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force de loi, et chaque bande a ses petits procédés de déformation[1].

Je ne saurais aussi me dispenser de faire remarquer que l’argot des classes dangereuses ne se parle pas en réalité comme on s’est plu à l’écrire dans certains romans. Se modelant sur des textes argotiques, — que je regarde comme des exercices beaucoup plus que comme des reproductions fidèles, — des auteurs ont fait parler à leurs personnages un argot trop complet en ce sens qu’il n’y entre pas assez de mots de la langue usuelle.

Qu’on le sache bien, les vrais argotiers ne sont pas si exclusifs, et leurs phrases admettent au moins 50 pour 100 de français intelligible. Pour le reconnaître, il suffit d’un coup d’œil sur les documents reproduits dans cette introduction (pages x et suiv.).


Pour ce qui regarde la partie étymologique, nous avons toujours marché avec prudence, préférant ce qui paraissait le plus simple, le plus clair ; n’hésitant pas à corriger au besoin l’opinion émise dans nos précédentes éditions, et à nous abstenir plutôt que d’émettre une douteuse hypothèse. Bien qu’on nous ait reproché le contraire, nous avons fait le moins de science possible.

Nous n’avons pas fait dériver archi-pointu (archevêque) du latin archiepiscopus ; nous nous sommes contenté de rappeler les pointes de sa mitre.

Nous n’avons pas fait venir briolet (piquette) du latin ebriolus (ce qui était tentant), mais des vins de Brie, qui avaient encore en 1820 la réputation un peu acide du Suresnes.

Nous n’avons pas non plus avancé qu’avoir son casque (être gris) venait de ce que « l’ivresse amène naturellement une violente migraine, celle que les médecins appellent galea, parce qu’elle vous coiffe comme un casque. » Non ! avoir son casque, comme avoir dans le loquet, comme être casquette, nous a paru tout simplement faire allusion à l’état de

  1. V. dans le Dictionnaire les articles Dun (parler en), Dunon, Lem, etc. V. dans la préface le chapitre III (Des modifications)