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CONTRIBUTION DE LA GUADELOUPE




ne voulut avoir sur sa table du sucre de canne, du chocolat, du rhum et du café. Les Antilles eurent, pendant au moins un demi-siècle et peut-être un siècle, le quasi monopole en Europe de la fourniture de certaines de ces denrées.

Le commerce des Antilles avec la France représentait, à la veille de la Révolution, malgré la perte de certaines des petites Antilles en 1763, un tiers environ du commerce de la métropole, cela sans tenir compte des réexportations vers l’Europe centrale et orientale de produits d’origine coloniale qui avaient été transformés dans les usines françaises, tels que les cotons tissés en Normandie, les sucres raffinés dans les usines françaises, les étoffes préparées avec l’indigo des Antilles.

Un observateur pénétrant a pu dire que l’aspect même des foules et des armées du 18e siècle avait été transformé par l’intervention dans la vie européenne des produits des Antilles françaises. L’aspect grisâtre ou brunâtre et terne des foules du moyen âge ne s’était que peu modifié encore au 17e siècle. Au 18e siècle, au contraire, des couleurs plus vives apparaissent. Les uniformes de l’armée en particulier, les habits de cour deviennent bleus : c’est l’indigo des Antilles qui a fait ce miracle. De même, le confort de la vie familiale s’est accru en 50 ans, dans la première moitié du 18e siècle, plus rapidement qu’il ne l’avait fait au cours des deux ou trois siècles précédents, cela encore par la vertu des produits alimentaires des Antilles.

Je n’ai pas ici le temps de vous retracer avec quelques détails l’histoire des Antilles depuis leur entrée dans la vie française. Je dirai cependant que cette histoire a été glorieuse et parfois déplorable. Séparées de la métropole par un immense océan, elles furent menacées, bombardées, envahies par les Anglais un très grand nombre de fois au cours de ce même 18e siècle, qui a pourtant été celui de leur plus grand épa-