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HOMME.

convolutions se multiplient, surtout dans les races humaines supérieures. Un autre caractère de diflerenciation entre l’homnie et les autres mammifères consiste dans le défaut de symétrie que l’on constntc cliez lui entre les deux liémisphères du cerveau. Ce défaut est d’autant plus accusé chez un sujet que calui-ei appartient à une race humaine plus élevée.

Certains organes très développés chez les animaux, sans manquer tout à fait chez riiomme, ne s’y rencontrent qu’à l’état rudimentaire : tels sont, par exemple, l’appendice du ciccuni, les muscles auriculaires quelquefois si développés chez certaines personnes qu’elles peuvent mouvoir leurs oreilles comme le fait un cheval, le muscle peaucier, lepli semi-lunaire de la conjonctive, qui est l’analoiruc de la troisième paupière ou paupière transversale des oiseaux et des reptiles, la caroncule lacrymale, etc. On a souvent dit que l’homme était cosmopolite et qu’il pouvait vivre aussi bien sous le pôle qu’à l’équateur ; mais il y a des restrictions à faire à cette proposition ainsi formulée. En réalité, chaque race humaine a un habitat déterminé dont elle ne peut sortir impunément. La race nègre est faite pour les climats les plus chauds, et la race blanche pour les climats tempérés. L’une ou l’autre ne peut se maintenir florissante que dans la zone qui lui a été dévolue par la nature.

L’étude de la géologie et de la paléontologie prouve surabondamment que l’homme n’a pas toujours existé sur la terre, que les grands mammifères pachydermes, ruminants, carnassiers, etc., l’y ont précédé et qu’il est le dernier venu, le terme ultime de l’ensemble des créatures actuelles. Mais à quelle époque doit-on faire remonter son origine ? A cette question si importante, la science positive répond : Au commencement (le l’une quaternaire, ou tout au plus pendant l’df/e pliocène. En efl’et, à dater des premiers temps de l’époque quaternaire, l’homme a laissé des preuves indiscutables de son existence. Ces preuves consistent dans les instruments en pierre qui sont les produits de son industrie, et aussi dans les quelques rares débris humains trouvés dans 1 intérieur du sol ou dans les cavernes. A la vérité, on a découvert dans des terrains bien plus anciens que le quaternaire des espèces d’outils en silex qui semblent être l’o'uvre d’un être intelligent ; des savants autorisés pensent que cet être n’était pas l’homme tel qu’il existe aujourd’hui, mais une créature intermédiaire entre l’animalité et l’humanité. On a donné à cet être, hypothétique du reste, puisqu’on n’en a rencontré aucun Tcstigc, les noms d’anthropopil/iè</ue et de précurseur de l’homme. On a fondé la supposition de son existence sur les silex tailles intentionnellement qui ont été successivement découverts à Thenay (Loir-et-Cher), près d’Aurillac et en Portugal. A Thenay, l’abbé Bourgeois, en 1867, a recueilli à la base du calcaire de Beauce, c’est-à-dire dans l’étage aquitanien ou miocène tout à fait inférieur, des silex craquelés à la surface par l’action du feu, et d’autres silex taillés grossièrement et dépourvus pour la plupart du conchoïde de percussion. La régularité des entailles et des retouches ne peut s’expliquer qu’en attribuant ce travail a un être doué do facultés comparables à celles de l’homme. Cet être devait déjà connaître l’usage du feu, ainsi que l’indiquent les nombreux silex qui en ont subi l’action. Fin 1877, M. Rames découvrit au puy Courny, près d’Aurillac, dans le terrain tortonien ou miocène supérieur, des silex éclatés par percussion et fort semblables aux silex tailles de l’époque quaternaire. Ces pièces étaient enfouies avec des débris de mastodontes, de dinothériums et d’hipparions qui en indiquent géologiquement la date. Enfin, à Otta en Portugal, dans la vallée du Tage, M. Carlos Ribeiro a trouvé, en 1871, des silex et des quartzites taillés en place dans un gisement de la fin du miocène. Les silex de Thenay étaient de très petites dimensions ; ceux du Portugal se trouvaient un peu plus gros, et ceux des environs d’Aurillac, intermédiaires entre les uns et les autres. On a conclu de ce fait que s’il y a eu réellement des anthropopitnèques, ceux-ci étaient plus petits que l’homme, et qu’il en a existé trois espèce» au moins.

