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va me falloir aller prendre ma place, cet été, sur les bancs du parc Jeanne-Mance ou devant le paon du parc Lafontaine.

Bonjour, marraine chérie, je vous envoie mille baisers très affectueux.

Votre petite cousine.

Yolande. »

« Cette chère petite, comme cela va être gentil de l’avoir auprès de moi et comment donc n’ai-je pas songé plus tôt à l’inviter ? » Et Mlle Perrin, tout heureuse, oublia ses chardons écossais et leurs mariages possibles pour laisser sa rêverie s’acheminer doucement vers le passé. Les Perras étaient des neveux de sa mère, les seuls parents qu’elle se connût. À la naissance d’Yolande on l’avait demandée ainsi que son père pour « être dans les honneurs ». Depuis, elle avait toujours entretenu des relations amicales avec ses cousins ; mais son père étant mort, et les époux Perras l’ayant déjà précédé dans la tombe, Yolande, élevée par une tante maternelle, s’était trouvée éloignée d’elle et ce n’était que plus tard, comme sa filleule venait d’atteindre sa quinzième année, que Mlle Laure l’avait retrouvée, bien décidée cette fois à ne plus la perdre de vue. Mais un voyage à Montréal était toute une révolution dans la vie de la recluse de la Villa des Ancolies, aussi après cinq ans de promesses formelles faites à sa filleule, elle ne s’était pas encore senti le courage de l’aller voir.

« Cette chère petite, depuis cinq ans que je ne l’ai pas vue, elle doit être une véritable demoiselle maintenant. J’avais neuf ans quand elle est née… comme c’est loin déjà ! Vingt ans… elle a vingt ans et je suis sa marraine… Vingt ans… À cette occasion, papa m’avait amenée à Montréal… C’était la première fois que j’y allais. Comme j’étais craintive et timide ! Au baptême, je ne pus parvenir à réciter mon Credo que j’avais bien étudié et que je savais par cœur… Était-