Page:Larivière - La Villa des ancolies, 1923.djvu/66

Cette page a été validée par deux contributeurs.
64
La Villa des Ancolies

— Mais non, mais non, marraine, il faut plastronner. Tenez, il vous regarde encore et quels regards… et Jean aussi vous regarde étonné. Allons, soutenez ces regards. Mais ces messieurs sont indiscrets, on ne dévisage pas les gens de la sorte : on a beau être jolie, ça devient embêtant à la fin. Heureusement qu’ils sont passés ; mais oui ! il se retourne… et Jean aussi… Marraine, rentrez ou je vais être jalouse !

— Regarde, Yo. Monsieur Hainault s’est retourné une seconde fois.

— Je crois qu’il sera moins pressé de procéder à présent…

— Ma petite Yo, tu es la plus mignonne canaille que je connaisse !

Les deux jeunes filles étaient bien loin encore de la réalité, car dans la beauté blonde si élégamment mise dont il avait avec tant de peines détaché ses yeux, ce brave Hainault n’avait même pas reconnu Mlle Perrin.

Les deux jeunes gens marchaient, en causant avec animation, sur le trottoir opposé. Par instinct, Hainault avait jeté un regard craintif vers la villa de peur d’y découvrir Fidèle et ses crocs tant redoutés, quand la douce et souriante figure de Mlle Perrin lui était apparue. Ce n’avait été qu’une vision fugitive, mais, médusé par ce charme fugace, il avait levé les yeux comme il passait devant la villa et les en avait détachés à regret, attiré malgré lui par la grâce et la beauté de l’occupante de la véranda. Deux fois il s’était retourné, fasciné par la gracieuse apparition.

— Jean ! As-tu remarqué ces deux jeunes filles ?

— Me crois-tu donc aveugle ? Je comprends maintenant pourquoi ton vieux hibou d’adversaire a fait rajeunir son antre, elle attendait de la visite. Hé ! Tu n’as pas l’intention de te retourner une troisième fois ?

— Je ne veux pas paraître ridicule.

— Il faut reconnaître que cette vieille fille a de très jolies visiteuses, une du moins.