation, en parlant des choses : Par toujours j’entends un très-long temps, et non pas une éternité absolue. (Buff.) En toute espèce de projet, il y a deux choses à considérer : premièrement, la bonté absolue du projet ; en second lieu, la facilité de l’exécution. (J.-J. Rouss.) Il y a dans tous les arts un beau absolu et un beau de convention. (D’Alemb.) || Entier, complet, sans restriction, sans exception, sans condition : Une nécessité absolue. Un droit absolu. Nous ne savons ce que c’est que bonheur ou malheur absolu ; tout est mêlé dans cette vie. (J.-J. Rouss.) Ma confiance en lui était absolue. (Volt.) La solitude absolue, le spectacle de la nature, me plongèrent bientôt dans un état presque impossible à décrire. (Chateaub.) Personne sur la terre n’est doué d’une perfection absolue. (G. Sand.) Nous ne pouvons pas directement faire entrer dans les rapports sociaux la vérité absolue. (Vinet.) L’esprit critique ne peut admettre un jugement absolu. (Renan.) || Exclusif, qui ne concède rien : Homme absolu dans ses idées, dans ses opinions. || Impérieux, tranchant : Vous le prenez là d’un ton bien absolu (Mol.) Il m’en coûte plus que je ne puis dire, de vous parler d’un ton si absolu. (Marmontel.) La signora lui parlait d’un ton animé, tantôt riant, tantôt prenant un air absolu. (G. Sand.)

C’est elle qui gouverne, et, d’un ton absolu,
Elle dicte pour loi ce qu’elle a résolu.
Molière.

Ordre absolu, Ordre qui ne souffre ni réplique, ni retard : Antiope pleura, ne voulant point y aller, mais il fallut exécuter l’ordre absolu de son père. (Fén.) || Sens absolu, Sans aucune restriction : Vous prenez ce que je dis dans un sens trop absolu. (Acad.)

— Substantiv. Se dit d’un homme impérieux : Personne ne l’aime, il est grondeur, il fait trop absolu. (Balz.)

— Gramm. Il se dit, en général, par opposition à relatif : Homme est un terme absolu, père est un terme relatif. (Acad.) || Mode, temps absolu, Celui qui ne dépend d’aucun autre. || Proposition absolue, Celle qui par elle-même énonce un sens complet : Dieu est juste, voilà une proposition absolue. || Nom, adjectif, verbe pris dans un sens absolu, Employés sans complém., et exprimant un sens complet par eux-mêmes.

— Algèb. Nombre absolu, Le nombre connu qui contient l’un des termes d’une équation.

— Chim. Se dit d’une substance qui est parfaitement pure : Huile absolue. Alcool absolu.

— Philos. Se dit par opposition à contingent, à conditionnel : Vérités absolues, Vérités immuables qui ne dépendent d’aucun temps, d’aucun lieu, d’aucune circonstance.

— Théol. Qui s’étend à tous les péchés : L’absolution du prêtre est absolue. Jeudi absolu, Le jeudi saint, parce qu’autrefois la cérémonie de l’absoute se faisait ce jour-là.

Syn. Absolu, impérieux. Celui qui est impérieux exige qu’on lui cède : C’est par impuissance que les êtres faibles sont impérieux ; voyez les femmes et les enfants. (De Lévis.) Celui qui est absolu veut être obéi avec exactitude : Son père était fort sévère et fort absolu. (Fontenelle.) Absolu appartient au caractère ; impérieux qualifie surtout le ton, les manières. Un caractère absolu peut être poli et même doux dans la forme ; un homme impérieux laisse supposer une irritation habituelle. Celui-ci n’exige que de la déférence, celui-là ne veut que de la soumission. On n’est impérieux que par moments, un caractère absolu se fait sentir sans interruption. À un mari impérieux, il faut une femme douce ; à un mari absolu, il faut une femme docile : Lesdiguières était absolu dans sa famille : il voulut si fermement ce mariage, qu’il fallut bien que Créquy y consentit. (St-Simon.) Les Romains avaient une politique bien impérieuse à l’égard des rois qui leur résistaient. (St-Réal.)

Antonymes. Relatif (terme), constitutionnel (roi).

ABSOLU s. m. (ab-so-lu — lat. absolutus, même sens). Philos. Ce qui existe indépendamment de toute condition ; l’idée ou la vérité première sur laquelle reposent toutes les autres : L’absolu, c’est Dieu. L’absolu, de quelque genre qu’il soit, n’est ni du ressort de la nature, ni de celui de l’esprit humain. (Buff.) L’heure peut sonner où tout esprit aura soif et faim de l’absolu. (G. Sand.) L’absolu nous est complètement inaccessible, nous ne le connaissons que par ses termes opposés, qui seuls tombent sous notre empirisme. (Proudhon.)

— S’emploie au pluriel dans ce sens : Le progrès de notre savoir et de notre bien-être consiste à découvrir sans cesse de nouveaux absolus. (Proudhon.)

— Alchim. Ce que les anciens appelaient la pierre philosophale : Sa physionomie, fortement contractée, ressemblait à celle d’un vieux alchimiste perdu dans la recherche de l’absolu. (G. Sand.)