Avec l’époque quaternaire, on sort du domaine de l’hypothèse, et quelques ossements humains bien authentiques prouvent que l’homme a existé dans nos contrées dès le commencement de cette époque. Les plus célèbres de ces ossements sout : le crâne de Néanderlhal, le crâne de Canstadt, le crâne d’Eguisheim près de Colmar, le crâne de lirux en Bohème, le crâne et les ossements de Denise près du Puy-en-Velay ; enfin la mâchoire et les os de la Naulelte. K cet inventaire il faut ajouter la mâchoire du Moulin-Quignon qui lit tant de bruit lors do sa découverte, mais dont l’authenticité est aujourd’hui fort contestée.

L’examen de tous ces restes humains permet, dans uue certaine mesure, de reconstituer l’homme primitif de nos contrées. Son squelette olîrait un grand nombre de caractères qui le rapprochaient de celui des grands anthropo’ides. Tous les os sont épais et fort massifs et montrent des saillies et des impressions musculaires extraordinairement développées, indices de muscles puissants. Cependant la taille ne dépassait pas la moyenne actuelle. Les côtes sont très arrondies et présentent une brusque courbure ; le col du fémur est épais et court et le tibia a la forme d’une lame de sabre. Les os de la face donnent lieu aux remarques suivantes : le maxillaire inférieur est gros et d’une épaisseur considérable ; il ne porte point d apophyses géni ; le menton est fuyant en arrière de la verticale ; le volume des molaires va croissant d’avant en arrière, comme dans les races actuelles les plus inférieures. La conformation du crâne présente aussi des particularités très importantes : on y remarque des sinus frontaux excessivement développés, des arcades sourcilières extrêmement saillantes se réunissant l’une à l’autre en une sorte de bourrelet au-dessus du nez ; un sillon profond entre les arcades sourcilières et la base du front. Celui-ci, très fuyant en arrière, est si étroit qu’il semble presque faire défaut. Mais si la région frontale est peu développée, la partie postérieure de la tète l’est à un degré dont les crânes de nos jours ne peuvent donner aucune idée. Les sutures des os crâniens sont simples ; elles se sont opérées de bonne heure en avant et très tardivement en arrière ; la suture frontale est remplacée par une saillie qui rappelle la crête des grands singes. La calotte crânienne a la forme d’un ellipsoïde très allongé. Cet homme du commencement du quaternaire était très dolichocéphale, puisque son indice céphalique n’était que de 72. On a donné le nom de race de Neanderthal à la race humaine à laquelle il appartenait. Cette race semble avoir dominé presque exclusivement en Europe pendant tout l’âge quaternaire, c’est-à -dire pendant la durée des époques chelléenne, moustérienne, solutréenne et magdalénienne ; mais pendant ce laps de temps considérable, elle paraît s’être rapprochée de plus en plus de l’homme actuel. A l’époque magdalénienne, la mâchoire inférieure était moins trapue qu’au début du quaternaire ; le menton, à peu près vertical, n’était ni fuyant en arrière ni projeté en avant comme il l’est de nos jours. Les trois molaires étaient également développées à chaque branche dos deux mâchoires, et au maxillaire inférieur la saillie des apophyses géni était bien marquée. Les fortes crêtes des os longs sont l’indice d’une puissance musculaire considérable. L’homme magdalénien avait surtout les jambes très vigoureuses et devait courir admirablement. La race de Néanderihal ne disparut point de nos régions après l’époque quaternaire. Elle continua d’y exister pendant l’âge de la pierre polie : mais son squelette se modifia graduellement : les os devinrent moins rugueux et le crâne prit des proportions plus harmonieuses ; en un mot, elle se rapprocha de plus en plus de l’homme actuel. Néanmoins elle garda quelques traits de son ancien type, tels que la dolichocéphalie, la platvcnémic du tibia, la goulliére profonde sillonnant le péroné, etc. ;

