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CONTRIBUTION DE LA GUADELOUPE



après une station à l’île d’Aix mit à la voile le 23 avril 1794. On ignorait alors en France les événements de la Guadeloupe. Les forces qu’on y faisait passer avaient pour objet principal d’empêcher que cette colonie ne tombât au pouvoir des Anglais ; c’était un fait accompli de la veille !

La division eut la chance de ne faire, en route, aucune rencontre fâcheuse. Le 2 juin, elle était dans les eaux de la Guadeloupe. Rendue près des côtes de la Grande-Terre, on apprit à bord, par des hommes qui montaient une barque, tout ce qui s’était passé dans la Colonie. Les Anglais en étaient les maîtres, mais les commissaires se présentaient dans des circonstances heureuses ! l’escadre ennemie était absente, mouillée dans les ports de la Martinique ; le général Dundas, le plus résolu comme le plus intelligent des chefs anglais, venait d’être emporté par la fièvre jaune ; la Grande-Terre était dégarnie de troupes ; les Français une fois à terre, une foule de colons, en butte aux vexations des vainqueurs, courraient se ranger sous les drapeaux de la République.

Cependant, tenter la conquête avec les moyens dont on disposait était chose périlleuse. Les chefs, assemblés, délibérèrent sur le parti à prendre. Les hommes du métier, les généraux, comptant les hommes sous leurs ordres, hésitaient ; ils se demandaient s’il ne serait sage de suivre les instructions du ministre, portant recommandation : "S’il y avait impossibilité de débarquer, de gagner les États-Unis d’Amérique et de retourner en France."

Venant à opiner, Victor Hugues dit :
— Nous sommes partis pour venir à la Guadeloupe. Nous y voici ! Le fait que les Anglais y sont arrivés avant nous ne peut nous empêcher de débarquer. Allons à terre !

La résolution de débarquer étant prise, on ne perdit pas un instant. Les troupes furent mises à terre au