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hui, ce n’est pas seulement de bien peindre et de bien écrire, c’est de penser quelque chose qui vaille la peine d’être peint et d’être écrit.

Lorsqu’il arrive qu’une œuvre de cet art si habile s’adresse à mieux qu’aux seules sensations, lors même qu’elle intéresse véritablement les passions du cœur, l’imagination poétique, il est rare qu’elle atteigne dans son action jusqu’au principe qui contient, ennoblit, divinise tout cela, qui est plus que le sentiment, plus que l’imagination, plus que l’intelligence, qui est l’homme lui-même dans ce qu’il a de plus vivant et de plus divin, jusqu’à l’âme.

En mettant de côté toute prétention d’avoir atteint le but, l’auteur de ces poëmes ose dire que ce n’est pas pour les sens, pour l’imagination, pour le cœur même tout seul qu’il a voulu écrire ; c’est pour l’âme. C’est l’âme qu’il cherche à exciter au dedans de lui-même et chez les autres, parce qu’elle est le ressort intime de la vie, la force essentielle qui meut toutes nos facultés. On lui a reproché de conduire trop souvent son lecteur dans le désert, de le séparer des hommes et du mouvement social. Le poëte essaye, en effet, de s’isoler des passions et des intérêts vulgaires, des agitations sans but moral ; mais il n’a jamais songé à se placer en dehors de la vie humaine. Ces voix de la nature et du désert, interprétées par lui, qu’enseignent-elles au promeneur solitaire, sinon l’adoration de Dieu, l’amour des hommes, le respect de soi-même et l’enthousiasme de l’idéal ?