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vieux mot pelé (habit fourré), il n’y a pas bien loin. — Au xvie siècle, dans les Nuits de Straparole, il est question d’un personnage qui, à coups d’un gros bâton « peigne son homme de toutes façons. » C’est bien la même image que nous avons conservée dans peignée. — D’un autre côté, peloter qui se dit aussi pour battre, me paraît maintenant bien proche de pelauder : rosser, étriller. Rognioner (grogner) est un vieux mot donné tel, comme les précédents, par le dictionnaire de la langue romane de Roquefort. De même pour paumoier (saisir) et paumer (tomber en défaillance), d’où viennent paumer (prendre) et paumer : perdre[1]. Je ne retrouve pas d’exemple aussi ancien de stuc (part de vol), mais un arrêt rendu par le Parlement de Paris contre un recéleur, n’a pas dédaigné d’en conserver trace ; il est du 22 juillet 1722. (Paris, Delatour et Simon, 1722, in-4o.) Avoir son arnaud (être de mauvaise humeur), est une déformation du vieux mot renos (fâcheux, grondeur), et lorsque j’ai fait observer qu’au lieu du renarder moderne, on disait autrefois renauder, j’aurais dû ajouter que renaud se disait autrefois pour renard, ce qui rétablit une similitude parfaite entre les deux expressions…
    Rabelais a usé d’un verbe qui est bien l’équivalent de nos morfier et morfiler (avaler), quand il dit : « Là, là ! c’est morfiaillé cela. Ô lacryma Christi !… c’est vin pineau. »
    Enfin, j’ai été assez heureux pour trouver un texte décisif sur une question bien controversée dans le monde de la philologie argotique.
    Dans cet autre passage : « Verse tout, verse de par le diable ! verse deçà tout plein, la langue me pelle : Lans stringue ! », Rabelais confirme mes premières conjectures[2] sur l’origine germanique de notre mannstringue (marchand de vin). —

  1. Ce double sens de paumer, en apparence si contradictoire, s’explique mieux si on considère le premier paumer comme une forme de notre verbe empaumer, tandis que le second vient de pausmer qui voulait dire autrefois : se pâmer, défaillir.
  2. « Mannezingue : mot à mot homme (mann) vendant à boire (zu trinken). On a dit d’abord mannstringue. » — Excentricités du langage. 5e édition.