Encycl. Phil. Absolu veut dire, d’après son étymologie (absolutus, solutus ab omni re), dégagé de tout lien, indépendant. Il s’applique à ce qui ne porte aucun lien, à la chose qui enveloppe toutes les choses et qui n’est elle-même la conséquence de nulle autre. L’absolu, c’est ce qui n’est limité par rien, conditionné, causé par rien, soutenu par rien, dérivé de rien. Pour les philosophes théistes, l’absolu c’est Dieu, l’Être parfait, l’Être premier, l’Être infini, qui existe par lui-même et qui ne peut pas ne pas exister. Dans le système de Spinosa, l’absolu c’est la substance unique dont tous les êtres ne sont que des modes. Dans la philosophie allemande, absolu est synonyme d’indéterminé, c’est l’être pur, identique au néant, abstraction vide que Hegel place à l’origine de toutes choses. Pour les philosophes allemands, qui dit détermination dit limite, et qui dit réalité dit détermination. On ne peut penser l’absolu, parce qu’on ne peut penser que ce qui est déterminé ; la condition de toute pensée et de toute connaissance, c’est la relation ; le devenir seul est l’objet de la science et de la philosophie.

ABSOLUITÉ s. f. (ab-so-lu-i-té — rad. absolu). Néol. Qualité de ce qui est absolu : Les caractères de l’idée sont l’universalité, l’absoluité, l’immutabilité. (Bautain.)

ABSOLUMENT adv. (ab-so-lu-man — rad. absolu). D’une manière absolue, avec une autorité absolue : Cléopâtre crut régner plus absolument sous ses enfants que sous son mari. (Boss.) Il s’imaginait gouverner absolument après la mort de Philoclès. (Fén.) La gloire de gouverner la France presque absolument ne lui suffisait point. (Fontenelle.) Eutrope était un favori tout-puissant auprès de l’empereur Arcade, et qui gouvernait absolument l’esprit de son maître. (Chateaub.) || Entièrement, tout à fait, complètement : Tout le monde absolument fut de cet avis. (Acad.) Il est rare qu’un livre dicté par la bienveillance soit absolument mauvais. (Boiste.) Mon maître est absolument décidé à l’épouser. (Regnard.) Quant à la langue grecque, nous conviendrons qu’il l’ignorait absolument. (D’Alemb.) L’économie politique n’est plus qu’une impertinente rapsodie, dès qu’elle affirme comme absolument valables les faits collectionnés par Adam Smith et J.-B. Say. (Proudhon.) || Impérieusement : Jusqu’ici il avait dit : Je prie ; il change de langage et il dit plus absolument : Je veux ! (Boss.) Il m’ordonna si absolument de manger quelque chose, que je le fis par respect pour ses ordres. {L’abbé Prévost.) || Indispensablement, forcément, nécessairement : Il faut absolument que vous partiez. (Acad.) La nature n’est pas absolument ennemie de l’art et des règles. (Boil.) Nous ne l’avons pas cru absolument ; nous le connaissons pour un fieffé conteur d’histoires. (G. Sand.)

Dites absolument que je ne suis qu’un sot.
Molière.

— S’empl. quelquefois avec ellipse du verbe, et cela a lieu surtout après les interrogations : Si vous ne voyez dans les actions des hommes que les mouvements extérieurs et purement physiques, qu’apprenez-vous dans l’histoire ?Absolument rien. (J.-J. Rouss.) Et il ignore toujours la part que monseigneur a dans tout ceci ?Absolument. (E. Sue.)

— Déterminément, malgré toute opposition et toute remontrance ; il se joint alors avec le verbe vouloir ; mais, dans certains cas, vouloir absolument n’exprime qu’une insistance obligeante : Le roi de Prusse est réellement indigné des persécutions que j’essuie ; il veut absolument m’établir à Berlin. (Volt.) Matta voulut absolument que le chevalier de Grammont vint s’établir chez lui. (Hamilton.)

— Dans les phrases négatives, il sert à donner plus d’énergie à l’expression : Il ne fait absolument rien. (Acad.) C’est un jeune homme d’un rare mérite, et qui n’a absolument que ce mérite pour toute fortune. (Volt.) Il est notoire que dans le travail, l’offre, la demande, la division, la qualité, les proportions, le prix et la garantie, rien, absolument rien n’est régularisé. (Proudhon.)

Prier absolument, exprime tantôt l’action d’une volonté qui n’a pas besoin de commander pour se faire obéir, tantôt l’autorité morale de l’amitié. Mme  de Sévigné a employé cette heureuse alliance de mots, sur laquelle elle a appelé elle-même l’attention : Toutes les dames s’en retournent ; on épargne une partie du chemin à la maréchale, en la priant absolument de demeurer à Poitiers, où elle avait été prise. (Mme  de Sév.) Vous me caressez en me priant absolument de vous donner cette écritoire. Je ne crois pas que ces deux mots-là se soient jamais trouvés ensemble. (Mme  de Sév.)

— Philos. Dans le langage philosophique, il signifie En soi, dans son essence, dans sa nature, etc., toute idée de relation écartée : On ne doit rien aimer que Dieu, absolument et sans rapport. (Malebr.) L’animal croissant, encore absolument faible, devient fort par relation. (J.-J. Rouss.) Le lieu ne doit jamais être considéré absolument. (Condill.) Il n’y a rien d’absolu, rien de parfait dans la nature, et de même rien d’absolument grand, rien d’absolument petit. (Buff.)

— En gramm. Dans un sens absolu : Prendre, employer un mot absolument.