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S’il tourne à droite, s’il ne se laisse pas trop attarder par les merveilles s’offrant à chaque pas sous ses yeux, à peine aura-t-il marché un quart d’heure qu’il rencontrera, campée sur la rive escarpée, une immense vieille maison de pierre rustique toute couverte de vignes, de campanules et de liserons, flanquée d’un riant bosquet et littéralement engloutie sous un amas de fleurs et de verdure. S’il s’avance vers la grille récemment remise à neuf, il lira, peint en lettres de bronze : « Villa des Ancolies ». S’il pénètre… Ou plutôt, non… qu’il soit discret… qu’il ne pénètre pas, seuls les conteurs ont ce privilège de pénétrer sans indiscrétion chez les gens.

Vers le milieu de juin 1918, époque où commence notre récit, la « Villa des Ancolies », portée aux plan et livre de renvoi officiels de Saint-Hyacinthe le Confesseur comme propriété de « Mlle Laure Perrin, fille majeure », méritait bien son nom.

L’ancolie, l’ancolie du Canada (aquilegia canadensis, famille des renonculacées, nous disent les savants botanistes) est une petite fleur d’un rouge carminé à l’extérieur, jaune safran à l’intérieur, dont les cinq sépales enlaçant ses cinq pétales, semblent une amoureuse garde d’honneur autour du fruit embryonnaire. Elle s’élève de douze à quinze pouces du sol sur un pédoncule si frêle qu’il plie sous le poids de son gracieux fardeau. Les savants vous diront peut-être encore que ses feuilles sont pétiolées-composées-tri-crénelées, etc., sachons seulement qu’elles sont d’un beau vert foncé à la face exposée au soleil et plus pâle sur l’autre. Telle quelle, l’ancolie est une fleur gracieuse et jolie et surtout, elle est tout à fait indigène, bien de chez nous, une vraie compatriote, et les savants ont même été obligés de reconnaître officiellement cette qualité et de lui adjoindre l’explicatif « du Canada ».

Mais quelle sauvage ! quelle timide ! Ou plutôt non, quelle coquette ! En somme,