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je pouvais, car je ne sais pas, moi, ce qu’il faut faire, et j’aimerais mieux mourir, voyez-vous, que de me rendre indigne de sa bonté. Oh ! je comprends maintenant la puissance des parents sur leurs enfants, je comprends qu’on leur donne toute sa vie, son bonheur, et qu’ils disposent de nous à leur fantaisie. Excusez-moi, si je parle toujours ; mais il y a tant de temps que je n’ai rien dit ! Ma chère amie, je vous fais mes adieux. Nous partons pour la Russie.

— Vous partez ? resterez-vous longtemps éloignés ?

— Je ne sais, et je ne pourrai pas même vous écrire ; il paraît qu’on veut attendre que je sache l’orthographe.

— Pourquoi partez-vous ?

— Il le faut ; et puis on veut me marier. Il le veut lui.

— Avec qui ?

— Je ne sais pas ; peu m’importe ! pourvu qu’il aime celui que j’épouserai. Je commence tard à être fille ! mais je veux être une fille modèle, une femme irréprochable. Je vous le disais, chaque position impose des devoirs, et j’ai bien vite compris que j’en avais beaucoup, moi ; je les accomplirai tous, fussent-ils même difficiles, car rien ne peut payer la tendresse de mon père. Il m’a donné son nom ; mais il ne me l’aurait pas donné que je ne l’aimerais pas moins ; n’est-ce pas, ma bonne et bien aimée, que j’ai eu raison de faire abnégation de moi et que tout le monde eût agi de même ?