mais elle ne fut

pas seule à habiter l’O. de l’Europe, qu’une race nouvelle était venue envahir dès le commencement de l’époque robenhausienne. Cette race, de taille plus petite, avait le crâne brachycéphale. Partie de l’Asie Mineure, de l’Arménie et de la région du Caucase, elle apportait chez nous une nouvelle civilisation et y introduisait l’agriculture et les animaux domestiques. Elle ne tarda point à se mêler avec l’ancienne population autochtone, et l’on retrouve des indices de ce mélange dans les dolmens do la Lozère, dans ceux du Nord de la France, par exemple dans les grottes sépulcrales arlilicielles {’e la vallée du Petit-Morin (Marne). Dans un même dolmen on retrouve souvent des individus des deux races et d’autres individus dont le crâne mésaticéphale annonce un croisement certain. Du reste, la nouvelle population brachycéphale dut être d’autant plus nombreuse que l’on s’éloignait davantage du Midi. C’est elle qui est prépondérante dans la caverne de Furfooz, près de Dinant (Belgique). Quant à la race primitive de Néandcrthal , elle s’est perpétuée en France jusqu’à l’époque actuelle. Il en existe encore de nos jours des représentants, très modifiés, il est vrai, par l’influence du type brachycéphale. Cependant de temps en temps on rencontre des individus qui, par l’effet de l’atavisme, reproduisent les caractères essentiels de l’homme de Neanderthal. Tout le monde sait que l’ensemble de l’humanité se partage en groupes difl’érant les uns des autres par la coloration de la peau, la forme de la tête, les traits de la face, la nature laineuse ou non laineuse des cheveux, etc. ; on distingue à première vue le Blanc du Nègre, le Chinois à la peau jaune de l’Américain au teint cuivré. Mais comment les naturalistes expliquent-ils ces dissemblances’ ?

Ils se partagent à ce sujet en 

deux écoles : l’école des inonogénisles et l’école des polijgénistes. Suivant les monogénistes, tous les hommes proviendraient d’un seul couple humain primitif, et les dilTérenccs profondes que l’on remarque aujourd’hui parmi eux devraient être attribuées au climat qu’ils habitent, à leur genre de vie, à leurs habitudes et à leurs mœurs, etc. Il y aurait donc unité d’origine et consanguinité entre tous les hommes. Les groupes que l’on remarque parmi eux ne seraient que des races ou collections d’individus présentant un certain nombre de caractères communs acquis dans des conditions identiques de vie et transmissibles par l’hérédité. Les polygénistes, au contraire, rejetant l’origine unitaire de l’homme, pensent que tous les êtres humains ne descendent point d’un même couple ancestral, qu’il y a plusieurs espèces d’hommes , que chaque espèce a eu son centre de création spécial, et qu’elle est apparue sans l’intervention des autres. Probablement, selon cette manière de voir, les diverses espèces n’auraient point une origine simultanée. Le débat est loin d’être tranché entre ces deux opinions contradictoires, surtout si l’on envisage la question au point de vue exclusif de 1 histoire naturelle, abstraction faite de toute doctrine religieuse ou philosophique. De cet état de choses résulte une première difficulté pour la classification des races humaines ; mais cette difficulté n’est point la seule et il en surgit d’autres dont les principales doivent être attribuées aux mélanges qui se sont opérés entre les différents groupes humains, et à nos connaissances imparfaites relativement à une foule de populations. Toutefois voici quelques classifications dues à des savants éminents. En 1722, un voyageur français, Bernier, proposa de partager les hommes en quatre races : les Blancs européens, les Jaunes asiatiques, les Noirs africains et les Lapons. Quelques années plus tard, Linné admit dans le genre humain quatre variétés : l’Européen, au teint blanc, aux cheveux blonds et aux yeux bleus ; Y Asiatique, à la peau jaune, aux cheveux noirâtres et aux yeux bruns ; l’Africain, au teint noir, aux cheveux noirs et crépus, au nez épaté et aux lèvres proéminentes ; enfin