Tendre constamment à élever, à fortifier l’âme aux dépens de tout ce qui n’est pas elle, l’exciter à l’amour du beau, même sans indiquer à son activité un but précis dans le milieu social, n’est-ce pas préparer l’homme à l’action, à tout ce que le devoir exigera ? Ne vaut-il pas mieux stimuler la vie dans son principe, que surexciter passagèrement tel ou tel organe ? Cet appel adressé à l’âme est sans doute d’un effet moins prompt, moins éclatant que l’appel direct à la passion, mais son influence est plus profonde, plus énergique et surtout plus durable. Notre temps abonde en œuvres d’art d’une exécution brillante, mais qui semblent procéder de l’effervescence physique, de l’excitation matérielle du cerveau plutôt que de la pensée et d’une sérieuse inspiration. De telles œuvres attestent la vigueur du tempérament et non celle de l’esprit, et leur portée ne saurait dépasser les sens et l’imagination dans ce qu’elle a de plus extérieur et de plus grossier. Ce n’est pas seulement au théâtre que la mimique des passions s’est ainsi substituée à leur expression littéraire, que la représentation des phénomènes physiologiques a remplacé la peinture des réalités morales, c’est dans tous les arts, dans tous les genres de poésie. On cisèle, on enlumine curieusement le masque de la passion, et, sous ce masque, il n’y a personne qui sente. On n’a pas exprimé la passion véritable, mais on a représenté les gestes violents, les signes désordonnés qui la traduisent aux yeux. On peut
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