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— Quoi, Mademoiselle ? interrogea le brave cocher.

— Je vous dis d’aller chercher ma valise au baggage room et que voici mon check, comprenez-vous ?

— Bien sûr que je sais parler français.

— Ma chère marraine, je ne sais comment m’excuser d’avoir été aussi indiscrète ; mais que voulez-vous, j’avais une telle envie de passer près de vous ces quelques semaines de vacances ! Bien sincèrement, mon intrusion ne vous dérange pas trop ?

— Comment faire une pareille supposition, ma chère enfant ; tu sais bien que ta venue me transporte au troisième ciel.

— Je ne demande pas tant, cousine, j’avoue même que je vous préfère sur terre. Voyez-vous, au troisième ciel, je ne sais si j’aurais pu me payer un voyage aller et retour pour vous y aller visiter. D’ailleurs, vous verrez que je ne troublerai que très peu votre travail et que je m’ingénierai à me rendre utile. Je serai la petite souris qui gruge bien un peu, mais que l’on n’ose attraper tant elle met d’artifice à se faire oublier. Et puis, nous avons certains goûts communs : vous aimez beaucoup les fleurs, moi-même je les adore ; je me rappelle que vous étiez jadis une musicienne délicieuse et c’est même en vous entendant jouer du piano que j’ai pris du goût pour cet instrument. Recevez-vous beaucoup de visites chez vous, marraine ?

— Bien rarement, ma chérie ; je suis un peu solitaire et j’ai peur que ma compagnie ne te paraisse quelque peu monotone. Tu es un petit colibri qu’il ne ferait pas bon retenir trop longtemps en cage et la solitude qui, insensiblement et sans intention, s’est établie autour de moi te fera peut-être paraître les jours bien longs.

— Ne dites pas de pareilles monstruosités, marraine, je suis certaine de passer auprès de