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La Villa des Ancolies

plus, je lui ai parlé de vos intérêts dans notre entreprise et j’allais lui intimer l’ordre d’abandonner ses procédures contre vous, mais il ne m’en a pas laissé le temps :

« Monsieur Gendron », m’a-t-il dit avec un frémissement de colère, « je crois vous avoir servi fidèlement durant les cinq années que j’ai été à votre emploi et à celui de vos commanditaires, si vous avez quelques reproches à m’adresser sur la manière dont je remplis mes fonctions, je suis prêt à les recevoir ; mais en dehors de l’usine je suis le maître de mes actes et je ne vous reconnais pas le droit de profiter de votre titre de patron pour vous y immiscer ! »

Que pouvais-je faire de plus ? Le renvoyer ? Ce serait une perte pour notre industrie. Toutefois, si vous l’exigez je suis disposé à le faire.

— Loin de moi cette idée, Monsieur Gendron, je suis même confuse de vous avoir attiré ce désagrément.

— Vous êtes une brave fille, ma chère Laure, vous refusez de rendre le mal pour le mal. Vous verrez que cette affaire s’arrangera. D’ailleurs, je n’ai pas encore dit mon dernier mot.

En sortant de chez ses amis, notre recluse crut que peut-être le salut serait de rendre visite à Mlle Lozeau, la Supérieure des Enfants de Marie, dont le frère était un ami de M. Hainault ; mais aux premiers mots qu’elle lui adressa sur le sujet de sa visite, la vieille fille — Mlle Lozeau avait quarante ans tout près — se récria : « Comment voulez-vous que je fasse une telle demande ? Mon frère me disait hier encore qu’il n’osait passer devant votre demeure, de peur de se faire attaquer par votre chien, et si je ne l’en avais dissuadé, il eût lui-même porté plainte. Croyez m’en, Mademoiselle, sacrifiez votre chien… »