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A LA PENSÉE FRANÇAISE



ciles ; ne perdez pas de temps, car j’ai un peu d’appétit ce soir… Vous aviez quelque chose à me dire, mon enfant, ajouta l’abbé en se tournant vers sa gouvernante.

— Eh ! oui, Monsieur, quelque chose de bien pressé.

— Que ne parliez-vous ?

— Y avait-il moyen ? Quand Benoîte vous tient, ou quand vous tenez Benoîte, il n’y a que Dieu qui puisse se faire écouter de vous.

— Bon, ne grondons pas… Qu’est-ce ?… Ah ! Benoîte, encore un mot… N’avez-vous pas quelque peu de saumon en réserve ?

— Non, Monsieur, mais j’ai un beau rouleau de turbot.

— Eh bien, ma fille, je ne vous défends pas de lui faire une sauce aux câpres ; c’est un morceau très glorieux. Vous me disiez, ma chère Marthe ?… — Que depuis deux heures le jeune homme vous attend dans la bibliothèque ; tout de même il est doué d’une fameuse patience ! — Ah ! je crois bien qu’il est patient ! Faites mettre son couvert, ma bonne demoiselle, faites mettre son couvert.

Et, poussant la porte de la bibliothèque, M. de Brionne quitta le salon.


……………………

Ce fut en souriant avec bonté qu’il entra dans son cabinet ; aussitôt qu’il aperçut le vicomte, il se découvrit en saisissant l’une des plus larges ailes de son petit chapeau.

— Un seul mot me fera pardonner tout le temps que vous avez perdu à m’attendre, Monsieur le Vicomte : j’arrive de la rue Miroménil où j’avais à voir quelques pauvres…

— Le seul plaisir que j’éprouve à vous rencontrer, mon père…

Et, pendant une heure, M. de Brionne causa avec le