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— Non.

— N’avez-vous pas pensé que le bonheur pouvait se rapporter au mari qu’on reçoit, ou qu’on rencontre ?

— Non, puisque nous devons toujours aimer notre mari tel qu’il est. Moi, qui n’ai jamais ressenti d’affection pour personne, j’aurai tant de tendresse à lui donner !

— Pourtant il est de bonnes et de mauvaises natures.

— Sans doute, mais l’homme qui nous épouse nous aime, et c’est assez pour que nous lui pardonnions tout ; rien ne me paraît plus clair. Quel qu’il soit, je le chéris d’avance. Qu’importe son visage, c’est son affection que j’aime.

Violette frémit en voyant cette fille si pure dont l’ignorante ingénuité courait au devant du sacrifice. Peut-être les de Cournon allaient-ils l’immoler honteusement à quelque vieillard maladif, à quelque gentilhomme ruiné ou bien encore à l’un de ces libertins flétris, blasés, qui, après avoir usé de tout, prennent le mariage comme un repos, le salissant et le profanant par leurs souvenirs odieux. À cette pensée, elle se sentit froid. Que faire ? Laisser sacrifier cet ange, ou l’abandonner à la grâce de Dieu ? garder le silence ou bien parler ? Elle ne pouvait ouvrir la bouche et restait en contemplation devant la fraîcheur de cette âme ; elle l’admirait et ne pouvait se décider à en altérer la